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La chefferie traditionnelle Bene a l'ère de la libéralisation politique au Cameroun et de ses ressorts: le cas de l'arrondissement de Nkol-Metet

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par Sylvain Charles AMOUGOU MVENG
Université Yaoundé II SOA - DEA Sciences politiques 2009
  

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Dans le cadre de ce paragraphe, nous analyserons d'abord la coutume comme cadre de dévolution du pouvoir chez les Bene ; avant d'en examiner l'exercice du pouvoir traditionnelle dans cette aire culturelle.

A- La coutume comme cadre de dévolution du pouvoir traditionnel

La coutume est la norme qui est en premier mobilisée pour désigner le détenteur du pouvoir traditionnel chez les Bene. En d'autres termes, la dévolution du pouvoir chez les Bene est basée sur deux instances : la Coutume comme corpus des normes non écrites et le charisme des individus.

1- La coutume, première instance de dévolution du pouvoir chez les Bene

Chez les Bene, les règles coutumières constituent le substrat juridique qui régit les individus dans cet espace culturel. En d'autres termes, dans cette communauté, l'autorité est d'abord celle de l'Eternel d'hier, c'est-à-dire, celle des coutumes sanctifiées par leur validité immémoriale et par l'habitude enracinée en l'homme de les respecter. De cette coutume, il appert que les aînés sont foncièrement les bénéficiaires du pouvoir traditionnel. Un adage Béti le renchérit si bien en ces termes :« ntôl mon meyian m'esia » ; en d'autres termes, cela signifie que le fils aîné est considéré comme le dauphin de son père.

Au demeurant, il en est plus de doute que chez les Bene comme dans l'ensemble du complexe Béti, que le pouvoir soit ancré autour du droit d'aînesse38(*), le Ntol ou le Nyamoro (l'aîné) est la clé de voûte en vertu du principe de la sagesse qui, chez les Béti, dépend d'un âge suffisamment avancé. Cependant, la prééminence de l'aîné dépend de celle du lignage aîné. L'aîné, pour gouverner, a besoin de la reconnaissance de son équité, ou son efficacité par les membres de son groupe ; en d'autres termes, tous ses pouvoirs lui sont reconnus de façon consensuelle,39(*) afin qu'il puisse exercer. A contrario, ce ne serait pas possible.

Ainsi dit, les logiques gérontocratiques sont enracinées dans les usages Bene .On fait davantage confiance aux plus anciens, qui sont de ce fait très écoutés. Mais comme Kpwang le fait remarquer, l'aîné n'a pas toujours permis l'implantation des Chefferies efficaces (voir Kpwang 2007 : 77).

Au-delà de la force coutumière comme dévolution du pouvoir chez les Bene, la dévolution du pouvoir peut emprunter un autre canon qui est celui du charisme.

2- Le charisme, deuxième instance de la dévolution du pouvoir chez les Bene

Le charisme est considéré comme l'une des qualités exceptionnelles, grâce auxquelles un individu exerce une influence sur les autres individus. Selon Weber,40(*) le charisme peut ressortir de trois ordres : le premier étant personnel. Exemple : un Chef de guerre, un Chef politique ou une virtuose religieuse (prophète ou magicien). En second lieu, le charisme héréditaire, qui tient au prestige de la lignée (cas des monarchies héréditaires). Enfin le charisme de fonction41(*), qui ne découle pas des mérites personnels de l'individu mais de sa place dans une institution. Par exemple, le Chef au sein d'une Chefferie dispose d'un charisme de fonction, alors que le Chef d'un réseau épistémique dispose d'un charisme personnel. Toutes choses étant égales par ailleurs, chez les Bene ces trois types de charismes peuvent se manifester cumulativement chez un individu. Cependant dans cette aire culturelle, le charisme du Chef se résume dans sa bravoure, son éloquence, son habileté, son partage des richesses... (Voir Ongodo, 2005 : 31; Laburthe-Tolra, 1981 : 358-359). Mais pour mieux lire toutes ses valeurs, nous les avons regroupées dans deux registres, l'Ayog (courage) et l'Akab (générosité).

2-1- L'Ayog (courage)

Dans ce premier registre, nous analyserons les éléments qui forgent le pouvoir du Chef. Nous avons en premier lieu, le don de la parole et l'éloquence,42(*) et ensuite la condition physique, qui sont les éléments importants pour s'imposer chez les Bene /Béti.

S'agissant de l'art oratoire, il constitue un véritable atout pour posséder son auditoire. C'est par cette qualité que chez le béti le Chef est souvent qualifié de Ndzoé ou Ndjobôt, « c'est-à-dire, celui qui parle au nom du groupe » tout entier. Son éloquence, et/ou son maniement de la langue doit faire montre de sa connaissance des proverbes béti notoirement, si possible. Et le Conseil des anciens d'appuyer péremptoirement.

En dehors du maniement de la langue, le physique du leader était parfois un atout pour s'imposer, ou digne d'admiration.

Autrefois, la condition physique était aussi nécessaire pour s'imposer comme Chef. Laburthe-Tolra (1981 : 359) décrit bien le rôle du physique dans la gouverne du peuple en ces termes : « la tradition Béti est nette sur les traits de caractère qui vont permettre à un individu de s'imposer comme Chef. Le premier, qui n'est pas suffisant, mais qui est commun sans être obligatoire, est sa force physique, nécessaire d'ailleurs à tout garçon pour être vrai homme ».

Selon la cosmogonie Bene, Nnë Bodo, qui est considéré comme l'ancêtre des Bene, semblait jouir d'une condition physique impressionnante lui ayant permis de protéger les siens et surtout ayant permis aux siens de traverser le fleuve Sanaga43(*) sur le dos d'un serpent dénommé Ngamedza'a. Selon Laburthe-Tolra, Nnë Bodo était nanti d'une double supériorité. Il affirme à cet effet que : « Sa supériorité magique allait de pair avec sa supériorité physique et son courage » (Laburthe-Tolra, 1981 :106).

Il ressort de ces deux éléments qui fondent l'Ayog (le courage) du Chef que ces derniers rentrent dans le registre du charisme personnel. Cependant, l'Akab (la générosité)  du Chef, doit aussi être lu à travers son charisme de fonction, et ce charisme de fonction mérite que l'on s'y attarde.

* 38 A Nkol-Metet à la Chefferie de Groupement Bene Sud Est la légitimité de son Chef Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé est souvent contestée car pour ses détracteurs il est issu d'une ethnie démographiquement minoritaire(les Mvog Essissima). Sa Majesté pour faire face à cette contestation à l'habitude d'affirmer : «  la loi du nombre est une loi démocratique, alors que, lorsqu'on parle de Chefferie traditionnelle, on est tout simplement dans le champ de la tradition. Or chez les Béti en général, c'est l'aîné qui est bénéficiaire du pouvoir traditionnel. De toute évidence, Essissima Nkoa était l'aîné des fils de MbarTsogo (Zambo Melunu, Mbarga Ba'ana, Zambo Ba'ana....). Il était donc nécessaire de rétablir avec la Chefferie de Groupement l'ordre naturel des choses (Source entretien du 11/02/2012 à Mbalmayo avec Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé).

* 39On assimile l'aspect consensuel de l'autorité du leader à un mirage démocratique.

* 40 (Alpe, Beitone, Dollo, Lambert, Parayre, 2005:26).

* 41 Le charisme de fonction ici peut être synonyme à la notion du capital symbolique, au sens de Bourdieu, qui est l'ensemble des signes distinctifs et des symboles du pouvoir acquis, ou hérité par un agent. Ce peut être la respectabilité, l'honorabilité...

* 42 Chez les Bene MVOG AMOUGOU de Metet Centre, la qualité qu'ils appréciaient beaucoup chez leur Chef, Sa Majesté MBALA MESSI (décédé en février 2012), c'était son don oratoire et sa grande maîtrise des proverbes béti. Propos recueillis lors d'un focus groupe à Metet Centre, le 30 Août 2012.

* 43Nnë bodo aurait permis la traversée des groupes ethniques tels que les Yemesum, Mvog Ebo'o, Oyek, Angok, Yemedu, Yanda, Osa Angon Woa, Obege, Oka'a, Fong, Elende, Ewondo, Ngui, Yembama, Yenke (Laburthe-Tolra, 1981 :54).Ainsi dit, lesBene par l'entremise de leur ancêtre seraient un peuple guide ayant permis à l'ensemble du groupe ethnique Béti, de traverser la Sanaga.

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