Conclusion Générale
Au terme de notre travail, une réflexion
enracinée dans le Livre de Sagesse de Salomon, une conviction
s'impose : toute marche humaine d'un point vers un autre doit être
parsemée de repères. Autrement, on se perd. Le Livre de la
Sagesse de Salomon nous en indique un, qui peut revitaliser notre approche
existentielle. Telle est la fonction première du message de Sg 6, 1 - 7,
21 : Salomon y exhorte les rois à la Sagesse du pouvoir. Nous avons
laissé ce message rencontrer notre vécu réel. En jeune
théologien Africain, nous avons laissé la Sagesse de
Salomon nous interpeller et provoquer une conversion du regard face
à l'exercice du pouvoir sur la terre africaine. La cécité
du regard dont nous sommes parfois victimes, tellement nous sommes
habitués aux dysfonctionnements presque structurels de l'appareil
politique, a fait place à la découverte du sens originaire du
pouvoir : le Livre de la Sagesse nous a montré qu'il
doit être au service du peuple sous le regard de Dieu (Sg 6, 4). Nous
avons voulu en appeler à la réhabilitation de l'humain qui doit
être au centre de toute activité politique. Le Livre de la
Sagesse nous a aidés à revisiter les éléments
fondamentaux du pouvoir, qui doivent être respectés pour parvenir
à une bonne gouvernance. Ayant établi en Dieu l'origine de tout
pouvoir (Sg 6,3), l'écoute continuelle de l'instruction divine doit
faire naître dans le coeur du roi l'estime de la Sagesse. Seule la
Sagesse permet au au roi d'exercer son pouvoir d'une manière
appropriée, et d'être assuré de l'incorruptibilité,
qui rend proche de Dieu (Sg 6, 18-19). Seule la Sagesse maintient, de
manière continuelle, le roi dans « une conscience
anthropologique » (Sg7, 1-6), et lui rappelle la présence de
l'autre, image de Dieu, foncièrement un « alter
ego » qu'il doit pourtant gouverner. La conscience
anthropologique qui détermine l'exercice du pouvoir a été
mise en exergue et présentée comme la leçon principale de
notre premier chapitre. Elle a ensuite servi de fil conducteur au
deuxième chapitre. Nous sommes partis de la « conscience
anthropologique », telle qu'elle est proposée par le roi, qui
Salomon se reconnaissait entièrement égal à tous les
mortels, pour penser la dignité de l'Homme dans notre culture africaine.
Pour ce faire, nous avons jeté un pont entre la conscience de la
condition humaine offerte en Sg 7, 1-6 et la dignité humaine. L'Homme
étant au-delà de sa condition humaine, donc fragile, un
être de transcendance et capable de Dieu. Bref, l'image du
Créateur, principe de sa dignité. Un passage basé
essentiellement sur la « conscience anthropologique ».
L'homme africain participe à la dignité supérieure de
l'humain, mais trouve aussi dans sa propre culture des éléments
qui le caractérisent d'une manière spéciale, à
savoir la communauté, le sens de l'hospitalité et la croyance
à la survie. En présentant ainsi de manière
systématique ces divers éléments, nous arrivons à
répondre à la question qui a motivé dès le
début de cette étude : comment les dirigeants
politiques peuvent-ils, de manière consciente et
réfléchie, redonner une juste espérance au peuple
d'Afrique par leur manière d'exercer le pouvoir ?
Voilà pourquoi, dans le troisième chapitre, nous avons
jugé bon de procéder à une lecture de la Sagesse, telle
qu'elle se manifeste dans différentes cultures et les amène
à la réalisation complète de leurs aspirations profondes.
C'est pourquoi nous avons entrepris une étude concrète du concept
« de culture » dans Eglise et
Société, le discours socio-politique de l'Eglise catholique
du Congo (1956-1998), tome 1 « Textes de la conférence
épiscopale ». Il s'agissait de retrouver les traces de la
Sagesse dans la réalité d'une culture et d'y introduire un
ferment qui pourrait contribuer à la réinvention de la culture du
bien commun, entendu comme un bien qui dépasse la simple satisfaction
des besoins des membres d'une communauté encore close et les rejoint
dans leur désir de l'être universel qui est en l'Homme plus
profond encore que tout désir égoïste. Comme on peut
le constater, une herméneutique du pouvoir, en Afrique, inspiré
de Sg 6, 1 - 7, 21, invite fondamentalement à une disposition profonde
d'écoute. Il s'agit d'écouter l'instruction du Seigneur dans
l'exercice du pouvoir. Seule l'écoute de la Sagesse divine
façonne en moi la conscience anthropologique et me dispose à
l'écoute continuelle de l'autre pour cheminer avec lui vers le bonheur
que Dieu accorde aux Hommes. Tous sont appelés par vocation à
vivre dans une cité organisée.
Table des
matières
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