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Les droits des agriculteurs et le marché mondial des gènes

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par Monia BRAHAM epse YOUSSFI
Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis II - DEA en Droit de l'Environnement 2006
  

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§2- La communauté internationale dépositaire des « droits des agriculteurs » :

La réalisation des « droits des agriculteurs » incombe à la communauté internationale, le texte de la résolution 5/89 prévoit que « ces droits sont dévolus à la communauté internationale, qui en tant que dépositaire pour les générations présentes et futures des agriculteurs, doit assurer aux agriculteurs tous les bénéfices qui leur reviennent, les aider à poursuivre leur action et appuyer la réalisation des objectifs globaux de l'Engagement International ».

En effet, l'analyse des engagements qui incombent à la communauté internationale nécessite au préalable de déterminer qu'est ce qu'on entend par la communauté internationale dans le cadre de cette résolution ?

Partant du constat qu'une « utilisation désordonnée de cette terminologie affecte la rigueur d'une notion , sur laquelle la doctrine continue à diverger »239(*), on peut dire que cette notion a été exploitée dans les stratégies de toutes les revendications tiers-mondistes et ce en dépit des divergences entre ceux qui, frappés par la persistance des conflits aussi bien dans les rapports Etatiques qu'au sein des organisations internationales nient l'existence d'une communauté internationale et, ceux qui considèrent par contre que toute communauté est par définition conflictuelle et affirment son existence.

Par conséquent, si on invoque cette notion c'est pour « mettre à la charge de Etats nantis l'obligation d'assister les pays en recherche de développement, dés lors que riches et pauvres font partie de la même communauté, les premiers ne sauraient se désintéresser des seconds »240(*).

Partant de cette analyse et à la lecture du texte de l'Engagement International de la FAO tel que réinterprété par les trois résolutions à savoir la résolution 4/89, la résolution 5/89 et la résolution 3/91, on peut affirmer que la communauté internationale devrait contribuer à la concrétisation des « droits des agriculteurs » d'une part à travers un engagement de la part des pays développés qui ne devrait pas se limiter à l'assistance technique mais à une obligation de financement pour la réalisation de "ces droits" au profit des PED d'où l'on peut conclure à l'insertion des « droits des agriculteurs dans une approche d'aide au développement (A); Ce concept devrait être analysé par rapport à son intégration dans le cadre de la stratégie de la FAO s'agissant de la gestion internationale des ressources phyto-génétiques (B).

A- L'insertion des « droits des agriculteurs » dans une approche d'aide au développement :

Le concept des « droit des agriculteurs » en tant système de reconnaissance du rôle des agriculteurs dans la conservation des ressources phyto-génétiques vise le renforcement des capacités des pays en développement pour la conservation et l`utilisation de ces ressources et ce conformément au principe de coopération tel que prévu à l'article 5 de l'Engagement International de la FAO (I), la résolution 4/89 portant sur l'interprétation concertée de cet Engagement prévoit le recours au fonds international des ressources phyto-génétiques pour le financement des « droits des agriculteurs » (II).

I- Le renforcement des capacités en matière de gestion des RPG :

Les besoins des pays en développement en matière de gestion des RPG ont été déjà signalés dans le texte de l'Engagement qui prévoit dans son article 5 «  la coopération Internationale aura particulièrement pour objet :

a- d'établir ou de renforcer les capacités des pays en développement le cas échéant sur une base nationale ou sous-régionale, en ce qui concerne les activités phyto-génétiques, notamment l'inventaire, l'identification et la sélection des végétaux, la multiplication et la distribution des semences afin de rendre tous les pays à même de tirer pleinement partie des ressources génétiques dans l'intérêt de leur développement agricole »

En faisant le constat que « les RPG sont indispensables à l'amélioration génétique des plantes cultivées, mais n'ont pas été suffisamment prospectées et sont menacées d'érosion et de disparition », la résolution 5/89 souligne l'importance de renforcer les capacités des pays en développement en matière d'inventaire, d'identification et de sélection et déplore le fait que ces capacités sont  « insuffisantes ou même inexistantes » dans ces pays.

En effet, les impératifs de la conservation des RPG au profit de l'humanité (a) devrait être complétés par le renforcement des capacités des PED dans le domaine de l'amélioration variétale (b).

a- le renforcement des capacités en matière de conservation des RPG : 

Il s'agit du renforcement des capacités des pays en développement en matière de conservation in situ et ex situ des RPG.

La conservation in situ revêt une importance particulière en tant que technique « avec la prise en compte du fait que l'interdiction, ou la réglementation de l'exploitation d'espèces déterminées était insuffisante pour assurer leur survie, si les milieux ou les habitats n'étaient pas eux même protégés »241(*).

Elle est considérée la plus intéressante pour la protection de la nature et définie comme « la conservation des éco-systèmes et des habitats naturels et le maintien et la reconstitution de populations viables d'espèces dans leurs milieux naturels et pour les espèces domestiquées, dans le milieu où se sont développés leurs caractères distinctifs »242(*) .

L'acquisition des techniques de conservation in situ permet d'acquérir des capacités pour les RPG en amont dans les champs des agriculteurs où on peut entretenir une forte diversité génétique constituée de variétés de pays, d'espèces sauvages apparentées aux plantes cultivées et ce à travers un effort de vulgarisation au profit des agriculteurs.

L'objectif étant de maintenir la dynamique des systèmes agraires traditionnels qui sont le lieu des pratiques qui organisent un flux constant de gènes entre ces variétés et des formes sauvages d'espèces cultivées rencontrées dans les champs des agriculteurs sous forme d'adventices et ce « à travers le maintien du rôle fonctionnel de la diversité génétique qui constitue pour une population un véritable réservoir d'évolution »243(*).

Pour les communautés agricoles dont la vie dépend de l'utilisation de la biodiversité locale, la conservation se présente comme le résultat indirect des pratiques culturelles et économiques de ces communautés et non pas comme un objectif économique ou écologique « elle dépend de l'organisation sociale et culturelle des sociétés, l'utilisation des ressources suit un modèle circulaire ou le matériel végétal remplit à la fois les fonctions de production et de réservoir des gènes »244(*).

Les variétés traditionnelles ne sont pas des structures génétiques figées, ce sont au contraire des structures dynamiques «  ce qu'il importe de conserver ce n'est pas la diversité génétique en tant que telle mais les mécanismes qui ont conduit à cette diversité et qui sont l'oeuvre des paysans »245(*).

Le renforcement des capacités vise également l'acquisition des techniques pour la conservation ex situ qui « intervient à titre de complément aux mesures in situ »246(*), pour les espèces dont les habitats d'origine ont été détruits ou sont fortement menacés elle se présente comme une alternative de la conservation in situ de l'agro-biodiversité et «  constitue le seul moyen de préserver l'existence de certaines espèces »247(*).

Elle se matérialise par le maintien des collections nationales : Il s'agit donc de maintenir les organismes hors de leurs habitats originaux, à l'aide d'équipements tels que les banques de gènes, de cultures cellulaires, de jardins botaniques et moyennant des techniques spécifiques telles que la cryo-préservation (technique de congélation dans l'azote liquide à -196°C ) qui assure la conservation in vitro à long terme du matériel génétique248(*).

En 1989, sur les 127 collections de base détenues par les banques de gènes, 17 collections sont localisées dans les pays en développement (81 dans les pays développées, 29 détenues par les CIRA) : Ces chiffres montrent bien que les capacités des pays en développement en matière de la conservation des RPG ex situ sont assez limitées.

La détention des RPG en banques de gènes nécessite un important effort de documentation et d'évaluation et des compétences particulières pour assurer la régénération des plantes dans la mesure que la banque de gène la plus perfectionnée ne peut offrir les conditions de la sécurité absolue249(*).

Par ailleurs, une banque de gènes nationale devrait s'insérer dans le cadre d'une dynamique de la recherche qui vise la maîtrise des technologies variétales250(*).

b- le renforcement des capacités dans le domaine de l'amélioration variétale : 

Le renforcement des capacités nationales dans le domaine de l'amélioration variétale a été prévu par l'article 6 de l'Engagement International de la FAO qui a fixé comme objectif de « rendre tous les pays à même de tirer pleinement parti des ressources phyto-génétiques dans l'intérêt de leur développement agricole », ce texte précise que cet objectif peut être atteint non seulement en matière d'inventaire, d'identification des végétaux mais également en matière « de sélection, de multiplication et de distribution des semences ». Ces aspirations légitimes de la part des PED se heurtent le plus souvent au manque des moyens financiers destinés à l'amélioration variétale et ce en dépit de la richesse dont ils disposent en terme de ressources phyto-génétiques.

Par ailleurs, l'absence d'un système de protection susceptible d'encourager les chercheurs à se lancer dans le domaine de l'amélioration variétale et de stimuler la création de cette filière constitue une entrave face au développement d'un marché national des semences dans ces pays qui demeurent pour autant dans le contexte de l'Engagement International très peu dépendants du marché international des semences commerciales, ce dernier ne représentait en fait que 12 % du marché mondial des semences251(*).

A travers la résolution 4/89, les représentants des PED ont exprimé la volonté de leurs pays d'accéder aux biotechnologies agricoles ; Appliquées au vivant végétal, ces technologies suscitaient l'intérêt de ces pays à plus d'un titre : En effet, à la formation et le renforcement de leur capacités dans ce domaine s'ajoute leurs revendications par rapport à un accès rémunéré à leurs ressources phyto-génétiques et ce en dépit d'une formulation très peu expresse du texte qui retrace comme objectif du concept des droits des agriculteurs de « profiter pleinement des bénéfices actuels et futures de l'utilisation améliorée des RPG par la sélection et autres méthodes scientifiques ».

Le renforcement des capacités techniques des PED dans le domaine de la gestion des ressources phyto-génétiques nécessite la mobilisation des fonds pour la réalisation de ces aspirations.

II- La mobilisation des financements pour la réalisation des « droits des agriculteurs »:

* 239 Dupuy ( René Jean), op cit, P 309 ;

* 240 Idem. P313.

* 241 Boisson de Chazounes ( Laurence), Desgagné ( Richard), Romano (Cesare), Protection internationale de l'environnement, Edition Pedone, Paris, 1998, P 128.

* 242 Untermaier (Jean), «  la convention de Rio sur la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique » in Les hommes et l'environnement : quels droits pour de 21ème siècle, Edition Frison-Roche, Paris, 1998, P 106.

* 243 Chauvet (Michel), « Les ressources génétiques et la biodiversité, état des connaissances et pistes pour l'action », article précité, P 83.

* 244 Aubertin (Catherine), Boivert (Valérie) « les droits de la propriété intellectuelle au service de la biodiversité une mise en oeuvre bien conflictuelle », article précité, P 11.

* 245 Idem.

* 246 Untermaier (Jean), Idem, P 107.

* 247 Levèque (Christian), Environnement et diversité du vivant, Edition Cité des sciences et de l'industrie, op cit, P 110.

* 248 Idem, P 115.

* 249 Valorisons la diversité de la nature, division de l'information de la FAO, 1993. Adresse électronique :

http://www.fao.org/DOCREP/004/V1430F/V1430F 00.HTM

* 250 Un cadre national de concertation sur la gestion des ressources génétiques est indispensable pour mener à bien ces activités, Voir à ce propos la démarche française s'agissant de l'élaboration d'une charte nationale à cet effet : La charte nationale pour la gestion des ressources génétiques , BRG, Mars, 1999.

* 251 Glachant (Mathieu), lévèque (Francois), Bonjean (Alain), op cit, P 137.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe