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La sécurité juridique en droit administratif sénégalais

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par Abdou Ka
Université Gaston berger de saint Louis - DEA droit public 2015
  

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Chapitre II : Une exigence de sécurité juridique en constante progression

L'exigence de sécurité juridique connaît une avancée notoire dans le contexte sénégalais (Sect. 1). Toutefois, elle doit être nécessairement encadrée dans son évolution (Sect. 2).

Section 1 : L'avancée notoire de l'exigence de sécurité juridique

L'exigence de sécurité juridique est fréquemment invoquée par les justiciables dans le cadre du procès administratif (Par. 1). Aussi, la notion de sécurité juridique présente des vertus tentaculaires (Par. 2).

Paragraphe 1 : Une exigence de sécurité juridique fréquemment invoquée

L'exigence de sécurité juridique est fréquemment invoquée par les justiciables. Du contentieux administratif au contentieux constitutionnel, la sécurité juridique constitue aujourd'hui un argument juridique déployé à suffisance par les requérants. Les recours fondés sur la violation de l'exigence de sécurité juridique se multiplient. Le moyen tiré de la violation de la sécurité juridique est brandi aujourd'hui sur presque tous les fronts jurisprudentiels. La sécurité juridique devient une arme au service du justiciable qu'il pourra dégainer à volonté contre la puissance publique. En effet, dans un contexte caractérisé par un individualisme marqué, la garantie des droits individuels devient un enjeu crucial. Ainsi, la sécurité juridique en ce qu'elle implique des droits subjectifs est devenue incontournable sur le terrain du contentieux. Aussi, du fait du renouvellement de l'office du juge aussi bien administratif que constitutionnel, l'idée de sécurité juridique présente davantage d'intérêts au plan contentieux.

L'époque contemporaine correspond au triomphe de l'idéologie libérale. Les libertés individuelles sont aujourd'hui sacralisées au point que toute forme d'empiètement de la puissance publique sur celles-ci soulève des récriminations de tous bords. Comme expression de cette volonté de protéger plus efficacement les droits subjectifs, la sécurité juridique est en passe de devenir un argument juridique récurrent sur le plan du contentieux. La sécurité juridique devient ainsi le leitmotiv du discours juridique sur les droits individuels. Pour F. MELLERAY, il faut voir dans « cette demande de sécurité juridique le triomphe d'une conception libérale et individualiste de l'intervention publique »153(*).

Dans cette logique, la sécurité juridique est invoquée par les justiciables même dans des cas où le caractère opérant du moyen tiré de sa violation ne paraît pas très évident. Malgré la réticence des juges administratif et constitutionnel à consacrer pleinement la sécurité juridique en droit positif, les justiciables ne découragent pas et continuer à brandir l'argument tiré de la méconnaissance de l'exigence de sécurité juridique. En effet, dans un contexte marqué par une insécurité juridique devenue inquiétante, ils ont trouvé dans l'exigence de sécurité juridique un outil juridique efficace pour la protection de leurs droits les plus fondamentaux. Comme remède contre la crise que traverse le droit contemporain, la sécurité juridique est vue du côté du citoyen comme un principe libérateur. L'exigence de sécurité juridique permet de préserver le citoyen des effets pervers du droit. Pour KAMEL FENNICHE, « la sécuritéjuridique est un principe du droit qui a pour objectif de protéger les citoyens contre les effets secondaires néfastes du droit, en particulier des incohérences, ou la complexité des lois et règlements, ou leur changement trop fréquent »154(*). C'est pourquoi, le requérant se montre souvent très prompt à invoquer la violation de l'exigence de sécurité juridique dans le cas où une décision émanant d'une autorité publique s'avère lui être défavorable. De même, les opérateurs économiques s'investissent désormais sur beaucoup de fronts jurisprudentiels afin de garantir la sécurité juridique de leurs activités commerciales. Ainsi, le principe de sécurité juridique pourra surement constituer un argument fort au service des entreprises contre la rétroactivité économique, c'est-à-dire l'hypothèse où un changement du dispositif juridique modifie, de manière substantielle, le bilan prévisionnel d'un investissement en cours d'exécution même lorsqu'il n'y a pas de rétroactivité au sens juridique.

Avec la mutation actuelle que connaît l'office du juge qu'il soit administratif ou constitutionnel, l'exigence de sécurité juridique devient incontournable. Cette mutation de l'office du juge va dans le sens d'une meilleure prise en compte des intérêts des parties au litige. Très abstraits au départ, les contrôles exercés par le juge administratif et par le juge constitutionnel deviennent beaucoup plus imprégnés des faits.

Le contentieux administratif, un contentieux essentiellement objectif, devient beaucoup plus ouvert à la condition du requérant tant dans ses droits subjectifs que dans sa situation personnelle. Il y a un véritable renouvellement de la perception de l'administré en tant que partie au procès administratif qui s'amorce. RENE CHAPUS disait que « même si lerequérant n'en a pas conscience, il agit dans l'intérêt public pour le compte de la légalité afin de permettre au juge d'assurer le rétablissement de la légalité méconnue »155(*). La donne a changé. Désormais, il s'impose de considérer que le justiciable agit d'abord dans son propre intérêt. Ainsi, l'exigence de sécurité juridique a soulevé beaucoup d'engouement de la part des administrés soucieux de la protection de leurs intérêts par le juge dans le cadre du procès administratif. En réaction à ces sollicitations, le juge a même, dans certaines espèces, sacrifié la légalité à l'autel des droits subjectifs. Aussi, il s'est montré très sensible aux conséquences de ses décisions sur les droits des administrés. Conscient des effets de ses décisions sur la sécurité juridique des justiciables, le juge administratif français a mis en oeuvre un ensemble de techniques tendant à conforter ceux-ci dans leurs droits. C'est dans cette perspective que s'inscrit la technique de modulation des effets d'une décision contentieuse.

Du côté du juge constitutionnel, l'objectivité du contrôle des lois est très bien ancrée, mais il reste qu'avec les récentes avancées notées en la matière, il est permis d'espérer une meilleure prise en considération des intérêts des requérants. En France, avec la réforme constitutionnelle de 2008, la question prioritaire de constitutionnalité a été instituée sous la forme d'un contrôle a posteriori. Le juge constitutionnel pourra désormais abroger une loi promulguée s'il établit qu'elle viole les droits et libertés garantis par la constitution. Il est mis en place un système de filtre. Cette réforme a permis de rendre beaucoup plus concret le contrôle de constitutionnalité. Tout citoyen lésé dans ses droits, dans le cadre d'un litige où il est parti, par une loi pourra désormais en excepter l'inconstitutionnalité et, sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de Cassation selon la nature du litige, le Conseil Constitutionnel statuera sur la constitutionnalité de la loi en cause.

Ainsi, cette nouvelle modalité du contrôle de constitutionnalité des lois a constitué un canal privilégié de réception de la sécurité juridique en droit positif français156(*). La question prioritaire de constitutionnalité a servi de prétexte aux citoyens qui ne ratent jamais l'occasion d'inclure dans leurs requêtes le moyen tiré de la violation de la sécurité juridique. Acculé par les justiciables, le juge constitutionnel a fait évolué sa jurisprudence sur beaucoup de points afin de mieux garantir la sécurité juridique des citoyens. C'est dans cette logique que s'inscrit sa jurisprudence relative à la modulation des effets de ses décisions contentieuses.

A la lumière de tout ce qui précède, il est possible de s'accorder avec A. CRISTAU et d'affirmer, à propos de la sécurité juridique, que « la notion est dans l'air du temps »157(*). Elle est invoquée à tort et à travers par les justiciables. Certes, cet engouement à propos de l'exigence de sécurité juridique se justifie largement au regard de sa fonction dans le système juridique, mais il reste que le recours abusif à cette notion peut s'avérer dangereux. En effet, « intimement liée à la définition du droit, le principe de sécurité juridique a perdu en signification et en normativité, en raison d'une utilisation quelque peu abusive »158(*).

La sécurité juridique est désormais au coeur du contentieux administratif. Les justiciables recourent usuellement à l'exigence de sécurité juridique comme argument dans le cadre du procès administratif. En cela elle revêt un intérêt particulier dans le contentieux administratif. L'intérêt que suscite la sécurité juridique s'explique aussi par le fait qu'elle est une notion tentaculaire.

* 153 F. MELLERAY, « La revanche d'Emmanuel Levy ? L'introduction du principe de protection de la confiance légitime en droit public français », Revue Droit et Société 2004 p.143, op. cit

* 154 K. FENNICHE, « La jurisprudence du Conseil d'Etat et le concept de sécurité juridique », Actes du Colloque d'Alger, 4 convention des juristes de la Méditerranéen, p.30

* 155 R. CHAPUS, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 13ème édition, 2008

* 156 A. BORZEIX, « La QPC : quelle confiance légitime ; quelle sécurité juridique ? »,RDP 2010, n°4, p.983

* 157 A. CRISTAU, « L'exigence de sécurité juridique », Dalloz 2002, p.2814

* 158 E. BORDES, « Radioscopie jurisprudentielle du principe de sécurité juridique : analyses de évolutions possibles à la lumière de la QPC », VIIIème Congrès national de l'AFDC, Nancy, 16 17 18 Juin 2011

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault