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La transition démocratique en Mauritanie à  travers la revision constitutionnelle de 2012

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par Mohamed Sarr
Université de Tunis El Manar - Mastère de recherche 2016
  

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République Tunisienne

Ministère De l'Enseignement Supérieur Et de la recherche Scientifique

Université de Tunis el Manar

Faculté de Droit et de Science Politique de Tunis

Mémoire pour l'obtention du Diplôme de Mastère de recherche en science politique

La transition démocratique en Mauritanie à travers la révision constitutionnelle de 2012

Sous la direction de : Elaborée par :

Mme.Asma Nouira Mohamed El Moctar Sarr

Membres du jury :

Président :...........................

Encadrant: Mme Asma Nouira

Rapporteur:........................

2015-2016

La faculté n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les mémoires et les thèses. Ces opinions sont considérées comme propres à leurs auteurs.

DEDICACES

A Mes chers parents et toute la grande famille, que nulle dédicace ne puisse exprimer mes sincères sentiments, pour leur patience illimitée, leur encouragement contenu, leurs aide, en témoignage de mon profond amour et respect pour leur grands sacrifices.

A Mes chers frères et soeurs pour leurs grands amour et leurs soutient, qu'ils trouvent ici l'expression de ma haute gratitude.

A Mes chers ami(e)s, mes camarades de classe, et a tous et toutes ceux que j'aime.

REMERCIEMENTS

En préambule et au terme de ce travail de recherche scientifique, je tiens à remercier sincèrement Mme Asma Nouira, mon encadrant de mémoire, pour sa rigueur, sa générosité et sa bienveillance.

Aux membres du Jury de me faire honneur en acceptant d'évaluer mon travail.

A Mes professeurs de Mastère qui m'ont permis de bénéficier de leur savoir et de leurs connaissances. Car en Wolof on dit que « Nul n'a le prix à payer du savoir reçu ».

A toutes ces personnes, acteurs politiques, militants de la société civile et professeurs émérite qui m'ont ouvert leurs portes et m'ont fourni les informations dont j'avais besoin lors de mes entretiens et enquête de terrain.

Principales abréviations

AG / NU  : Assemblée Générale / Nations Unies

AJD/MR  : Alliance pour la Justice et la Démocratie / Mouvement pour la Rénovation

Al  : Alinéa

APP  : Alliance Populaire Progressiste

ATT  : Amadou Toumani Touré

BASEP  : Bataillon de Sécurité Présidentielle

CAP  : Coalition pour une Alternance Pacifique

CMJD  : Comité Militaire pour la Justice et la Démocratie

CMRN : Comité Militaire de Redressement National

CMSN : Comité Militaire de Salut National

CNDH  : Commission Nationale des Droits de l'Homme

COD  : Coalition de l'Opposition Démocratique

E/R: En retraite

FLAM  : Forces de Libération Africaine de Mauritanie

FNDD  : Front National de Défense de la Démocratie

FNDU  : Front Nationale pour la Démocratie et l'Unité

FPC  : Forces Progressistes du Changement

GGSR  : Groupement Général pour la Sécurité des Routes

GIC  : Groupe International de Contact

HAPA  : Haute Autorité de la Presse et de l'Audio- visuelle

HCE  : Haut Conseil d'État

IRA : Initiative pour la Ressursigence de l'Antiesclavagisme

OSC  : Organisations de la Société Civile

PRAG  : Parti Radical pour l'Action Générale

PRDS  : Parti Républicain Démocratique et Socialiste

RFD  : Rassemblement des Forces Démocratiques

RNRD  : Rassemblement National pour la Réforme et le Développement

TPMN  : Touche pas à ma nationalité

UFP  : Union des Forces de Progrès

UPR : Union Pour la République

Sommaire

Introduction

Partie I  : Les acteurs de la politique mauritanienne : Un dialogue inaudible

Chapitre I  : Profil des acteurs politiques

Section I  : Mauritanie : La caserne des militaires

Section II  : Des oppositions qui s'opposent

Chapitre II : Le général (E/R), l'opposition hétéroclite et le régime

Section I  : Les accords de Dakar oubliés et les « radicaux » à la marge

Section II  : Une démocratie qui se consolide ou un autoritarisme libéral

Partie II  : De timides amendements pour de sérieux problèmes

Chapitre I  : Amendements et lois face aux tares sociales: les obstacles à la démocratisation

Section I  : Les problèmes sociaux premiers: quelle solution normative ?

Section II  : Le problème de cohabitation

Chapitre II : Amendements et renforcements: les autres institutions sociales

Section I  : La société civile, l'armée et le pouvoir

Section II  : Des institutions à renforcer

Conclusion

Introduction

Dès 1994, la revue Politique Africaine, dans son numéro 55, s'interrogeait en ces termes: « La Mauritanie: un tournant démocratique ? ». Avec le concours de plusieurs chercheurs, la revue panafricaine francophone étayait les « questions pour l'avenir »1(*) dont le pays devrait faire face avec l'engagement dans sa toute première expérience « démocratique » de 1991 voulu par Maouiya Ould sidi Ahmed Taya (Taya). Quinze ans plus tard, dans son numéro 114 de 2009, la même revue ironisait en ces termes « Mauritanie, la démocratie au coup par coup »2(*), afin de s'interroger sur ces mêmes défis face au coup de force du 06 Aout 2008 et les interminables putschs qui, à la fois, initient et font échouer la démocratisation en Mauritanie.

Afin de contextualiser3(*) le sujet, nous devons revenir sur cette matinée du 6 Aout 2008 lorsque le président Sidi Ould Cheikh Abdellahi (Sidi), président élu démocratiquement à l'issue des présidentielles de Mars 2007 et investi en Avril de la même année, décide de limoger par décret quatre généraux de l'armée4(*). Ces derniers, écoeurés par cet acte décident à leur tour de le déposer, à leur tête se trouvait le commandant du BASEP, habitué au palais présidentiel et aux putschs et contre-putschs, Mohamed Ould Abdel Aziz (Aziz). Aussitôt l'information, comme une trainée de poudre, fait le tour du monde, et crée une situation de confusion au sein des leaders politiques, dont certains vont le dénoncer très tôt, et s'organiser en un front de « partis anti-coup »6(*), le FNDD; de l'autre côté les putschistes s'organiseront autour du Haut Conseil d'État (HCE), une autre version des CMRN, CMSN et CMJD, connu jadis par les mauritaniens, donc l'institution militaire gouvernante présidée par Aziz. Cette situation de bras de fer entre putschistes avérés et partis politiques désireux du retour de la légalité constitutionnelle, restera telle quelle jusqu'à ce que la communauté internationale condamne le coup militaire et établit un GIC sur la Mauritanie7(*) en nommant des envoyés spéciaux pour le pays afin que la situation confuse soit dénouée. Les différents acteurs politiques mauritaniens signeront le 03 Juin 2009 les accords cadre de Dakar « entre les trois grands pôles politiques mauritaniennes »8(*), par la médiation du GIC sur la Mauritanie et à travers le gouvernement du Sénégal. Cet accord de « sortie de crise » à double objectif, à savoir transitoire et post-transitoire, nous emmène à une élection présidentielle du 18 Juillet 2009 dont Aziz remportera avec 52,2% des suffrages.

Au lendemain des élections du 18 Juillet, l'opposition réclame l'application des dispositions post-transitoires, à savoir, le titre VII du paragraphe 4 des accords de sortie de crise intitulé « De la poursuite du dialogue nationale ». Cette disposition stipulait que « Cet accord ne met pas fin à la poursuite du dialogue national sur les autres points qui peuvent renforcer la réconciliation nationale et la démocratie, et que dans le prolongement de l'élection présidentielle, le dialogue national inclusif sera poursuivi et intensifié entre toutes les forces politiques nationales...»9(*). Ce que réfutent les acteurs au pouvoir en estimant que ce dernier n'a plus d'objet depuis l'élection présidentielle. C'est parti pour un quiproquo interminable entre les différents acteurs politiques. Allant du dialogue séparé entre le pouvoir et une partie de l'opposition10(*) qui donnera « l'Accord politique » du19 Octobre 201111(*); au boycott par l'autre partie de l'opposition12(*) du dialogue et de toutes les échéances électorales organisées entre 2013 et 2014.

Le bémol dans cet accord de 2011 entre acteurs politiques, et en période transitionnel, est son caractère restreint, qui fait que, probablement, les décisions qui en seront issues, n'engagent que ceux qui y ont pris part; alors qu'il devait être inclusif, sur la base d'un consensus entre l'ensemble des acteurs de la classe politique du pays, du moins si l'on se réfère au titre VII des Accords de Dakar pour la sortie de crise.

Sur cette lancée, nous allons, suivant un angle sociopolitique et actantiel, étudier ce contexte marqué par une interaction conflictuelle entre les différents acteurs politiques du pays, par rapport à une démocratisation nécessaire qui dépend fortement de leurs comportements face aux règles préétablies.

Pour cela, il nous faudra « l'utilisation de procédés opératoires rigoureux, bien définis, transmissibles, susceptibles d'être appliqués à nouveau dans les mêmes conditions, adaptés au genre de problème et de phénomène en cause»13(*). Tel que le travail de terrain qui s'appuiera sur des entretiens d'individualités et la documentation, à savoir « toute "trace" en rapport avec l'activité des hommes vivant en société et qui, de ce fait, constitue indirectement une source d'informations sur les phénomènes sociaux »14(*), afin de vérifier les variables explicatives qui constitueront des réponses à notre problématique.

Il est à distinguer entre le processus de démocratisation proprement donné et la phase post-transition. Cela veut dire, théoriquement le processus de démocratisation débute du point (A), la chute d'un régime autoritaire, ensuite c'est le début du jeu entre les différents acteurs, qui font et défont alliances et compromis. C'est aussi le moment des jeux sur les différentes règles à adopter et censées régir le régime à venir, enfin c'est l'occasion de régler ou d'inscrire dans l'agenda les questions d'ordre nationales qui préoccupent les citoyens, ou en tout cas, les plus importantes. Ce processus prend fin au point (B), l'établissement d'un nouveau gouvernement sur la base de nouvelles règles15(*). Ensuite il y a ce qui est, théoriquement, appelé la phase de « seconde transition »16(*) qui peut être considérée comme le début ou les prémices de la consolidation démocratique. Cette période permet de mettre en oeuvre et d'entériner les règles qui ont été faites durant le processus transitionnel, donc c'est la phase d'une institutionnalisation, ou si vous voulez, de la routinisation démocratique. Enfin là, ce ne sont plus les acteurs qui font les règles, mais c'est plutôt les règles qui font les acteurs, et ces derniers sont tenus de s'y conformer.

Cela s'inscrit dans la théorie de la démocratisation qui est un phénomène dépendant de plusieurs autres phénomènes ou variables dites indépendantes qui agissent sur elle et qui déterminent son résultat avec une certaine « incertitude »17(*) sur l'issue du processus. Nous avons principalement deux courants dans le cadre de l'étude des transitions démocratiques : le premier est celui de l'école des pré-conditions ou des structures qui explique la possibilité de passage d'un régime autoritaire vers un régime démocratique par un ensemble de facteurs socio-économiques, à savoir une industrialisation assez suffisante, une urbanisation de la société, la richesse ou le revenu par tête des habitants (P.I.B/habitant) et le niveau d'éducation. Bref la modernisation donnerait l'ouverture à une classe moyenne large, ouverte et favorable à un régime démocratique, pour paraphraser en substance « les critères » de Lipset18(*), figure de proue de cette théorie de la fin des années cinquante grâce à son ouvrage Some social requisites of Democracy : Economic developement and politicallegitimacy, 1959. Il estimait que « une société divisée entre une grande masse pauvre et une petite élite favorisé, résultera soit d'une oligarchie [...] ou d'une tyrannie »19(*). L'autre courant de pensée est celui qui base son approche sur les acteurs et non sur les structures socio-économiques. Il s'agit du paradigme « Agent based approach » ou « Agency Factors of Democratization ». La théorie de l'école des acteurs analyse le processus d'une transition de régime autoritaire vers un régime démocratique avec le choix des leaders politiques, principaux acteurs du changement, par l'élaboration de nouvelles règles démocratiques. Grâce au classique de O'donnell et Schmitter, Transition from authoritarian rule (1986), appuyé sur une étude empirique des transitions des régimes politiques en Amérique Latine et des pays d'Europe du Sud et de l'Est, qui balise le cadre théorique de la « democratization studies », l'élite politique,« hard-liners » et « soft-liners »20(*) par le biais de leurs choix stratégiques, constituent les facteurs essentiels au changement de régime avec l'établissement des règles du jeu. En outre, le travail de Linz et Stepan, The Breakdown of Democratic Regimes (1979) et Problems of Democratic transition and consolidation : Southern Europe, South America and Post-communist Europe (1996), ont approfondie l'analyse des transitions, et surtout de la consolidation des régimes démocratiques, toujours avec le rôle crucial des acteurs. Cela avec des critères qui reviennent à une démocratisation complète par le niveau « comportemental », « attitudinal » et « constitutionnel » des acteurs et, au cas échéant, à un régime démocratique consolidé qui repose sur ce qu'ils appellent les « cinq arènes ou terrains d'une démocratie consolidée »avec des institutions démocratiques dont les compétences et les limites sont bien déterminées. Cette école des « Democratization studies » ou de la « Transitologie » qui concentre son analyse et ses explications du changement par les acteurs, est celle qui nous permettra de mener une étude concrète de notre objet de recherche.

Cet éclairage théorique de la démocratisation est important dans la mesure où ça nous permet de saisir les problèmes du contexte politique des périodes 2008, 2012 et 2014. Cela se vérifie à partir du moment de la chute de Sidi en 2008 (point A), les différentes positions des protagonistes menant jusqu'aux accords de Dakar pour la sortie de crise. Puis l'élection de Aziz (point B). Ensuite, des décisions de ce dernier de faire fi des accords de sortie de crise et de ces protagonistes de ne pas reconnaitre le résultat des urnes. De la décision du pouvoir de tenir en 2011un dialogue sortant du cadre des accords précités, dont certains leaders de l'opposition boycotteront en plus des dernières élections en 2013 et 2014. Là, sont les comportements des leaders en période post-transitionnelle. Il y a eu, en fait, une relation significative sur le comportement des acteurs lorsqu'ils sont en position d'élaborer les règles, ce qui résultera de cette élaboration et lorsqu'ils seront tenus de s'y conformer quel que soit leurs positions ou leurs décisions ex ante.

Raison pour laquelle, nous inscrivons notre étude de la démocratisation en Mauritanie entre 2008 et 2014, à travers la révision constitutionnelle de 2012, dans un « schème actancielle ». Les acteurs politiques en action et en interaction, leurs choix de coopérer ou de ne pas coopérer à l'élaboration et au respect des règles. L'impact que cela a sur la variable à expliquer qu'est la consolidation des institutions d'un régime politique basé sur des règles démocratiques.

Les concepts centraux constituant notre objet d'étude sont transition démocratique et révision constitutionnelle, dont le premier a déjà été discuté ci-dessus21(*), s'agissant du second se rapportant aux amendements ayant été fait par les parlementaires mauritaniens réunis en congrès afin de statuer sur des dispositions relatives à la constitution à modifier22(*). Par ces concepts dérivent des notions secondaires, tels acteurs et niveau d'interaction, pactes ou compromis, et institutions.

Le concept acteur s'inscrit ici dans l'étude de l'élite (s), ce concept au pluriel ou au singulier, a été le débat entre les chercheurs qui y ont consacrés leurs travaux, cela depuis Pareto et de Mosca, les pères fondateurs qui ont ouvert la voie à la «?théorie des élites?». Pareto définissait l'élites, au sens large, comme des «?catégories sociales composées d'individus ayant la note la plus élevée dans leur branche, il poursuit en définissant l'élite comme, les individus qui exercent les fonctions dirigeantes, dont on distingue, l'élite gouvernementale, ou, classe dirigeante qui détient effectivement le pouvoir, et l'élite non gouvernementale ou classes dominantes, qui sans exercer le pouvoir soutient la précédente et sert éventuellement d'intermédiaire entre l'élite dirigeante et la masse.?»23(*), quant à Mosca il parle plutôt de «?classe politique?» et/ou «?classe dirigeante?» au lieu d'élite(s)24(*), Cependant, ces définitions étant tantôt «?pluraliste?», et tantôt «?moniste?», nous pousse à recourir à une définition plus générique donnée par Genieys W, en désignant l'élite comme «?une minorité qui dispose à un moment donné dans une société déterminée d'un prestige découlant de qualités naturelles valorisées socialement (par exemple, la race, le sang, etc.) ou de qualités acquises (culture, mérite, aptitude, etc.). Ainsi, le vocable désigne tout aussi bien le milieu (social, territorial, entre autres) d'où est issue l'élite, que les acteurs qui la composent, ou encore le terrain au sein duquel elle manifeste sa prééminence. Dans ce cas de figure, le déterminant est toujours suivi d'un qualificatif permettant de restreindre le champ du groupe d'acteurs identifié comme constituant une élite?»25(*). Suivant cette définition, nous allons durant notre travail utiliser le concept «?acteur?», dans une perspective décisionnelle et actancielle, pour désigner l'ensemble des acteurs, leaders, en action et en interaction, qui décident, influencent ou subissent, directement ou indirectement, l'institutionnalisation de la politique nationale. Et pour les spécifier,  nous allons y faire suivre le qualificatif « politique », pour désigner les civils actifs dans les partis politiques, « société civile », pour ceux qui sont actifs dans les mouvements sociaux et « militaire», pour les militaires actifs dans le domaine politique. 

S'agissant du pacte ou de compromis, nous y entendons « tout accord explicite et pas forcément publique ou justifié, entre une sélection d'acteurs politiques, qui cherche à définir ou mieux redéfinir les règles régissant l'exercice du pouvoir sur la base de garantis vitaux, ces pactes peuvent être de durée limité ou basé sur un consentement continu qui ouvrira la voie à des règles durables »26(*). Le fait que maintenant nous remarquons dans l'interaction de ces acteurs politiques des manifestations, telle qu'ils n'arrivent pas à s'entendre ou s'entendent peu sur les procédures concernant les règles de la conduite politique, ou qu'ils concluent des accords restreints et/ou non inclusifs. Ceci est un signe d'absence de consensualisme, où règne une certaine méfiance qui limiterait leurs interactions dans une sorte d'insécurité ou de méfiance de part et d'autres, et qui, probablement aboutirai, sur des mesures radicales et/ou punitives que pourraient prendre l'un des camps en guise d'exclusion de facto de l'autre camp du jeu du pouvoir27(*).

Et enfin, concernant les « Institutions », nous entendons par ces dernières comme des «modèles d'interactions régularisés qui sont connus, pratiqués, et régulièrement acceptés (pas nécessairement approuvées normativement), par des acteurs sociaux donnés, auxquels, par vertu de ces caractéristiques, entendent interagir suivant les règles et normes formelles et informelles de ces modèles. Parfois, mais pas nécessairement, les institutions sont des organisations formelles: elles sont matérialisées par des bâtiments, sceaux, rituels et des personnes autorisées à parler au nom de ces organisations. »28(*).

Avec ces définitions nous sommes à mesure, grâce à l'interaction entre les acteurs par les pactes qu'ils lient ou pas, de tester l'institutionnalisation démocratique, si cela ressemble ou pas à une « Delegative Democracy : DD »29(*) comme l'appel O'Donnell. C'est-à-dire que le pays est formellement démocratique, ou plutôt recoupe les sept attributs Polyarchique de Dahl, par l'établissement récent d'un régime démocratique30(*). Cependant, il n'est ni démocratiquement institutionnalisé, ni consolidé, et n'est non plus pas menaçant de revenir en une forme d'autoritarisme du passé31(*).

Par conséquent, l'hypothèse centrale de notre sujet est la suivante: Après les élections présidentielles en Juillet 2009, le choix de certains acteurs politiques, qu'ils soient au pouvoir ou à l'opposition, de ne pas respecter les règles qui ont été établit sur la base d'un pacte durant le processus de transition, peut être facteur de division au niveau de l'élite politique et constituer un obstacle à tout projet de consolidation démocratique.

Cette hypothèse en nous servant de réponse provisoire, permet de répondre à la problématique suivante, à savoir: A travers la révision constitutionnelle du 20 Mars 2012 en Mauritanie et des contextes qui l'entourent ; Est-ce qu'entre deux phases, celle du processus transitionnel et celle de la consolidation, séparées en théorie, mais qui s'inscrivent dans une perspective linéaire, si la polarisation des acteurs peut influer sur l'effectivité des changements institutionnels? Autrement dit, on peut se demander si l'absence de pacte consensuel entre les principaux leaders politiques ex ante aux amendements constitutionnelle peut-elle influer sur les résultats institutionnels ex post ?

Afin de répondre à cette question, nous traiterons, successivement, le problème récurrent de l'interaction entre les acteurs politiques mauritaniens (Ière Partie) ; Ensuite décrire et analyser l'effectivité des amendements faits par rapport aux questions nationales du pays (IIème partie).

* 1 Ainsi intitulé par H. Guillaume et P. Bonte qui s'interrogeaient sur le brusque retournement d'un régime militaire et autoritaire vers la démocratie, ce malgré les nombreuses variables sociales, ethniques, économiques et internationales dont le pays fait face. In BONTE P et GUILLAUME H, Mauritanie: questions pour l'avenir, Politique africaine, N°55, Octobre 1994, Karthala. pp. 2-10.

* 2 Cette expression démontre l'ironie dans les processus démocratiques en Mauritanie qui sont interrompues et initiés à la fois par des coups d'États militaires. La dernière en date, Aout 2008, était un coup qui venait de déposer un gouvernement démocratique qui a à peine fait 1 an. In CIAVOLELLA R. et FRESIAM., « Entre démocratisation et coups d'État. Hégémonie et subalternité en Mauritanie », Politique Africaine, 2009/2 (N° 114), p. 5-23. http://www.cairn.info/revue-politique-africaine-2009-2-page-5.htm

* 3 Tout au long de notre introduction, notre démarche méthodologique est essentiellement inspirée de la démarche proposée dans l'ouvrage méthodologique de QUIVY R. et VAN CAMPENHOUDT L. Manuel de recherche en sciences sociales, DUNOD, Paris, 2ème Edition, 1995.

* 45 Il s'agit des généraux au niveau de l'état-major de l'armée, de la gendarmerie, de la garde nationale et de l'état-major du BASEP (Bataillon de la Sécurité Présidentielle), dont Aziz était à ce poste. Voir ANTIL A. et LESOURD C., « Non, mon Président ! Oui, mon général ! Retour sur l'expérience et la chute du président Sidi Ould Cheikh Abdellahi », l'Année du Maghreb [En Ligne]. V 2009, mis en ligne le 01 novembre 2012. URL https://anneemaghreb.revues.org/620

* 6Ibid.

* 7 Il s'agit de l'Union Africaine, l'Union Européenne, les Nations Unies, l'Organisation International de la Francophonie, La Ligue des États Arabes et L'organisation de la Conférence Islamique, in OULD BOUBOUTT A. S., « La révision constitutionnelle du 20 Mars 2012 en Mauritanie », L'Année du Maghreb, n°10, 2014, pp. 297-314. PDF https://anneemaghreb.revues.org/2176?file=1

* 8 Ainsi nommés dans le titre de l'Accord cadre de Dakar du 05 Juin 2009, Il s'agit du camp soudé autour de Aziz après sa démission et future UPR, du FNDD et du RFD.

* 9 Contenu du paragraphe 4 de l'Accord Cadre de Dakar entre les trois grands pôles politiques mauritaniens, p.4 2009. Voir Annexe.

* 10 Il s'agit de La C.A.P est une coalition de partis politiques formée par l'ancien Président de l'Assemblée nationale Messaoud Ould Boulkheir, leader de l'APP, il y avait El Wiam, Sawab et Hamam

* 11 L'accord politique de 2011 entre la CAP et le parti au pouvoir, l'UPR, contenaient des amendements à la constitution, d'où la révision constitutionnelle de 2012 et des amendements à certaines lois telles la loi sur les partis politiques, l'accès des femmes aux mandats électifs, la prohibition des candidatures indépendantes hors présidentielles, l'élargissement de la représentation au niveau de l'assemblée nationale...

* 12 Il s'agit du COD, formation qui succéda au FNDD en intégrant en son sein un autre parti politique au lendemain des élections de Juillet 2009.

* 13 PINTO R et GRAWITZ M., Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 4ème Edition, 1971. p. 288

* 14 DEL BAYLE J-L. L., Initiation aux méthodes des sciences sociales, Classiques des Sciences Sociales, 2000, p. 167. Version numérique PDF http://classiques.uqac.ca/

* 15 Définition donnée par O'DONNELL et SCHMITTER in O'DONNELL G. et SCHMITTER P. Transition from authoritarian rule, tentative conclusions about uncertain democraties, The John Hopkins University Press, 1986, p. 6. C'est nous qui traduisons et reformulons.

* 16Ces notions de « seconde transition » et de « consolidation » ont été développées par O'donnell. In O'DONNELL G., « Delegative democracy? »,Pre-published as Kellogg Institute working paper #192, April 1993, Edition PDF du Kellogg Institute

* 17Le terme incertitude « incertainty » repose sur l'issue du processus à un type de régime qui peut être encore autoritaire, démocratique, ou quelque chose d'autre, suivant la stratégie des acteurs et le résultat que celles-ci donneraient. Il est développé par O'DONNELL G., et SCHMITTER P Op.Cit

* 18 A part Lipset, d'autres auteurs se rangeront aussi dans cet ordre de pensée tels que Moore dans son étude sur l'histoire socio-économique de plusieurs pays a démontré le type de régime qui résulterait de chaque processus, ce qui lui permettait de dire « sans bourgeoisie, pas de démocratie ». Dans cette idée des pré-conditions structurelles, telles l'industrialisation, l'éducation, le niveau de P.I.B..., ils concluent par cet axiome que « la plupart des pays riches sont démocratiques et presque toutes les démocraties sont des pays riches ».

* 19 Citation en page 75, Traduit par nous, LIPSET S.M, « Some Social Requisites ofDemocracy: Economic Development and Political Legitimacy», American Political Science Review, 53, pp 69-105. doi:10.2307/1951731. In Julian Wucherpfennig, Modernization and Democracy: Theories and Evidence Revisited, ETH Zurich, Center for Comparative and International Studies

* 20 Hard-liners et Soft-liners désignent le comportement des acteurs à être prêt à maintenir le régime autoritaire ou à soutenir un changement de régime. O'DONNELL G. and SCHMITTER P. C., p15 Op.cit.

* 21 Définition donnée, voir Supra note 14.

* 22 La révision constitutionnelle ou amendement constitutionnel s'entend des modifications apportées à la constitution par le titulaire du pouvoir constituant dérivé, tel en Mauritanie, le parlement bicaméral réuni en congrès en session extraordinaire selon les dispositions constitutionnelles du texte fondamental du 20 Juillet 1991. Voir aussi Lexique des termes juridiques, 22ème édition, 2014-2015, Dalloz.

* 23 LEFERME-FARGUIERES F. et VAN RENTERGHEM V., « Le concept d'élites. Approches Historiographiques et Méthodologiques », Hypothèses 2001/1 (4), p. 55-67. Version PDF sur Cairn.info http://www.cairn.info/revue-hypotheses-2001-1-page-55.htm pp.3-4

* 24 Ici Mosca raffine sa définition en définissant la «?classe politique?» avec un double aspect «?théorique?» et pratique?» à savoir, primo, que «?le pouvoir est détenu et exercé, toujours et partout, par une minorité dominant une majorité?» et, secundo, «qu'au sein d'une même société plusieurs minorités peuvent partager le pouvoir?», cela se fonde sur ce qu'il appelle la «?formule politique?» qui rend légitime cette domination, ». D'ailleurs l'auteur Alberto Puppo explique cette différence de vocabulaire en citant Albertoni, un autre auteur qui laisse savoir que quand Mosca parle de classe politique, c'est la classe politique Sicilienne, la mafia, alors que la classe dirigeante désignerait celle de l'État Italien. Alberto Puppo compare cette explication avec des écrits de Mosca lorsqu'il était Sénateur, qu'il existait deux niveaux au sein de la minorité dirigeante, à savoir la classe politique avec quelques douzaines d'hommes et la classe dirigeante, beaucoup plus nombreux, qui constituait l'appareil politico-administratif. PUPPO A., « Gaetano Mosca et la théorie de la classe politique. Une pensé antidémocratique au service de la liberté », Revue Française d'Histoire des Idées Politiques 2005/2 (n°22), p. 17-31 DOI 10.3917/rfhip.022.001. Version PDF in Cairn.info http://www.cairn.info/revue-francaise-d-histoire-des-idees-politiques-2005-2-page-17.htm p. 8.

* 25 GENIEYS W., Op.Cit. Version PDF p. 2

* 26 Définition de pacte entre les acteurs donnée par O'DONELL G. et SCHMITTER P. C., p.35. Op.cit. C'est nous qui traduisons.

* 27 Ici nous nous sommes inspirés de la définition conceptuelle sur la désunion à partir des élites, dit élite de type désuni et plurielle, donnée par HIGLEY J. et BURTON M. G. In « The Elite variable in democratic transitions and breakdowns », American Sociological Review, Vol. 54, N. 1 (Feb, 1989), pp. 17-32. PDF in http://www.jstor.org/stable/2095659. C'est nous qui traduisons.

* 28 O'DONNELL G., Op. Cit. C'est nous qui traduisons.

* 29 Terme et abréviation de Delegative Democracies (DD's) utilisé par O'DONNELL G. Op.cit.

* 30Les sept attributs d'une Polyarchy, d'après DAHL sont l'élection des officiels, des élections libres et équitables, un suffrage inclusif, le droit de se présenter aux élections, la liberté d'expression, l'existence d'une information alternative et l'autonomie associative. In O'DONNELL G., Illusions about consolidation, Journal of Democracy, Accessed by University of California, San Diego, 7.2 (1996) 34-51. PDF http://muse.jhu.edu/journals/journal_of_democracy/v007/7.2odonnell.html

* 31 C'est nous qui traduisons et reformulons la définition de Delegative Democracies (DD) donnée par O'DONNELL G., in Op.cit.

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