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L'"arbitralisation" de la cour internationale de justice: une étude critique

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par Pierre Barry NJEM IBOUM
Institut des Relations Internationales du Cameroun - Diplome d'Etudes Supérieures Spécialisées 2010
  

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PARAGRAPHE 2

L'autonomie méthodologique de la Cour335(*)

En posant le principe de l'obligation de résoudre les conflits par des moyens pacifiques, la Charte des Nations Unies énonce indistinctement en son article 33336(*) un ensemble de procédures pour parvenir à cette fin. Ces différents mécanismes empruntent des chemins divers, mais tous participant à une même logique, résoudre le différend. Parmi ces mécanismes, d'aucuns sont dits politiques ce qui sous-entend que c'est la politique qui gouverne le déroulement des opérations, tandis que les autres à l'instar de l'arbitrage et du règlement judiciaire sont dits juridictionnels, c'est-à-dire qu'ils sont assis sur un usage du droit.

Ce dernier - qui nous intéresse ici puisque c'est le mode employé par la Cour - se distingue de tous les autres en un élément essentiel qui est que le juge met fin au différend sans chercher à « gommer les différences337(*) » ayant comme seul objectif de rendre justice. Là où les autres font preuve de pragmatisme en adoptant des décisions transactionnelles, là où les autres se bornent juste à proposer des bases de négociation, ou encore élucident juste les questions en litige et exposent aux parties les termes d'un arrangement convenable, le « juge [lui] tranche : sa fonction est de décision et d'adjudication : donnant raison à l'un, il donne tort à l'autre [...]. Il ne lui revient ni de conseiller les parties sur la conduite à tenir, ni de prévoir des difficultés ultérieures, ni d'exercer une mission de médiation ou de bons offices338(*) ». Le juge ne prend donc pas en compte des considérations d'opportunité ou de politique encore moins des sentiments dans le rendu de son verdict. La Cour l'a fort bien dit dans l'affaire Haya de la Torre (C. I. J. Recueil 1951, pp. 78-79), elle a noté que les deux Parties lui demandaient une décision « sur la manière dont l'asile doit prendre fin ». Elle a dit que l'asile devait prendre fin, mais a refusé d'indiquer les moyens qui devaient être employés pour donner effet à cette injonction. La Cour s'est exprimée en ces termes : 

« La forme interrogative qu'elles ont donnée à leurs conclusions montre qu'elles entendent que la Cour opère un choix entre les diverses voies par lesquelles l'asile peut prendre fin. Mais ces voies sont conditionnées par des éléments de fait et par des possibilités que, dans une très large mesure, les Parties sont seules en situation d'apprécier. Un choix entre elles ne pourrait être fondé sur des considérations juridiques, mais seulement sur des considérations de nature pratique ou d'opportunité politique; il ne rentre pas dans la fonction judiciaire de la Cour d'effectuer ce choix.339(*) ».

Devant le juge et donc en principe devant la Cour, « une partie gagne, et une partie perd340(*) ». Il faudrait quelque peu relativiser cette idée, parce que rien n'interdit en réalité au juge de tenir compte de certaines autres considérations. De même, l'on peut sans pour autant qu'il y ait défaut de jugement, aboutir à une situation où le droit à dire soit dit de telle manière que les deux parties se retrouvent dans une situation d'égalité. Qu'elles soient en même temps créditrices et débitrices du jugement rendu.

La Cour a aussi prouvé une grande autonomie dans l'échafaudage de son raisonnement et le choix des bases juridiques de ses décisions en s'appuyant sur l'adage jura novit curia (le droit est l'apanage du juge). Car si le juge doit s'exprimer sur le petitum, ou l'objet du différend, tel qu'il est indiqué dans les demandes et les conclusions des parties, il est libre en revanche de le faire de la manière qu'il considère la plus adéquate ; par exemple sans se prononcer nécessairement sur tous les points soulevés par les parties à condition qu'il puisse arriver à donner une réponse complète au petitum. Mais cela signifie surtout que le juge a toute liberté dans l'orientation juridique de sa décision, sans être asservi à un choix entre les théories juridiques défendues par les Parties.

CONCLUSION DU CHAPITRE

La Cour internationale de Justice présente bien des éléments de permanence et d'indépendance. La permanence se note notamment à travers sa fixité et sa constance fonctionnelle. L'indépendance quant à elle peut être relevée de par l'autonomie institutionnelle et méthodologique de la Cour. Cette dernière est un élément très important pour la détermination d'une véritable autonomie de la Cour. Mais pour qu'il en soit ainsi, il faudrait que « l'instrument » que la Cour utilise pour « fabriquer » sa décision jouisse d'une légitimité, entraînant une adhésion sans équivoque des parties. De même faut-il qu'en même temps la décision rendue jouisse d'une autorité fondée sur les textes fondateurs de la Cour et admise par les États parties devant la Cour.

En clair le droit doit faire son lit dans le fonctionnement de la Cour et ses décisions doivent être obligatoires ce qui s'avère être le cas dans la pratique.

* 335 L'idée - à laquelle nous adhérons - et une partie des développements qui suivront ont été empruntées à Fouret et prost op. cit.

* 336 « 1.les parties à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales, doivent en rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix.2. Le Conseil de sécurité, s'il le juge nécessaire, invite les parties à régler leur différend par de tels moyens. »

* 337 Denis ALLAND, (dir.), Droit international public, Paris, Presses Universitaires de France, 2000 à la p.493, cité par Fouret et Prost, à la page 207.

* 338 Ost, supra à la p.45, cité par Fouret et Prost op. cit. à la p. 207.

* 339 Affaire du Cameroun septentrional (Cameroun c. Royaume- Uni), Exceptions préliminaires, Arrêt du 2 décembre 1963 : C.I.J. Recueil 1963, p. 15. à la page 19.

* 340 Richard BILDER, « International dispute settlement and the role of international adjudication » dans Lori F. Damrosch, (dir.), The International Court of Justice at a crossroads, New York, Transnational Publishers, 1987, à la page170. cité par Prost et Fouret op. cit. à la p.207.

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