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L'organisation internationale de la francophonie et la démocratie en Afrique noire francophone.


par Abdou-Ramane MAMA
Université d'Abomey-Calavi (UAC) - Master 2 Droit international et organisations internationales 0000
  

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Paragraphe 2 : Un renforcement avéré des institutions judiciaires

«Les institutions sécuritaires et judiciaires peuvent provoquer des crises violentes lorsqu'elles transgressent les droits de l'Homme, échappent au contrôle démocratique ou pratiquent la discrimination»115. On le sait bien, la justice est l'une des pièces maîtresses de l'Etat de droit. Elle représente dans les démocraties contemporaines le moule dans lequel la science du droit se concrétise et se perfectionne. Il n'y a pas de démocratie sans Etat de droit. Il n'y a pas non plus d'Etat de droit qui ne s'appuie sur le socle d'une justice indépendante et crédible, dotée de moyens à la hauteur de sa mission116. Pourtant, dans nombre de pays de l'espace francophone en général et en particulier ceux de l'espace noir francophone, le fonctionnement de la justice se heurte à des difficultés à la fois d'ordre statutaire117 et d'ordre matériel118. Ce qui réduit la capacité de l'institution juridictionnelle à assurer efficacement la protection des droits et à créer la confiance indispensable au développement économique des Etats.

C'est fort de ce constat que l'OIF dans sa vocation de promotion de la démocratie et en collaboration avec ses réseaux institutionnels119, s'investit dans le renforcement du

115 BAGAYOKO Penone Niagale, «la réforme des systèmes de sécurité dans l'espace francophone», ahjucaf. Disponible sur www.ahjucaf.org/ La-reforme-des- systemes-de.html.

116 KASSI BROU Olivier Saint Omer, Francophonie et justice: contribution de l'organisation internationale de la Francophonie à la construction de l'Etat de droit, thèse de doctorat, Université de Bordeaux, 2015, p.54.

117 AHJUCAF, l'indépendance de la justice, Actes du 2è congrès, Dakar, AHJUCAF, 7-8, novembre 2007. Disponible sur www.ahjucaf.org.

118 AAHJF, Rapport général du colloque international sur le thème « coût et rendement du service public de la justice dans l'espace AAHJF», Bissau, 1- 5 novembre 2007.

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119 Depuis 1985, l'organisation internationale de la Francophonie a accompagné la création de quinze réseaux institutionnels. Parmi elles, on peut citer: l'Association Africaine des Hautes juridictions Francophones (AAHJF). Elle est créée en novembre 1998 et met en oeuvre des actions concrètes de coopération entre les juridictions membres, se traduisant, notamment, par l'organisation de rencontres scientifiques et la publication des travaux juridiques correspondants. L'Association des Cours constitutionnelles ayant en partage l'usage du français (ACCPUF) est créée en avril 1997. Elle a pour objectif de faciliter les échanges d'idées et d'expériences entre cours constitutionnelles et institutions équivalentes, aux fins, notamment, de renforcement de ces institutions. L'Association des Hautes juridictions de cassation des pays ayant en partage l'usage du français (AHJUCAF) est créée en mai 2001. L'AHJUCAF a pour objet de favoriser la solidarité et les échanges d'idées et d'expériences entre les institutions judiciaires membres mais aussi de promouvoir le rôle de ces institutions dans la consolidation de l'Etat de droit. Le Réseau international francophone de formation policière (FRANCOPOL) est créé en septembre 2008 et a notamment pour mission de créer un lieu d'échange et de collaboration entre les services de police et écoles de police de langue française, oeuvrant dans le domaine de la formation policière et dans les domaines associés ; diffuser l'information relative aux événements, colloques et rencontres qui ont trait à la formation et aux pratiques policières ; partager le savoir des acteurs dans le domaine de la formation policière et stimuler les réflexions portant sur les nouveaux défis et sur l'actualisation des besoins en formation ; contribuer au développement des organisations policières francophones par l'accroissement des échanges d'informations et d'expertise. Le Réseau des compétences électorales francophones (RECEF) est créé en août 2011 et est un regroupement international des administrateurs d'élections de l'espace francophone. Il vise notamment à soutenir ses membres dans la mise en place d'institutions électorales pérennes, neutres, autonomes et indépendantes ; favoriser le professionnalisme par l'échange d'expériences et de bonnes pratiques ; promouvoir la pleine participation des citoyennes et citoyens aux scrutins ; encourager la

pouvoir judicaire, étant la pièce maitresse de la construction de l'Etat de droit. L'appui de l'OIF à la justice est assuré dans toutes les dimensions du système judicaire, c'est -à-dire aussi bien la justice constitutionnelle (B) que la justice ordinaire (A).

A-Un soutien général à la justice ordinaire.

La justice ordinaire regroupe l'ensemble des juridictions de droit commun, en partant des tribunaux de première instance jusqu'à la Cour de Cassation. Le renforcement du rôle de ces juridictions est primordial dans tout Etat de droit. Dans l'espace francophone en général et plus particulièrement dans les pays du Sud, la justice ordinaire n'arrive pas encore à exprimer pleinement son rôle, et ceci s'explique par deux raisons fondamentales. Il s'agit d'abord de l'influence constante et sur plusieurs dimensions du pouvoir politique qui compromet son indépendance; une indépendance qui constitue pourtant une condition essentielle de son bon fonctionnement et de sa crédibilité. Ensuite, le personnel judiciaire dans les Etats d'Afrique noire francophone n'est pas exempt de reproches notamment sur les plans qualitatif que quantitatif.

En ce qui concerne l'indépendance de la juridiction ordinaire, soulignons que selon KASSI BROU Saint Omer, l'autonomie doit être assurée aussi bien sur le plan fonctionnel que dans les dimensions administrative120 et budgétaire121. L'appui de l'OIF à l'indépendance des juridictions ordinaires est assuré par son accompagnement aux réseaux institutionnels de la Francophonie. A cet égard, les rencontres thématiques organisées autour de l'indépendance de la justice, par l'Association Africaine des Hautes Juridictions

recherche relative aux élections ; établir et approfondir des partenariats avec toute institution ayant des fins compatibles avec celles du RECEF. Voir http://reffop.francophonie.org/le-reseau/les-membres-du-reseau/les-reseaux-institutionnels-de-la-francophonie, pour plus de détail sur les réseaux institutionnels de la Francophonie.

120 « L'indépendance administrative suppose et implique que les tribunaux aient la maitrise de tous les éléments de leur administration, lesquels ont un impact direct sur l'exercice de leur mission juridique. Elle s'oppose à ce que la répartition des affaires entre les juges s'opère autrement qu'en vertu d'un tableau annuel de roulement. Ainsi, non seulement la composition d'une juridiction ne doit pas être fixée par la loi mais encore, l'organisation des juges à une cause, les séances du tribunal, la fixation du rôle, ainsi que la durée des procès doivent échapper au pouvoir exécutif ».Voir KASSI BROU Olivier Saint Omer, Francophonie et justice: contribution de l'organisation internationale de la Francophonie à la construction de l'Etat de droit, op.cit., p.81.

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121 KASSI BROU souligne que « dans l'espace francophone, les garanties financières des juridictions ne sont, en général pas constitutionnalisées. La plupart du temps, le budget des juridictions greffe le budget national et reste tributaire des disponibilités financières de l'Etat. Le pouvoir politique est pourvoyeur des fonds et les chefs de Cours n'en sont que les gestionnaires ». Voir KASSI BROU Olivier Saint Omer, Francophonie et justice: contribution de l'organisation internationale de la Francophonie à la construction de l'Etat de droit, op.cit., p.82.

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Francophones (AAHJF), l'Association des Institutions Supérieures de contrôle (AISCCUF), l'Association des cours et conseils constitutionnels des pays ayant en partage l'usage du français (ACCPUF), ont permis de rappeler l'importance de l'indépendance institutionnelle des juridictions. Aussi, l'OIF à travers les déclarations du Caire et de Paris a-t-elle souligné avec une parfaite lucidité l'obligation quant aux Etats de renforcer les moyens matériels et financiers octroyés à la justice car «l'absence d'autonomie budgétaire et la faiblesse des moyens diluent les objectifs vertueux d'indépendance et d'efficacité de la justice»122. En plus de l'indépendance des magistrats, l'OIF est convaincue que la formation de ces derniers est primordiale pour perpétuer l'Etat de droit. «C'est la raison pour laquelle la Francophonie a, en vertu de ses engagements, donné un relief concret à son action en faveur de la modernisation des systèmes judiciaires nationaux en la structurant autour de deux axes complémentaires»123.

