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Sagesse et pouvoir. une herméneutique du pouvoir

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par Antoine BASUNGA Nzinga
ITCJ - Baccalauréat canonique en théologie 2010
  

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· 2. Vers la Sagesse du bien commun 

Nombreux sont ceux qui voudraient se soustraire au noble devoir de veiller à la bonne gestion de la res publica. Il s'agit d'une fuite de responsabilité politique qui se traduit souvent par une évasion langagière du genre : « on n'est pas là pour faire de la politique ». Cette attitude se prolonge dans une méfiance quelquefois injustifiée à l'égard de l'autorité. Une dérobade s'ensuit parfois implicite, qui révoque l'appartenance à une identité qui est caractéristique de l'Homme : « celle d'être un être social par essence », comme nous l'avons montré dans les chapitres précédents. Cette dérobade qui, en réalité, est une démission, voire une négation de son identité profonde, se répercute et s'extériorise dans une fuite ou encore dans l'abandon de ses responsabilités politique. C'est si, déjà la communauté était abandonnée à son sort.

Dans l'Afrique actuelle, au visage multiforme et fort contrasté, une Afrique désunie et affaiblie par de graves injustices, une telle attitude ne peut qu'étonner. La prise en charge de la responsabilité politique est une question de vie ou de mort en Afrique; ce n'est pas une question nouvelle l'histoire nous révèle que de nombreux empires et royaumes africains se sont distingués par leur engagement remarquable dans la gestion de la cité. On peut citer le royaume Congo94(*), l'empire Lunda, l'empire Mandeng, le royaume Akan, le royaume de Monomotapa, l'empire Zoulou95(*) et j'en passe. L'histoire suivant son cours, ces empires et royaumes puissants ont été confrontés avec la civilisation occidentale. Malheureusement, il s'est avéré que cette confrontation eut un effet dévorant contrairement à ce que préconise aujourd'hui S. Huntington dans le cadre des relations internationales96(*).

De cette rencontre violente la tradition africaine est sortie perdante. L'âme de la tradition africaine c'est-à-dire le dénominateur commun de sa culture au-delà de toute diversité a été engloutie par la marée coloniale, si bien que, jusqu'à nos jours, s'il venait à manquer un peu de sel importé (dans sa forme actuelle), même dans nos villages les plus éloignés des centres, l'on ne pourrait plus avaler sa nourriture97(*). Ceci montre jusqu'à quel point l'organisation africaine fut ébranlée.

A vrai dire, l'époque coloniale aurait pu mériter de la « reconnaissance » de la part l'Afrique si elle ne s'était pas caractérisée par une multitude de violences, et au dénigrement de « l'âme » africaine. Elle aurait eu droit à la reconnaissance, parce qu'elle aurait pu être un « nouveau » point de départ. Les systèmes politiques aurait pu épargner à l'Africain de rester l'éternel élève d'un maître dont il ne peut se défaire. C'est là la conséquence de la violence exercée par un pouvoir instrumentalisé qui est tout à fait le contraire du pouvoir de la Sagesse, que seul Dieu accorde (Sg 6,3). Sans verser dans la nostalgie d'un paradis perdu, la présente réflexion veut mettre en lumière l'exigence naturelle qui s'impose à l'Homme africain : c'est dans la cité que l'Homme doit vivre en vue de réaliser son bien-être. Ce bien-être, dans la société, ne peut voir son accomplissement que dans un cadre éthique où la poursuite du bien commun demeure la norme qui doit façonner l'exercice du pouvoir. Le bien commun n'est pas à rechercher dans la contemplation d'une « forme immuable d'un bien cosmique», afin d'y conformer son éthos ici bas. Le bien commun nous semble être revêtu de brillante (Sg 6, 12) étoffe de la Sagesse, la génératrice de tous les biens (Sg 7, 12). L'écoute de la Sagesse permet de percevoir des évidences qui sont propres à l'espèce humaine, notamment dans le don du discernement pour le bien commun.

Or, c'est là parfois le tendon d'Achille de la sphère politique africaine. Nos systèmes politiques ont ignoré ou négligé la valeur du bien commun et se sont voilé la face, plutôt que de reconnaître la splendeur de la Sagesse (6,12). Le bien commun, qui est la raison d'être ultime des instances politiques, a été désacralisé et banalisé. L'homme politique africain abhorre l'austérité qu'exige la quête du bien commun, et se réfugie dans des pratiques illégales, qui le détournent de l'appel et de l'idéal que son métier lui propose: la réalisation du bien commun. La perte du sens sacré intrinsèque au bien commun affecte nos communautés politiques dans toutes leurs dimensions. Car s'il est vrai que le caractère du politique (comme vision d'une société) et de la politique (comme ensemble d'actions concrétisant le politique) d'une communauté doit se jauger par rapport au bien commun, alors il est tout aussi vrai que la perte du sens du bien commun dans une communauté politique représente une option suicidaire pour la communauté entière.

En réalité, cette perte de sens déshumanise la communauté politique, et la rend incapable de répondre à sa vocation en tant que communauté d'Hommes. Des conséquences néfastes s'ensuivent, faisant obstacle au plus grand épanouissement de la vie de toute la communauté. Outre les conditions liées à son histoire, il sied de se demander si la perte du sens de bien commun ne serait pas la cause profonde des misères qui bloquent le décollage du développement africain ? L'Afrique a de donner à la culture du bien commun un nouvel élan. La réinvention de l'Afrique, et une réorganisation politique digne de ce nom, inspirées par la Sagesse divine, dépendent d'une prise en charge du bien commun par les Africains et pour l'Afrique. Comment y parvenir ? Notre réflexion distingue deux voies, à savoir : l'éducation comme disposition à la Sagesse du bien commun et l'organisation institutionnelle en vue du bien commun.

* 94 _ G. Balandier, Au Royaume de Kongo, du XVIè au XVIIIè Siècle, Paris, Hachette, 1965.

* 95 _ Cette conception du pouvoir que se faisaient les « Maîtres » est illustrée par l'explication de Chaka lorsqu'il rebaptise son clan du nouveau nom de « Amazoulou , clan du ciel». C'est parce que, dit-il, « je suis élevé ! tenez, je ressemble à ce grand nuage où gronde le tonnerre : ce nuage personne ne peut l'empêcher de faire ce qu'il veut. Mais aussi je regarde les peuples et ils tremblent et celui que je viens frapper ne se relève plus, tel Zwidé. Zoulou ! Amazoulou ! ». cf. Thomas Mofolo, CHAKA, Paris, Gallimard, 1940, p. 171.

* 96 _ Résumant les six parties de son livre, Le Choc des Civilisations, S. Huntington en arrive à la conclusion suivante : « Nous éviterons une guerre généralisée entre civilisations si, dans le monde entier, les chefs politiques admettent que la politique globale est devenue multicivilisationnelle et coopèrent à préserver cet état de fait. » cf. Samuel P. Huntington, Le Choc des Civilisations, Op., cit., pp. 17-18.

* 97 _ C'est ce genre de transformation que note Elungu Pene lorsqu'il voit la tradition africaine perdante dans sa rencontre avec la rationalité moderne, et qu'il l'invite à la vie de la raison. cf. Elungu P.E.A, Tradition africaine et rationalité moderne. Paris, L'Harmattan, 1987, pp.153-182.

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