b. Les Antécédents des TM de Nuremberg et
de Tokyo
S'il n'a trouvé aucune application, l'article 227 du
Traité de Versailles constitue cependant une source féconde pour
d'intenses travaux de réflexion (...)44. La deuxième
Guerre Mondiale avait fait l'occasion des multiples violations humanitaires
dont les auteurs ne sauraient rester impunis.
Au cours de cette guerre, et en particulier avec les
déclarations de Moscou de 1943 et de Potsdam de 1945, les Alliées
(la France, le Royaume-Uni, les Etats-Unis et l'Union Soviétique)
avaient affirmé que les criminels de guerre des puissances de l'Axe
seraient punis de manière exemplaire à la fin du
conflit45.
Avec l'Accord de Londres du 8 aout 194546, les
Alliés formalisèrent la décision d'instituer un Tribunal
militaire, siégeant en Allemagne (Nuremberg), qui aurait comme tache de
juger les plus grands criminels de guerre Nazis. C'est ainsi qu'il a
été institué le Tribunal
42W. Bourdon et E. Duverger, Op. cit., p.
14.
43 Ibidem.
44 J.P. BAZELAIRE et T. CRETIN, La justice
pénale internationale, Paris, PUF, 2000, p. 16.
45S. ZAPPALA, La justice internationale,
Paris, Ed. Montchrestien, 2007, p. 55.
46Accord de Londres du 08/08/1945. Dans Telford
TAYLOR, Les procès de Nuremberg : Crimes de guerre et droit
international, Paris, Bulletin de conciliation international N0
450, Avril 1949, pp. 335-349.
- 13 -
militaire international (TMI) de Nuremberg en exécution
de l'Accord de Londres47. Un autre Tribunal militaire international,
plus connu sous la dénomination, de Tribunal de Tokyo, fut
constitué pour connaître des crimes commis en
Extrême-Orient. C'est un Décret, pris par le Général
Mac Arthur (Commandant suprême des Puissances Alliées en
Extrême-Orient) en date du 19 janvier 1946 et conformément
à la Conférence de Potsdam, qui avait institué le Tribunal
de Tokyo48.
A cet effet, la guerre d'agression est, pour la
première fois, qualifiée de crime « contre la paix » et
sanctionnée pénalement ; elle constitue, selon le Statut du
T.M.I. de Nuremberg, une infraction internationale à part
entière, et un fondement d'une responsabilité pénale
individuelle49.
L'Accord établissait la compétence
matérielle du tribunal en lui conférant pour mission de juger les
crimes contre la paix, les crimes de guerre et les crimes contre
l'humanité. Se référant au paragraphe a de l'article 6 du
statut du tribunal militaire International, « il est soumis à la
juridiction du tribunal militaire international les crimes contre la paix :
c'est-à-dire la direction, la préparation, le
déclanchement ou la poursuite d'une guerre d'agression, ou d'une guerre
en violation des traités, assurances ou accords internationaux, ou la
participation à un plan concerté ou à un complot pour
l'accomplissement de l'un quelconque des actes qui
précèdent50 ».
Au sens de cet article, le crime contre la paix était
envisagé de trois façons distinctes : - La direction, la
préparation, le déclenchement ou la poursuite d'une guerre
d'agression ;
- La guerre en violation des traités, assurances ou
accords internationaux ;
- La participation à un plan concerté ou
à un complot pour l'accomplissement de l'un quelconque des cas
susvisés51.
Ayant tracé la voie de la responsabilité
pénale des chefs en tant que tels, l'Accord de Londres précisait
que les dirigeants, les organisateurs, les provocateurs ou les complices qui
auraient pris part à l'élaboration ou à l'exécution
d'un plan concerté ou d'un complot pour
47 Article 1 du Statut du Tribunal militaire international,
annexé à l'Accord de Londres du 08/08/1945. Dans Telford
TAYLOR, Op. cit., pp. 335-349.
48 L. CONDORELLI, cité par V. M.METANGMO,
Op. cit., p. 52.
49 H. ASCENSIO, E. DECAUX et A. PELLET, Op. cit.,
p. 251.
50 Article 6.a du Statut du Tribunal militaire
international. Dans Telford TAYLOR, Op. cit., p. 339.
51 J.P. BAZELAIRE et T. CRETIN, Op. cit.,p.
21.
- 14 -
commettre l'un quelconque des crimes ainsi
définis52 sont responsables de tous les actes accomplis par
toute personne en exécution de ce plan53.
L'article 7 insistait et excluait formellement que le fait
d'avoir été chef d'Etat ou d'avoir assumé des
responsabilités au niveau gouvernemental puisse être une excuse ou
une source d'atténuation des sanctions. Enfin, l'article 8 dispose que
le fait d'avoir agi conformément aux instructions de son gouvernement ou
d'un supérieur hiérarchique ne dégagera pas l'auteur de sa
responsabilité, mais pourra être considéré comme un
motif de diminution de la peine, si le Tribunal décide que la justice
l'exige.
Sur le modèle du Statut du TMI de Nuremberg, le crime
contre la paix se décomposait en quatre phases distinctes qui
correspondaient à quatre incriminations autonomes. La participation
à elle seule suffisait pour engager la responsabilité
pénale de l'individu.
Deux critères prévalaient à la
détermination des auteurs de l'acte d'agression :
· le fait matériel de participer à un acte
d'agression, et
· le fait que cette participation ait été
intentionnelle et exécutée en connaissance de cause, dans le
cadre d'un plan ou politique d'agression54.
La définition du crime contre la paix ci-haut
donnée se rapportait à l'agression commise par des individus et
s'inscrivait dans une perspective du droit pénal international dont les
textes constitutifs de TMI furent les premières pierres importantes.
L'accord de Londres aura alors été un acquis
dans les suivants travaux sur la définition de l'agression qu'on
considérera d'une part comme crime de l'Etat dans la Résolution
3314(XXIX) et d'autre part comme crime de l'individu dans le Statut de Rome
révisé.
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