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L'"arbitralisation" de la cour internationale de justice: une étude critique

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par Pierre Barry NJEM IBOUM
Institut des Relations Internationales du Cameroun - Diplome d'Etudes Supérieures Spécialisées 2010
  

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PARAGRAPHE 2

LE ROLE PRÉPONDÉRANT DES PARTIES SUR LE FONCTIONNEMENT DE L'ARBITRAGE ET L'EXECUTION DES SENTENCES.

L'initiative de l'arbitrage appartient donc exclusivement aux parties130(*) . Cette forte présence se note également quasiment pendant toute l'instance arbitrale (A) mais également bien après que soit rendu la sentence (B). Ce second point n'étant pas en réalité un trait unique à l'arbitrage.

A : Pouvoirs de modulation de l'organe arbitral par les parties.

Possibilités moins offertes en situation d'arbitrage institutionnel qui nous l'avons vu, est un véritable contrat d'adhésion auquel sont invités à adhérer les parties, et qui pour la plupart du temps aménagent tout. Les parties à un arbitrage ont des possibilités de réformer l'organe arbitral à leur guise.

C'est ainsi qu'il leur revient de déterminer le nombre d'arbitres131(*) et ce n'est pas ni le temps que doit prendre l'arbitrage et le lieu de celui-ci qui leur échappe. Á leur convenance donc, elles vont décider soit de confier l'arbitrage à un juge unique, soit à 3 ou cinq etc. un nombre impair d'arbitres étant très souvent privilégié. De même vont-elles décider d'accorder 6 mois voire 1 an ou pourquoi pas 2 ans à l'arbitre selon les nécessités de leurs actions. Toujours vont-elles décider de saisir l'arbitre résidant dans le pays ou le lieu de l'une des parties ou dans un pays ou lieu neutre.

Participant toujours des possibilités qui leur sont offertes, les parties peuvent mettre fin d'un commun accord aux fonctions de l'arbitre et mettre donc ainsi un terme à l'arbitrage132(*). Alternative offerte également aux parties devant le juge international et national, mais disparaissant devant ce dernier lorsque l'une des parties s'est constituée partie civile, l'action étant alors menée par le procureur.

Les parties peuvent également de façon directe ou en se référant à un règlement d'arbitrage régler la procédure arbitrale. Elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix. Les arbitres tranchent le fond du litige conformément aux règles de droit désignées par les parties ou à défaut choisies par eux comme les plus appropriées compte tenu par exemple des usages de la matière du différend. L'arbitre peut statuer en amiable compositeur lorsque les parties lui ont conféré ce pouvoir.

B : La disponibilité de la sentence et la nécessité d'une garantie d'exécution.

Très souvent la sentence arbitrale est rendue dans la procédure et selon les formes convenues par les parties. Cela implique par exemple que les parties pourraient exiger que la sentence soit rendue à l'unanimité des arbitres133(*).

Lorsque la sentence est rendue, en principe cette décision met fin au différend et fixe dorénavant les positions des parties, mettant donc à jour les droits de chacun. Cet idéal, s'il s'est souvent vérifié, connaît quelques fois des anicroches. En effet comme précédemment relevé, la réussite de l'arbitrage repose sur la bonne foi des parties et l'exécution de la sentence n'en est pas épargnée. L'exécution spontanée pourrait donc apparaître dans une hypothèse criarde de mauvaise foi comme une exception. Rien en réalité n'oblige les parties à exécuter la sentence rendue134(*). De la sorte, la sentence peut ne pas connaître d'exécution, une exécution lente, faire l'objet d'un accord etc. bref plusieurs modalités d'exécution peuvent être formulées.

Cet état de fait, - véritable faiblesse de l'arbitrage - a pour conséquence une véritable nécessitée de renforcement de l'autorité de l'arbitre. En effet, contrairement à la justice étatique où les garanties d'exécution sont aménagées et font corps avec le processus judiciaire, l'arbitrage pour sa part fait recours à un tiers extérieur à la procédure. C'est ainsi que la partie créditrice du jugement fait recours au juge étatique par le biais de la demande d'exequatur135(*) pour briser la volonté rebelle. Le juge étatique apparaissant en fin de compte comme le garant de l'exécution de la sentence car seul possédant l'autorité y afférent. C'est le constat auquel aboutit Yves GUYON lorsqu'il affirme que : « C'est là la principale cause d'infériorité des sentences arbitrales par rapport aux jugements rendus par les juridictions étatiques. L'arbitre a le pouvoir de dire le droit. Mais les parties, qui sont les personnes privées, ne peuvent lui déléguer un pouvoir de contrainte, dont elles ne disposaient pas elles-mêmes. D'où la nécessité d'avoir recours à la collaboration des juridictions étatiques, si une exécution forcée s'avère nécessaire136(*) »

Si l'arbitrage se manifeste donc par cette présence trop forte des parties dans le fonctionnement de l'organe arbitral, il faut relever - autre trait majeur - également pour distinguer l'arbitrage du règlement judiciaire qu'une logique quelque peu différente anime l'arbitre. En effet comme le pense Yves Guyon

« L'arbitrage permet aussi d'aboutir à des sentences qui sont mieux acceptées par les parties que les jugements rendus de manière trop impersonnelles. Le bon arbitre ne tranche pas dans le vif. Il fait tout ce qui est possible pour réconcilier les parties aujourd'hui opposées, mais qui souhaitent souvent continuer des relations d'affaires. L'arbitrage est une médecine douce, alors que la justice d'État est parfois une chirurgie invalidante137(*) ». Ces propos tenus sûrement dans le cadre d'un arbitrage commercial ne se perdent pas s'agissant d'un arbitrage interétatique. En effet quelque soit les raisons du différend, il est logique de penser que passer la période de tension les États devraient tôt ou tard collaborer, et donc l'arbitre essaiera de protéger cette relation. C'est dire que l'arbitre - quoique l'arbitrage soit un mécanisme juridictionnel - peut au cours du processus de règlement du différend occulter les nécessités juridiques pour servir celles extrajuridiques. Il peut faire recours à plus de pragmatisme et ainsi recourir à des considérations soit politiques, soit économiques etc.

Quand le juge dit le droit rien que le droit par le droit, l'arbitre dit le droit rien que le droit et pas seulement par le droit. Quand pour le juge, l'un perd l'autre gagne, pour l'arbitre, parfois l'un gagne l'autre aussi. Il faudrait cependant relativiser cette idée.

En effet, si un tel état d'esprit peut être propre aux arbitrages corporatifs, c'est-à-dire d'une certaine catégorie de sociétés ou de personnes qui ont en commun des intérêts notamment commerciaux, il ne peut pas être globalisé à tout arbitrage notamment interétatique. Car, l'arbitre se comporte souvent comme le juge en rendant une sentence impartiale qui fixe de façon claire et définitive les droits de chacun sans aucune considération que celle de dire le droit138(*). De même faut-il souligner que dans certaines situations, il n'est pas exclu que le juge tant national qu'international puisse être amené à rendre un verdict qui contente les deux parties, sans pour autant que le verdict en soit biaisée.

* 130 Contrairement par exemple à la justice étatique où un tiers en l'occurrence le procureur peut intervenir.

* 131 Ce qui bien entendu ne peut être le cas devant les juridictions étatiques.

* 132 Notamment en cas de transaction.

* 133 Il faut relever ici qu'une telle hypothèse altèrerait fortement la règle de l'imparité dans la constitution du tribunal, raison sans doute pour laquelle elle n'est pas très souvent appliquée.

* 134 Seule leur « conscience », leur bonne volonté, obligation des plus morale.

* 135 Procédure par laquelle un tribunal d'un État déterminé donne force exécutoire dans son ordre interne à une décision judiciaire étrangère ou à une sentence arbitrale ou à un acte public étranger. Jean SALMON, Dictionnaire de droit international public, op. cit. à la p. 480.

* 136 Yves GUYON op. cit.à la p.75.

* 137 Yves GUYON, ibid, à la p. 10.

* 138 Voir pour ce faire la sentence du 4 avril 1928 de l'arbitre Max Hubert dans l'affaire Ile de Palmas (Etats-Unis d'Amérique/Pays-Bas).

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