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Les droits des agriculteurs et le marché mondial des gènes

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par Monia BRAHAM epse YOUSSFI
Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis II - DEA en Droit de l'Environnement 2006
  

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Conformément à la résolution 4/89, la réalisation « des droits des agriculteurs » se matérialise concrètement à travers un fond géré par la commission de la FAO sur les ressources phyto-génétiques.

En effet, un fond international pour les ressources phyto-génétiques a été crée en 1986 sans que les mécanismes de son alimentation ne soient déterminés, il est par ailleurs prévu dans les résolutions 4/89 et 3/91 que «  les droits des agriculteurs deviendront réalité grâce à un fond international pour les ressources phyto-génétiques, en particulier mais pas exclusivement dans les pays en développement ». En 1991, les participants au Dialogue de Keystone ont réitéré la nécessité de créer un fond pour l'appui des programmes de conservation et d'utilisation des ressources génétiques conformément au concept des droits des agriculteurs252(*).

Ce concept vise en outre à instaurer un régime d'accès libre et rémunéré aux ressources phyto-génétiques, une ambiguïté découle du fait que les objectifs de ce concept au titre de la conservation des RPG s'entremêlent avec ceux revendiqués par les PED de la rémunération de l'accès à ces mêmes ressources.

Par ailleurs, cette rémunération est appréhendée de manière rétroactive, elle se rapproche par cet aspect à un mécanisme de dédommagement : Partant du constat que « la majorité des RPG provient des pays en développement où les agriculteurs n'ont pas été suffisamment indemnisés ou récompensés de leurs efforts » et qu'il est indispensable de continuer d'assurer la conservation ex-situ et in-situ , « le développement et l'utilisation des RPG dans tous les pays et de renforcer les capacités des pays en développement dans ce domaine », l'interprétation concertée prévoit en outre que « la meilleure façon d'appliquer le concept des droits des agriculteurs est d'assurer la conservation, la gestion et l'utilisation des RPG au profit des générations présentes et avenir des agriculteurs ». On peut en déduire que les fonds mobilisés visent en premier lieu à instaurer une incitation à la conservation.

Plus problématique, la question des droits des agriculteurs aux avantages est plutôt tributaire de l'acceptation par les pays développés qui ont « le plus bénéficié » du principe de l'accès libre aux RPG de contribuer effectivement au financement du système instauré; En vertu de ce principe, la mobilisation des fonds permettrait logiquement « d'acheminer des fonds en provenance des utilisateurs (éventuellement sur la base des avantages nationaux tirés de l'usage des RPG pour l'alimentation et l'agriculture étrangères) vers les donateurs du matériel génétique et les pays d'origine en fonction de la quantité et le type des RPG »253(*). On peut par conséquent conclure à un rapprochement des "droits des agriculteurs" du principe de la responsabilité commune mais différenciée tel que connu en Droit de l'environnement.

Seulement et en l'absence de modalités pratiques pour la répartition de ces bénéfices, la rémunération de l'accès sur la base du concept « des droits des agriculteurs » n'a pas eu réellement une application, celle ci devrait être fondée sur « les principes de l'équité et de la transparence »254(*)conformément à la résolution 3/91 qui a mis sur pieds d'égalité les technologies de pointe et les technologies rurales et locales étant donné que « les unes et les autres jouent un rôle important et complémentaire dans la conservation et l'utilisation des RPG »255(*) .

La répartition des avantages est en réalité appréhendée d'une manière large et rétroactive cad non seulement comme une rémunération de l'accès à une ressource phyto-génétique mais également pour le dédommagement des PED au titre de leurs contributions aux collections ex-situ détenues par les centres internationaux de la recherche agricole.

Le texte de l'Engagement International tel que réinterprété en 1989 ne reconnaît que le principe d'une répartition équitable au profit des PED sur la base du concept des "droits des agriculteurs", il ne prévoit aucun mécanisme de répartition à l'échelle nationale entre les parties contractantes et leurs agriculteurs pour poursuivre l'objectif de la conservation256(*).

Peut-on en déduire que les impératifs de la conservation à travers le principe d'une incitation à la conservation à l'échelle globale ont occulté l'objectif du concept des « droits agriculteurs » s'agissant de la répartition des avantages d'où le scepticisme des PED par rapport à ce concept et une plus grande rétention du matériel génétique végétal par ces pays ou d'une volonté délibérée d'étendre les compétences de la FAO pour la gestion des RPG in situ.

B- L'intégration des « droits des agriculteurs » dans le cadre d'une gestion internationale des RPG:

Le concept «  droits des agriculteurs » vise à étendre les compétences de la FAO via la commission des ressources génétiques pour l'alimentation et l'agriculture257(*) à la gestion des RPG in situ. Ce concept est conçu pour une gestion qui s'internationalise : il s'agit d'une gestion préventive (I) et de plus en plus centralisée (II).

I - Une gestion préventive :

L'Engagement International présente l'avantage d'étendre les compétences de la FAO à la gestion des RPG ex situ, le concept « droits des agriculteurs » constitue un élément déterminant dans cette gestion qui s'internationalise et un appui complémentaire qui tend à étendre cette gestion sous les auspices d'une organisation internationale aux RPG détenues dans les conditions in situ.

Cette gestion est préventive, le système mondial dont la mise en place a démarré depuis 1983 avec la création de la commission des ressources phyto-génétiques (devenue la commission des ressources génétiques pour l'alimentation et l'Agriculture) comprend deux éléments clés :

· le rapport sur l'état des ressources phyto-génétiques dans le monde

· le plan d'action mondial pour la conservation et l'utilisation durable des ressources phyto-génétiques présentant un intérêt pour l'alimentation et l'agriculture.

La prévention est tributaire d'un processus d'évaluation impulsé par les pays membres de la FAO : Il intègre l'évaluation de la gestion des RPG in situ dans le cadre d'une évaluation globale de «  l'état de la diversité génétique, des plantes et les capacités locales et mondiales de gestion, de conservation et d'utilisation in situ et ex situ des RPG »258(*).

Le plan d'action mondial pour la conservation et l'utilisation durable des ressources phyto-génétiques pour l'alimentation et l'agriculture adopté dans la déclaration de Leipzig en 1996 comprend des activités qui visent à renforcer les capacités des pays et à améliorer la conservation. La conservation in situ des RPGAA est considérée dans le cadre de ce plan comme un axe stratégique pour cette gestion qui s'internationalise259(*). Il a été établi grâce à un processus participatif à l'initiative des pays260(*) et un grand nombre d'intervenants y ont adhéré : Gouvernements, organisations non gouvernementales, industriels et scientifiques individuels.

Dans ce plan, on reconnaît l'importance de certaines questions qui se posent aux programmes nationaux, « notamment les DPI, l'échange, le transfert et le commerce des ressources phyto-génétiques. Une coordination est nécessaire pour fournir aux programmes nationaux des informations sur ces questions et pour évaluer l'incidence de l'évolution de la situation internationale dans ces domaines sur la conservation et l'échange des ressources phyto-génétiques, ainsi que pour intégrer les progrès de la recherche, le cas échéant, dans les systèmes et les usages nationaux »261(*).

Par ailleurs, ce plan recommande aux gouvernements et leurs systèmes de recherche nationaux d'envisager «  des mesures législatives qui permettent la distribution et la commercialisation des variétés locales ou des variétés des agriculteurs et des variétés obsolètes si elles répondaient aux mêmes critères de distribution et de commercialisation en ce qui concerne les maladies, les ravageurs, la santé et l'environnement que les autres variétés conventionnelles ou homologuées »262(*) , cette recommandation est conforme à l'objectif de la conservation à la ferme par les agriculteurs en tant qu'un axe stratégique de la conservation de l'agro-biodiversité retenu par ce plan.

Le système mondial de la gestion des RPGAA comprend également des codes de conduite et des normes internationales (code de conduite pour la collecte et le transfert de matériel génétique, normes et lignes directrices concernant les banques de gènes et le code de conduite sur les biotechnologies) et des mécanismes mondiaux (Réseaux par culture et domaine d'activité, Réseau international des collections ex situ, système mondial d'information et d'alerte rapide).

Le système mondial d'information et d'alerte rapide présente l'intérêt d'attirer l'attention sur les menaces potentielles sur l'agro-biodiversité dans les conditions in situ et s'insère parfaitement dans le cadre de cette gestion préventive basée sur une politique internationale de planification, d'évaluation de la gestion des RPG in situ à l'échelle internationale, et un système de veille et d'intervention rapide mis en place dans le cadre de cette gestion qui est également centralisée.

II - Une gestion centralisée :

Cette gestion qui s'internationalise est confiée à la FAO à travers la commission des ressources génétiques pour l'alimentation et l'agriculture, crée en 1983 (initialement commission des ressources phyto-génétiques). Cette commission tient des sessions périodiques pour assurer le suivi et l'évaluation des différents instruments mis en place à l'échelle internationale en matière de gestion des RPGAA. Un groupe de travail technique intergouvernemental sur les RPG présentant un intérêt pour l'alimentation et l'agriculture a été également crée en 1997, ses membres sont élus tous les deux ans pendant les sessions ordinaires de la CRGAA.

Le système mondial avec ses différentes composantes exposées ci-dessus avait donc besoin d'un instrument juridique contraignant à l'échelle internationale pour encadrer juridiquement une politique de gestion des RPGAA qui s'internationalise sous les auspices de la FAO et qui remplace l'Engagement International sur les RPG simple résolution de cette organisation internationale263(*).

Le concept des « droits des agriculteurs » comme il a été formulé dans les instruments de la politique générale de la gestion des RPGAA a été également au centre des débats qui ont porté sur le TIRPGAA sous les auspices de la FAO; Ces différents instruments traduisent la transition du régime de la liberté d'accès aux RPG à un régime d'accès facilité à ces ressources, la recherche d'un accès partagé au RPGAA vise à faciliter l'accès aux dites ressources au profit des demandeurs des gènes et de répartir équitablement les avantages qui en découlent au profit de leurs pourvoyeurs.

Le concept des droits des agriculteurs s'est métamorphosé avec cette nouvelle vision : Désormais c'est la loi nationale qui est en mesure de le consacrer au profit de l'objectif de la conservation de l'agro-biodiversité conformément à des principes directeurs qui sont la répartition des avantages et la protection des connaissances traditionnelles, la connexité entre « les droits des agriculteurs » et le régime d'accès est l'une des manifestation de la métamorphose de ce concept tel que consacré dans le TIRPGAA.

CHAPITRE II:

* 252 Rapport du Groupe Crucible II. Adresse électronique : http://web.idrc.ca/openbook/990-01.

* 253 Voir à ce propos le Rapport de la commission des ressources génétiques pour l'alimentation et l'agriculture, 1ère session extraordinaire. Rome, 7-11 novembre 1994. CPGR-Ex 1/94/5.

* 254 La résolution 3/91 prévoit à cet effet « la conservation effective et l'utilisation durable des RPG sont une nécessité urgente et permanente et par conséquent les ressources destinées au fond international et aux autres mécanismes de financement devraient être substantielles, régulières et fondées sur les principes d'équité et de transparence » .

* 255 Rappelant également la reconnaissance simultanée des droits des obtenteurs et des agriculteurs dans l'interprétation concertée objet de la résolution 4/89.

* 256 On peut penser par exemple à un système de redistribution à l'échelle nationale par l'institution d'une incitation à la conservation.

* 257 Instituée en 1983 en tant que commission des ressources phyto-génétiques, son mandat a été élargie suite à la conférence de la FAO de 1995 afin d'englober toutes les composantes des ressources génétiques dans les domaines de l'agriculture et de l'alimentation (ressources zoogénétiques et ressources phytogénétiques). Actuellement 159 pays ainsi que l'Union Européenne sont membres de cette commission.

* 258 Le premier rapport a été présenté à la quatrième conférence technique internationale tenue à Leipzig en Allemagne, Juin 1996.

* 259 Ce plan a un caractère continu, il est suivi, examiné et tenu à jour par la CRGAA.

* 260 158 pays ont préparé des rapports nationaux d'évaluation de l'état de leurs ressources génétiques.

* 261 Plan d'action mondial pour la conservation et l'utilisation durable des ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture, § 237.

* 262 Plan d'action mondial pour la conservation et l'utilisation durable des ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture, § 203.

* 263 113 pays ont adhéré à l'Engagement International en 2000,

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