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L'arbitrage ohada à l'épreuve de l'arbitrage investisseur-etat

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par Cassius Jean SOSSOU
Université de Genève Faculté de Droit et Hautes Etudes Internationales et du Développement - Master of Advanced Studies in International Dispute Settlement (MIDS) 2008
  

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B.- Le droit OHADA de l'arbitrage face aux spécificités de l'arbitrage d'investissement

161. Parler de spécificités de l'arbitrage d'investissement reviendrait à trouver à cette forme d'arbitrage des altérités qui justifieraient sa nature propre et la distingueraient des autres formes d'arbitrage. Pourtant, «le système de règlement des différends relatifs aux investissements a emprunté ses principaux éléments à celui de l'arbitrage commercial« et donc, le droit de l'arbitrage d'investissement n'est pas pour autant aussi distinct de celui de l'arbitrage commercial. Cependant, un constat se dégage de la comparaison entre les deux formes d'arbitrage. En effet, les différends entre investisseurs et États soulèvent la particularité d'aborder des questions générales d'intérêt public moins fréquentes dans les différends privés commerciaux internationaux. Il s'ensuit donc que l'appréciation par les tribunaux arbitraux de la conformité au droit international des mesures prises par les pouvoirs publics, dans l'optique de la préservation des intérêts publics, se déroule le plus souvent dans un cadre privé, selon une procédure à huis clos empreinte d'une confidentialité qui est de plus en plus contestée. En effet, ces mesures des pouvoirs publics, puisque c'est d'elles qu'il est question, sont dans l'arbitrage d'investissement appréciées dans des procédures qui se déroulent dans le strict respect de la confidentialité dont l'arbitrage en général et plus particulièrement l'arbitrage commercial s'accommode. La quasi-totalité des arbitrages d'investissement se déroulent donc selon cette politique de confidentialité de l'arbitrage qui inclut le schéma du huis clos des audiences, de la non publicité de la procédure et des audiences, de l'exclusion de tierces personnes à l'arbitrage et de la non publication des sentences qui en découlent. L'arbitrage dans le cadre du Règlement institutionnel de la CCJA ne s'en exempte donc guère141(*). Pourtant, cet état de chose, de nos jours, s'accommode très mal avec l'essence même de l'arbitrage d'investissement142(*) qui n'est pas un processus strictement «privé«, comme le rappelle Redfern et Hunter, mais une procédure présentant au contraire un caractère «hybride«, dans la mesure où ses effets juridiques sont susceptibles de s'étendre à la sphère publique143(*). C'est l'ensemble de cette procédure qui s'affranchi de la confidentialité et qui fait sienne le principe de la transparence dans un arbitrage d'investissement qui se veut de plus en plus ouvert au public, lequel a de bonnes raisons d'y participer, qui constituera le substrat de ce qui suivra et ceci dans le cadre bien précis de l'arbitrage d'investissement soumis au Règlement OHADA. Dans la mesure du possible, la codification et la pratique institutionnelle au niveau des autres organismes d'arbitrage viendra corroborer cette étude relative à la transparence dans l'arbitrage d'investissement OHADA. Pour ce faire, nous nous appesantirons sur les enjeux liés à la transparence dans le cadre de l'arbitrage d'investissement soumis au Règlement OHADA (1) pour ensuite aborder cette transparence dans son contenu avec à la clé une approche de propositions eu égard à la problématique sur la participation de tierces personnes dans l'arbitrage OHADA (2).

1.- Le Règlement d'arbitrage de la CCJA à l'épreuve des exigences de l'arbitrage d'investissement

162. Si nous avons choisi de disserter uniquement sur le Règlement d'arbitrage de la CCJA c'est par souci de comparaison aux Règlement des autres institutions internationales telles que la CCI, la CPA, la CCIG, le CIRDI pour ne citer que ceux-là. Au risque de nous répéter, nous insistons sur le fait que l'arbitrage institutionnel offre le bel exemple de la capacité des institutions d'arbitrage à pouvoir mieux s'adapter aux changements, du moins à l'évolution qu'exige la pratique de l'arbitrage. A notre avis, le processus de modelage du contenu des Règlements institutionnels d'arbitrage est beaucoup plus aisé que celui des législations régissant l'arbitrage. Mieux, les garanties qu'offre l'arbitrage institutionnel dans le cadre d'un arbitrage d'investissement ne sont à nuls autres pareils comparables aux garanties d'un arbitrage d'investissement ad hoc et donc il nous paraît plus judicieux d'analyser l'adaptabilité du Règlement d'arbitrage de la CCJA aux exigences de transparence et de participation de tierces que le droit commun de l'arbitrage qu'est l'AUA. L'arbitrage d'investissement dans le cadre formalisé par le Règlement de la CCJA offre le bel exemple de compatibilité à la pratique de l'arbitrage d'investissement sauf qu'il lui manque un certain nombre de dispositions devant lui permettre de se «normaliser«.

a.- Les enjeux de la transparence et de la participation de tierce dans l'arbitrage d'investissement dans le cadre institutionnel OHADA

163. Tout comme le Règlement d'arbitrage de la CNUDCI, sur le model duquel il est d'ailleurs bâti, le Règlement d'arbitrage de la CCJA est élaboré pour être appliqué à tout différend d'ordre contractuel144(*) et donc par induction à la résolution des litiges commerciaux et de l'investissement. Cependant, s'il est évident que le Règlement d'arbitrage de la CCJA a été adopté dans la perspective de son application aux arbitrages commerciaux privés sous les auspices de la CCJA, il est moins avéré que les dispositions de ce texte normatif soient compatibles avec l'arbitrage entre un investisseur privé et un Etat, eu égard aux exigences de l'arbitrage d'investissement. En effet, l'arbitrage d'investissement présente certaines particularités liées à la transparence dans la procédure que l'on ne retrouve pas dans l'arbitrage privé commercial encore moins dans les dispositions du Règlement de la CCJA. Pourtant, c'est cette transparence qui présente un certain nombre d'enjeux qui postulent de la différenciation entre les deux formes d'arbitrage. En effet, les enjeux immédiats sur la base desquels la différenciation est faite entre les deux formes d'arbitrage sont tels que l'arbitrage privé commercial (tel qu'il est régulé dans le cadre de l'OHADA par le Règlement de la CCJA) participe de la protection des intérêts économiques privés des parties impliquées tandis que l'arbitrage d'investissement fait naître une forte composante d'intérêts publics du simple fait de la participation à cet arbitrage de l'Etat. Or, cette composante d'intérêts publics (que nous détaillerons dans la suite du développement) dans le cadre d'un arbitrage d'investissement emporte la nécessaire protection de la part de l'Etat d'un certain nombre de droits et d'acquis fondamentaux pour lesquels la confidentialité dont l'arbitrage est généralement empreint est battue en brèche. En effet, la remise en cause du principe de confidentialité dans l'arbitrage consacre a contrario la transparence qu'il est appelé de tous les voeux dans l'arbitrage d'investissement. L'arbitrage d'investissement se caractérise donc entre autres par la transparence qui offre à cette forme d'arbitrage des garanties procédurales spécifiques telles que la publicité de la procédure et des audiences, la publication de la sentence arbitrale, la participation de tierces personnes à l'arbitrage et dans une certaine mesure la jonction d'instance dans l'arbitrage d'investissement. Toutes ces exigences font défaut dans la législation OHADA sur l'arbitrage et notamment dans le Règlement de la CCJA. Même si, force est de le reconnaitre, les législations et Règlements institutionnels d'arbitrage modernes sont réticents à l'idée d'admettre une telle transparence, le revirement est en train de s'imposer davantage et plus particulièrement dans le cadre de l'arbitrage d'investissement avec l'«irruption de la société civile« dans l'arbitrage d'investissement145(*). On assiste ainsi à un «nouveau paramétrage« des principaux Règlements institutionnels d'arbitrage avec pour idée de fond le réajustement des dispositions pour l'administration procédurale des litiges de l'investissement et plus particulièrement les litiges entre un investisseur privé et un Etat.

164. Mais avant tout, intéressons nous aux intérêts publics qui peuvent découler des potentielles implications que l'arbitrage d'investissement peut avoir dans le cadre de l'arbitrage institutionnel OHADA. Pour cela, notre postulat de départ sera celui d'un arbitrage entre un investisseur privé et un Etat soumis à l'OHADA sur le fondement d'un traité d'investissement ou accord d'investissement contenant une clause OHADA ou d'une législation nationale (code de l'investissement) contenant une offre d'arbitrage OHADA. Dans cette hypothèse, notre questionnement reposera sur la nature des intérêts publics susceptibles d'affecter la procédure d'arbitrage et pour lesquels le Règlement d'arbitrage de la CCJA ne prévoit aucune solution.

* 141 _ Voir à ce sujet l'article 14 du Règlement d'arbitrage de la CCJA qui aborde la problématique de la confidentialité de l'arbitrage dans tous ses états.


* 142 _ Il conviendrait de rappeler que la plupart des arbitrages entre un investisseur privé et un Etat présente la caractéristique d'être des arbitrages internationaux, souvent mixtes, reposant sur un fondement triple distinct a savoir : les traités de protection des investissements des mécanismes de promotion et de protection de l'investissement contenus dans la législation d'un Etat (c'est le cas des codes d'investissement) et enfin les contrats d'investissement contenant une clause d'arbitrage. Ces arbitrages, malgré la diversité de leur fondement présente la caractéristique d'être des arbitrages d'investissement ce qui les différencient substantiellement de ceux qui régulent les rapports économiques entre des parties privées à l'arbitrage. Quand bien même les deux formes d'arbitrage répondent aux principes généraux du droit de l'arbitrage et au classicisme procédural de l'arbitrage, les enjeux auxquels ils aspirent ne sont pas les mêmes. De sorte qu'aujourd'hui les législations modernes sur l'arbitrage tendent à se conformer à ces enjeux dans le corpus des textes applicables. Aussi, Nous ne faisons pas de distinction dans le cadre de cette étude entre les Traités bilatéraux d'investissement et les accords multilatéraux d'investissement. Bref, entrent dans le cadre de cette étude tous les accords internationaux d'investissement dans lesquels les mécanismes de protection de l'investissement étranger sont envisagés.


* 143 _ Redfern, A., et Hunter, M., Law and Practice of International Commercial Arbitration, 3eme éd., Sweet & Maxwell, 1999, p.11 [«International commercial arbitration is a hybrid. It begins as a private agreement between the parties. It continues by way of private proceedings, in which the wishes of the parties are of great importance. Yet it ends with an award that has binding legal force and effect and which, on appropriate conditions, the courts of most countries of the world will recognize and enforce. The private process has a public effect, implemented with the support of the public authorities of each state and expressed through its national law.»]


* 144 _ Art. 2.1 du Règlement d'arbitrage «La mission de la Cour est de procurer, conformément au présent règlement, une solution arbitrale lorsqu'un différend d'ordre contractuel, en application d'une clause compromissoire ou d'un compromis d'arbitrage, lui est soumis par toute partie à un contrat, soit que l'une des parties ait son domicile ou sa résidence habituelle dans un des Etats-parties, soit que le contrat soit exécuté ou à exécuter, en tout ou partie sur le territoire d'un ou de plusieurs Etats-parties«


* 145 _ Stern, B., «L'entrée de la société civile dans l'arbitrage entre Etat et investisseur«, Revue de l'arbitrage 2002, No 2, p.329 ; voir du même auteur, « L'intervention des tiers dans le contentieux de l'OMC »,

RGDIP, 2003, N° 2, p.219 ; « Un petit pas de plus : l'installation de la société civile dans l'arbitrage CIRDI entre Etat et investisseur », Revue de l'arbitrage 2007, No 1, p.3.


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