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L'infraction d'avortement face au droit de disposer de son corps.


par Frédéric Bwanakay
Université de Lubumbashi - Graduat 2017
  

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§2 : Les éléments constitutifs de l'infraction de l'avortement

Les deux formes d'avortement supposent quatre éléments communs suivant : un élément matériel, un résultat obtenu ou une tentative de l'obtenir, des moyens employés pour atteindre ce résultat et un élément intentionnel.

1) L'élément matériel : consiste dans la pratique ou manoeuvres destinées à interrompre artificiellement la grossesse en provoquant l'expulsion prématurée du produit de la conception. Quant au résultat, l'infraction est consommée si le résultat est atteint, c'est-à-dire s'il y a eu interruption de la grossesse, s'il y a eu la mort de foetus peu importe que l'enfant soit mort avant l'infraction. Mais le fait constitue une tentative si l'enfant est né avant et qu'il a survécu malgré sa mise au monde avant terme52(*).

Il importe également peu que le foetus soit mort antérieurement aux pratiques abortives53(*).

Lorsque le résultat recherché n'est pas atteint nonobstant la réalisation de l'acte matériel, il y a tentative punissable. Est le fait sera puni au même titre que l'infraction consommée.

On classe généralement les moyens de provoquer l'avortement en :

- Moyens chimiques

- Moyens mécaniques54(*)

- Médicaments : ce sont toutes substances solides ou liquides simples ou composées aux quelles l'art de guérison attache un effet déterminé sur l'organisme et en matière d'avortement l'effet d'expulser le foetus55(*)

2) L'élément intentionnel : est le fait pour l'auteur d'avoir eu l'intention de provoquer l'avortement en violation de la loi pénale : si cette intention manque, l'avortement n'est pas constitué. C'est le cas de l'avortement thérapeutique ou eugénique pratiqué par un médecin dans le dessein de sauver la vie de la femme enceinte ou d'épargner à l'enfant à naitre en le supprimant, tout inconfort physique et moral56(*)

Le fait constitue les coups et blessures et non un avortement si l'auteur a porté des coups à une femme enceinte dans les conditions telle que l'accouchement avant terme a été la conséquence imprévue de ces coups57(*)

Le fait d'avoir exercé sur une femme pour la faire avorter des violences et que ces violences ont occasionné sa mort. Cela constitue une infraction des coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner (article 48 CPLII)58(*)

En outre, si l'avortement est le résultat des coups et blessures involontaires ou d'un manque de précaution ou de prévoyance, il doit constituer une infraction aux articles 54 ou 55 du code pénal livre II. Notamment aux lésions corporelles involontaires59(*).

3) Sanction :

Ø Art. 165. [O-L.70-031 du 30 avril 1970. - celui qui, par aliments, breuvages, médicaments, violences ou par tout autre moyen, aura fait avorter une femme, sera punie d'une servitude pénale de cinq à quinze ans. ]

Ø Art. 166. [0-L.70-031 du 30 avril 1970. - la femme qui, volontairement, se sera fait avorter, sera punie d'une servitude pénale de cinq à dix ans.]

Quiconque porte des coups volontaire ou involontaire à une femme enceinte. Et si les coups portés et les blessures faites volontairement, sans détruire l'embryon ou le foetus, entrainent pourtant une altération grave de la santé de la femme, de l'embryon, du foetus ou la perte d'un organe, l'auteur est passible de deux à cinq ans de SPP et d'une amende de deux cents mille à trois cent cinquante mille francs congolais60(*).

Est puni également des peines prévues pour non-assistance à personne en danger, le personnel soignant qui s'abstient de porter assistance à une femme en instance d'accouchement61(*)

On peut relever, avec LIKULIA B., AKELE et FOFE62(*), que la législation actuelle sur l'avortement en République Démocratique du Congo, comporte deux défauts majeurs relatifs à la définition de cette infraction et aux problèmes de qualifications auxquelles celle-ci donne lieu.

Concernant la première observation aux termes de la formulation doctrinale et jurisprudentielle de l'avortement. Notent les trois auteurs, celui-ci est matériellementcaractérisé à partir du moment où l'interruption de grossesse, réalisée au moyen de procédés artificiels, chimiques ou mécaniques, se trouve en quelque sorte attestée par l'expulsion du produit de la conception, c'est-à-dire par l'évacuation de celui-ci hors du corps de la mère... Il importe peu que le foetus soit mort antérieurement aux pratiques abortives (délit impossible) ou qu'il survive à celles-ci63(*). Tant et si bien que, lorsque dans un cas de grossesse gémellaire de triplés par exemple, une manipulation est opérée tendant à arrêter le développement normal de l'un des foetus tout en le maintenant dans le corps de sa mère jusqu'au terme de la grossesse, c'est-à-dire à la naissance de ses frères ou soeurs, il est difficile de retenir l'incrimination d'avortement avant l'expulsion de l'infortuné.

A l'évidence, notent LIKULIA B. et alii64(*), il y a une importante distorsion entre la volonté du législateur la vie en gestation et la mise en oeuvre doctrinale et prétorienne de cette volonté. Cette situation trouve sans doute son origine dans le fait que les auteurs et les tribunaux considèrent qu'un foetus mort est forcément évacué 65(*) ; ce qui ne se vérifie pas toujours.

Par ailleurs, il ne peut y avoir, à proprement parler, « d'avortement sur soi-même », car l'avortement ne victimise pas la mère, mais l'enfant simplement conçu. Il serait plus juste de parler de l'avortement commis par la mère. Cette confusion, expliquent les trois auteurs cités ci-avant, « tient au phénomène de « dualité victimale » qui est de l'essence même de l'infraction d'avortement, laquelle donne en effet lieu à une double victimisation atteignant à titre principal et final l'enfant en gestation et, à titre secondaire et modal la mère. « L'avortement suppose en effet des coups et blessures ou l'administration des substances nuisibles exercés directement sur l'enfant in utero ou l'atteignant indirectement par la mère ».

Les conclusions 66(*) auxquelles sont parvenus ces auteurs à l'issue de leur étude restent encore maintenant éclairantes quant à la réforme indispensable de la législation sur l'avortement. Nous voudrions ici en faire nôtres puisqu'elles sont de nature à renforcer la protection de l'enfant à naître :

« 1°Lorsque la femme commet elle-même des manoeuvres abortives, elle est à la fois victime de coups et blessures et de l'administration de substances nuisibles, et délinquante eu égard à l'infraction d'avortement. Sa victimité ne prête pas à conséquence puisqu'elle ne peut pas être poursuivie pour les infractions qui l'ont victimiée. En revanche, sa délinquance sera sanctionnée ;

« 2° Lorsque la femme a simplement donné son consentement à l'avortement sans pratiquer elle-même les manoeuvres abortives incriminées, sa victimité n'entraîne aucune suite pénale à son propre égard, mais doit être considérée à l'égard des auteurs de l'acte prohibé, contre lesquels le cumul idéal avec l'avortement sera retenu. En revanche, la criminalité de cette femme peut être établie en qualité de complice dans la mesure où elle a recherché activement cet avortement, ne fût-ce que parce qu'elle a dû se déplacer librement jusqu'au lieu où l'acte a été commis ;

« 3° Puisque la femme est poursuivable comme complice, il est normal que l'homme, auteur de la grossesse, qui l'a incitée à avortée soit lui aussi poursuivi. On pourrait ainsi mettre l'accent sur sa double responsabilité à l'égard de sa compagne et à l'égard du fruit de leur union. De la même manière, on pourrait envisager de poursuivre pour provocation ou incitation à l'avortement, toutes autres personnes qui exerceront une certaine ascendance ou une certaine autorité sur la femme ;

« 4° ... Il peut se faire que l'avortement résultant des coups et blessures intentionnellement donnés ou des substances nuisibles intentionnellement administrés soit en réalité tout à fait involontaire. Il faudrait arriver à protéger l'enfant et la mère en aggravant à situation de l'auteur de ces coups volontaires ou de cette administration volontaire dans la mesure où il connaissait l'état de grossesse de la victime ;

« 5° Pour résorber les difficultés éprouvées par les juges relativement au problème de qualifications multiples résultat du phénomène de dualité victimale en matière d'avortement, on pourrait recourir à la technique d'aggravation spéciale des peines (sur le modèle notamment de la technique utilisée en matière de « meurtre commis en vue de faciliter le vol », de « coups et blessures aggravés », ou encore de « viol aggravé »). Ainsi par exemple, lorsque les manoeuvres abortives pratiquées auront entraîné la mort de la femme, le juge n'aura plus à hésiter entre l'avortement et l'homicide praeter intentionnel. Il retiendra simplement la qualification spéciale d'avortement aggravé. Il n'aura donc pas à privilégier la protection de la vie de la mère contre celle de la vie de l'enfant, ou vice-versa comme cela arrive bien souvent. La formulation de cette aggravation spéciale peut se faire dans ces termes : « s'il résulte de l'avortement pratiqué des conséquences dommageables pour la femme consistant en une altération plus ou moins grave dela santé, une maladie, une incapacité de travail, une mutilation grave ou la perte absolue d'un organe); ou encore si la femme succombe aux manoeuvres abortives... ».

Ajoutons une sixième proposition tendant à introduire dans le régime répressif de l'avortement la sanction de l'interdiction d'exercer, à quelque titre que ce soit, aucune fonction médicale dans les cliniques ou maisons d'accouchements (dont il convient par ailleurs d'organiser une police sanitaire) à l'encontre du personnel sanitaire (médecins, pharmaciens, infirmiers, etc.). Peuvent également être envisagées des sanctions à caractère éducatif consistant par exemple en la condamnation à une prestation « pénaux-pédagogique » spécifique consistant par exemple en une assistance médicale ou psychologique aux femmes souffrant de séquelles dues à un avortement.

Ces différentes propositions rendent à renforcer la protection pénale de la natalité, c'est à dire en somme à garantir à l'enfant, dès sa conception, le droit de l'existence. Lorsque viendra à la vie, cette protection devra se poursuivre pour mettre l'enfant à l'abri de diverses atteintes.

* 52 LIKULIA B., op. Cit. p. 177

* 53 Idem

* 54 Ibidem

* 55 LIKULIA B. op. Cit.

* 56 Idem

* 57 Art. 143 à 146 de la loi n°01/009 du 10 janvier 2009 portant protection de droit de l'enfant en RDC

* 58 1er Insti. Elis 23 avril 1947, RJCB, p. 109, cité par LUYAMBA WALEMBA.

* 59MINEUR G., cité par KUMWIMBA NSAPU, du taux élevé du chiffre noir de l'infraction d'avortement face à la protection de l'enfant avant la naissance en RDC, inédit, mémoire Unilu, 1991-1998, p. 14

* 60 Art. 145 de la loi n°09/001/2009

* 61 Art. 146 de la précitée

* 62 LIKULIA B., et alii, op.cit., pp 78 et s.

* 63 LEDOUX A., Avortement, in Encyclopédie Dalloz, droit criminel. Paris 1953, pp 208 et s, n°03, LUKULIA et Alii, op.cit., pp 82-84.

* 64 LIKULIA B. et alii, op.cit., pp 79-80.

* 65C.S.J Cass, 20-12-78, arrêt Tshidibi, bulletin des arrêts de la Cour Suprême de Justice, année 1978, Kin., 1979, p 153.

* 66 LIKULIA B. et Alii, op.cit., pp 82-84.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld