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Stratégies indigènes d'adaptation aux changements climatiques: cas des populations autochtones et communautés locales autour du parc national de boumba bek, est cameroun

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par Lionel Constantin FOSSO
Université de Dschang, Cameroun - Master recherche II en Gestion de l'Environnement 2014
  

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4.4.4 Stratégies d'adaptation des PACL face aux impacts des CC sur les activités de

pêche

La pêche est une activité pratiquée essentiellement par les femmes chez pygmées Bakas. La majorité des réponses apportées à cette question a été le changement de technique de pêche pour s'adapter à l'évolution et à la rareté de la ressource halieutique (96%). Les Pygmées sont passés de la pêche au panier qui se faisait par la technique du poisson barré, à la pêche au filet. Les PACL utilisent des lianes empoisonnée (Strophantus) ou poisons chimiques pour les déverser dans l'eau afin que les poissons soient asphyxiés et remontent en surface pour être ramassés dans l'eau.

Les Bantous par contre se sont lancés dans la pisciculture avec l'appui du Ministère de l'Elevage, des Pêches et des Industries Animales (MINEPIA) en s'associant en GIC. Cela leur permet de faire face au déficit de poissons et de tirer des revenus de cette activité.

Figure 27 : Zones de pêche des PACL autour du PNBB

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4.4.5 Stratégies d'adaptation des PACL face aux impacts des CC dans les autres secteurs Les changements climatiques amènent les PACL à changer de mode de vie. Les Pygmées Bakas deviennent peu à peu sédentaires, pratiquent l'agriculture comme les Bantous, et les femmes font des travaux ménagers comme occupation principale ou secondaires.

Face aux intempéries de plus en plus violentes, les Bakas entreprennent des constructions plus solides. Ils font les huttes avec les feuilles de marantacées en saison sèche, et des huttes avec des planches et troncs de petits arbres en saisons des pluies. Ils ont même commencé à construire en terre battue comme les bantous, parce qu'ils trouvent que leurs maisons sont plus résistantes aux effets du vent que les huttes.

Face à la rareté de l'eau potable, les Bakas consomment très souvent de l'eau contenues dans les lianes de forêt. Cette eau est très pure et issue d'un processus de filtration naturel végétal.

La diminution de l'abondance des PFNL alimentaires pousse certains Bakas à s'intéresser à d'autres PFNL dont l'abondance s'avère plus importante. Ils pensent que si un PFNL est abondant, et qu'un autre devient rare, cela signifie que la nature voudrait leur demander de consommer celui qui est abondant et laisser en régénération celui qui est rare. Cette manière de penser et de gérer la forêt a permis aux pygmées Bakas de préserver la forêt pendant des millénaires tout en contribuant à maintenir la forêt en bon état. Mais de nombreux facteurs externes sont venus les pousser hors de la forêt, avec des effets non seulement sur leur mode de vie, mais aussi sur celui de tous les PACL. Les photos suivantes présentent certains changements d'activités observés chez les PACL interviewés.

Figure 28 : Femme Baka ménagère

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Figure 29 : Construction des huttes Bakas simple à gauche et solide à droite

Figure 30 : Baka consommant les amandes de mangue sauvage

Figure 31 : Consommation de l'eau des lianes de forêt par un Nkounabembé

De cette analyse, il ressort que les stratégies d'adaptation mises en place par les PACL sont en relation avec les perceptions qu'ils ont des changements climatiques. En dehors de la

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perception des CC liée à la diminution du brouillard, pour chacune des autres Perceptions (irrégularité des pluies, variabilité des saisons, vents violents, etc), ils ont développé des méthodes d'adaptation propres en relation avec ces perceptions.

Pour les perceptions portant sur l'irrégularité des saisons, le début tardif des pluies, le décalage et la perturbation des saisons de pluies, Les stratégies indigènes d'adaptation mises en place portent sur le repérage traditionnel du début effectif des saisons pluvieuses à l'aide des indicateurs naturels (période d'apparition des chenilles à tête noire). Ils ont également opté pour la modification de la date des semis et du calendrier cultural, ainsi que le changement de techniques agricoles et la domestication de certaines espèces végétales sauvages. L'une des stratégies portant sur la provocation des pluies par des rites ancestraux est entièrement basée sur les savoirs traditionnels. Du point de vue analytique, ces stratégies basées sur le savoir traditionnelles sont très efficaces pour combattre la vulnérabilité selon les PACL.

Pour les perceptions portant sur la forte battance des pluies et la vélocité du vent élevée en saison des pluies, les PACL ont adopté des stratégies d'adaptation allant des constructions de maisons plus solides à l'utilisation des brise-vents dans des systèmes agroforestiers pour les plantations et les champs.

Pour les perceptions portant sur l'augmentation de la chaleur, la sècheresse fréquente, l'allongement de la saison sèche et l'arrêt précoce de la saison des pluies, les PACL ont mis en place des stratégies d'adaptation portant sur la diversification des cultures au sein d'un même champ ou au sein d'une même plantation, l'utilisation des variétés améliorées, soit provenant des ONG ou des structures gouvernementales en place, soit issues d'un processus de sélection sur la base de leur savoirs traditionnels.

Ces différents résultats sont comparables à ceux de M. Ouedraogo et al., 2010 qui ont menés une étude sur la perception et les stratégies d'adaptation aux changements de précipitations par les Paysans du Burkina Faso en 2010. Après analyse ils trouvent que les mesures d'adaptation les plus appropriées sont celles élaborées par les paysans qui vivent la réalité des changements climatiques, notamment dans le secteur agricole.

Une étude similaire portant sur les perceptions locales des changements climatiques et les mesures d'adaptation dans la gestion des parcs à karité au Nord du Benin menée par GNANGLE et al., en 2010 a permis de voir la relation entre les perceptions paysannes du phénomène de changements climatiques et les stratégies paysannes mises en place pour s'y

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adapter. Il ressort clairement de cette étude que la priorité ou le choix est porté sur une méthode d'adaptation en fonction du niveau de perception du phénomène.

Il ressort aussi que, d'autres chercheurs ont mené des études sur la perception des changements climatiques dans la zone subsaharienne, et sont unanimes que, les changements climatiques qui se manifestent par une élévation des températures et une baisse des précipitations. Ces variations sont bien perçues par les peuples autochtones et communautés locales. Celles-ci ont élaboré des stratégies d'adaptation propres qui varient en fonction du niveau de perception du phénomène.

Les résultats présentés dans le cadre de cette étude se rapprochent de ceux du GIEC en 2010 et du CSC en 2013. Les observations faites par les PACL autour du Parc National de Boumba Bek, sont les mêmes que celles des scientifiques de ces deux institutions.

De cette étude, il ressort clairement que dans les stratégies indigènes d'adaptation aux changements climatiques mises en place par les PACL autour du PNBB, certaines stratégies d'adaptation peuvent être collectives (les rites traditionnels aboutissant à la provocation des pluies), communautaire (identification du début effectif de la saison des pluies à partir des marqueurs naturels) ou individuelles. La même remarque a été faite par Traoré et al., en 2002 qui ont identifié les types d'adaptation élaborés par les peuples du bassin du Niger.

De cette analyse, il ressort que le changement climatique n'est pas une nouveauté en Afrique. De nombreuses communautés locales qui sont confrontés aux défis créés par ce phénomène depuis des années ont accumulé une somme de connaissances très variées dont on pourrait s'en inspirer pour élaborer des méthodes d'adaptation durables. Une intégration de ces savoirs traditionnels aux connaissances scientifiques pourrait augmenter la résilience, élaborer des stratégies efficaces et mieux outiller le gouvernement dans la gestion des risques y afférents. Ces stratégies d'adaptation basées sur le savoir traditionnel, malgré certaines insuffisances, permettent aux PACL de faire face aux changements immédiats de leur environnement depuis des millénaires.

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CHAPITRE. 5 : CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS 5.1. Conclusions

Au terme de cette étude dont l'objectif global a été de contribuer à l'amélioration des stratégies d'adaptation aux changements climatiques à travers l'amélioration des connaissances sur les stratégies indigènes d'adaptation aux changements climatiques, force est de constater que les températures moyennes annuelles ont augmenté entre un minimum de 23,6°C (1974) et un maximum de 25,9°C (2013) de 1971 à 2014. De plus, la moyenne globale des températures de 24,72°C #177;0,59°C, observée pendant la même période a tendance à augmenter significativement de plus de 0,5°C. Cette élévation de température dans la zone s'avère supérieur aux observations du GIEC en 2013 dans son cinquième rapport d'activités, qui stipule que la température a augmenté de 0,85°C entre 1880 et 2012 dans le monde ; d'où le réchauffement est plus accentué à Boumba Bek.

Par contre, les précipitations moyennes annuelles ont tendance à rester stables de 1951 à 2014, malgré la diminution apparente entre une valeur maximale de 2140,5 mm au cours de la décennie 2 et une valeur minimale de 1331,5 mm au cours de la décennie 5. La moyenne générale des précipitations annuelles moyennes de 1574,23 #177;178,97 mm subit une diminution de 30 mm sur l'ensemble de la période, ce qui s'avère non significatif d'après le test de régression effectué. Le nombre de jours de pluies par année est passé de 163 jours de pluies en 1962 à 118 jours de pluies en l'an 2000 ce qui implique de graves conséquences pour les activités des peuples autochtones et communautés locales.

Autour du parc national de Boumba Bek, les peuples autochtones (les pygmées Bakas) et les communautés locales (les Bangando, les Mvong Mvong et les Nkounabembe) interrogés perçoivent clairement les changements climatiques à travers 16 perceptions différentes citées. Ils relèvent principalement une augmentation de la chaleur , une perturbation du rythme des saisons et la baisse dans la durée des pluies. Ils ont également relevé une fréquence élevée de phénomènes climatiques extrêmes tels que les sècheresses, les tempêtes de vents de plus en plus violents, les pluies de plus en plus fortes entrainant des inondations dans la zone.

Les Changements climatiques affectent les PACL à travers la réduction de l'abondance des ressources naturelles, perturbant ainsi les activités de cueillette, de chasse et de pêche, qui sont des activités vitales pour peuples.

Les stratégies d'adaptation développées par les PACL pour le secteur agricole sont principalement une diversification plus élevée des cultures au sein d'une même parcelle

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(polyculture), un système de prévision du début effectif et de la fin des saisons de pluies basé sur des manifestations phénologiques et d'autres savoirs traditionnels, la domestication des espèces sauvages et le changement de techniques culturales. La provocation traditionnelle et blocage traditionnel des pluies ont également été cités par les personnes interrogées. Les stratégies d'adaptation pour le secteur de la cueillette mises en place par les PACL portent essentiellement sur la sédentarisation progressive des Pygmées Bakas, et la pratique de l'agriculture comme activité pour les pygmées Bakas.

Dans le secteur de la chasse, les PACL optent pour un changement de techniques de chasse et une reconversion des chasseurs soit en Agriculteurs, soit en éleveur. Pour ceux qui pratiquent la pêche comme activité, l'adaptation porte sur l'amélioration des techniques de pêche à partir des méthodes traditionnelles et sur l'implication des autres classes sociales dans l'activité de pêche.

A l'issue de ces résultats, il ressort que les changements climatiques sont réels et bien perçus par les PACL qui ont élaborés des savoirs traditionnels pour s'y adapter. Quoique ceux-ci s'avèrent limités, les savoirs traditionnels sont d'une extrême importance, aux vues de la forte vulnérabilité des communautés rurales qui ne possèdent pas de ressources, ni de moyens techniques pour s'y adapter.

L'hypothèse principale formulée au début de cette étude, qui stipule que « l'utilisation des savoirs traditionnels dans les méthodes d'adaptation est la principale stratégie d'adaptation des PACL face aux changements climatiques autour du parc national de Boumba Bek », est acceptée. Les méthodes telles que le dispositif de prévision du début effectif des pluies et de la fin effective des pluies, la provocation traditionnelle des pluies lorsqu'elles tardent à tomber ainsi que le blocage des pluies en période de crue excessive, sont des stratégies d'adaptation basées sur les savoirs traditionnels ancestraux des PACL autour du PNBB. La domestication des espèces sauvages est également fonction des habitudes alimentaires de PACL, car ceux-ci privilégient la domestication de l'igname sauvage plutôt qu'une autre espèce sur la base de leurs savoirs traditionnels.

L'hypothèse secondaire 1 qui dit que les températures ont augmenté d'au moins 0,5°C et les précipitations ont diminués d'au moins 2% par décennie au cours des quatre dernières décennies est acceptée partiellement. Car de cette étude, il ressort que la température moyenne annuelle à la station de Yokadouma a augmenté de plus d'un demi-degré Celsius selon la courbe de tendances. Par contre, les précipitations restent stables malgré une diminution

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apparente de 30 mm sur la période. L'hypothèse principale basée sur le rapport de Molua et Lambi en 2007 au Cameroun est partiellement acceptée.

L'hypothèse secondaire 2 qui dit que les PACL perçoivent clairement les changements de leur environnement sur les trente dernières années est acceptée ; car il ressort de cette étude que les PACL ont cité 16 perceptions différentes allant des sensations de chaleur en hausse et des précipitations en baisse, à la baisse progressive du phénomène de Brouillard et la vélocité élevée en saison des pluies. Cette perception des changements climatiques est bien ressortie à travers la manifestation de phénomènes climatiques extrêmes telle que la sècheresse, les inondations et les tempêtes de vent à fréquence élevée, Bien relevés par les PACL.

L'hypothèse secondaire 3 qui stipule que le principal impact des Changements Climatiques sur les PACL autour du parc national de Boumba Bek a été la réduction de l'abondance des PFNL est acceptée, car de l'analyse des discours, il ressort une perception de la diminution des ressources naturelles affectant la disponibilité des PFNL dont les quantités sont en baisse pour certaines PFNL autour du parc. Par contre, les quantités d'autres PFNL tels que les mangues sauvages seraient plutôt en hausse, à cause des stress physiologiques due à l'augmentation de la chaleur (I. Cacciari et al. 2010).

L'hypothèse secondaire 4 qui dit que les méthodes d'adaptation mises en place par les PACL varient en fonction du niveau de perception du phénomène par la communauté ou l'individu est accepté car dans le cadre de cette étude, selon que l'interviewé appartienne à une classe d'âge, la stratégie d'adaptation énumérée varie en fonction de la manière de percevoir le phénomène des changements climatiques. Néanmoins, aucune stratégie n'a été relevée pour la perception de la diminution du phénomène de Brouillard perçue par les vieux.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein