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Les droits des agriculteurs et le marché mondial des gènes

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par Monia BRAHAM epse YOUSSFI
Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis II - DEA en Droit de l'Environnement 2006
  

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§2- La protection des STARG par la propriété intellectuelle traditionnelle :

Les droits des agriculteurs en tant que droits à la protection des connaissances traditionnelles par rapport aux ressources phyto-génétiques en liaison avec le principe de la répartition équitable des avantages sont insérés dans le cadre de la protection juridique des ST associés aux ressources génétiques par des législations nationales qui constituent des systèmes sui generis de protection.

En effet, la propriété intellectuelle est un ensemble de principes et de règles qui réglementent l'acquisition, l'exercice et la perte de droits et d'intérêts relatifs à des actifs incorporels susceptibles d'être utilisés dans le commerce , «  son objet est intrinsèquement dynamique comme le sont les principes et les règles qui les régissent, la propriété intellectuelle a récemment connu une évolution très rapide de manière à s'adapter aux nouvelles techniques et aux méthodes commerciales découlant de la mondialisation de l'économie»420(*).

L'adaptabilité des DPI à des objets nouveaux n'aboutit pas nécessairement à la création de systèmes sui generis de protection, ainsi le droit des brevet a du relever le défi de protéger des objets nouveaux tels que les inventions biotechnologiques, les nouveaux procédés d'utilisation des moyens informatiques appelés méthodes de fonctionnement, les droits d'auteurs ont été également élargis pour englober les logiciels et la protection des bases de données.

Un système sui generis n'est concevable que lorsque des transformations substantielles d'un régime de DPI s'avèrent nécessaires afin d'assurer la protection d'un objet nouveau421(*), ainsi un système sui generis peut être défini comme la conception « d'un système nouveau de protection des DPI lorsque est apparu que l'adaptation pure et simple des mécanismes existants ne tiendrait pas compte des caractéristiques d'un nouvel objet....Un régime de propriété intellectuelle devient sui generis si l'on modifie certaines de ses caractéristiques de manière à tenir dûment compte des particularités de son objet et des besoins particuliers qui conduisent à la création d'un système distinct »422(*).

A ce titre, un régime sui generis de protection de la propriété intellectuelle traditionnelle est totalement distinct des législations portant sur l'accès aux ressources génétiques quoiqu'elles ont à traiter un même objet de protection qui est la biodiversité tantôt perçue sous l'angle de ressources génétiques, tantôt, sous l'angle de savoirs traditionnels.

L'étude de ces différents systèmes de protection des ST et d'accès aux RG (A) présente l'intérêt de nous éclairer sur la possibilité d'un système sui generis de protection des ST à l'échelle internationale et l'on ne peut que se demander sur la place des droits des agriculteurs dans ce système (B).

A - Systèmes de protection des ST et d'accès aux RG :

Des législations nationales sur la protection des STARG peuvent être considérées comme des systèmes de protection qui se distinguent des législations réglementant l'accès aux ressources biologiques. La place des droits des agriculteurs dans ces systèmes de protection devrait être analysée (I).

Des initiatives régionales tendent à harmoniser les visions nationales concernant les ST et les RG (II) ouvrant la voie pour une harmonisation globale de ces systèmes.

I -Législations nationales:

Les législations nationales portant sur les ST et les RG relèvent de deux préoccupations conflictuelles: D'une part, la réglementation de l'accès aux ressources biologiques conformément au principe de la souveraineté sur les ressources biologiques (a), d'autre part, des législations portant sur la protection des savoirs traditionnels associés aux ressources génétiques visent à assurer une régulation au profit des communautés traditionnelles (b).

a - Législations nationales portant sur l'accès aux ressources génétiques :

Le principe de souveraineté des Etats sur les ressources biologiques implique «  le droit pour réglementer l'accès à ces ressources, déterminer leur utilisation, y compris le partage des avantages qui en résultent »423(*). Ces législations sont fondées selon certains auteurs sur des attentes très peu raisonnables par rapport à la valeur du matériel végétal424(*).

Les demandeurs des RPG ont tendance à éviter l'accès dans les pays qui ont adopté de telles réglementations425(*). Plusieurs inconvénients découlent d'une telle réglementation qui constitue selon un point de vue un système  bureautique,  très peu clair  et dont le coût en terme de temps et d'argent pour assurer le principe de consentement préalable et en connaissance de cause conformément à la CDB s'avère très élevé426(*).

En effet, l'analyse de certaines législations qui réglementent l'accès aux RG nous amène à conclure à l'encadrement juridique des droits communautaires sur les STARG et ce, lorsque le consentement préalable des communautés culturelles autochtones est exigé en matière d'accès aux ressources génétiques et ce, conformément à leurs lois coutumières.

Ces législations portant sur l'accès aux RG peuvent être considérées comme des systèmes qui poursuivent deux objectifs : D'une part encadrer les échanges des ressources génétiques à l'échelle internationale, assurer une régulation intra-étatique entre l'Etat et les communautés traditionnelles, d'autre part.

A ce titre, ces législations doivent être distinguées de celles portant sur la protection des STARG proprement dits.

b- Législations nationales portant sur la protection des STARG :

Vu l'impossibilité des protéger les STARG par les Droits de propriété intellectuelle modernes, certains pays ont opté pour des solutions sui generis et considèrent ces ST comme des biens incorporels qui doivent être protégés par des droits spécifiques427(*).

La plupart de ces systèmes reposent sur différents principes juridiques tels que ceux qui sont associés à la propriété intellectuelle et ceux qui relèvent d'autres préoccupations telles que la protection de la biodiversité ou de l'agriculture. L'objectif de ces législations est la maîtrise de l'utilisation des ST et d'assurer le partage des avantages qui en sont issus sans créer nécessairement des droits exclusifs sur ces savoirs, elles s'inscrivent donc dans une logique plutôt défensive.

Deux exemples peuvent être analysés afin de retracer les tendances de la protection des STARG : Les solutions retenues par India's Plant Varieties Protection and Farmer's Rights Act et le Phillipine's Executive Order N° 247.

- India's Plant Varieties Protection and Farmer's Rights Act:

L'Inde a mis en place une nouvelle loi sur la protection des variétés végétales et les droits des agriculteurs reconnaissant aux agriculteurs le droit de conserver, utiliser, échanger et partager le produit de leur exploitation, même lorsqu'il s'agit de variétés protégées.

Parallèlement des ONG entreprennent la constitution de registres sur la biodiversité et les savoirs locaux et mettent en place un réseau de bases de données décentralisées. La réalisation de ce projet dépend toutefois de moyens mis en oeuvre : Accès payant, création d'un fond national pour la biodiversité apportant un soutien financier à ces institutions locales, bourses aux communautés et individus pour des actions de conservation des ressources biologiques.

L'accès à ces bases de données pose le problème de leur utilisation et les dérives sont possibles : Sont-elles mise au service de ces communautés ou donneront- elles lieu à des privatisations des ressources et des savoirs au moyen des DPI ?

- Philippine's Executive Order N° 247:

Trois registres sont prévus dans la loi du Philippine : L'inventaire nationale des espèces végétales, les registres nationaux du patrimoine culturel autochtone et le registre national des inventions, dessins et modèles d'utilité autochtone. Il s'agit d'un système exhaustif afin de couvrir tous les savoirs traditionnels des autochtones.

On prévoit un système de propriété intellectuelle communautaire sur les savoirs traditionnels (semences, matériaux, procédés ou produits culturels allant du tissage au folklore).

Le texte prévoit également le principe que tous les bénéfices découlant des savoirs et des innovations des communautés autochtones et locales seront affectés à leur développement et à leur bien être. Toute exploitation commerciale de ces savoirs et innovations dépendra du consentement, donné librement et en toute connaissance de cause de leurs propriétaires.

Cet exposé permet de retracer plusieurs tendances : Les registres de protection des ST sont des inventaires de ressources, accessibles pour une utilisation commerciale et pourraient être gérés au niveau communautaire et local ce qui facilite l'accès des demandeurs des gènes moyennant des arrangements contractuels dans lesquels on peut inclure des droits sur les savoirs traditionnels protégés en vertu de ces registres, il s'agit d'une étape franchie vers la reconnaissance de la propriété intellectuelle traditionnelle, celle ci a été également reconnue dans des textes à l'échelle régionale.

II- Initiatives régionales:

Les droits des agriculteurs constituent un élément de système sui generis de protection des STARG à l'échelle régionale : Contrairement à la loi modèle de l'OUA (b) qui tente selon une certaine vision428(*)d'harmoniser vainement les positions des pays africains face aux conséquences de l'application de l'article 27-3 B de l'accord ADPIC, le pacte andin (a) poursuivant également un objectif d'harmonisation aborde la question de la biodiversité sous l'angle du consentement des communautés autochtones pour tout accès aux RG.

a- L'accès aux RG conformément au Pacte Andin:

Introduit en 1996 par la décision 391, le pacte andin constitue un système commun d'accès aux ressources génétiques, applicable après adoption de législations nationales correspondantes dans les 5 pays membres : Bolivie, Colombie, Equateur, Pérou et Venezuela.

Cette démarche est particulièrement appropriée, dans la mesure où les ressources sauvages de la biodiversité (celles de l'Amazonie) sont en fait diffuses sur les territoires des cinq pays429(*).

Le pacte andin vise à couvrir non seulement les ressources sauvages, elles même mais également leurs dérivés des RG d'espèces migratoires se trouvant sur leurs territoires, la souveraineté nationale sur les RG est même étendue sur les RG détenus ex- situ. A la différence de la CDB, les pays du pacte se considèrent comme des pays d'origine des collections ex-situ (article 7 du pacte)430(*).

Le pacte Andin prévoit conformément à la CBD une procédure d'accord préalable en connaissance de cause, à la fois auprès de « l'autorité nationale compétente » et des communautés locales et autochtones et un ensemble de dispositions sur l'information publique, la participation des ressortissants nationaux aux recherches, un soutien à la conservation et à l'utilisation durable des ressources génétiques, du transfert des technologies, obligation de rapport scientifique et le dépôt de spécimen du matériel collecté. Il est largement favorable au principe de la souveraineté nationale sur les ressources biologiques, il prévoit également un système de régulation pour tout accès au profit des communautés autochtones en prévoyant le consentement des pays et des communautés à l'accès. Quant est il de la loi modèle de l'OUA.

b- Les droits des Agriculteurs dans la loi Modèle de l'OUA :

A l'instar du TIRPGAA, la loi modèle de l'OUA prévoit dans l'article 25 « la reconnaissance des droits des agriculteurs se fonde sur l'énorme contribution des communautés agricoles locales, en particulier celle des femmes, dans toutes les régions du monde, notamment dans les centres d'origine de la diversité des plantes cultivées et des autres formes de l'agro-biodiversité, pour la conservation , le développement et l'utilisation durable des ressources génétiques végétales ou animales qui sont à la base de la sélection pour les productions alimentaires et agricoles et pour la pérennité de ces contributions , les droits des agriculteurs doivent être reconnus et protégés ».

Cette reconnaissance implique selon la loi modèle la protection des droits des agriculteurs sur leurs variétés végétales, la loi modèle encadre également l'articulation des droits des agriculteurs et des droits des obtenteurs.

- Droits des agriculteurs sur leurs variétés végétales :

L'article 26 de la loi modèle de l'OUA prévoit « les variétés des agriculteurs sont reconnues et protégées conformément aux pratiques et lois coutumières en vigueur dans les communautés agricoles locales concernées, qu'elles soient écrites ou non ».

La protection des variétés des agriculteurs conformément au Droit coutumier s'inscrit dans le cadre de l'application de l'article 18 de la loi modèle de l'OUA qui prévoit que « L'Etat reconnaît et protège les droits des communautés tels qu'ils sont inscrits et protégés dans les normes, les pratiques et les lois coutumières existants au sein des communautés locales et autochtones et reconnus d'elles, que ces lois soient écrites ou non ».

Cette reconnaissance de l'application du droit coutumier pour la protection des variétés des agriculteurs est une articulation entre les droits souverains et les droits des agriculteurs : « Considérant que l'Etat et son peuple exercent des droits souverains et inaliénables sur leurs ressources biologiques » et que « les droits des communautés locales sur leurs ressources biologiques , connaissances et technologies sont reconnus ».

Il s'agit de l'un des objectifs de la législation modèle qui consiste à « Reconnaître, pratiquer et garantir les droits inaliénables des communautés locales y compris des communautés agricoles sur leurs ressources biologiques et leurs variétés végétales, leurs connaissances et leurs technologies ».

La protection des "droits des agriculteurs" sur leurs variétés végétales constitue un système de protection à part entière qui implique le principe du consentement préalable et en connaissance de cause de la communauté locale pour l'accès à leurs ressources biologiques, ces communautés ont même le droit « d'interdire tout accès à leurs ressources biologiques, innovations, pratiques ou connaissances et technologies si un tel accès doit être octroyé au détriment de l'intégrité de leur patrimoine culturel et naturel », ils peuvent, en outre, retirer leur consentement ou restreindre les activités découlant de l'accès si celui ci s'avère « nuisible à leur vie socio-économique ou à leur patrimoine naturel et culturel ».

L'application du droit coutumier en matière d'accès et de partage des ressources biologiques à travers « l'échange traditionnel » de ces ressources est un principe qui ne doit pas souffrir d'aucune exception :  L'article 22-2 de la loi Modèle de l'OUA « aucune barrière légale n'entravera le système d'échange traditionnels des communautés locales dans leurs droits prévus au paragraphe I ci-dessus et des autres droits qui peuvent être inhérentes aux pratiques et lois coutumières des communautés concernées ».

Tout en limitant la portée de ce principe qui n'est applicable que pour l'échange, peut-on en conclure à l'éventualité de la création d'un système sui generis pour les droits des agriculteurs comparable au système UPOV qui protège les activités de sélection par les obtenteurs fondé sur le droit coutumier ou à une vision spécifique du privilège du fermier par rapport à la réalité Africaine ?

- Articulation droits des agriculteurs / Droits d'obtenteurs :

La loi modèle de l'OUA reconnaît les droits des obtenteurs auxquels des limites sont prévues à l'article 43 ; Il s'agit du privilège du fermier dans la vision africaine. Conformément à l'article 27 portant sur les droits des agriculteurs qui prévoit qu' « un agriculteur ne pourra pas vendre des semences ou du matériel de multiplication issus d'une sélection industrielle protégée dans un but commercial » l'article 43 prévoit la possibilité de « multiplier , cultiver et utiliser des plantes de cette variété dans un but non commercial » et « vendre des plants ou matériel de multiplication de cette variété comme produit alimentaire ou pour tout autre usage que la culture des plantes ou la multiplication de cette variété ».

L'article 43 reconnaît également le principe de la liberté d'accès par les agriculteurs aux variétés protégées pour une sélection traditionnelle : Il s'agit de la possibilité « d'utiliser le matériel de reproduction ou de multiplication d'une variété dans le but d'élaborer une nouvelle variété végétale » seulement, cette utilisation ne devrait pas être répétitive dans le but de la commercialisation de la nouvelle variété.

On peut en déduire à une conception large du privilège du fermier dans la vision africaine qui reconnaît le système de la semence de ferme et le mode de sélection traditionnelle par les agriculteurs même par rapport à une variété protégée.

B- La protection internationale de la propriété intellectuelle traditionnelle:

Les réflexions en cours dans le cadre des travaux du comité intergouvernemental sur la propriété intellectuelle relatives aux ST, aux ressources génétiques et au folklore431(*) visent à l'instauration d'un système sui generis de la protection de la propriété intellectuelle traditionnelle.

Largement partagées par la doctrine432(*), ces réflexions pourraient aboutir à l'adoption d'un instrument à l'échelle internationale pour la protection de la propriété intellectuelle traditionnelle (I). La biodiversité est conçue comme un élément de ce système, c'est pourquoi il faut s'interroger sur la place des droits des agriculteurs dans le système à instaurer (II).

I- Réflexions sur un système international de la protection de la propriété intellectuelle traditionnelle :

Un système sui generis pour la protection de la propriété intellectuelle traditionnelle constitue une alternative à l'inadaptabilité des systèmes de protection de la propriété intellectuelle modernes pour la protection des savoirs traditionnels.

En effet quatre caractéristiques ont été retracées par le comité intergouvernemental sur le savoir traditionnel, les ressources génétiques et le folklore pour les ST qui méritent une protection:

- les éléments spirituels et concrets des ST sont étroitement liés et inséparables

- les communautés traditionnelles créent ces savoirs pour s'adapter à un monde en mutation

- les ST évoluent constamment et ne cessent de s'améliorer

- les ST englobent plusieurs domaines qui recouvrent aussi bien les expressions culturelles que la technique

Dans une optique holistique, un système sui generis doit refléter intégralement ces caractéristiques « il ne devra pas exiger que l'on sépare et isole les différents éléments des ST, mais suivre une démarche systématique et globale » 432(*), une description des ST dans leur intégralité s'impose et peut se matérialiser en inventaires et bases de données et peuvent être considérés comme une fixation matérielle des ST à protéger.

Selon cette démarche, les droits conférés pour les éléments constitutifs des ST impliquent la capacité de leur détenteurs d'empêcher les tiers de procéder à la reproduction ou la fixation et la reproduction du produit de la fixation, lorsqu'il s'agit des éléments techniques constitutifs des ST, leurs détenteurs doivent être en mesure d'empêcher l'utilisation de fabriquer, d'utiliser,d'offrir à la vente,de vendre ou d'importer à ces fins le produit traditionnel protégé. Ainsi, « un système sui generis de protection des ST au titre de la propriété intellectuelle devra donc posséder à la fois les caractéristiques propres aux droits d'auteurs et aux droits voisins et celles propre à la propriété industrielle.

La logique défensive des droits conférés en vertu d'un système sui generis ne contredit pas la possibilité d'une démarche de protection positive des ST ce qui permettra de protéger les ST par des droits moraux432(*) et patrimoniaux, les droits attachés à la protection des ST pourront également comprendre le droit de céder, de transférer et de concéder sous licence les contenus des bases de données sur les ST ayant un caractère commercial ou industriel, le comité intergouvernemental des ST, des ressources génétiques et du folklore précise à ce propos que si on ne prévoit pas « la possibilité de transférer les droits ou de les concéder sous licence, toute tentative visant à examiner la question du partage des avantages dans le cadre de la convention sur la diversité biologique sera nécessairement vouée à l'échec »433(*).

Cette position nous amène à s'interroger sur les objectifs d'un système sui generis de protection des ST : Est-il essentiellement défensif c-a-d s'efforce t-il d'interdire l'appropriation illicite de l'utilisation des ST ou est-il comparable à la protection du patrimoine culturel ? A-t-il un objectif plus général comme la conservation de la diversité biologique, l'utilisation de ses composantes et le partage juste et équitable des avantages découlant de l'utilisation des ressources génétiques ? Vise t-il à encourager l'exploitation commerciale des ST ou à les préserver dans un contexte culturel spécifique ?

La réponse n'est pas aisée sur l'intégration des priorités environnementales à un tel système de protection qui tend à intégrer les ST dans le commerce international des produits biotechnologiques en prétendant apporter une réponse à la question épineuse et complexe du partage équitable des avantages qui sont issus de la biodiversité conformément à une vision culturelle et patrimoniale des ressources génétiques qui se construit au détriment de leur valeur économique.

Mr Henri Sambuc adepte de cette vision culturelle, en partant du constat qu'aucun système actuel ne pose « le principe de  reconnaissance universelle de l'intelligence humaine » propose « un cadre juridique conventionnel donnant un statut national et international aux savoirs traditionnels sans les hiérarchiser et au profit d'un cercle le plus étendu possible des détenteurs ayant droit »434(*)

Que les savoirs traditionnels soient des connaissances intellectuelles c-à-d le produit d'une activité intellectuelle n'est mis en doute par personne. Ainsi, la propriété intellectuelle traditionnelle considérée comme alternative aux droits de propriété intellectuelle moderne est fondée sur la définition de la propriété intellectuelle telle qu'elle ressort de l'article 2 de la convention de 1967 instituant l'OMPI :

« Au sens de la présente convention, il faut entendre par

Viii ) « propriété intellectuelle, les droits relatifs :

§ aux oeuvres littéraires, artistiques et scientifiques

§ aux interprétations des artistes , interprètes et aux exécutions des artistes exécutants aux phonogrammes et aux émissions de radiodiffusion

§ aux inventions dans tous les domaines de l'activité humaine

§ aux découvertes scientifiques

§ aux dessins et modèles industriels

§ aux marques de fabrique, de commerce et de service, ainsi qu'aux noms commerciaux et dénominations commerciales.

§ A la protection contre la concurrence déloyale

et tous les autres droits afférents à l'activité intellectuelle dans les domaines industriel, scientifique , littéraire et artistique ».

On peut déduire que les DPI ne se limitent pas aux droits auxquels on se réfère usuellement mais à tous les droits afférents à une activité intellectuelle dans les domaines industriel, scientifique , littéraire et artistique.

Par ailleurs, la propriété intellectuelle traditionnelle est compatible avec l'accord ADPIC435(*) , sa mise en place pourrait éventuellement être entreprise dans le cadre de l'OMPI habituée à gérer des unions et ce conformément aux articles 3 et 4 de la convention de 1967 constituant l'OMPI.

Le but de l'OMPI conformément à l'article 3 est « de promouvoir la protection de la propriété intellectuelle à travers le monde par la coopération des Etats, en collaboration s'il y a lieu avec toute autre organisation internationale », l'article 4 ajoute « l'organisation s'emploie à promouvoir l'adoption de mesures destinées à améliorer la protection de la propriété intellectuelle à travers le monde, à mettre en harmonie des législations peut accepter d'assumer l'administration qu'implique la mise en oeuvre de tout autre engagement international tendant à promouvoir la protection de la propriété intellectuelle ou de participer à son administration, encourage la conclusion de tout engagement international tendant à promouvoir la propriété intellectuelle ou de participer à une telle administration ».

A cet effet, on peut penser à la possibilité d'instaurer un système international de la protection des ST selon la vision holistique et culturaliste de l'OMPI, qui permettra à la lumière des législations sui generis actuels qui répondent à des préoccupations spécifiques ou partielles, d'harmoniser les législations nationales selon cette vision dont les dérives sont réelles et qui risquent d'intégrer les ressources génétique dans le commerce international au seul profit des multinationales en imposant définitivement l'appropriation privative de ces ressources au détriment de l'équité recherchée à travers le troisième principe de la CDB qui est la répartition juste et équitable des avantages issus de la biodiversité.

II - Place des droits des agriculteurs dans le système de la protection de la propriété traditionnelle :

La création d'un système sui generis protégeant les droits des agriculteurs pourrait résulter d'un « mécanisme d'enregistrement des variétés mises au points par des moyens traditionnels et des connaissances, innovations et pratiques traditionnelles afin de renforcer le partage équitable des avantages »436(*).

Les travaux de l'OMPI portant sur un système international de la protection de la propriété traditionnelle ignorent formellement les droits des agriculteurs. Le traitement proposé de la question des ST dans l'approche holistique décrite ci-dessus intègre les ressources génétiques dans le système sui generis proposé sans apporter une réponse spécifique à la question des ressources phyto-génétiques.

Certains auteurs en s'inspirant de la loi modèle de l'OUA et de la loi indienne sur la protection des variétés végétales et des droits des agriculteurs défendent l'idée d'un système sui generis efficace pour la protection des variétés végétales des agriculteurs au sens de l'article 27- 3- b437(*) et indépendamment du système de l'UPOV afin de traduire les préoccupations spécifiques de certains pays qui ne sont pas nécessairement conformes à ce système438(*).

Par ailleurs, aucune mention à l'UPOV n'est faite dans l'accord ADPIC tandis que d'autres droits de propriété intellectuelle le sont, d'où l'on peut conclure à l'existence « de marges de manoeuvre, une flexibilité et une liberté de décision suffisantes au niveau national en ce qui concerne l'interprétation de l'option sui generis »439(*).

En utilisant l'expression « système sui generis efficace », l'AADPIC ne fournit aucune indication directe quant aux éléments ou aux composantes d'un tel système, certaines caractéristiques peuvent être dégagées de cet accord440(*) :

- le système sui generis doit être un système de propriété intellectuelle441(*)

- le système sui generis doit être efficace, c'est-à-dire applicable442(*)

- le système sui generis doit être non discriminatoire vis-à-vis des pays d'origine du requérant443(*)

- le système sui generis doit accorder le traitement de la nation la plus favorisée444(*) ;

Des auteurs pensent à la possibilité de créer un système sui generis adapté aux pays africains distinct de celui de l'UPOV445(*), sur le fondement d'une interprétation flexible du terme efficace « le sens de l'adjectif efficace doit être interprété de manière à servir l'intérêt général, autrement dit le degré d'efficacité d'un système sui generis ne doit pas être mesuré par rapport à la mesure dans laquelle il répond en considération les préoccupations qui animent les brevets et les autres systèmes voisins comme celui de l'UPOV. La mesure dans laquelle le système sui generis répond aux préoccupations des populations des pays pauvres doit aussi jouir d'une considération comparable.

Une telle interprétation de l'efficacité nous semble aller dans le sens de l'article 7 de l'AADPIC car elle sert « l'avantage mutuel de ceux qui génèrent et ceux qui utilisent les connaissances techniques»446(*), le renforcement du principe du traitement spécial et différencié constitue selon cet auteur le second fondement de ce système sui generis qui devrait s'appuyer sur la reconnaissance par l'AADPIC de principes essentiels en la matière comme celui de la souveraineté nationale sur les ressources génétiques et le principe du partage des avantages qui en sont issus.

A vrai dire les systèmes sui generis se constituent par défaut en tant qu'alternative au brevet, « comme tels, ils sont au croisement des questions de rémunération des innovations , d'accès aux ressources génétiques et de protection des savoirs traditionnels »447(*) ; Il s'agit d'un cadre de protection des variétés qui tel qu'il est formulé dans l'accord ADPIC donne « une certaine latitude pour la reconnaissance des savoirs et des savoirs faire existants et pour la mise en place de réglementations les protégeant »448(*).

Par ailleurs, les principes et les obligations découlant des accords et des conventions internationales portant sur les ressources phyto-génétiques jouent un rôle important dans l'élaboration des systèmes sui generis « on ne peut cependant pas en conclure que ce type de système, tel qu'il est défini dans l'accord AADPIC est l'instrument le plus apte à couvrir tous les aspects de ces principes ou obligations. Ce qui est certain c'est qu'il faudra en tenir compte lorsqu'on déterminera la portée et les objectifs du système sui generis, de manière que ni le système lui-même ni ses éléments n'aillent à l'encontre de ces principes et obligations »449(*) .

Dans cette optique, la loi modèle de l'OUA considérée comme un système sui generis qui pourrait éventuellement encadrer les droits des agriculteurs n'est pas totalement conforme à l'esprit de l'AADPIC, les difficultés de sa transposition à l'échelle nationale à travers les législations Africaines additionnées aux insuffisances des pays africains en termes de capacités et d'expertise et la méconnaissance de ses implications pour le développement national et la coopération internationale450(*)sont de nature à conclure à l'inefficacité de la législation modèle en tant que système d'harmonisation des législations nationales.

En s'interrogeant sur la place des droits des agriculteurs dans le cadre de la propriété intellectuelle traditionnelle, on peut placer ces droits aussi bien dans le cadre de préoccupations en termes de conservation des ressources biologiques et de la volonté de lever toutes les entraves à l'accès aux ressources phyto-génétiques dans l'optique de leur développement451(*).

Les droits des agriculteurs ne peuvent être conçus dans le système sui generis de la protection de la propriété intellectuelle traditionnelle défendu par l'OMPI que sous l'angle de l'application du droit coutumier, option déjà consacrée par la loi modèle de l'OUA.

Par ailleurs, le droit coutumier est une pierre angulaire dans un système de protection de la propriété intellectuelle traditionnelle. Il suppose sa reconnaissance par la loi nationale. L'accès aux RG et aux ST conformément au Droit coutumier ne contredit pas en principe les revendications relatives à la création d'un système sui generis pour la protection des variétés végétales traditionnelles. A cet effet, la loi modèle de l'OUA consacre l'inclusion des droits des agriculteurs dans le cadre des droits communautaires (rapprochement avec l'article 17-1 de la convention africaine) et recommande aux pays africains de reconnaître dans leurs législations nationales les droits coutumiers.

Seulement cette reconnaissance risque d'exclure les Etats, qui bénéficient en vertu de la convention sur la diversité biologique de droits souverains sur les ressources phyto-génétiques qui existent sur leurs territoires, de tout arrangement sur le partage juste et équitable des avantages issus de la biodiversité, cette option est susceptible de transférer définitivement l'application du principe du consentement préalable donné en connaissance de cause en matière d'accès aux ressources génétiques aux communautés agricoles locales et autochtones au détriment des Etats et de leurs droits sur la biodiversité.

Fondée plutôt sur une logique d'appropriation privative des ressources génétiques nationales, la protection des STARG s'opère pleinement à l'encontre d'une appropriation Etatique des ressources génétiques et risque de mettre en échec les tentatives de la régulation inter-étatique à travers le troisième principe de la CDB à savoir le partage juste et équitable des avantages issus de la diversité biologique, la régulation intra-étatique proposée par les systèmes de protection de la propriété intellectuelle traditionnelle n'est en définitive qu'une régulation marchande favorable aux demandeurs des gènes dans le cadre de la gestion du marché mondial des gènes par la demande.

Par ailleurs, cette régulation par la protection des savoirs traditionnels n'est possible que lorsqu'on assure dans l'ordre juridique (national et international) une articulation entre la propriété intellectuelle traditionnelle et les droits de la propriété intellectuelle moderne.

A cet effet, des voies s'élèvent aujourd'hui dans des enceintes internationales pour revendiquer une modalité de partage des avantages issus de la biodiversité qui est susceptible d'assurer non seulement une articulation entre l'innovation traditionnelle et l'innovation moderne mais également faciliter le suivi par les Etats, conformément au principe de la souveraineté nationale sur les ressources biologiques, de l'application des régimes d'accès et de partage nationaux relatifs aux ressources génétiques.

A ce titre, l'analyse de la divulgation d'origine des RG et des ST au niveau des demandes de brevet, option juridique en pleine gestation à l'échelle des négociations internationales, constitue un complément nécessaire dans cette étude dans la mesure qu'elle est susceptible d'assurer un nouveau rééquilibrage des rapports conflictuels sur la biodiversité et qui prend en considération les intérêts des parties prenantes aux arrangements de partage des avantages sans faire écran aux Etats qui bénéficient des droits souverains sur la biodiversité.

* 420 Eléments constitutifs d'un système sui generis de protection des savoirs traditionnels. Travaux du comité intergouvernemental de la propriété intellectuelle relative aux ressources génétiques, aux savoir traditionnels et au folklore : troisième session 13-21 juin 2002: Document établi par le Secrétariat de l'OMPI. Genève 29/3/2002, P 9.

* 421 Teixieira Nascimento (Ana Rachel), mémoire précité. P 91.

* 422 Eléments constitutifs d'un système sui generis de protection des savoirs traditionnels, document précité de l'OMPI, P 9.

* 423 Feyt (Henri), Sontot (André), article précité. P7. http://john-libbey-eurotext.fr

* 424 A Laird (Sarah), Kery Ten (Kate), Commercial use of biodiversity access to genetic resources and benefit-sharing, Editions EARTH SCAN, London, 1999. P 130.

* 425 Idem.

* 426 Ibidem.

* 427 Projet de loi brésilienne.

* 428 Voir à ce propos l'article de GAIN : Des agents des DPI cherchent à dérailler le processus de l'OUA. Grain. JUIN 2001.

* 429 L'absence du Brésil, qui a préféré une législation qui lui soit propre, vient restreindre l'effet du pacte andin.

* 430 Feyt (Henri), Sontot (André), article précité, P11.

* 431 Voir notamment le document de l'OMPI : Eléments constitutifs d'un système sui generis de protection des savoirs traditionnels. Travaux du comité intergouvernemental de la propriété intellectuelle relative aux ressources génétiques, aux savoir traditionnels et au folklore : troisième session 13-21 juin 2002  : Document établi par le Secrétariat de l'OMPI. Genève 29/3/2002.

434 Sambuc (Henri Philippe), op cit, P 217-236.

435 Document de l'OMPI : Eléments constitutifs d'un système sui generis de protection des savoirs traditionnels, document précité, P 16.

* 432 A ce propos le comité intergouvernemental des ST, des ressources génétiques et du folklore souligne l'importance de reconnaître les droits moraux pour les ST qui ne doivent pas faire l'objet d'une utilisation commerciale, voir à ce propos le document précité du comité intitulé Eléments constitutifs d'un système sui generis de protection des savoirs traditionnels, P 22.

* 433 Idem.

* 434Sambuc (Henri Philippe), Ibid, P 103.

* 435 Ibidem. P 209 et suivants.

* 436 Recommandation de l'UICN à la 5ème réunion de la conférence des parties à la CDB (Nairobi 15-26- mai -2000) point 23 de l'ordre du jour « accès aux ressources et partage des Avantages », mai, 2000, P 3.

* 437 L'article 27-3-b ne prévoit pas le système UPOV comme le système sui generis efficace pour la protection des variétés végétales mais exhortent les Etats à protéger les variétés végétales par un système sui generis efficace comme alternative au système du brevet.

* 438 Alors que d'autres auteurs n'envisagent les systèmes sui generis que par rapport au système UPOV, voir par sur les élément d'un système sui generis l'analyse de Dan Leskien et Michael Flitner dans « Droits de propriété intellectuelle et ressources phyto-génétiques : Option pour un système sui generis » in Dossiers des ressources génétiques n° 6 juin 1997 IPGRI. Edition électronique.

* 439 ADPIC contre biodiversité que faire de la révision de l'article 27.3 b. Grain. Mai 1999, P 2.

* 440 Voir le détail de ces caractéristiques dans le Document de la FAO : Manuel de référence « L'accord sur les aspects des Droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce ». Collection Les négociations commerciales multilatérales sur l'agriculture. Rome 2001, P 95-98.

* 441 Conformément à l'article 68 de l'AADPIC qui charge le conseil de l'AADPIC de surveiller le fonctionnement de l'accord et de vérifier si les membres s'acquittent des obligations qui en résultent.

* 442 Les droits conférés en vertu d'un système de protection des DPI sont exécutoires.

* 443 Il s'agit du respect du principe du traitement national conformément à l'article 3-1 de l'AADPIC.

* 444 Il signifie que tous les avantages accordés par un membre aux ressortissants de tout autre pays concernant la protection de la propriété des variétés végétales doivent être étendus aux ressortissant des autres membres.

* 445 Abou Abbes (Sow), les systèmes sui generis : comment concilier rémunération des innovations, innovations, conservation de la biodiversité, maintien de l'accès aux ressources génétiques et protection des savoirs traditionnels ? In Dialogue régional sur « Commerce, DPI et ressources biologiques : entre besoins d'intégration au système international et nécessité de préservation des intérêts spécifiques de l'Afrique ». Dakar 30-31 juillet 2002, ICTSD, P 157-159.

* 446 Idem, P 158.

* 447 Chétaille (Anne), « Droits de propriété intellectuelles, accès aux ressources génétiques et protection des variétés végétales en Afrique centrale et occidentale » In Dialogue régional sur « Commerce, DPI et ressources biologiques : entre besoins d'intégration au système international et nécessité de préservation des intérêts spécifiques de l'Afrique ». Dakar 30-31 juillet 2002 ICTSD. P 26.

* 448 Idem.

* 449 Manuel de référence « L'accord sur les aspects des Droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce ». Collection Les négociations commerciales multilatérales sur l'agriculture. Rome 2001, P 98.

* 450 Ekpère (J.A), « the OUA Model Law for protection of the rights of local communities, farmers and breeders and the regulation of access to biological resources » in Dialogue régional sur « Commerce, DPI et ressources biologiques : Entre besoins d'intégration au système international et nécessité de préservation des intérêts spécifiques de l'Afrique », Dakar 30-31, ICTSD, 2002, P 165.

* 451 « Farmer's rights are crucial to food security in providing an incentive for the conservation and development of plant genetic resources which constitutes the basis of food and agriculture throughout the world » Mekouar (Mohamed Ali), « A global instrument on agro-biodiversity :The international treaty on plant genetic resources for food and agriculture », FAO, Legal papers on line, January, 2002, P 10.

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