En effet, la question des capacités humaines de la justice se pose en des termes à la fois qualitatifs124 et quantitatifs.

La communauté des Etats francophones a très tôt pris la juste mesure des enjeux liés à la formation du personnel de justice. Dès le Sommet de Dakar (mai 1989), la résolution sur la Coopération juridique et judiciaire a érigé la formation des magistrats et du personnel judiciaire en objectif prioritaire. En 1995, la Déclaration du Caire, en relevant que les lacunes dans l'information et la formation des magistrats entravent le bon fonctionnement de la justice, invitait les Etats à faire une plus large place à la formation initiale, continue et spécialisée, des magistrats et des personnels auxiliaires de justice, dans le cadre de plans nationaux et régionaux. Dans la Déclaration de Paris, les ministres francophones de la justice ont une fois de plus réitéré leur volonté de renforcer les compétences des professionnels de justice, par le soutien à la formation initiale, continue et spécialisée.

122 KASSI BROU Olivier Saint Omer, op.cit., p.77.

123 Ibidem, p.201.

124 L'exigence de compétence a pour pendant naturel l'impératif de formation. La qualité de la justice impose alors de questionner objectivement l'aptitude du magistrat à accéder à ses fonctions et à s'y maintenir.

La question de la formation du personnel de la justice est conduite au sein de la Francophonie suivant deux stratégies : la formation des structures nationales chargées de la formation judicaire et l'appui direct aux cycles de formation spécialisée et/ou sectorielle.

La formation des structures nationales de formation est assurée par l'appui de l'OIF au renforcement des capacités nationales de formation. Tournée dans ces débuts vers les centres de formation, cette formation s'intéresse depuis 1994 à la formation des formateurs des personnels judiciaires. La démarche de l'OIF consiste à fournir aux établissements de formation de la documentation et des outils pédagogiques et de favoriser la concertation et la coopération entre eux, en encourageant les échanges d'enseignants et d'experts. Elle organise ainsi des séminaires de formation des formateurs en mettant l'accent sur l'élaboration d'outils méthodologiques qui serviront de support d'enseignement.

Conformément aux engagements du Caire, la Francophonie, à travers son ancienne direction à la coopération juridique et judiciaire, a dans un premier temps, apporté son soutien à la mise en réseau des responsables nationaux de la formation judiciaire, en vue de resserrer leurs liens et de favoriser le partage et la libre circulation des matériaux pédagogiques entre professionnels francophones de la formation. Particulièrement attachés à ce réseau et à ces objectifs, les ministres francophones de la justice ont, dans la Déclaration de Paris, invité l'OIF à le revitaliser afin d'impliquer davantage les structures nationales dans la définition et la réalisation de politiques et stratégies intégrées dans le domaine de la formation initiale et spécialisée des personnels judiciaires en privilégiant la formation des formateurs. Dans le même esprit, la programmation 2010-2013 s'est assignée l'objectif de redynamiser le réseau des responsables nationaux de la formation judiciaire, en vue d'aider, par l'échange et la mutualisation des moyens, à la mise en place de politiques nationales de formation125.

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125 OIF, Programme 2010-2013, Paris, OIF, septembre 2010, p. 23.

Au-delà du cycle de visioconférences organisé en 2005 au bénéfice des responsables nationaux de la formation judiciaire d'une douzaine de pays francophones d'Afrique126 dont dix appartenant à l'espace noir francophone, la Francophonie a soutenu la participation de responsables nationaux à des rencontres internationales de formation des formateurs. Dans la dynamique de valorisation de la concertation et de l'expertise francophone, l'OIF a par exemple financé en décembre 2004, la participation de représentants du réseau francophone des responsables nationaux de la formation judiciaire, aux travaux de la deuxième Conférence internationale sur la formation de la magistrature, à Ottawa. Dans la même lancée, elle a appuyé en 2006, l'organisation par l'Académie internationale des droits de l'Homme, de l'Université d'été internationale de formation de formateurs, à Vichy, sur le thème « Droits de l'Homme et gouvernance à l'ère des nouvelles technologies ». Elle a par ailleurs soutenu en novembre 2011, la participation de responsables francophones de structures nationales de formation judiciaire, à la cinquième Conférence de l'Organisation internationale pour la formation judiciaire tenue à Bordeaux127.

Par ailleurs, s'agissant de la formation directe des magistrats assurée par l'OIF, elle se fait au travers des rencontres thématiques et le soutien aux programmes des réseaux institutionnels.

Les rencontres thématiques tournent autour de plusieurs thèmes dont les droits de l'enfant et la justice pénale des mineurs, le contentieux administratif, le droit des affaires, le droit commercial, les droits de l'Homme et la justice pénale internationale et autres. Par exemple, l'OIF a financé en 2000, un séminaire sur les droits de l'enfant en Tunisie et a

126 Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Côte d'Ivoire, Guinée, Madagascar, Mali, Niger, Rwanda, Sénégal, Tchad

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127 Grâce au soutien de la Francophonie, onze responsables de structures nationales de formation judiciaire d'Afrique francophone ont pu être associés aux travaux de la Ve Conférence de l'Organisation internationale pour la formation judiciaire, organisée à Bordeaux, du 31 octobre au 3 novembre 2011, sur « La formation judiciaire dans un monde globalisé ». En marge de cette rencontre, l'OIF a organisé les 7 et 8 novembre 2011 à son siège, une concertation francophone sur le renforcement de l'offre francophone de formation judiciaire, à laquelle ont participé des représentants des structures internationales et régionales partenaires, ainsi que ceux des réseaux institutionnels francophones intervenant dans les secteurs du droit et de la justice.

organisé en décembre 2004 128 , à Ouagadougou, un séminaire régional africain de formation sur la justice des mineurs. S'agissant du droit international, la Francophonie soutient la promotion des Droits de l'Homme et de la justice pénale internationale auprès des magistrats francophones. Dans cette dynamique, elle organise par exemple des programmes de formation sur la CPI129.

Enfin en ce qui concerne l'appui aux programmes des réseaux, soulignons que la Francophonie soutient également les initiatives de formation des membres des juridictions suprêmes ordinaires. Elle a par exemple appuyé le plan triennal de formation de la Cour suprême du Bénin, ainsi que les activités de l'AHJUCAF130 et de l'AAHJF131 en la matière. En matière de justice financière, l'OIF soutient les cycles réguliers de formation initiés par l'Association des institutions supérieures de contrôle ayant en commun l'usage du français (AISCCUF), au bénéfice des membres des Cours des comptes et institutions équivalentes, en vue du renforcement de leurs méthodes de contrôle. Les magistrats debout ne sont pas en marge des efforts mobilisés par la Francophonie pour assurer la formation continue des professionnels de la justice. A cet égard, l'OIF soutient la formation des parquetiers francophones à travers le financement de leur participation aux congrès annuels de l'Association internationale des procureurs et poursuivants (AIPP).

L'appui de l'OIF au renforcement de la justice concerne en dehors des juridictions ordinaires, les Cours ou Conseils Constitutionnels.

128 Cette formation a eu lieu du 29 novembre au 3 décembre 2004 à Ouagadougou et a connu la participation des magistrats des Etats d'Afrique noire francophone tels que le Bénin, le Burkina-Faso, le Burundi, le Cameroun, le Gabon, la Guinée Conakry, le Mali, le Niger, la RDC, le Sénégal et le Togo.

129 Formation d'une centaine d'avocats maliens et congolais au fonctionnement de la CPI. organisation de deux séminaires régionaux de sensibilisation et de formation au travail de la CPI en Afrique centrale (Yaoundé, 2010) et en Afrique du Nord et Moyen-Orient (Tunis, septembre 2011). L'OIF a financé le premier séminaire conjoint de la CPI et de l'Union africaine sur « Les aspects techniques du Statut de Rome et la pratique de la CPI » (Addis-Abeba, juillet 2011) à l'intention de représentants de la commission de l'Union africaine et des conseillers juridiques des délégations permanentes des Etats membres de l'Union africaine.

130 En 2004, la Francophonie a accompagné l'AHJUCAF à organiser une session de formation sur « Le juge de Cassation et les nouvelles technologies». En ligne sur http://www.aahjf.org.

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131 L'OIF a apporté son soutien à l'AAHJF pour l'organisation de la session régionale de spécialisation des compétences des magistrats des Cours suprêmes africaines (Cotonou, décembre 2010).

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote