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L'organisation internationale de la francophonie et la démocratie en Afrique noire francophone.


par Abdou-Ramane MAMA
Université d'Abomey-Calavi (UAC) - Master 2 Droit international et organisations internationales 0000
  

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Paragraphe 2 : Le recadrage du rôle de l'armée et de la société civile

La bonne marche du système démocratique passe par le bon fonctionnement des institutions et leur participation chacune à leur niveau à l'éclosion des valeurs démocratiques. Dans cette perspective, le rôle de l'armée ne doit pas être négligé dans la mesure où elle est considérée comme une actrice de la démocratie271. Le rôle de l'armée doit être alors redéfini (A) car l'actualité africaine depuis l'avènement de la démocratie fait état de ce que sa place reste encore léthargique au sein des Etats africains. Cette redéfinition du rôle de l'armée doit être couplée par le réveil de la société civile (B) qui doit assurer à son tour une véritable veuille citoyenne.

A- Un apport primordial de l'armée.

La fin de la guerre froide a sonné le glas des conflits interétatiques et renforcé la paix dans les frontières étatiques. La création de l'ONU, investie de la mission du maintien de la paix et de la sécurité internationale avec l'action d'avant-garde du Conseil

268 KASSI BROU Olivier Saint Omer, Francophonie et justice: contribution de l'OIF à la construction de l'Etat de droit, thèse précitée, p.88.

269 C'est à l'occasion d'une interview accordée au quotidien « Le Monde» en 1982 que Robert Badinter évoque au sujet de l'indépendance des membres du Conseil constitutionnel, leur « devoir d'ingratitude » à l'égard de leur autorité de nomination. La formule a ensuite été reprise par FAVOREU Louis dans « La notion de Cour constitutionnelle », in De la Constitution : Etudes en l'honneur de Jean-François Aubert, Bâle, Helbing et Lichtenhahn, 1996, p. 25.

270 KASSI BROU Saint-Omer, Francophonie et justice: contribution de l'OIF à la construction de l'Etat de droit, thèse précitée., p.89.

271 ESSONO Evono Alexis, « Armée et démocratie en Afrique, une relation ambivalente à normaliser », Afrique Contemporaine, n° 242, 2012

de sécurité a permis de réduire les menaces externes génératrices de conflits et d'affrontements entre les nations. Mais dans leur ordre interne, les Etats sont dans une constante menace. Les déchirements ethniques, les guerres civiles, les coups d'Etat militaire, les exactions contre les populations civiles commises le plus souvent par les forces de l'ordre272, ainsi que les divisions ethniques au sein de l'armée exacerbent les affres d'anarchie, de violence de famine et de viol devant une action étriquée de l'armée273. Ainsi, dans nombre de pays d'Afrique noire francophone, l'armée est loin de jouer son rôle d'actrice de la démocratie. Au contraire elle contribue à la mettre à l'épreuve.

Une simple explication à cette situation est la politisation et l'instrumentalisation de l'armée, vouée exclusivement à des missions extramilitaires, ce qui a pour conséquence l'éloignement de l'armée de son objectif véritable, à travers la négligence voire l'abandon de la formation, de la discipline, du patriotisme, de l'éthique. De façon pratique, cette déchéance se manifeste par le vol, les pillages, le viol, les assassinats, la trahison et les massacres durant les périodes troubles de contestation du régime prédateur en place. En temps normal de terreur, ce sont les brutalités, le racket, le tribalisme, les violations massives des droits humains. En Guinée par exemple selon Amnesty International en 2009, «l'armée est en pleine déliquescence, c'est le corps malade du pays... C'est un lent périssement. Les troupes d'élite se sont livrées depuis des années à des pillages et des exactions. En toute impunité»274. L'exemple du massacre sanglant des populations civiles en 2009 en Guinée par le putschiste Daddis Camara aidée par sa troupe amène à s'interroger sur le rôle de l'armée en Afrique.

L'instrumentalisation de l'armée à des fins politiques est très notable en Afrique noire francophone. Ainsi, lors de la crise postélectorale de 2010-2011, « en Côte d'Ivoire,

272 Par exemple, lors de la crise postélectorale de 2010, des attaques incessantes ont été commises par les forces de l'ordre du Président Gbagbo et ses miliciens contre tout partisan supposé ou réel d'Alassane Ouattara, reconnu par la communauté internationale comme étant le Président élu à l'issu du second tour des élections présidentielles de novembre 2010. De même, les forces fidèles à Ouattara ont été responsables des exactions sur des bases ethniques ou politiques à l'égard des populations civiles selon Human Right Watch. Voir www.hrw.org/fr/news/2011/03/15/cote-divoire-les-forces-de-laurent-gbagbo-ont-commis-des-crimes-contre-l'humanite.

273 SODOKIN Koffigan Atsou, Contribution de l'OIF au droit international de la démocratie, mémoire précité, p. 81.

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274 La Chronique, Le Mensuel d'Amnesty international France, « l'Age des questions », n° 276, novembre 2009, p.21.

les deux camps ennemis qui s'affrontaient, lors de la course sanglante au pouvoir, ont, à tour de rôle, tribalisé l'armée pour arriver à leurs fins. (...) Au Congo Kinshasa, de Mobutu au Kabila père et fils, l'armée prend toujours la couleur ethnique du détenteur du pouvoir. Au Congo Brazzaville, la tribalisation de l'armée a débouché sur une guerre civile, tout comme au Tchad, ou le vainqueur fait massacrer l'ethnie de l'opposant vaincu. (...) La victoire d'Alpha Condé, très contestée, n'a été possible que grâce à la composition ethnique de l'armée qui a penché en sa faveur en réprimant sauvagement les manifestants du camp adverse, majoritairement des Peulh»275.

La remarque générale faite de l'armée en Afrique est qu'elle reste une armée prétorienne dont la structure est en pleine crise identitaire. « Ce sont souvent des armées prétoriennes au service d'un homme et non constituées pour la défense nationale. Elles sont fondées sur des bases ethniques car constituées majoritairement d'une ethnie, celle du chef de l'Etat»276. C'est l'exemple de l'armée togolaise composée majoritairement de Kabyés, l'ethnie de l'ancien président Eyadema. Selon Ayayi Togoata Apedo-Amah, « l'armée africaine a une triste réalité au sein des peuples qu'elle est censée protéger et défendre contre les ennemis extérieurs et intérieurs (...). Triste héritage de l'armée coloniale, l'armée néocoloniale est une armée d'occupation au service de la dictature ; elle n'est pas au service du peuple, elle sert à le réprimer, à le terroriser. Elle est parfois tribalisée et tribaliste quand le dictateur est un tribaliste compulsif»277. Or, la démocratie ne peut en aucun cas s'accommoder d'une armée prétorienne conçue pour la tyrannie et l'impunité.

Face à cette situation et eu égard à la menace contemporaine de la secte islamiste Boko Haram, l'aide à une réforme de l'armée est un enjeu de taille pour la Francophonie en vue de la vitalité des démocraties africaines.

275 AYAYI TAGOATA Apedo-Amah, « Togo : Réflexion sur le rôle de l'armée en Afrique à l'ère de la démocratisation et de

Boko Haram », 2016, www.togo-online.co.uk/opinions/togo-reflexion-sur-le-role-de-l'armée-en-afrique-lere-de-la-
democratisation-et-de-boko-haram.

276 ESSONO Evono Alexis, « Armée et démocratie en Afrique, une relation ambivalente à normaliser », Afrique Contemporaine, n° 242, 2012, p. 10. Disponible sur www.cairn.info/revue-afrique contemporaine-201-2-page-120.htm.

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277AYAYI TAGOATA Apedo-Amah, « Togo : Réflexion sur le rôle de l'armée en Afrique à l'ère de la démocratisation et de Boko Haram », article précité.

D'entrée de jeu, faisons remarquer que la construction d'une armée républicaine, au service de la démocratie « passe forcément par la professionnalisation des armées africaines (...) mais aussi par une amélioration des conditions de travail et de vie des militaires, sans laquelle on assistera aux mutineries et aux scènes de pillages qu'on a connu il y'a pas si longtemps au Burkina Faso en 2011»278. Cette exigence se pose avec plus d'acuité dans la mesure où « dans une démocratie digne de ce nom, l'armée ne peut être un acteur politique. Elle est soumise au pouvoir civil. Elle doit assumer la fonction que lui assigne la Constitution, c'est à dire la défense de la souveraineté nationale»279. De ce point de vue, si l'on est obligé de légitimer dans certaines circonstances l'intervention de l'armée dans la vie politique notamment en période de dérapage du pouvoir en place280, il faudrait faire remarquer, et ceci, à quelques exceptions près que «l'exercice du pouvoir politique par les militaires s'est traduit le plus souvent par la concentration des pouvoirs au profit des dirigeants, la violation massive des droits de l'homme et in fine le sous-développement»281. Alors qu'ils expliquent souvent leur intrusion dans la vie politique par la nécessité de préserver l'ordre constitutionnel ou défendre la démocratie, les militaires se sont révélés pire que le mal qu'ils dénonçaient282. Dès lors, cette intrusion de l'armée dans le pouvoir politique ne saurait être légitimée. D'ailleurs le système démocratique ne s'accommode pas de la violence. C'est pourquoi la Déclaration de Bamako condamne à l'alinéa 5 du chapitre 3 «les coups d'Etat et toute autre prise de pouvoir par la violence, les armes ou quelque autre moyen illégal». Il en ressort que pour éviter ces intrusions de l'armée dans le politique, conséquence du désamour ressenti par cette dernière de la gestion antidémocratique, il faut, à la prime abord, consolider la

278 ESSONO Evono Alexis, « Armée et démocratie en Afrique, une relation ambivalente à normaliser », article précité, p.18. Par rapport à la professionnalisation des armées en Afrique, soulignons que les recrutements dans l'armée sont souvent faits sans tenir compte de la vocation. Des critères de patriotisme et de vocation ne sont pas pris en compte dans le processus de recrutement des forces de l'ordre. Ce qui expliquerait en partir un manque d'engagement à servir avec dévouement la République.

279Ibidem.

280 Devant le refus des dirigeants politiques d'obtempérer aux revendications démocratiques du peuple ou face à des régimes dictatoriaux prédateurs des libertés publiques, l'armée est apparue comme le dernier bouclier ou rempart pour sortir le pays de l'impasse politique. Ainsi, c'est le cas au Mali, où l'armée dirigée par le Général Amadou Toumani Touré est intervenue en 1991 pour renverser le président Moussa Traoré et instaurer la démocratie. Elle a permis également de remettre sur les rails le processus démocratique. Ce fut le cas également au Niger en février 2010 où elle est intervenue pour mettre fin à une crise née de la volonté du président Tandja de se maintenir au pouvoir à tout prix.

281 AYAYI TAGOATA Apedo-Amah, article précité,

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282 Le coup d'Etat de Moussa Daddis Camara en Guinée et la crise qui en a suivi en sont une illustration parfaite.

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culture démocratique à l'endroit des dirigeants politiques. Car, affirme le Professeur EVONO Essono Alexis, « les crises politiques récurrentes en Afrique subsaharienne francophone s'expliquent, en grande partie, par l'absence d'une culture démocratique»283. La consolidation de la culture démocratique se traduira par le respect de la Constitution par tous et en premier, le chef de l'Etat, garant de la paix sociale et de l'unité nationale. Ainsi le respect des dispositions constitutionnelles conduirait à maintenir la stabilité constitutionnelle et ainsi à garder l'armée en retrait face au pouvoir politique c'est à dire à rendre anachroniques les interventions de l'armée dans la vie politique284. La construction d'une armée républicaine est en fin de compte une responsabilité du pouvoir civil (les autorités politiques) qui doit instaurer un climat de confiance avec les forces républicaines par le respect de la constitution, l'organisation de formations régulières pour leur permettre de décupler les nouvelles menaces contemporaines qui déstabilisent les Etats et se mettre ainsi résolument au service de la nation . A cet effet, Francopol qui est un réseau institutionnel francophone chargé de veiller à l'amélioration des conditions de travail des forces armées doit veiller particulièrement à cette préoccupation de la modernisation des outils de travail mis à la disposition des forces armées à l'échelle nationale.

En dehors de l'armée, la Francophonie doit également soutenir les actions d'un autre rempart de la démocratie qu'est la société civile nationale.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo