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L'innovation, la création végétale et la propriété industrielle : quelles évolutions possibles

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par Adam Borie Beclour
Université d'Auvergne - Master 2 Carrières internationales 2016
  

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Chapitre 2 : Les phénomènes d'enclosures et les buissons de brevets un obstacle à l'innovation.

Comme il a été vu, il existe des méthodes modernes permettant d'observer les caractères d'intérêts recherchés, de les décrire et de repérer les allèles associés avant d'introduire ces caractères par une série de rétrocroisements.

Or si ces caractères sont brevetés (par un sélectionneur ou une firme de l'agrochimie) il n'est plus possible pour le sélectionneur de créer la variété qu'il désire, ainsi il ne peut innover à moins d'avoir les moyens d'acheter un contrat de licence de brevet. C'est le cas de Gautier Semences qui fut contraint de payer des royalties à l'entreprise néerlandaise Rijk Zwann.

Cette dernière avait déposé un brevet revendiquant un caractère de résistance au puceron Nasanovia séparée du caractère de nanisme qui avait toujours été associé à la résistance au puceron. Or l'entreprise Gautier commercialisait déjà une laitue résistante sans le nanisme associé. Ainsi l'entreprise Gautier qui avait réalisé un long travail de recherche pour créer cette variété et la certifier au travers d'un COV, fut contrainte de payer à Rijk Zwann pour la commercialisation de cette laitue dans la mesure où Gautier ne détenant pas de brevets sur les caractères natif n'avait rien à échanger.

S'il est considéré que l'innovation végétale provient des entreprises de taille importante alors le brevetage des traits natifs n'est pas dangereux pour l'innovation. Dans la mesure où ces grandes entreprises ont les moyens de réaliser le travail de recherche et d'information sur les traits natifs pour savoir si les végétaux sur lesquels ils travaillent sont exempts de brevet sur les traits natifs (freedom to operate) et où elles ont également les moyens de s'échanger des brevets ou encore d'acheter des contrats de licence.

Pourtant si on considère que l'innovation végétale provient aussi des petits sélectionneurs qui choisissent prioritairement la stratégie du COV alors il ne faut pas permettre le brevetage des traits natifs car ceux-ci permettent des phénomènes d'enclosure et ralentissent le travail des sélectionneurs.

Ainsi le brevetage des gènes natif comme le note Fabien Girard : « ne laisse que très peu de place aux sélectionneurs traditionnels qui, ne faisant pas partie du jeu complexe de licences croisées qui lient entre eux les puissants opérateurs, ne sont pas en mesure d'accéder, par le moyen du contrat, à un certain nombre de technologies pourtant essentielles. »129(*)

Par ailleurs les phénomènes de buissons de brevet130(*) se caractérisent par une détention d'un ou plusieurs propriétaires sur plusieurs brevets portant sur des technologies additionnelles ou complémentaires131(*). Ainsi certains obtenteurs devront, en théorie, se frayer un chemin à travers un maquis de brevets. C'est-à-dire vérifier que les brevets sur lesquels ils vont travailler sont libres d'exploitation (freedom to operate). Il est donc exact que les buissons de brevet peuvent représenter un obstacle pour l'innovation.

Par ailleurs selon Fabien Girard les buissons de brevets :

«Tendent à compliquer le processus d'innovation, surtout pour les PME qui doivent se doter d'une capacité à identifier ces brevets potentiellement bloquants, d'une stratégie pour les contourner, et qui se trouvent dans une position difficile lorsque leurs travaux se révèlent dépendants de brevets délivrés. »132(*)

Il semblerait néanmoins, en Europe qu'on observe un mouvement politique visant à interdire le brevetage de ces caractères natifs obtenus par des procédés essentiellement biologiques.

Aussi il convient d'observer la loi biodiversité en France en ce qu'elle vise à interdire cette pratique133(*).

Cela peut laisser penser qu'en interdisant les brevetages des gènes natifs tout comme l'ont fait l'Allemagne et les Pays Bas, les brevets européen sur des gènes natifs ne seront pas acceptés.

Ainsi la situation apparaît controversée dans la mesure où l'octroi d'un brevet européen sur un caractère natif par l'OEB ne sera pas reconnu par ces trois pays, il est dorénavant délicat de se prononcer sur l'avenir de tels brevets.

Par ailleurs il est intéressant d'observer que le brocoli en question dans l'affaire affaire G2/13 a été breveté car il contient un agent anti cancer (des taux élevés de glucosinolates), il est intéressant d'observer que les arguments liés aux enjeux écologique et environnementaux n'ont pas leur place ici. Tout comme la recherche pharmaceutique tend à se concentrer sur la demande des pays développés (lutte contre l'obésité, le diabète, la malnutrition), la recherche sur les végétaux tend à réaliser du profit, par le biais du brevet, sur une demande qui demeure occidentale. C'est le cas de ce brocoli qui sera vendu trois fois le prix d'un brocoli normal parce qu'il comporte un agent anti cancer.

Ainsi si les biotechnologies nécessitent des investissements importants dans le but de lutter contre la faim dans le monde (1er génération de recherche basé sur la résistance des plantes à leurs ennemis naturels mauvaise herbes et ravageurs), d'anticiper le réchauffement climatique (2 eme génération basé sur la résistance au stress abiotique, chaleur froid salinité), le marché n'organise pas correctement ces recherches. La PI agit ici comme un stimulant de la recherche mais n'est pas nécessairement orientée selon les arguments de la PI basé sur le progrès. En effet différentes visions coexistent et dépendent du positionnement de chacun vis-à-vis du progrès.

* 129 Fabien Girard et Christine Noiville, Revue des contrats - 01/04/2013 - n° 2 - Contrat de licence de brevet et accès à la diversité génétique végétale?: le diable ne dort jamais. Page 719

* 130 Pour plus d'informations sur les buissons de brevets ou patent thickets voir : Report Workshop on Patent Thickets initiated by the EPO Economic and Scientific Advisory Board 26 September 2012, Leuven. Ou encore Marino Laure Les patent thickets : du bouillon de l'innovation à la poudrière, revue lamy, rldi, droit de l'immatériel.

* 131 «A patent thicket generally has several characteristics (von Graevenitz, Wagner, & Harhoff, 2011). It usually involves (1) multiple patents or patent applications on (2) the same, similar, or complementary technologies, (3) held by different parties. Voir Page 8.

* 132 Fabien Girard et Christine Noiville, Revue des contrats - 01/04/2013 - n° 2 - Contrat de licence de brevet et accès à la diversité génétique végétale?: le diable ne dort jamais page 719

* 133 Au titre de l'article 9 de la Loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, un alinéa 3bis à l'article L 611-19 est inséré :

- Ne sont pas brevetables :

3° Les procédés essentiellement biologiques pour l'obtention des végétaux et des animaux ; sont considérés comme tels les procédés qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection ;

3° bis Les produits exclusivement obtenus par des procédés essentiellement biologiques définis au 3°, y compris les éléments qui constituent ces produits et les informations génétiques qu'ils contiennent ;

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo