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L'"arbitralisation" de la cour internationale de justice: une étude critique

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par Pierre Barry NJEM IBOUM
Institut des Relations Internationales du Cameroun - Diplome d'Etudes Supérieures Spécialisées 2010
  

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PARAGRAPHE 2

La permanence fonctionnelle de la Cour.

La Cour est en activité quasiment toute l'année civile durant (A), cette situation démontre bien la permanence fonctionnelle de la Cour, de même que la continuité relevée de sa jurisprudence (B).

A- L'activité incessante de la Cour.

Tradition bien établie et preuve s'il en faut d'une permanence certaine, la Cour est en fonction quasiment toute l'année civile durant. En effet, alors pourtant que les tribunaux arbitraux se caractérisent par une existence essentiellement éphémère295(*), la Cour ne connaît que des périodes de vacances judiciaires qui en réalité ne gèlent pas le fonctionnement de la Cour puisque la Cour possède un « secrétariat » rôle que joue le greffe de la Cour. Dans la même logique d'assurer une continuité de fonctionnement de la Cour, un empêchement du Président ne constituerait aucunement un obstacle dirimant au fonctionnement de la Cour puisque parade a été prévue à cette situation. En effet l'article 13296(*) du Règlement de la Cour297(*) prévoit très clairement des modalités de remplacement. C'est sûrement à cette même logique que répond la formule de remplacement automatique d'un membre de la Cour n'ayant pas achevé son mandat298(*). Rien d'extraordinaire en réalité, mais pratique qui prend toute son importance quand on sait que la prise de fonction des membres élus de la Cour, ne se fait que le 06 février299(*) de l'année où les vacances auxquelles il est pourvu se produisent300(*). Cela démontre à souhait le souci qu'ont eu les pères fondateurs de la Cour d'assurer une continuité de fonctionnement de la Cour.

Continuité qui se note également dans la jurisprudence de la Cour.

B- La continuité jurisprudentielle de la Cour.

La pratique judiciaire de la Cour est un argumentaire à considérer pour établir une régularité fonctionnelle de la Cour. En effet, même s'il est indéniable que « la décision de la Cour n'est obligatoire que pour les parties en litige et dans le cas qui a été décidé301(*) » posant le principe d'une relativité de la chose jugée des décisions de la Cour, toujours est-il qu'il ne serait pas farfelu de parler d'une jurisprudence302(*) de la Cour. En effet de façon régulière la Cour se réfère de façon précise à sa « jurisprudence constante303(*) » en citant parfois des passages des décisions antérieures304(*), en relevant les faits pertinents de ces affaires pour les identifier au cas d'espèce. Si bien qu'une logique de cohérence, de continuité305(*) se dégage des raisonnements et des conclusions de la Cour, et qu'une autorité logique en découle306(*). Autorité donc ne saurait se prévaloir justement du fait de ce manque de permanence, les tribunaux arbitraux307(*). L'on doit quand relever que certaines sentences arbitrales bien que rendues dans le cadre d'un arbitrage ad hoc, ont une autorité bien établie en droit international. La Cour n'hésite pas souvent à se référer à ces sentences arbitrales pour fonder ses propres décisions. C'est ainsi par exemple que dans l'affaire qui a opposé le Cameroun à son grand voisin anglophone, la Cour dira « il soutient également qu'il ressort clairement de la jurisprudence de la Cour et de plusieurs sentences arbitrales que ces activités relèvent bien d'actes effectués à titre de souverain et sont dès lors pertinentes pour résoudre la question du titre territorial (Minquiers et Ecréhous, arrêt, C. I. J. Recueil 1953; Sahara occidental, avis consultatif; C.I.J. Recueil 1975; Rann de Kutch, sentence arbitrale, International Law Reports (ILR), vol. 50, p. 1; Canal de Beugle, arbitrage, ILR, vol. 52, p. 93)308(*) ». Elle le fera encore dans d'autres affaires309(*).Cela pourrait s'expliquer par la pertinence de la sentence et l'à-propos par rapport à l'affaire en instance.

Si cette pratique permettant d'assurer une sécurité juridique, permet, ou alors devrait permettre très clairement au juge international de participer - ce que pense d'anciens grands noms de la Cour internationale de Justice et de la Cour permanente de Justice internationale - au développement du droit international310(*) elle fixe plus le caractère permanent donc judiciaire, de la Cour, en même temps qu'elle annonce une autonomie véritable de cette dernière.

* 295 Il s'agit bien là de l'hypothèse des tribunaux arbitraux ad hoc, qui a notre sens sont plus nombreux.

* 296 Cet article se lit comme suit : « lorsque la présidence est vacante ou que le président est empêché de l'exercer, elle est assurée par le vice-président ou, à défaut, par le juge doyen ».

* 297 Règlement de la Cour internationale de Justice adopté le 14 avril 1978, entré en vigueur le 1er juillet 1978et régissant actuellement le fonctionnement de la Cour. Le 5 décembre 2000, la Cour a amendé deux articles du Règlement de 1978 - l'article 79 sur les exceptions préliminaires et l'article 80 relatif aux demandes reconventionnelles - ces modifications sont entrées en vigueur le 1er février 2001.

* 298 Article 2 alinéa 2 du Règlement de la Cour.

* 299 Date à laquelle les membres de la Cour élus à la première élection sont entrés en fonction en 1946.

* 300 Article 2 alinéa 1 du Règlement.

* 301 Article 59 du Statut de la Cour.

* 302 Jurisprudence prise ici dans le sens de « position qui se dégage, sur un point de droit donné, des décisions rendues par une juridiction. Ensemble de décisions concordantes. », Jean SALMON (dir.), Dictionnaire de droit international public, op. cit.

* 303 « Cette jurisprudence a été appliquée par une chambre de la Cour dans l'affaire du Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salvador/Honduras) » C.I.J., Certaines terres à phosphates à Nauru (Nauru c. Australie), Exceptions préliminaires, arrêt du 26 juin 1992, par. 52 p.24.

« La Cour n'a pas à se préoccuper de savoir si un différend portant sur le même objet a existé ou non entre la République du Cameroun et les Nations Unies ou l'Assemblée générale. De l'avis de la Cour, il suffit de constater que [...] les positions opposées des Parties [...] révèlent l'existence entre la République du Cameroun et le Royaume-Uni, à la date de la requête, d'un différend au sens admis par la jurisprudence de la Cour actuelle et de l'ancienne Cour. » .Affaire du Cameroun septentrional (Cameroun c. Royaume- Uni), Exceptions préliminaires, Arrêt du 2 décembre 1963 : C.I.J. Recueil 1963, p. 15. à la page 16. « La Cour a déjà été amenée à se prononcer sur des questions de ce genre. Dans l'affaire de l'Or monétaire pris à Rome en 1943 ».C.I.J. certaines terres à phosphates à Nauru (Nauru c. Australie), ibid., par.50 p. 23.D'autre part, la Cour a décidé dans l'affaire de l'Anglo-Iranian Oil Co. (C.I.J. Recueil 1952, p. 104) que le principe de l'interprétation suivant le sens ordinaire n'impose pas toujours l'interprétation purement littérale des mots et des phrases; dans l'affaire du Service postal polonais à Dantzig (C.P.J.I., Série B, no II, p. 39) la Cour permanente a dit que ce principe ne s'appliquait pas lorsque l'interprétation ainsi donnée conduisait « à des résultats déraisonnables ou absurdes ». [...]. Or, si l'interprétation littérale devait conduire à considérer une partie de la déclaration thaïlandaise de 1950, après coup et en raison de l'arrêt de la Cour en l'affaire Israël c. Bulgarie, comme une tentative d'accepter la juridiction d'une Cour dissoute, il y aurait là une contradiction nette avec la mention, dans une autre partie de la déclaration ...».  Affaire du temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande), Exceptions préliminaires, Arrêt du 26 mai 1961 : C. I. J. Recueil 1961, p. 17, à la page 33.

* 304 « Ainsi, le mandat avait été «créé, dans l'intérêt des habitants du Territoire et de l'humanité en général, comme une institution internationale à laquelle était assigné un but international : une mission sacrée de civilisation » (Statut international du Sud-Ouest africain, C.I.J. Recueil 1950, p. 132). Cette «mission » ... devait être exercée au profit des populations en cause auxquelles on reconnaissait des intérêts propres » (Conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l'Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, C.I.J. Recueil 1971, p. 28-29, par.46) ».C.I.J. Certaines terres à phosphates à Nauru (Nauru c. Australie), ibid. par.41, p.20. « Par la suite, dans l'affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique), la Cour s'est exprimée dans les termes suivants : « il ne fait pas de doute que, quand les circonstances l'exigent, la Cour déclinera l'exercice de sa compétence, comme elle l'a fait dans l'affaire de l'Or monétaire pris à Rome en 1943, lorsque les intérêts juridiques d'un Etat qui n'est pas partie à l'instance « seraient non seulement touchés par une décision, mais constitueraient l'objet même de ladite décision » (C.I.J. Recueil 1954, p. 32). En revanche lorsque des prétentions d'ordre juridique sont formulées par un demandeur contre un défendeur dans une instance devant la Cour et se traduisent par des conclusions, la Cour, en principe, ne peut que se prononcer sur ces conclusions, avec effet obligatoire pour les parties et pour nul autre Etat, en vertu de l'article 59 du Statut. Comme la Cour l'a déjà indiqué (au paragraphe 74 ci-dessus), les autres Etats qui pensent pouvoir être affectés par la décision ont la faculté d'introduire une instance distincte ou de recourir à la procédure de l'intervention. Dans le Statut comme dans la pratique des tribunaux internationaux, on ne trouve aucune trace d'une règle concernant les « parties indispensables » comme celle que défendent les Etats-Unis, qui ne serait concevable que parallèlement à un pouvoir, dont la Cour est dépourvue, de prescrire la participation à l'instance d'un Etat tiers. Les circonstances de l'affaire de l'Or monétaire marquent vraisemblablement la limite du pouvoir de la Cour de refuser d'exercer sa juridiction; aucun des pays mentionnés en la présente espèce ne peut être considéré comme étant dans la même situation que l'Albanie dans cette affaire, au point que sa présence serait véritablement indispensable à la poursuite de la procédure. » (Arrêt du 26 novembre 1984, C.I.J. Recueil 1984, p. 43 1, par. 88.) ». C.I.J., Certaines terres à phosphates à Nauru (Nauru c. Australie), ibid. par.51, p.24.

* 305 Le professeur KAMTO dira sur ce sujet que « [la Cour] applique un principe de cohérence qui l'amène à se référer systématiquement à ses décisions précédentes, à s'écarter le moins possible de son raisonnement antérieur ». Maurice KAMTO, « la volonté de l'État en droit international », op. cit. à la p. 286.

* 306 Ce que pense Bruno OPPETIT lorsqu'il affirme parlant des tribunaux judiciaires que « la jurisprudence des tribunaux judiciaires, sans aller sans doute jusqu'à représenter une véritable source du droit, n'en est pas moins empreinte, au sens où l'entendait Gény, d'une autorité considérable. » Bruno OPPETIT, Théorie de l'arbitrage, Paris, Presses Universitaires de France, 1998, 127 p. à la p.32.

* 307 Dans la lancée de l'idée précédente Bruno OPPETIT affirme « la jurisprudence arbitrale, en dépit de sa richesse, exerce sans doute un rayonnement moindre, car sa relativité est accrue par le secret, la dispersion et l'absence de hiérarchie ou même de coordination des juridictions dont elle émane, qui ne forment en aucune manière un ordre homogène ».il faudrait cependant relativiser cette idée.

* 308 Frontière terrestre et maritime Cameroun Nigeria Arrêt du 10 octobre 2002 Par.222

* 309 Délimitation maritime dans la région située entre le Groenland et Jan Mayen, Projet Gabcikovo-Nagymaros, Ile de Kasikili/Sedudu et Délimitation maritime et questions territoriales entre Qatar et Bahreïn.

* 310 « Je regrette que la Cour n'ait pas jugé bon, dans son arrêt, de donner à ses considérations juridiques un registre plus étendu. Pour ma part, je partage l'avis de l'ancien juge sir Hersch Lauterpacht, selon lequel « de puissantes considérations - tenant à la justice internationale et au développement du droit international - militent en faveur du caractère entièrement exhaustif des prises de position judiciaires des tribunaux internationaux » (LAUTERPACHt, The Development of International Law by the International Court, éd. révisée, 1958, chap. 3, p. 37). A quoi sir Hersch ajoutait (p. 39) : «Sur le plan interne on peut, pour administrer la justice, s'en tenir à des motifs purement formels ou procéduraux. On peut aussi, sans avoir à ménager les susceptibilités de l'une ou l'autre partie, ne pas tenir compte d'arguments qui ne sont pas indispensables pour la décision. Il ne sied pas d'en user de même dans les relations internationales, où les parties sont des Etats souverains, dont la juridiction de la Cour dépend à long terme, et où il importe, non seulement que justice soit faite, mais aussi qu'elle paraisse avoir été faite. » Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited (exceptions préliminaires) (Belgique c. Espagne), opinion individuelle du Juge Jessup C.I.J. [1970] Rec.4 par.2, p.161. Ce à quoi renchérissait sur ce rôle que devrait jouer la Cour le Juge Tanaka : « La fonction la plus importante de la Cour en qualité de principal organe judiciaire des Nations Unies consiste non seulement à régler les différends concrets, mais aussi, par son raisonnement, à contribuer au développement du droit international. » BarceIona Traction, Light and Power Company, Limited, (exceptions préliminaires) ibid, p.4.Notons également l'opinion individuelle du Juge M. Anzilotti sur la nature du processus judiciaire international dans l'affaire des Prises d'eau à la Meuse (C.P.J.I., série AB n° 70, p. 45) : « Le dispositif de l'arrêt se borne à rejeter les conclusions de la demande principale et de la demande reconventionnelle. Selon moi, dans un procès qui avait principalement pour objet l'interprétation d'un traité par rapport à certains faits concrets et dans lequel le demandeur et le défendeur présentaient, sur chaque point, des conclusions indiquant l'interprétation que chacun d'eux désirait voir adopter par la Cour, celle-ci ne pouvait se limiter au simple rejet des conclusions du demandeur: elle devait se prononcer également sur les conclusions du défendeur et, en tout cas, dire pour droit ce qu'elle jugeait être la bonne interprétation du traité. Les observations qui suivent ont été rédigées en partant de cette manière de concevoir la tâche de la Cour dans la présente affaire. »Voir enfin l'opinion individuelle du Juge sir Hersch Lauterpacht en l'affaire relative à Certains emprunts norvégiens, où il déclare: «A mon avis, une partie devant la Cour est fondée à attendre que l'arrêt reflète aussi exactement que possible les aspects fondamentaux de la position juridique prise par cette partie. Au surplus, j'estime conforme au rôle véritable de la Cour de répondre aux deux principales questions de compétence qui ont divisé les parties pendant de longues années et qui présentent un intérêt considérable pour le droit international. Il se peut qu'il y ait quelque chose de convaincant et de séduisant dans l'opinion d'après laquelle, entre plusieurs solutions possibles, un tribunal doit choisir la plus simple, la plus concise et la plus rapide. Toutefois, j'estime que cela ne saurait constituer, pour cette Cour, les seules considérations légitimes en cause. » Affaire relative à certains emprunts norvégiens, C. I. J. Recueil 1957, p.36.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand