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Décentralisation et coopération décentralisée au Bénin: Vers la légitimation des espaceds publics locaux pour le developpement des collectivités locales

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par cassius jean SOSSOU BIADJA
Université de Genève Institut Universitaire d'Etudes en Développement - DEA 2004
  

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A- Espace public local et développement au Bénin

Il s'agit pour nous de définir l'enjeu que constitue la création des espaces publics locaux dans le contexte de la mise en oeuvre du processus de décentralisation au Bénin. En effet la décentralisation participe t-elle de la création d'un espace public local? Et quelle est dans la dynamique coopération décentralisée/décentralisation le rôle que peut jouer cet espace public local?

A.1- Collectivité territoriale et espace public local essai de définition

Deux succinctes définitions de ces deux notions nous donnent un point de départ de l'analyse conceptuelle de la problématique.

a- Les collectivités territoriales

La notion de collectivité territoriale ou locale est une expression générique qui désigne l'ensemble des groupements humains géographiquement localisés sur une portion déterminée du territoire national, auquel l'État a conféré la personnalité juridique et le pouvoir de s'administrer par des autorités élus. Au Bénin, la loi sur l'administration territoriale stipule en son article premier que "l'administration territoriale de la République est assurée par les autorités et services déconcentrés de l'État et par les collectivités territoriales décentralisées dans le cadre défini par la présente loi." En effet, les collectivités territoriales au titre de cette loi sont non seulement les communes à statut particulier mais aussi les communes de droit commun à qui l'État a concédé une parcelle de pouvoir, d'autonomie de gestion et de décision.

La collectivité territoriale est donc vue comme l'espace territorial géographiquement délimité sur lequel un groupement d'hommes revendique et exerce une compétence de direction et de gestion qui lui est concédée par l'État central. Cette notion ne doit pas, cependant, être confondue avec celle d'élu local car ce sont ces derniers qui reçoivent mandat de la population pour administrer et gérer la collectivité.

La collectivité locale ou collectivité territoriale est, pour ainsi dire une notion carrefour regroupant outre l'ensemble des élus locaux, les autres composantes de la société à savoir: les associations les groupements, les légitimités non électorales que sont: les pouvoirs traditionnels, les notables les comités villageois etc. Chacun jouant un rôle précis mais surtout dans la complémentarité.

Certes dans cet espace territorial local sur lequel peut être identifiée et localisée la collectivité territoriale, existe une légitimité publique locale détenue par les élus locaux, qui en vertu des pouvoirs que leur confère leur élection, sont les seuls représentants des populations.

b- L'espace public local

Au sens commun "l'espace public" désigne les espaces libres, accessibles à un libre usage et qui dans l'ère géographique sur lequel il est situé, à un caractère "public". Au sens classique, le terme "public" porte en lui deux sens liés : "qui concerne le peuple, qui appartient à l'État ". Autrement dit: d'une part, l'usage de l'espace public est ouvert et propriété de tous; d'autre part son affectation, son agencement et sa gestion relèvent de décisions "officielles". Mais ceci ne suffit pas à désigner la multiplicité de fonctions et de sens que porte et contient la notion d'espace public. Aussi, une acception moderne du concept "d'espace public" permettra de l'entendre comme le lieu du débat, dans toute sa diversité de fonction et d'échelles, de sens. Sur ce, lorsqu'on parle d'espace public on parle bien évidemment "d'espace du débat" c'est-à-dire "d'espace de citoyenneté", "d'espace pour l'exercice de la démocratie".

Pour en revenir à la notion d'espace public local, celle-ci ne se résume pas au caractère physique d'un domaine ou d'un territoire géographique donné, sur lequel les collectivités locales béninoises pourront exercer leurs pouvoirs et prérogatives conquises à travers la décentralisation.

L'espace public local est une notion carrefour qui s'appréhende ici comme l'ensemble des synergies qui se dégagent de la dynamique issue des reconstitutions institutionnelles locales. Autrement dit, il est le reflet de la vitalité qui, dans le processus de décentralisation, s'observe au niveau d'une part, des élus locaux et d'autre part de la société civile. L'espace public local est, pour ainsi dire, un espace de concertation et d'action entre différents groupes d'acteurs locaux, qui assurent pour le bien être de la société, la cohérence d'actions ponctuelles dans un cadre territorial déterminé.

Dès lors se pose la question de savoir si la décentralisation participe de la création d'un espace public local? Autrement reformulée on se demandera si on peut concevoir un espace public local dynamique sans la décentralisation? Et quelle est dans la dynamique coopération décentralisée/décentralisation le rôle joué par cet espace public local? Ou du moins quel est le rapport qui existe entre la décentralisation et l'espace public local?

A.2 -Décentralisation, espace public local et logique participative au Bénin

a- Décentralisation et espace local

La question se pose ici de savoir s'il existe un rapport de dépendance entre les deux notions, autrement est-ce la décentralisation qui crée l'espace public local ou favorise t-elle le dynamisme de celui-ci s'il lui est totalement indépendant.

La décentralisation il faut le dire, libère les énergies à la base et de ce point de vue elle "favorise la participation des populations à l'élaboration des politiques de développement dans les domaines qui les concernent [...] elle contribue à assurer leur adhésion à leur exécution et par voie de conséquence une appropriation des politiques de développement."14(*) Il va s'en dire que la décentralisation en tant que processus de transfère de compétences ouvre un espace de débat public au sein duquel se retrouvent les populations pour disséquer et solutionner les problèmes de développement qui se posent à elles.

Si la décentralisation ne peut se concevoir sans le transfère des compétences et des pouvoirs de la sphère centrale vers la périphérie, sans la promotion des libertés locales et individuelles, il est peu envisageable qu'un espace public local dynamique tel que défini ci-dessus puisse être conçu sans la décentralisation.

Aujourd'hui, la dynamique participative, fondement principal de la notion d'espace public, est ancrée dans tous les domaines de pratiques des populations locales au point où, toute logique décisionnelle de direction, de gestion qui ne s'approprierait pas cet outil, est considérée comme anachronique et "anti-développementaliste."

Les deux concepts se nourrissent et se complètent lorsqu'on se place dans le champ de la démocratie et de la coopération internationale. L'espace public local n'est pas une notion née de la décentralisation, mais du fait que la décentralisation libère les énergies à la base, cela permet la revitalisation, une certaine dynamisation voire une émancipation de l'espace publique local en tant qu'espace du débat, de citoyenneté et de démocratie.

Certes, la décentralisation constitue pour ainsi dire, un cadre favorable au développement des espaces publics locaux dans la mesure où elle leurs vient en renfort institutionnel.

Ceci nous permet de constater qu'en Afrique en général et au Bénin en particulier, les forums de débats publics et de concertations existaient depuis fort longtemps, sous la dénomination de l'arbre à palabre. Mais ces plates-formes locales ne pouvaient pas être qualifiées d'espace public local au sens de la nouvelle donne, dans la mesure où, d'une part elles excluaient des débats certaines franges de la population comme les femmes, certains adultes, certaines catégories socioprofessionnelles et même certaines castes jugées indignent de participation et d'autre part, elles ne sont pas issues d'un processus de démocratie universellement reconnu et accepté.

Mais dans le nouveau contexte de décentralisation, l'espace public local ne pourra avoir tout son sens et son dynamisme que si le débat reste ouvert et accessible à ces laissés-pour-compte.

Le processus de décentralisation amorcé depuis les municipales de décembre 2002, nous le pensons bien, offre aux nouvelles collectivités territoriales, l'opportunité et le cadre propice de concertation et d'action au niveau local, ce qui favoriserait l'amorce d'une véritable politique de coopération décentralisée au profit des populations. Certes comme le souligne si bien Bernard HUSSON, la décentralisation favorise la création d'un espace public local qui est animé par des collectivités territoriales efficaces et attentives aux initiatives des citoyens.

Cependant, si l'objet de la coopération décentralisée dans sa nouvelle conception est de se passer de l'État pour que l'aide au développement atteigne directement les populations, toute politique de coopération décentralisée ne devrait pas se fier à l'exclusive action et au pouvoir discrétionnaire des élus des collectivités locales, d'où l'importance de la logique participative fondement de la notion d'espace public.

b- L'espace public local et la logique participative

Afin de reconnaître à l'espace public toute sa légitimité, il est clair qu'il faut se concerter et collaborer. Concertation et collaboration sont-elles les fondements de cette notion? Quelle est la place qu'occupe la logique participative dans la légitimité de l'espace public local? Répondre à ces questions, c'est résoudre le problème des modalités d'intervention directe des populations dans la vie municipale.

Force est de constater que pour une bonne administration des collectivités territoriales, la pratique veut que ne soit pas exclut l'évidence de la nécessité de concertation et de collaboration entre les instances locales de direction et la société civile, c'est-à-dire les populations ou leurs structures de regroupement. La concertation doit prévaloir en amont, elle suppose que les élus locaux requièrent l'assentiment de toutes les composantes de la population par des procédés formels de concertation tels que les référendums de consultation, les enquêtes, les assises populaires etc., afin de recueillir l'avis et les besoins réels des populations dans l'optique d'orienter et de définir l'approche de coopération décentralisée favorable au partenariat. Requérir l'avis des populations et s'enquérir de leurs besoins réels avant tout partenariat de coopération décentralisée tels doit être le credo des élus locaux. Quant à la collaboration elle doit être le fruit de la conjugaison des efforts entre les différents acteurs du développement au plan local.

Il est vrai qu'en Afrique, la coopération au développement depuis que les processus de décentralisation ont émergé, a toujours joué un rôle non moins important dans la promotion et la reconnaissance des rôles et des fonctions entre les différents acteurs du développement dont entre autre les acteurs non électoraux.

Cependant, à notre avis, le fait ne doit pas seulement être unidirectionnel, c'est-à-dire qu'il ne revient pas aux seuls partenaires au développement à travers les nouveaux programmes de coopération décentralisée en Afrique, de reconnaître la force des autorités traditionnelles et d'opter pour une approche plus ouverte, qui tienne compte de la légitimité sociale et du pouvoir de fait de ces autorités. Dans de nombreux pays où la décentralisation est en cours, les rôles et les mandats des autorités locales ne sont pas clairement définis.

Le cadre juridique reste assez vague sur la façon dont les différentes autorités locales doivent assumer leurs missions et leurs responsabilités. Pire, si le cadre existe réellement, il ne reflète pas toujours la pluralité des acteurs du développement ni la dynamique sur le terrain. Le Bénin n'échappe pas à cette généralité lacunaire.

Dans le processus actuel de la décentralisation et de la coopération décentralisée chaque maillon de la société local a un rôle à jouer. Les légitimités électorales ont certes un mandat électif, représentatif et sont censées s'enquérir des besoins des populations, mais ne sont pas forcement les personnes les mieux averties des questions de développement.

Pour renchérir cette thèse nous-nous permettons de paraphraser Emile Lebris qui affirme que "Les formes les plus efficaces de la participation populaire ne sont pas nécessairement celles qui sont organisées démocratiquement".15(*)

Cette réflexion soulève l'épineuse question de la nécessaire collaboration entre les instances locales (élus locaux) et la société civile, la nécessaire recherche d'un fil d'Ariane entre le corpus social local et le corpus politique local dans la mise en place efficace d'un espace public local dynamique.

Certaines forces locales non électorales ont une influence et un charisme qui peuvent être qualifiés de pouvoir de surdétermination sur la population, elles disposent (ces forces) d'un pouvoir d'influence sur l'ensemble de la population locale ou du moins, sur une frange non moins importante de celle-ci. Ainsi, au sein de l'espace public local, les légitimités sociales doivent être concertées comme des acteurs de la scène locale incontournables, car l'expérience a prouvé que tout cadre juridique ou arrangements institutionnels qui ignorent ou met sur la touche les autorités traditionnelles menace le succès des réformes. Ceci nous amène à dire qu'il ne faut en aucun cas oublier, ni mésestimer ou sous-estimer le rôle non moins important que joue la société civile dans la détermination et la formulation des questions de développement qui concernent la population. D'où l'importance de la reconnaissance du rôle non moins important des légitimités locales non électorales. L'implication de ces acteurs et la reconnaissance de leur autorité aussi bien par les acteurs locaux (la collectivité locale) et les partenaires, peuvent se révéler cruciales dans le succès des initiatives décentralisées visant à aborder les contraintes du développement et les causes profondes de la pauvreté. Grâce à leur légitimité sociale et à leur autorité morale, les leaders traditionnels et/ou religieux peuvent jouer un rôle important dans le règlement des conflits, l'établissement de consensus sur des sujets culturellement sensibles et la mobilisation des populations locales sur les projets de développement. Ces forces ou légitimités non électorales sont membres à part entière de la société civile et ont un rôle très important à jouer qu'au point où, toute politique de développement ou de coopération qui les exclurait serait vouée à échec. Il serait alors une erreur de ne pas prendre en compte leur point de vue, voire les associer dans toute politique de coopération décentralisée.

En effet sur ce point, Bernard Husson en observant l'homogénéité des sociétés du Sud affirme à cet égard que  "Les sociétés du Sud ont leur structuration, leur organisation, avec des pouvoirs traditionnels, des autorités religieuses, des associations professionnelles, des notables, des groupements de producteurs, des familles allogènes et des familles autochtones, des partis politiques, des associations de parents d'élèves, des comités de village, des ressortissants dans la capitale, etc."

Cette structuration sociale doit permettre une homogénéité d'action (homogénéité en terme de concertation et de collaboration au sein de l'espace public local pour légitimer celui-ci) dans la mise en place des initiatives décentralisées visant à aborder les contraintes du développement et les causes profondes de la pauvreté.

Au Bénin, les élus locaux vont jouer un rôle très important dans la coopération décentralisée à travers leur implication déterminante et collective pour asseoir une bonne politique en la matière, mais en réalité qu'est ce qui légitime l'action de ses élus locaux?

C'est incontestablement la législation dans toutes ses dispositions qui légitime leurs actions puisqu'elle dispose que les communes sont administrées par des conseils locaux et municipaux qui sont élus au suffrage universel direct dans les conditions fixées par la loi. La participation des populations à la désignation des autorités locales assure ainsi la légitimité démocratique de ces dernières.

Or la légitimité démocratique n'est pas la seule qui mobilise les populations au sein des collectivités locales, il existe au Bénin bien d'autres formes de légitimité, c'est le cas de la légitimité traditionnelle détenue par des chefferies coutumières (les chefs vodouns, les chefs de certaines sectes etc.)

L'existence au niveau local de ces forces dont la légitimité est reconnue ou vécue par une frange de la population locale comme facteur influençant leur vie quotidienne, telles que les détenteurs du pouvoir traditionnel, les chefferies, les associations professionnelles, les notables les groupements de producteurs, les associations des parents d'écoles, les comités de villages etc. ne doit pas être ignoré.

Bernard Husson, le souligne à juste titre " Etre élus et disposer d'un budget ne donne ni tous les droits ni toutes les compétences pour gérer le développement local et des relations de partenariat. Avoir une expérience dans les actions de développement et appartenir à la société civile ne donne ni de légitimité politique incontestable, ni nécessairement une connaissance approfondie de toutes les questions à traiter. Les collectivités du Nord comme du Sud aussi légitimes soient-elles, sont amenés à devoir collaborer avec les associations et plus largement avec le tissu économique et social; leur partenariat a besoin de s'ouvrir et de se diversifier, ne serait-ce que pour donner tout son sens à son caractère public ".16(*)

La notion d'espace public local, nous l'avons vu, ne pourra s'inscrire dans le contexte de l'assertion de Bernard Husson que si elle fait intervenir la dynamique participative qui impose la reconnaissance du rôle non moins important des légitimités non électorales. Cependant, sous quelle forme devra t-on institutionnaliser la pratique décentralisatrice pour légitimer l'espace public local? C'est toute la question du choix du mode de participation à la gestion des affaires locales ou du choix des modalités d'intervention directe des populations dans la vie municipale.

B- Légitimité et rôle de la coopération décentralisée

Si la décentralisation offre aux nouvelles collectivités territoriales béninoises une souveraineté partielle de gestion autonome au plan administratif, politique et économique, qu'en est-il de leur légitimité, légitimité entendue sous forme de capacité à être des acteurs de la coopération au plan international? Peut-on concevoir dans le contexte actuel de la mise en oeuvre du processus de décentralisation au Bénin, que les nouvelles collectivités territoriales sont légitimées par le simple fait de leur consécration à être des acteurs de la coopération au développement?

B.1- Légitimité des communes et de la coopération décentralisée

Il est de notoriété que la décentralisation peut réellement contribuer à accroître l'efficacité de l'aide en impliquant des acteurs autres que l'État, tant dans la conception du développement que dans sa mise en oeuvre. Autrefois, l'aide passait directement de l'État ou institution donateur à l'État central receveur c'est-à-dire d'une bureaucratie à une autre. Les populations bénéficiaires n'étant donc que des acteurs trop éloignés. Cet état de chose ne permettait pas aux populations de se sentir concernées des questions de développement et par conséquent de s'y impliquer. Á la suite du processus de démocratisation et pour pallier à cette insuffisance, il a été admis que l'aide doit être gérée de façon beaucoup plus décentralisée c'est-à-dire que ce soit les populations elles-mêmes qui s'occupent de la conception des politiques de développement et de la gestion de l'aide. Impliquer directement des acteurs non étatiques, tel est le credo actuel des acteurs de la coopération au développement.

Toutefois la grande question qui taraude ces acteurs de la coopération est celle de savoir comment mettre cette théorie en pratique.

La réponse à cette question se trouve selon Bernard Husson dans la mise en place des conditions qui légitiment les collectivités territoriales décentralisées dans leur nouvel état c'est-à-dire dans leurs missions propres dans leur dialogue avec les dynamiques associatives locales.

Toutefois, indépendamment du rôle que sont appelés à jouer les nouvelles collectivités décentralisées, l'État c'est-à-dire le gouvernement central ne doit pas être exclu de la scène de la coopération. Il ne doit pas non plus se décharger de sa mission en se dessaisissant de ses devoirs qui consistent à encourager la coopération entre le gouvernement local, la société civile et les organisations partenaires.

Les collectivités territoriales sont-elles reconnues comme des actrices de la coopération décentralisée?

a- La légitimité des collectivités territoriales comme actrices de la coopération

Il est important de rappeler encore une fois que la loi sur la décentralisation au Bénin, est incomplète ou du moins souffre de certaines lacunes préjudiciables (dans une mesure formelle) aux nouvelles collectivités décentralisées dans leurs actions de partenariat vers une coopération décentralisée. Cependant peut-on pour autant dire que l'inexistence d'un cadre juridique et/ou d'une politique qui promeut la coopération décentralisée est pour autant un facteur d'inhibition, un handicap à la reconnaissance légitime des collectivités locales comme des actrices de la coopération?

Depuis son accession à l'indépendance toute la politique étrangère de l'État béninois a toujours été menée par le gouvernement à travers sa chancellerie, les différents gouvernements qui se sont succédés à la tête de l'État béninois ont fait de la coopération, une politique officielle placée au plus haut niveau (d'État à État). Or la coopération au développement est un instrument d'aide qui offre aux pays pauvres les moyens de lutter contre la pauvreté en touchant les couches les plus défavorisées. Mais aujourd'hui, la mise en oeuvre effective de la décentralisation qui s'opère par l'installation des structures afférentes, à défaut de reconnaître aux nouvelles collectivités territoriales une légitimité de jure (de droit) va t-elle leur permettre de reconnaître une légitimité de facto (de fait), qui leur ouvrira la faculté et la possibilité de conclure des accords de partenariat internationaux?

La légitimité des collectivités territoriales comme actrices de la coopération peut être justifiée par deux idées forces:

- Si la nouvelle donne en matière de coopération décentralisée reconnaît aux communes le droit d'entrer en accord de partenariat sans passer par le truchement de l'État, si on conçoit bien avec Franck Petiteville que la coopération décentralisée est, "l'un des effets induits de la décentralisation en Afrique", alors il est aisé de comprendre que dès lors que l'État met en place le processus de décentralisation, il restreint sa légitimité en matière de coopération notamment décentralisée. Il s'agit ici bien plus qu'un simple transfère de compétence d'une sphère centrale vers une sphère locale au sein d'un même État, que d'une aliénation partielle de souveraineté.

Bien qu'aucune disposition légale ne le stipule, les nouvelles collectivités territoriales décentralisées au Bénin sont de fait des actrices de la coopération décentralisée puisque les partenaires au développement (l'UE et les communes partenaires) les reconnaissent en tant que tel. Toutefois il est souhaitable que cette lacune juridique soit comblée au plus vite pour conférer aux communes une légitimité formelle, de droit.

- Du fait que la décentralisation contribue à officialiser l'entrée en scène des collectivités locales béninoises sur le terrain de la coopération, il va s'en dire que les recompositions institutionnelles locales qui sont nées de ce processus contribuent à légitimer les collectivités locales dans leur nouveau rôle d'actrice de coopération notamment décentralisée.

Parler de la légitimité des collectivités locales dans le contexte actuel de la décentralisation et de coopération décentralisée c'est leur reconnaître la qualité et la capacité d'être des actrices de la coopération décentralisée, c'est rélégitimer l'État dans sa nouvelle fonction et c'est aussi reconnaître à la coopération au développement la faculté d'intervenir directement sans passer par le canal de l'État central dans sa démarche d'appui aux collectivités locales. Il est évident qu'avec la mise en oeuvre de la décentralisation au Bénin, c'est tout le processus de la coopération décentralisée qui se trouve être remis en cause.

Cette remise en cause se justifie à plus d'un titre car:

D'une part l'État central en transférant certaines compétences aux collectivités locales, légitime ces institutions en leur reconnaissant de facto (c'est le cas de le dire puisque aucune disposition légale ne le dit expressément) la qualité d'actrice de coopération.

D'autre part la coopération au développement notamment décentralisée retrouve les raisons d'être de sa nouvelle politique celle qui consiste à appuyer directement les acteurs locaux décentralisés, qu'elle considère comme étant plus proches des populations et des questions de développement et plus concernés par la gestion et l'administration du patrimoine local.

Enfin le processus de décentralisation remet en cause, du moins réduit partiellement la compétence de l'État central à être le seul canal par lequel la coopération décentralisée doit passer pour atteindre les populations bénéficiaires.

Il s'ensuit le fait que la politique de coopération internationale de l'État élaborée et mis en application par le Ministère des Affaires Etrangères se trouve dès lors restreinte à travers la nouvelle donne de coopération décentralisée.

Pour ce qui est de la légitimité des pouvoirs publics locaux, étant des institutions nationales élues démocratiquement, les pouvoirs publics locaux ont une légitimité et une responsabilité devant les électeurs. Ce sont des institutions publiques dotées d'un mandat visant à favoriser le développement au niveau local. Tous les actes menés par ces pouvoirs ne peuvent souffrir d'aucune illégitimité.

Toutes ces raisons évoquées participent-elles de la détermination de la légitimité de la coopération décentralisée dans le contexte de la décentralisation en cours au Bénin telle que le formule Bernard Husson? En quoi la coopération décentralisée trouve t-elle une quelconque légitimité en appuyant les collectivités territoriales naissantes béninoises?

b- Légitimité de la coopération décentralisée dans le contexte de la décentralisation au Bénin

Lorsque Bernard HUSSON affirme que «[...] alors que la coopération décentralisée est jusqu'ici intervenue essentiellement selon une logique projet, ne trouverait-elle pas sa légitimité et son efficacité en se positionnant clairement en appui aux collectivités territoriales naissantes dans leurs missions propres dans leur dialogue avec les dynamiques associatives locales et leur État, oeuvrant ainsi à la construction d'un tel espace public?»17(*) C'est toute la question de la définition du rôle que peut jouer la coopération décentralisée dans un contexte de décentralisation dans les pays du Sud et plus particulièrement pour ce qui est du cas qui nous intéresse au Bénin.

Le processus de décentralisation en cours au Bénin se traduit par d'importants défis auxquels les pouvoirs publics locaux doivent faire face:

- Tout d'abord, pour ces pouvoirs publics locaux, il leur revient la tâche de créer un environnement dans lequel les collectivités pourront participer de manière effective à la gouvernance locale et au développement local.

- Ensuite les pouvoirs publics locaux doivent créer les conditions qui leur permettent de disposer du potentiel nécessaire pour contribuer à l'amélioration de la démocratie participative mais aussi pour accompagner les efforts des organisations de la société civile et du secteur privé en faveur d'un développement local durable.

- Enfin, il leur revient de créer les conditions susceptibles de générer des moyens durables de soutien au développement local.

Ces défis à leur tour impliquent l'engagement des pouvoirs publics locaux dans l'éducation et le développement des collectivités afin de poser les fondements d'une gouvernance locale réelle et responsable et de renforcer en même temps la capacité des institutions locales à répondre de manière efficace aux besoins de leurs collectivités. Or les pouvoirs publics locaux sont confrontés au problème de l'inadéquation des ressources matérielles et humaines ainsi qu'à de faibles ressources fiscales.

Sans un soutien extérieur, les actions des pouvoirs publics locaux sont vouées à l'échec, d'où le rôle non moins important de la coopération décentralisée.

Ce rôle est d'autant plus capital pour les collectivités locales qu'en les appuyant, les partenaires au développement légitiment leurs interventions lorsque celles-ci interviennent dans le cadre d'appui à la décentralisation.

Parler du rôle de la coopération décentralisée dans le contexte de la décentralisation au Bénin revient à définir tout d'abord l'approche de cette coopération qui, la mieux, favoriserait les collectivités territoriales béninoises dans la mise en oeuvre de leur relation soit avec leurs partenaires territoriaux décentralisés (les communes étrangères) soit avec les institutions bilatérales ou multilatérales d'appui à la décentralisation.

Il est clair que la définition d'une approche de coopération décentralisée passe par la mise en place d'un cadre de politique précis, qui en des termes très clairs défini le contenu et les objectifs que peuvent poursuivre chaque entité infra étatique béninoise décentralisée. L'inexistence au Bénin de ce cadre de politique de coopération décentralisée ne facilite pas la tâche aux nouvelles entités décentralisées dans leur quête de partenariat qui réponde aux nouvelles exigences de coopération décentralisée.

Quelles sont les différentes approches de coopération décentralisée envisageables par les collectivités locales béninoises?

De l'analyse faite par Bernard Husson des approches de coopération décentralisée, il ressort que deux approches de coopération décentralisée sont les plus usitées dans les rapports de partenariat entre le Nord et le Sud. Il s'agit de l'approche solidarité et de l'approche développement communal, qui pour la plupart font appel beaucoup plus à la dimension partenariale de la coopération décentralisée, plutôt que de privilégier la dimension qui la légitime en se positionnant en appui institutionnel aux collectivités.

L'approche solidarité

Selon cette approche la coopération décentralisée est un instrument au service du brassage inter humain, un espace de rencontre interculturel qui ouvre à des rapports de solidarité et à une meilleure connaissance mutuelle entre les hommes. Dans ce cas, les collectivités territoriales sollicitent et obtiennent de leurs partenaires du Nord l'aide solidarité sous la forme :

- d'envoi d'objets en nature : livres, matériel médical, matériel de transport, etc.

- de financement de petites infrastructures : puits, écoles, centres de santé, etc.

Dans cette approche les actions des partenaires ne se distinguent pas des modes traditionnels d'appui au développement.

Les collectivités territoriales ici, s'intéressent plus à la réalisation d'infrastructures, plus qu'aux dispositifs pérennes et procédures de soutien aux innovations sociales. Lorsqu'on analyse le répertoire de la coopération décentralisée au Bénin, cette approche solidarité de la coopération décentralisée à été à la base de la plupart des partenariats entre les entités déconcentrées béninoises et les communes étrangères notamment françaises. Cette forme de coopération appelée coopération-jumelage foisonnent d'exemples, on peut dans ce régistre citer à cet égard: la coopération-jumelage Echirolles-Honhoué, la coopération-jumelage Evreux-Djougou, la coopération-jumelage Guyancourt-Comé, la coopération-jumelage Rillieux la Pape-Natitingou, pour ne citer que celles-là. La liste des accords de coopération décentralisée sous cette forme est annexée au document.

L'approche développement communal

Cette approche constitue une version beaucoup plus améliorée de la précédente et s'inscrit dans le contexte d'appui politique et institutionnel aux collectivités béninoises. Elle consacre son champ d'intervention à l'appui à la gestion de services urbains.

Cet appui passe par le soutien matériel, logistique et financier aux activités telles que, la mise en place de zones artisanales, l'amélioration de la qualité des services de santé, l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères etc., et ceci dans la recherche des voies qui permettent de légitimer les nouvelles collectivités territoriales.

Notons que sous le centralisme politique cette approche de coopération a été mise en oeuvre par les communes françaises et les partenaires béninois. En réalité ce sont la plupart des coopération-jumelages qui ont su adapter cette approche de coopération à leur partenariat.

Dans ce registre de mutation s'inscrivent les partenariats entre Djougou au Bénin et la ville d'Evreux en France, Mamers et Sè, Séremane-Erzange et Natitingou, San de Cergy Pontoise et Porto-Novo, Le grand Lyon et Porto-Novo, Echirolles et Honhoué etc.

Ces deux approches dans le nouveau contexte de décentralisation en Afrique doivent selon Bernard Husson être revues. Une troisième approche peut-être envisagée et constitue l'approche la mieux adaptée qui dans le contexte de la décentralisation favoriserait les pays du Sud dont notamment le Bénin.

Cette approche non encore expérimentée s'inscrit selon Bernard Husson dans "l'accompagnement et la transformation de l'organisation administrative et politique du pays dans un sens de plus grande transparence et d'une plus grande efficacité dans les services aux populations."18(*)

L'approche appui institutionnel

Cette nouvelle approche serait beaucoup plus favorable aux nouvelles communes béninoises. En effet, avec l'appui institutionnel la coopération décentralisée légitime non seulement les collectivités territoriales dans leurs nouvelles missions, dans leurs nouveaux rôles mais aussi participe de la relégitimation de l'État central en sa qualité de gardien de la coopération décentralisée.

Dans cette approche, la coopération décentralisée est appréhendée comme un appui qui favorise l'exercice, par les sociétés, de leurs droits et particulièrement de leur droit à la responsabilité. Elle peut être un facteur de réduction du fossé existant entre le « sommet » institutionnel (capital, pouvoir, connaissance) et la « base ». Elle arrive en soutien au développement économique et social dans les régions où elle se manifeste, par un concours à la mise en place et au renforcement de services collectifs et de dispositifs pérennes, plus que par le financement de projets et programmes limités dans le temps. Les domaines d'appui lorsqu'on envisage de s'inscrire dans cette approche sont les suivants :

- Aider les collectivités locales à se constituer en interlocuteur des associations et non à se penser comme une association supplémentaire;

- Contribuer à instaurer une notion de service public;

- Aider à prendre en compte l'existence et les demandes des groupes sociaux minoritaires;

- Favoriser une attention des techniciens des services publics nationaux aux demandes des populations;

- Inciter à l'élaboration de plans locaux de développement;

- Travailler en concertation avec l'État;

- Appliquer les systèmes de fiscalité locale; etc.

Cette troisième approche non encore expérimentée dans la pratique de la coopération au développement conduit selon B. HUSSON "à instaurer un nouvel espace de coopération entre la coopération inter étatique, gérée par les administrations centrales, et la coopération non gouvernementale. Son originalité est de reposer à la fois sur une assise institutionnelle et de bénéficier d'un ancrage local, qui mobilise au-delà du cercle restreint des techniciens et militants du développement et des entreprises qui voient dans la coopération un marché".19(*)

Quel peut être le rôle de l'État dans cette perspective?

B.2- Le rôle de l'État et propositions de réformes

a- Le rôle de l'État

Les vertus de la décentralisation telles que nous le souligne Dominique Gentil sont telles que: "La décentralisation doit permettre une meilleure mobilisation des populations pour un développement à la base, durable; la décentralisation est un moyen de relégitimer l'État, de le restructurer pour qu'il soit plus efficace [...] la décentralisation est un moyen de développer la démocratie." 20(*)

En effet, les recompositions institutionnelles nées de la décentralisation au Bénin ne doivent pas être un catalyseur de la légitimité de l'État central, ces recompositions sont en quelque sorte une brèche qui est ouverte pour la relégitimation de l'État central, laquelle a pour objet premier de donner à l'État toute sa légitimité comme lieu d'élaboration des règles de la vie commune, comme garant de la cohésion sociale.

Il ne s'agit pas de vider l'administration centrale de son contenu, de le dépouiller de ses prérogatives, mais plutôt de le renforcer dans sa nouvelle mission. L'État central dans la nouvelle donne du binôme décentralisation et coopération décentralisée a encore certes un rôle à jouer, il doit être à la fois le gardien et le garant de la légitimité du processus mais aussi le mécène de la coopération dans laquelle ses collectivités s'engagent.

Bernard Husson lui-même le confirme, lorsqu'il affirme que "La décentralisation ne sera pas réussie contre les États du Sud; Elle ne peut aboutir s'ils n'assument pas leurs fonctions. Il revient toujours aux États de préparer l'avenir, de faire émerger un projet global de société, de le négocier, le porter, le défendre à l'intérieur du territoire, comme sur la scène internationale".21(*)

En effet, dans ce contexte l'État doit être avant tout le garant de la légalité des actions menées par les collectivités territoriales en matière de coopération décentralisée. Pour ce faire il doit:

- Mener le contrôle de la légalité des actions des communes,

- S'établir un partenariat avec les nouvelles collectivités à travers l'élaboration des stratégies locales de coopération décentralisée,

- Soutenir certaines actions de coopération décentralisée à travers des cofinancements,

- Accompagner les opérations de coopération décentralisée au plan local à travers l'action de ses services déconcentrés.

- La législation en la matière doit lui confier le soin de veiller au respect par les collectivités territoriales des engagements internationaux du Bénin.

Pour y parvenir la coopération décentralisée doit aider l'État à jouer ce rôle, la coopération décentralisée ne peut avoir quelque légitimité entendue au sens d'efficacité que si elle se présente comme un ensemble cohérent vis-à-vis de chaque pays et si ces pays définissent une politique claire d'appui extérieur à leurs propres collectivités. Dans ce cas alors la coopération décentralisée peut être un des moyens de rénovation de la coopération en faveur du développement et un outil efficace pour soutenir les processus de démocratisation dans les pays où cette dynamique est engagée. Bernard Husson en affirmant que la décentralisation dans les pays du sud ouvre un enjeu majeur, celui de la création d'un espace public local qui légitime les actions de la coopération décentralisée ne renie pas la légitimité des États centraux du Sud. Au demeurant dans son assertion se trouvent les conditions sine qua non de la réussite de la coopération décentralisée.

Parlant du rôle de l'État central du Sud il affirme que: "Dans le domaine économique [...], leur fonction reste déterminante dans des domaines essentiels qui influent fortement sur les actions au niveau local: Contrôle des importations, valeur de la monnaie, politique d'ouverture aux investissements étrangers, fiscalité, soutien aux circuits de commercialisation des produits agricoles, aménagement d'infrastructures primaires... Le niveau local ne dispose ni de la compétence, ni de l'autorité politique nécessaire pour se substituer à l'État sur ces questions et les collectivités du Nord ne disposent d'aucun mandat pour appuyer leur partenaire dans ce sens. Les appuis devraient avoir, au contraire, pour objet de contribuer au rétablissement ou au renforcement de la légitimité des États du Sud. La réduction des relations de coopération de l'État n'est donc pas synonyme d'une coopération plus efficace."22(*)

Pour mieux répondre aux défis de développement que lui pose la décentralisation, l'État central béninois doit construire toute sa politique de coopération décentralisée autour de quelques grands axes afin de permettre aux collectivités territoriales béninoises de coordonner leurs actions de partenariat.

b- Propositions pour le renforcement de la dynamique coopération décentralisée et décentralisation au bénin

C'est toujours à Bernard HUSSON que nous devons ces propositions qui visent à renforcer la dynamique coopération décentralisée et décentralisation. Toutefois il conviendrait de noter que les collectivités territoriales béninoises ne pourront bénéficier de l'appui de la coopération décentralisée que s'il existe un cadre de politique global en la matière. L'inexistence d'un cadre référentiel de politique cohérent de coopération décentralisée est de nature à asphyxier toute initiative de développement par la coopération, des collectivités territoriales. Les propositions ici formulées viennent en appoint au rôle de l'État.

Renforcer le niveau politique local, construire des espaces de débats

"Nouer des relations directes entre personnes et institutions décentralisées est un puissant moteur de partenariat. Sans ces dimensions, la coopération décentralisée s'étiolera aussi vite qu'elle est apparue. Pour autant, la décentralisation dans les pays du Sud ne sera réussie que si des dispositifs permettant une collaboration entre collectivités territoriales et associations sont mis en place. Il ne s'agit donc pas d'appuyer les collectivités une à une, mais bien de contribuer à une dynamique locale qui implique le plus grand nombre d'acteurs. Cette option demande le respect de conditions précises : que soit dépassée l'aide par projet qui concentre une abondance de ressources humaines, techniques et financières pour traiter d'une situation, pour centrer les appuis sur la construction d'un espace public local de dialogue entre collectivités et acteurs non gouvernementaux (en charge pour cet espace d'impulser et soutenir les dynamiques locales."23(*) En effet le renforcement du niveau politique local passe par la mise en place au niveau des collectivités territoriales décentralisées des facteurs et des conditions propices à l'exercice effectif de la démocratie à la base. Même si, force est de le reconnaître, grâce à la décentralisation l'espace public local va être créé et que la coopération au développement contribuera à dynamiser cet espace, il ne serait point superflu de rappeler que la construction d'un l'espace public local dynamique est déterminante dans la réussite des programmes de coopération décentralisée visant à appuyer les processus de décentralisation. Cet effort de renforcement doit d'abord provenir et être mis en place par les autorités politiques du Bénin avant d'être appuyé par la coopération décentralisée.

Aider les collectivités locales à agir comme institutions publiques

Afin que les collectivités locales béninoises soient reconnues comme institutions publiques légitimes, par les résidents et par les différents partenaires au développement, afin que les pouvoirs publics locaux soient légitimés dans leurs rôles et afin que les partenaires au développement puissent intervenir dans la légitimité, il faut que les nouvelles collectivités territoriales décentralisées béninoises disposent de ces priorités sine qua non:

(1) Un budget bien alimenté par la collecte de l'impôt car sans ressources financières prélevées localement, les collectivités territoriales n'auront pas de crédibilité. La mise en place d'une législation fiscale au profit des collectivités territoriales qui définisse l'assiette des impôts locaux et les autres sources de financement des budgets locaux est d'une impérieuse et pressante nécessité.

(2) Un personnel bien formé agissant dans le cadre d'un service public local dynamique est le gage de la réussite et de la poursuite des réformes institutionnelles entreprises.,

(3) En liaison avec les instances nationales construire un système d'information pour choisir des priorités de développement.

En effet, des informations précises et claires pour choisir les priorités locales sont aussi importantes que les autres priorités ci-dessus citées. "Pour assurer pleinement leurs responsabilités, arrêter leur politique et concrétiser leur décision, les collectivités du Sud ont besoin de disposer d'une information précise sur leur territoire, qui dépasse la seule distribution des équipements installés. [...] Sans ces informations, les collectivités auront de grandes difficultés à organiser leurs priorités et à asseoir des assiettes pour les impôts locaux."24(*)

Mais déjà le Bénin peut se targuer d'avoir mis en place sur financement européen, la SERHAU-SEM (société d'économie mixte) qui a mis au point un produit informatisé et une méthode d'utilisation, pour la collecte équitable de l'impôt local dans des communes de taille moyenne.

Ce sont là les enjeux que la coopération décentralisée peut aider à relever et que le gouvernement central béninois doit contribuer à promouvoir.

* 14 Charles Nach Mback Décentralisation en Afrique: enjeux et perspectives in Afrique contemporaine N° spécial 3e trimestre 2001

* 15 Emile Lebris » La laborieuse construction d'un nouvel espace public» introduction au thème « la construiction municipale en Afrique» in politique Africaine n°74 Juin 1999

* 16 Bernard HUSSON  «coopération décentralisée légitimer un espace public local au Sud et à l'Est » in Traverse n°7 http://www.resacoop.org/ftp/transverses.pdf P.6

* 17 Bernard Husson (Ciedel) La coopération décentralisée, légitimer un espace public local au Sud et à l'Est in traverses n° 7

* 18 Bernard Husson (Ciedel) La coopération décentralisée, légitimer un espace public local au Sud et à l'Est in traverses n° 7

* 19 Ibidem

* 20 Dominique Gentil Coopération et décentralisation l'avanture ambigue in la coopération française en question Bibliothèque Publique d'Information

* 21 Bernard Husson (Ciedel) La coopération décentralisée, légitimer un espace public local au Sud et à l'Est in traverses n° 7

* 22 Ibidem

* 23 Ibidem

* 24 Ibidem

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo