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La paradiplomatie dans les relations internationales contemporaines. Contraintes et opportunités.


par Jackson CABENE GANZA
Université de Lubumbashi - Licence en relations internationales 2013
  

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§3. La paradiplomatie risque de conflit

Le développement de la paradiplomatie est également une lutte de pouvoir entre les mouvements nationalistes sub-étatiques et les acteurs du centre. De plus, un autre trait significatif du nationalise est la définition des besoins ou des intérêts de la nation lorsque les régions opèrent en relations internationales, elles sont obligées de se définir un intérêt national, lequel peut entrer en contradiction avec celui de l'Etat central au Canada par exemple ; l'appui unanime des partis politiques québécois à L'ALENA a facilité sa ratification et déclenché des nombreuses tensions avec le reste du pays.

72 François Massart-PIENARD cité par Stéphane Paquin, op cit, p 128.

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L'attitude des gouvernements centraux à l'égard de l'intrusion des

mouvements nationalistes sub-étatiques dans leur chasse gardée, la politique
étrangère et la représentation du pays à l'étranger est au départ, essentiellement négative. Les gouvernements centraux voient dans la perte du monopole un grand danger pour l'unité national et pour l'image du pays.

Rappelons également que les acteurs du centre sont nationalistes. L'attitude hostile des gouvernements centraux donne l'occasion aux entrepreneurs identitaires de mettre en oeuvre une mobilisation sociale contre la prétention hégémonique du centre. Puisque la politique étrangère est perçue comme un domaine réservé de l'Etat, le développement de la paradiplomatie devient, dans ce contexte, une lutte de pouvoir et de légitimité.73

Pour autant, le développement d'une paradiplomatie identitaire n'engendre cependant pas obligatoirement une escalade des conflits. Les catalans par exemple ont réussi à consolider leurs relations internationales tout en favorisant une normalisation des rapports avec le gouvernement espagnol. L'étude détaillée du cas catalan permet de constater que, d'une relation très conflictuelle dans les années 1980, les relations se sont aujourd'hui normalisées. On ne constate en effet plus de litiges devant les tribunaux et contrairement aux premières années, très peu de positions internationales divergentes et davantage des tentatives sérieuses pour baliser les actions internationales du gouvernement catalan.74 Avant la normalisation, quatre enjeux étaient particulièrement conflictuels, la réception de chef d'Etats étrangers par l'ancien président Jordi Pujol, Louverture de représentation de la catalogne à l'étranger, la participation du gouvernement catalan à des conférences et à des organisations internationales ou régionales et finalement la conclusion d'ententes ou d'accords internationaux. Sur tous ces enjeux on note une baisse structurelle des conflits, même s'il peut y avoir périodiquement des tensions.

Il est cependant plus difficile de déterminer à quand remonte cette normalisation. Il s'agit d'un processus évolutif. Il y a bien sûr des négociations officielles et officieuses sur les rapports entre Madrid et Barcelone. Notons cependant que les décisions du tribunal constitutionnel, en clarifiant les rôles des acteurs ont facilité le processus de normalisation et de routinisation. le tribunal constitutionnel a en

73 André Lecours et luis Moreno, cité par Stéphane dans paradiplomatie identitaire, le Québec, la Catalogne et la Flandre en relations internationales, politiques et societes, vol, 23, n°2-3, 2004, p226.

74 Cateria Gracia, i séjour cité par Stéphane Paquin, idem.

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effet rendu à la fin des années 1980 et au début des années 1990, des jugements de très grande importance dans ce processus de normalisation des rapports entre Madrid et Barcelone en accordant un rôle en relations internationales aux communautés autonomes.75

Pour ce qui est du Québec, depuis le référendum de 1995, le gouvernement Canadien s'est même lancée dans une offensive agressive afin de limiter l'accès du Québec aux décideurs internationaux, les conflits avec le gouvernement canadien sont en effet trop important même s'il n'y a peu des litiges devant les tribunaux (aucun des deux ordres de gouvernement n'ayant l'assurance de gagner), les gouvernements du Québec et du Canada ont à l'occasion des positions internationales divergentes. Le gouvernement du Québec a soutenu, par exemple, lors du forum économique mondial en 2002, que le Dollar canadien était en sursis, minant du coup la politique internationale du gouvernement canadien qui cherchait à dynamiser sa monnaie alors en chute libre.76

Mis à part les accords sur l'immigration avec le Québec, la participation des provinces dans les processus de prise de décisions en politique étrangère au Canada est davantage ponctuelle que permanente et stable. Il faut ainsi négocier à chaque fois le rôle de la place de chacun, ce qui est souvent source de conflit.

Les politiciens du gouvernement canadien ont toujours adopté sous les libéraux fédéraux, une attitude hostile à l'égard de la progression des relations internationales du gouvernement du Québec, sans égard pour le parti au pouvoir. On suppose à Ottawa que toute action internationale du Québec favorisera inévitablement les déchirements nationaux et les revendications autonomistes. Les conflits politiques ne se transposent pas toujours sur le plan administratif sauf s'il s'agit des questions culturelles. Dans l'ensemble, le développement d'une paradiplomatie identitaire par le gouvernement du Québec alimente les déchirements nationaux et peut difficilement être considéré comme une multiplication de puissance pour la politique étrangère canadienne.77

Le gouvernement canadien tente toujours de baliser les relations internationales du Québec. Historiquement la réponse des autorités gouvernementales du Québec varie, elle se veut un mélange d'accommodation et d'intransigeance en

75 Stéphane Paquin, op cit, p 226.

76 Stéphane Paquin, op cit, p 230.

77 Stéphane Paquin, op cit, p 92.

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fonction de "qui" se trouve au pouvoir dans les deux capitales ainsi que des sujets de discorde.78 Pour ce qui est du commerce et d'investissement, les relations entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux au canada sont généralement bonnes. De plus comme le soutient GRAHAM FRASER dans la préface du livre de LUC Bernier sur «la politique internationale du Québec», souvent dans les postes moins sensibles que Paris, les relations entre les délégations du Québec et l'Ambassade du Canada sont caractérisées par l'amitié et la coopération.79

Dans son énoncé intitulé «le Canada dans le monde» de 1995, le gouvernement canadien mettait à l'avant trois objectifs de sa politique étrangère. Le premier objectif concernait la promotion de la prospérité et de l'emploi, le deuxième ; la protection de la sécurité canadienne dans un monde stable et le troisième ; la protection des valeurs et de la culture canadienne dans le monde. Le gouvernement du Québec, se veut solidaire des deux premiers objectifs. En ce qui concerne le troisième, cependant, le différend est total. La politique du gouvernement canadien parle de promotion de la culture canadienne et non pas des cultures au canada (...)

Les relations Québec-Ottawa se dégradent sérieusement lorsqu'on aborde les sujets très sensibles tels que les rapports politiques avec des pays souverains comme la France ou la participation du Québec à des organisations multilatérales comme la francophonie. En effet, sur ces questions, une lutte s'instituera entre le gouvernement fédéral, qui cherche à préserver ses présumés prérogatives internationales en combattant activement les actions internationales du gouvernement du Québec qui échapperaient particulièrement au contrôle du canada.80

Le tableau n'est pas toute à fait noir. Les deux ordres de gouvernement collaborent à l'occasion. Les gouvernements canadiens et québécois concluent par exemple des accords administratifs en matière d'immigration, ils mettent régulièrement sur pied des missions internationales conjointes dans les voyages économiques.

En Belgique, on ne note pas de conflits devant les tribunaux, et les entités sub-étatiques belges jouissent aujourd'hui de plus d'autonomie que toutes les autres entités sub-étatiques en ce qui concerne la paradiplomatie. Il arrive cependant que la Belgique et la Flandre, prennent des positions internationales divergentes. L'Etat fédéral belge, n'est plus le seul acteur capable de s'engager contractuellement avec les

78 Idem.

79 Ibidem.

80 Louis Belanger cité par Stéphane Paquin, op cit, p 231.

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acteurs internationaux, il ne détient plus le monopole de la représentation internationale, il ne peut même pas désavouer une politique ou la signature d'un traité par les acteurs sub-étatiques dans leurs champs de compétences. Pour autant, la responsabilité internationale incombe à l'Etat belge.

Le nouveau système belge, qui se veut une réponse aux conflits antérieurs, peut également s'avérer une nouvelle source de tensions. Eric Philippart affirme que : «le système est devenu plus lourd à manoeuvre car il suppose de multiples mobilisations verticales et horizontales, il est aussi diffus, privé de leadership et de centre de gravité.81 Sur les questions européennes par exemple, il y a obligation de consensus, ce qui signifie que les communautés et les régions belges ont un droit de veto sur une bonne partie de la politique européenne de l'Etat belge. La loi oblige, en effet, les différents gouvernements à s'informer mutuellement des affaires étrangers à s'accorder sur la politique à suivre où à conclure des accords de coopération. De cette manière, croit-on, la cohérence de la politique étrangère n'est pas mise en péril ?

Dans la pratique, on constate également que peu de problèmes apparaissent en la matière et qu'il existe une concertation permanente entre les Etats fédérés et le niveau fédéral et entre les Etats fédérés eux-mêmes.82 Il y a bien eu des conflits concernant des questions d'environnement ou d'énergie, il est également arrivé que l'Etat fédéral contracte un accord sans en avoir les pleins pouvoirs, mais, à chaque fois, les problèmes ont été résolus soit par les instances politiques, soit par des collaborateurs des ministres. Dans un cas, il a même fallu un avis du conseil d'Etat, que les parties en cause ont ensuite respecté.

En Belgique, les conflits entre le gouvernement fédéral et les entités fédérés demeurent également limités du fait que les coalitions gouvernementales ont tendance à s'en tenir de façon simultané aux plans national et fédéral, une sorte de connivence s'installe, par exemple, entre élus flamands de deux ordres de

gouvernement pour favoriser un maximum d'autonomie pour les actions
internationales de la Flandre mais au-delà de tout ce qui vient d'être développé, le roi ou le gouvernement fédéral conduit toujours les relations extérieurs et conservent les prérogatives en matière de défense et de représentation diplomatique proprement dite.

81 Eric Phillipart cité par Stéphane Paquin, op cit, p 235.

82 Bart karremano cité par Stéphane Paquin, op cit, p 234 et suivantes.

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La politique étrangère belge subit également les effets de la crise politique entre les communautés, conflit qui ne s'est pas apaisé depuis plus de quarante ans. Les flamands, par exemple ne souhaitent pas que la Belgique s'engage dans les actions en Afrique centrale qui sont surtout justifier par le maintien d'une influence francophone. Parfois, la Belgique et la Flandre prennent des positions internationales, divergentes, la condamnation par exemple de la position belge par la Flandre vis-à-vis du boycotte de l'Autriche après les élections législatives du 3 octobre 1999 qui ont propulsé à l'avant-scène le parti libéral (FPÖ) de Jorg Haider.

Enfin, le cas du Québec, de la Flandre et de la Catalogne sont riches d'enseignement en ce qui concerne le phénomène "paradiplomatie" d'où les conflits ne sont pas inévitables. Pour prévenir ces conflits, les gouvernements sont tenus de s'informer mutuellement de leurs politiques étrangères. Ils doivent s'entendre sur la politique à suivre au sein du comité interministériel pour la politique étrangère ou pour conclure les accords de coopération.

Les entités sub-étatiques n'ont pas que des contraintes, elles disposent également diverses opportunités qui leurs permettent d'effectuer une extension de leurs activités sur le contexte international.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus