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Responsabilité du dirigeant et gestion des risques

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par Claudine MARTIN
Université de Nantes - Master 2 Droit des activités économiques 2008
  

Disponible en mode multipage

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SOMMAIRE

Remerciements page 3

Liste des abréviations page 4

Introduction page 6

Chapitre 1. L'audit et la gestion des risques juridiques : un outil efficace de prévention contre la mise en cause de la responsabilité civile du dirigeant d'entreprise page 13

I. Quelques cas d'engagement de la responsabilité civile du dirigeant page 15

A. Exemples de cas de mise en cause de la responsabilité du dirigeant prévus par le Code de Commerce  page 16

I.1. Les infractions aux dispositions législatives ou règlementaires page 16

I.2. La violation des statuts page 17

I.3. La faute commise à l'occasion de la gestion page 18

B. Le cas particulier de la responsabilité du dirigeant d'une entreprise en

difficulté page 20

1. L'action en comblement du passif page 23

2. La faillite personnelle page 25

3. L'interdiction de gérer page 27

II. Les moyens mis en oeuvre par la Gestion des risques juridiques pour éviter l'engagement de la responsabilité civile du dirigeant  page 28

A. L'assurance de la responsabilité civile du dirigeant social page 28

II.1. La qualité d'assuré et l'objet de la garantie page 28

II.2. Les limites du recours à l'assurance page 30

B. La mise en place de « garde-fous » par la gestion des risques juridiques page 31

1. Le rôle déterminant du juriste dans la gestion des risques

juridiques page 31

2. L'organisation d'un contrôle interne de gestion page 34

Chapitre 2. La gestion des risques, un outil de prévention de l'engagement de la responsabilité pénale des dirigeants sociaux page 35

II.2.I. Quelques cas de mise en cause de la responsabilité pénale des dirigeants page 37

A. La responsabilité pénale du dirigeant pour manquement aux règles d'hygiène et de sécurité page 37

B. Deux exemples d'infractions pénales prévus par le droit des sociétés page 39

1. L'abus de biens sociaux page 40

2. Infraction relative aux comptes sociaux : la publication ou présentation de comptes infidèles page 43

II. Moyens développés par la gestion des risques juridiques pour éviter l'engagement de la responsabilité pénale du dirigeant page 45

A. La délégation de pouvoirs page 45

1. Les conditions de la délégation de pouvoirs page 46

2. Des limites importantes en pratique page 47

B. Des garde-fous à organiser en interne page 50

1. La mise en place d'un moyen de prévention pour la protection de la sécurité physique et psychologique des salariés : le CHSCT page 49

2. Charte d'éthique et de bon usage page 51

Conclusion page 53

Bibliographie page 55

Annexes page 57

Annexe n°1 : Les risques Juridiques page 57

Annexe n°2 : Les étapes clés de la gestion des risques page 58

Annexe n°3 : Evaluation des risques résiduels page 59

Annexe n°4 : Note de procédure interne relative à la contractualisation page 60

Annexe n°5 : Note de procédure interne relative au traitement des données à caractère personnel page 65

Annexe n°6 : Entretien avec Dominique PAGEAUD, Gestionnaire de Risques, Société d'Avocats Ernst and Young page 68

REMERCIEMENTS

Je tiens tout d'abord à remercier mon maître de stage, Mme Mireille BAUDU, Responsable juridique de LARENA SAS, pour ses précieux conseils, son regard professionnel, pour toutes les connaissances qu'elle m'a transmises, ainsi pour sa disponibilité et toute la patience qu'elle m'a témoignée.

Je remercie également les membres du groupe de travail avec lesquels j'ai étroitement collaboré dans le cadre de la mise en place du projet « Gestion des risques » au sein du groupe LARENA : Gilles ROLLAND, Directeur Général, Jérémy CHAILLOU, Contrôleur de gestion, et Ellen CHEDALEUX, Juriste.

Je tiens aussi à remercier tous les autres membres de LARENA qui m'ont offert un accueil chaleureux, et ont contribué à faire de ce stage une initiation réelle au monde de l'entreprise, notamment Mme Aurélia THOUEIL, Responsable Qualité.

Mes remerciements s'adressent aussi à mon directeur de mémoire, Mme Marine FRIANT-PERROT, pour ses conseils avisés, ainsi qu'à Mme Emmanuelle DANDE pour son assistance et sa disponibilité tout au long de l'année universitaire.

LISTE DES ABREVIATIONS

A

ABS Abus de Biens Sociaux

Aff Affaires

AMRAE Association pour le Management des Risques et des Assurances de l'Entreprise

AIRMIC Association of Insurance and Risk managers 

B

BOSP Bulletin Officiel du Service des Prix

Bull. civ. Bulletin des arrêts de la Chambre Civile de la Cour de Cassation

Bull. Crim Bulletin des arrêts de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation

Bull. Joly Bulletin Joly (mensuel d'information des sociétés)

C

C. Civ Code Civil

C. Pén Code Pénal

CA Cour d'Appel

CCass Cour de Cassation

Ch. Civ Chambre Civile

Ch. Com Chambre commerciale

Ch. Crim Chambre Criminelle

CHSCT Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail

Circ Circulaire

Concl Conclusions

COSO Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission 

D

D. Décret

DRT Direction des relations du Travail

E

ERM Enterprise Risk Management

F

FERMA Federation of European Risk Management Associations 

J

JCP La semaine Juridique - Jurisclasseur périodique

L

L Loi

LGDJ Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

LPF Livre des Procédures fiscales

N

NTIC Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication

N° Numéro

P

PUF Presses Universitaires de France

R

Rev Revue

RJDA Revue de Jurisprudence de Droit des Affaires

S

SARL Société à Responsabilité Limitée

Supra Ci-dessus

INTRODUCTION

« En fait, comme Monsieur Jourdain fait de la prose sans le savoir, nous vivons en permanence dans un univers vibratoire, saturé d'ondes juridiques, que nous ignorons jusqu'à ce qu'un accident fâcheux le révèle. Une conduite avisée consiste à prendre conscience le plus tôt possible de ces bornes de l'environnement juridique et le dirigeant de société sera bien inspiré de réaliser à temps ce que sont ses droits et ses obligations »1(*). Le dirigeant de société a donc des droits et des obligations qu'il doit assumer, sous peine d'engager sa responsabilité ou celle de l'organisation. En pratique cette responsabilité soulève un paradoxe intéressant chez le dirigeant. La responsabilité est autant rejet qu'elle n'est attirance. Aussi le chef d'entreprise revendique sa fonction en cas de réussite, et tente de diminuer son rôle en cas d'échec, situation dans laquelle sa responsabilité sera recherchée2(*). Pour atteindre le succès, il doit prendre les décisions qu'il pense être les plus pertinentes au regard de la situation, tout en sachant qu'il y a toujours un risque que l'objectif atteint ne soit pas celui qu'il avait fixé auparavant. Mais « le risque n'est-il pas la condition du succès ? » comme l'écrivait L. De Broglie3(*).

Il est sans conteste que la prise de risque est inhérente à la fonction de dirigeant d'entreprise et il serait illusoire de croire que le risque peut être éradiqué. D'ailleurs espérer une société dépourvue de risque relève de la virtualité. L'idéologie du risque zéro est une chimère. Même les activités considérées comme étant les plus anodines peuvent engendrer des conséquences néfastes, ou pour le moins inattendues, pour l'entreprise.

Pourtant, force est de constater que les citoyens réclament toujours plus de sécurité n'admettant pas le risque. Aussi ils formulent des demandes incessantes à un Etat élevé au rang de « providence ». Le recours à cet Etat divinisé a d'ailleurs été corroboré par la création de la Sécurité Sociale, qui a confirmé l'idée selon laquelle l'Etat a pour fonction de protéger les individus contre tous les dangers qui les entourent4(*) . Or l'Etat, aussi providence qu'il soit, ne peut protéger ses citoyens contre la réalisation de tous les risques imaginables et encore moins en assumer seul la responsabilité. C'est pourquoi il a mis à la charge des acteurs de la vie économique des régimes de responsabilités rigoureux.

Ainsi, les dirigeants sociaux ont pu voir des cas d'engagement de leur responsabilité, civile ou pénale, fleurir, sous l'arrosoir du législateur mais aussi sous celui du juge.

Juridiquement, la responsabilité d'une personne est engagée lorsqu'un dommage a été subi par une victime, et que celle-ci en a prouvé le lien direct avec les agissements de l'auteur. Concernant le dirigeant social, sa triple casquette de personne physique, employeur et dirigeant d'entreprise l'expose à un nombre important de cas dans lesquels sa responsabilité peut être engagée. Concrètement cela représente une multitude de textes législatifs et règlementaires portant sur le droit du travail, le droit applicable à son activité économique, le droit de la concurrence... C'est dans ce contexte, et pour tenter d'aider le dirigeant social à encadrer au mieux ses activités, que des méthodes de gestion des risques ont été créées.

La gestion des risques de l'entreprise, en anglais « Enterprise Risk Management - ERM), consiste à identifier toutes les sources de risques pouvant menacer des objectifs stratégiques de l'entreprise ou inversement représenter des opportunités susceptibles de procurer un avantage concurrentiel. Le but est d'améliorer l'efficacité de l'allocation des ressources, d'assister la prise de décision afin que toutes ses conséquences, bonnes ou mauvaises, aient été prises en considération. Il s'agit aussi de créer de la valeur, notamment en attirant les investisseurs en leur montrant que l'entreprise a pris toutes les mesures nécessaires pour atteindre et protéger ses résultats.

La gestion des risques contribue à renforcer l'image de l'entreprise et sa crédibilité vis-à-vis de ses clients et de ses partenaires, ainsi qu'à pérenniser ses activités.

Elle prend en compte les différentes acceptions du « risque ». Cette précision a une grande importance en pratique. En effet, le risque présente plusieurs facettes et selon les domaines d'activités, les chefs d'entreprise seront plus sensibles à un risque qu'à un autre. D'ailleurs la notion même de « risque » prête à discussion. Le risque tel qu'il est défini par le dictionnaire Larousse, est la « possibilité, probabilité d'un fait, d'un événement considéré comme un mal ou un dommage ». En termes d'assurance, le risque est considéré comme étant « l'évènement dommageable contre l'arrivée duquel on cherche à se prémunir »5(*), mais englobera aussi l'objet garanti. En économie, comme le précise Elie Cohen6(*), « un risque correspond à l'occurrence d'un fait imprévisible - ou à tout le moins certain - susceptible d'affecter les membres, le patrimoine, l'activité de l'entreprise et de modifier son patrimoine et ses résultats ». Et en Droit, le risque peut être défini comme étant « l'éventualité d'un évènement ne dépendant pas exclusivement de la volonté des parties et pouvant causer la perte d'un objet ou tout autre dommage ».7(*)

Il est cependant nécessaire de comprendre que le risque n'est pas systématiquement négatif. Les risques spéculatifs, tels que les investissements de capitaux, n'ont pas nécessairement des conséquences négatives pour la société. En effet, ils ont pour finalité d'accroître les capitaux de l'entreprise, d'atteindre de nouveaux marchés et de développer de nouveaux produits par exemple. Les sociétés prennent des risques de manière consciente dans le but d'engendrer des profits. En outre, toujours à titre d'illustration, un changement de réglementation est un risque qui, s'il se réalise, peut très bien s'avérer favorable pour l'entreprise.

D'une manière générale, on peut considérer que le risque peut être défini comme étant la « possibilité, l'éventualité qu'un évènement, une action ou une inaction affecte, dans un sens comme dans l'autre : la capacité de l'entreprise à atteindre ses objectifs et à déployer sa stratégie, les principaux actifs nécessaires à la mise en oeuvre de son business model (actifs corporels, incorporels, financiers, humains), et la création de valeurs ou les valeurs de l'entreprise »8(*).

Généralement, les risques sont classés selon leur nature. Ainsi on distingue cinq principaux risques auxquels doit faire face le dirigeant, d'après Xavier Kergall9(*)  : « il me semble que l'on peut distinguer cinq risques inhérents à la fonction du dirigeant : le risque financier, le risque juridique, le risque lié aux charges fiscales, le risque d'être copié et de subir une atteinte à ses droits de Propriété Intellectuelle, et le risque contact-client ».

Le risque financier a des conséquences sur les actifs de l'entreprise, et donc à terme sur son chiffre d'affaires. Le risque lié aux charges fiscales est celui qui augmentera les charges que doit payer le dirigeant, par un changement législatif notamment. Le risque de subir une atteinte aux droits de propriété intellectuelle renvoie principalement à la protection du savoir-faire de l'entreprise, et celui dit du « contact-client » consiste à perdre de la clientèle ou tout du moins à ne pas parvenir à la fidéliser durablement. Le risque juridique, quant à lui, est multiple. Il peut s'agir de la violation d'une règle en vigueur, mais aussi le risque qu'une nouvelle norme vienne bouleverser le cadre juridique des activités de l'entreprise. Le dictionnaire d'analyse et gestion des risques définit le risque juridique comme le « risque associé à tout évènement externe ou décision interne pouvant mettre l'activité ou l'entreprise en situation non-conforme aux lois ou aux règlementations. Le risque juridique comporte deux classes de risques : les risques de responsabilité civile qui peuvent être assurés, et les risques pénaux qui sont considérés comme relevant de l'entière responsabilité de l'auteur et ne peuvent être assurés »10(*). Les facteurs des risques juridiques sont variés selon les entreprises. Il peut s'agir de la non connaissance des engagements pris, ou de la Propriété Intellectuelle qui est mal protégée, du non respect des licences accordées, ou encore d'un contrat mal rédigé et du non respect d'obligations contractuelles11(*).

A ces risques, viennent aussi s'ajouter les risques opérationnels, qui troublent l'organisation quotidienne de l'entreprise, et les risques liés à l'image qui ont des conséquences sur la notoriété de la société et jouent sur la confiance qu'ont les partenaires (clients, investisseurs) dans l'entreprise. Le risque stratégique est lié au déploiement d'une mauvaise stratégie, ou à l'absence de veille concurrentielle notamment. Et pour finir, le risque de l'homme clé qui est réalisé lorsqu'une personne est devenue indispensable pour l'organisation, de sorte que son absence cause de graves problèmes pour le maintien des activités dont elle avait la charge.

Tous ces risques sont donc pris en considération dans le cadre d'une gestion des risques.

Si une telle méthode n'existait pas en tant que telle encore dans les années 1990, elle occupe aujourd'hui une «place centrale dans la prise de décision. Le contrôle des risques est considéré comme « essentiel à la stabilité et à la continuité des activités de l'entreprise ».12(*)

La reconnaissance de la gestion des risques a été progressive. La première référence à cette méthode remonte à 1956, aux Etats-Unis. Un article de la « Harvard Business Review » mentionnait le « risk management ». Il suggérait alors d'employer une personne à temps plein pour gérer les risques et minimiser les pertes, mais il s'agissait pour l'essentiel d'un prolongement du poste de gestionnaire d'assurance. Puis des débats ont fait évoluer la notion de gestion des risques. Ainsi, initialement axée sur un aspect assurantiel, elle s'est orientée vers les risques financiers, pour englober aujourd'hui tous les aspects de la vie de l'entreprise. Dorénavant, au lieu de s'intéresser aux risques passifs, c'est-à-dire aux dangers auxquels l'entreprise est exposée, la gestion des risques s'est orientée sur la gestion des risques « commerciaux », pour évaluer les risques induits par une intensification de la concurrence sur les marchés13(*).

Cet intérêt pour la gestion des risques peut s'expliquer de différentes manières. On l'attribue la plupart du temps à la mondialisation, à l'importance croissante de la valeur pour les actionnaires, ou à l'augmentation récente du nombre de faillites. Néanmoins, cette explication est somme toute un peu réductrice de ce qui a réellement poussé les entreprises à développer la gestion des risques. Il est en effet nécessaire de préciser que les diverses crises qui ont touché le secteur des activités économiques ont aussi contribué à une prise de conscience des dirigeants de l'importance de la gestion des risques. On peut notamment citer les crises sanitaires dans le domaine agroalimentaire, telle que la crise dite de la « vache folle » dans les années 1990, la « pandémie » de grippe A H1N1 actuellement ; ou encore des crises financières comme la crise des « subprimes » dès 2008. A cela s'ajoute également la pression grandissante que le législateur fait peser sur les dirigeants en matière de prévention. Ont notamment été imposés : le principe de la traçabilité des denrées alimentaires14(*) pour les entreprises agroalimentaires, le système des alertes européennes15(*), ou encore l'obligation d'organiser des plans de continuité des activités en cas de cas avéré de grippe A H1N1 dans les entreprises françaises par exemple16(*).

La nécessité d'une prévention est donc de plus en plus actuelle. Et l'un des principaux défis aujourd'hui pour les dirigeants sociaux réside dans la détermination d'un degré de risque acceptable afin d'optimiser la création de valeurs, objectif considéré comme le postulat de base du management des risques. Mais cette notion de « niveau de risque acceptable » n'est pas des plus simples à entendre. Classiquement, le risque était considéré comme acceptable lorsqu'il était indemnisable. Néanmoins, cela ne vaut plus aujourd'hui. Comme l'affirme Christine NOIVILLE, c'est « la fin d'un postulat ». Il n'est pas possible de considérer qu'un risque est acceptable s'il peut être assuré : premièrement parce que l'assurance ne peut être que civile, et deuxièmement parce que le mouvement de moralisation du monde des affaires conduit à sensibiliser les acteurs sur la prévention quand bien même le risque serait assurable. C'est le cas par exemple de l'hypothèse dans laquelle le dirigeant organise un repas avec des collaborateurs, mais les mets qu'il présente provoquent une intoxication alimentaire parmi ceux-ci. Certes cela peut être indemnisable par le contrat d'assurance de la société, mais il n'empêche que cela nuit à l'image de l'entreprise. Par conséquent cela reste un risque qu'il convient d'encadrer, même s'il est indemnisable. On a ensuite considéré que le risque était « acceptable » s'il était imputable à un tiers à la société. Ce postulat est somme toute autant discutable que le premier énoncé. En effet, il est tout de même nécessaire de prouver que le risque est imputable à un tiers, et il faudra parfois justifier que toutes les précautions ont été prises au sein de la société pour éviter cette situation (en matière de sécurité des salariés par exemple, car une faute simple, une négligence ou une imprudence suffisent à engager la responsabilité pénale du dirigeant17(*)).

La notion de risque acceptable est donc difficile à cerner. Néanmoins, nous pouvons aujourd'hui considérer que sera acceptable, le risque qui a été expressément accepté par l'intéressé, en connaissance de cause, et qui, s'il se réalisait, ne conduirait pas la société à sa perte, autrement dit vers un dommage qui remettrait en cause la continuité durable de ses activités.

Il faut bien avoir à l'esprit que l'objectif premier de la gestion des risques est de créer de la valeur pour la société, et pour le dirigeant de se protéger contre la mise en cause de sa responsabilité personnelle. Afin de l'aider à organiser cette méthode, le déroulement de la gestion des risques en entreprise a été quelque peu « standardisé » au travers de modèles. Les plus connus en la matière sont le COSO (« Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission ») développé aux Etats-Unis, et la méthode FERMA (« Federation of European Risk Management Associations »), développée en Europe et plus connue sous le nom de l'AMRAE (Association pour le Management des Risques et des Assurances de l'Entreprise ») en France ou AIRMIC (« Association of Insurance and Risk managers ») en Grande Bretagne.

Ces méthodes, malgré quelques variantes, présentent un socle commun. Tout d'abord, en toutes hypothèses, la gestion des risques comporte plusieurs étapes18(*). Elle débute par l'identification du risque au regard de la définition des fondamentaux de l'entreprise (son activité, son modèle économique, sa stratégie principalement) qui aura été préalablement réalisée. Il s'agit d'identifier, d'analyser et de caractériser les risques, en vue d'obtenir une vision globale de l'entreprise.

Ensuite il faut hiérarchiser les risques. Pour effectuer un tel classement, le dirigeant doit prendre en compte le risque lui-même, son impact et sa probabilité de survenance19(*). Il faut questionner les opérationnels de chaque activité afin d'obtenir les visions de chacun. C'est principalement le rôle du comité d'audit. Une fois l'enquête menée on est en mesure d'établir une cartographie des risques. Ce document permet de recenser et d'évaluer les risques majeurs d'une organisation et de les présenter synthétiquement sous une forme hiérarchisée.

Puis, compte tenu de la hiérarchisation des risques, il conviendra d'adopter des plans d'actions pour chaque risque, sans oublier de créer un processus de contrôle interne et de suivi du plan d'action mené.

Un management des risques performant doit être permanent et irriguer toute l'organisation. Il est mis en oeuvre par l'ensemble des collaborateurs, à tous les niveaux de l'entreprise. Mais si la condition d'un tel déploiement comme gage de réussite de la gestion des risques est facile à comprendre, la pratique n'en est pas pour autant aisée. En effet, il est nécessaire d'analyser chaque activité de l'entreprise, chaque enjeu, et donc de cerner les problématiques de chaque acteur. Il va sans dire que le nombre d'acteurs et de centres d'intérêts, même s'il varie selon la taille de l'entreprise, sera très important. C'est la raison pour laquelle, le métier de « Risk manager » a été crée. Le gestionnaire du risque est le professionnel de la gestion des risques. Il est le partenaire des opérationnels et est donc amené à connaître les attentes des divers acteurs de l'entreprise, mais aussi de ceux qui composent l'environnement dans lequel la société évolue (tels que les investisseurs).

La gestion des risques est une méthode structurée qui, comme nous l'avons vu, a pour objectif premier de créer de la valeur pour la société. Elle permet aussi au dirigeant de mettre en place des outils pour éviter de voir sa responsabilité personnelle mise en cause. Il n'en demeure pas moins que, concrètement, chaque année en France, plus de 5 000 dirigeants de TPE et PME font l'objet de poursuites concernant la mise en cause de leur responsabilité.20(*)Les sanctions allouées par les tribunaux sont souvent lourdes : elles vont de la condamnation du responsable au versement de dommages-intérêts à des peines de prison.

Comment expliquer un tel bilan alors qu'en parallèle la gestion des risques se développe ?

Il semble donc tout à fait légitime de se demander si l'audit et la gestion des risques permettent réellement d'éviter la mise en cause de la responsabilité du dirigeant social. L'objectif de cette étude n'est pas d'envisager tous les cas de mises en cause de la responsabilité du dirigeant, mais plutôt d'en étudier quelques uns et de mettre en valeur les instruments qui peuvent être développés dan le cadre d'une gestion des risques pour y remédier.

Nous verrons donc, dans un premier temps, plusieurs cas d'engagement de la responsabilité civile du dirigeant, ainsi que les moyens développés par l'ERM pour les éviter, (Chapitre 1) pour nous pencher, dans un second temps, sur quelques infractions pénales auxquelles le chef d'entreprise doit faire face, et les solutions qui peuvent être mises en place dans le cadre d'une gestion des risques (Chapitre 2). Nous analyserons ainsi dans ces développements leur efficacité et leurs lacunes.

Chapitre 1. L'audit et la gestion des risques juridiques : un outil efficace de prévention contre la mise en jeu de la responsabilité civile du dirigeant d'entreprise

Le chef d'entreprise possède dans le cadre de ses fonctions, d'importantes prérogatives qui lui permettent de diriger la société. En exerçant de tels pouvoirs, il s'engage à en assumer la responsabilité civile.

Il convient de préciser dès à présent que notre étude portera ici aussi bien sur le dirigeant de droit que sur le dirigeant dit « de fait ». Dans le premier cas, ses pouvoirs lui ont été conférés par les statuts de la société ou dans un texte législatif (c'est le cas, par exemple, du gérant de SARL21(*)). Le second cas fait référence à la situation dans laquelle une personne exerce de fait, d'une manière directe ou par personne interposée, une « activité positive de gestion et de direction de l'entreprise sous le couvert et au lieu et place du représentant légal ».22(*)

La jurisprudence a posé des conditions strictes pour qu'un individu soit qualifié de dirigeant de fait. Cette rigueur est compréhensible puisqu'une telle qualification fait peser sur les épaules de celui qui l'assume les mêmes obligations que celles du dirigeant de droit, et le fait également bénéficier de ses prérogatives. Se voir qualifier de dirigeant de fait n'est donc pas sans conséquences. Ainsi, la jurisprudence exige que le dirigeant de fait exerce ses fonctions en totale indépendance23(*), et de manière active24(*). En outre, il faut que son activité revêt un caractère continu et régulier, et « ne saurait consister en un acte isolé »25(*). Aussi, à titre d'exemple, des actionnaires « qui ne s'étaient pas bornés à un simple rôle d'investisseurs ou à trouver des solutions de restructuration financière, mais dépassant une intervention à titre de conseil, avaient exercé un réel pouvoir de direction en plaçant le conseil d'administration dans une situation de dépendance, en soumettant des décisions de cet organe aux résultats de leurs recherches et leurs avis »26(*) avaient été considérés par la chambre commerciale de la cour de cassation comme étant des dirigeants de fait.

On peut donc reprendre la définition posée par la Cour de Cassation et définir le dirigeant de fait comme étant celui qui « en toute indépendance et liberté exerce une activité positive de gestion et de direction et se comporte, sans partage, comme maître de l'affaire ».27(*)

L'article L241-9 du Code de Commerce28(*) prévoit que les dirigeants de fait peuvent voir leur responsabilité engagée au même titre que les dirigeants dits de Droit. Et il est communément admis par la Jurisprudence, que le cumul des responsabilités entre dirigeants de droit et de fait est tout à fait possible. L'une n'exclut pas l'autre. En effet, le dirigeant de droit ne fait pas écran à la mise en cause de la responsabilité de la personne qui exercerait en réalité les fonctions de dirigeant29(*).

Le droit français prévoit que les dirigeants de sociétés peuvent voir leur responsabilité civile mise en cause dans de nombreuses situations. Il serait vain de vouloir toutes les citer, c'est pourquoi, dans un premier temps, nous ne traiterons que des cas prévus par les articles L223-22 et L225-251 du code de commerce. A savoir, au regard du droit des sociétés le dirigeant peut être attaqué pour violation des statuts, méconnaissance des dispositions législatives ou règlementaires, ou encore pour faute de gestion. Nous aborderons également l'hypothèse particulière de la mise en cause de la responsabilité du chef d'entreprise lorsque la société qu'il dirige est soumise à une procédure collective (I).

Et dans un second temps, nous analyserons les techniques qui peuvent être proposées dans le cadre d'une gestion des risques pour éviter la mise en cause de la responsabilité civile du dirigeant. (II)

I. Quelques cas d'engagement de la responsabilité civile du dirigeant

Le principe qui domine en matière de responsabilité est que « seul celui qui a subi un préjudice peut agir ». La personne qui se prétend victime devra prouver qu'elle a personnellement subi un dommage et que celui-ci est la conséquence d'un fait imputable au dirigeant, et non à la société. 30(*)

Il convient de préciser que la responsabilité civile du dirigeant peut être mise en cause que le préjudice ait été subi par la société ou par des tiers.

Ainsi, l'action en réparation du préjudice subi par la société, dite « action sociale » peut être exercée par la société elle-même au travers de son représentant légal, on parle alors d'action « ut universali », ou par les associés ou actionnaires (action « ut singuli »). Il s'agit d'une action d'ordre public qu'aucune disposition des statuts ne peut écarter. La particularité de cette action réside dans le fait que les dommages-intérêts qui pourraient être attribués en réparation du préjudice seront versés à la société, et non pas à celui qui intente l'action. En pratique, il faut bien remarquer que l'action ut universali est très rarement exercée. Il est en effet logique que les dirigeants n'intentent pas une action ut universali contre eux-mêmes s'ils ont commis une faute de gestion et ont par la même causé un préjudice à la société.

L'action peut aussi être intentée pour réparer le préjudice subi, non pas par la société, mais par les associés ou actionnaires personnellement. Ils doivent alors prouver que le dommage dont ils se prévalent est bien distinct du préjudice de la société. Ce sera le cas par exemple si le dirigeant a détourné des dividendes destinés à l'associé.31(*)

Il faut également souligner que la responsabilité civile des dirigeants peut être considérée comme individuelle ou solidaire. Celle individuelle est engagée lorsqu'une faute est imputable à un dirigeant seul, tandis que celle solidaire intervient quand plusieurs dirigeants ont commis une faute commune ou collective, sans pour autant qu'il soit nécessaire que leurs actes aient été identiques. Lorsque le juge retient la responsabilité solidaire des dirigeants, la victime peut demander à n'importe lequel d'entre eux qu'il paye le montant de la réparation dans son intégralité, étant entendu que celui qui voit sa responsabilité engagée peut toujours exercer une action récursoire contre les autres. Pour autant cette règle n'interdit pas au tribunal de déterminer la part contributive de chaque dirigeant dans la réparation du dommage. 32(*)

A l'égard des tiers, la responsabilité du dirigeant peut être engagée mais sous réserve de respecter certaines conditions que nous allons expliciter dans les développements suivants.

La responsabilité des dirigeants peut notamment être mise en cause pour violation du droit des sociétés (A), mais aussi dans l'hypothèse particulière dans laquelle l'entreprise est déclarée « en difficulté » (B).

A. Exemples de cas de mise en cause de la responsabilité du dirigeant prévus par le Code de Commerce 

En vertu des articles L223-22 et L 225-25133(*)  du Code de Commerce, la responsabilité civile du dirigeant peut être mise en cause par les associés et par les tiers dans trois hypothèses : en cas d'infraction aux dispositions législatives ou règlementaires (1), en cas de violation des statuts (2), ou encore en cas de faute commise dans la gestion (3).

1. Les infractions aux dispositions législatives ou règlementaires

Le premier cas d'engagement de la responsabilité civile du dirigeant prévu par les articles L223-22 et L225-251 du code de commerce est la « la violation des dispositions législatives ou règlementaires ».

Cette action en responsabilité ne concerne que les dirigeants de droit, associés ou non, désignés par les articles L223-22 et L225-251 du code de commerce ou pour lesquels une disposition renvoie expressément à ces articles.

Concrètement, il serait très difficile, voire impossible, d'énumérer de manière exhaustive ces « dispositions législatives ou règlementaires ». Elles sont extrêmement nombreuses et les dirigeants peuvent se révéler coupables d'une multitude de manquements commis tout au long de la vie de la société (de sa constitution à sa dissolution). On peut citer à titre d'illustrations l'inobservation des règles de constitution de la société comme l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés34(*), ou le non respect de règles de fonctionnement comme le manquement à l'obligation de dépôt des comptes sociaux au greffe du tribunal de commerce dans le mois qui suit leur approbation par l'assemblée générale des actionnaires.35(*)

En pratique, le terme « dispositions législatives ou règlementaires » recouvre une multitude d'obligations et il va sans dire que cela fait peser une pression sur le dirigeant social. Pour faire face au risque de violer un des règlementations, l'audit et la gestion des risques juridiques disposent d'outils intéressants, que nous développerons prochainement.

Le second alinéa des articles L 223-22 et L 225-251 du code de commerce ne fait pas décroître la pression pesant sur les épaules du chef d'entreprise en précisant que celui-ci verra sa responsabilité civile engagée en cas de « violation des statuts ».

2. La violation des statuts

Comme nous l'avons vu précédemment, l'un des trois principaux cas de mise en jeu de la responsabilité civile du dirigeant prévus par les articles L223-22 et L225-251 du code de commerce est la « violation des statuts ».

Il est vrai que la loi impose aux sociétés commerciales et aux sociétés civiles de rédiger des statuts. Ces derniers mentionnent principalement la forme de la société, sa dénomination, son siège social, le montant de son capital social, ainsi que ses règles de fonctionnement. Une fois les statuts rédigés et enregistrés auprès du centre des impôts du domicile de l'un des associés ou du siège social de la société, le dirigeant est tenu d'en respecter les dispositions. Cette obligation vaut tant pour les dispositions statutaires qui reprennent une disposition légale ou règlementaire que pour les dispositions statutaires propres à la société.

A défaut, les articles L 223-22 et L 225-251 du code de commerce prévoient qu'il engagera sa responsabilité civile. Il est important de préciser qu'en pratique seul le dirigeant de droit est concerné par les textes sus-cités.

Concrètement, il s'agit pour le dirigeant de respecter les règles de fonctionnement de la société qui ont été établies dans les statuts. Ainsi, à titre d'exemple, le co-gérant qui passe outre la clause statutaire prévoyant la signature conjointe des gérants pour tous les actes de gestion, engage sa responsabilité à l'égard de la société pour violation des statuts et peut être condamné à garantir la société du paiement des sommes qu'elle doit verser au cocontractant.36(*)

On comprend donc aisément que la rédaction des statuts est une étape très importante lors de la création d'une société car ils permettent d'encadrer le fonctionnement de l'entreprise, et les rapports entre la direction et les actionnaires et associés notamment. Le dirigeant a tout intérêt à en connaître les termes dans le détail, et à s'organiser une protection au cas où il ne respecterait pas une disposition statutaire.

Les articles L223-22 et L225-251 du code de commerce prévoient aussi que le dirigeant peut voir sa responsabilité engagée pour « faute commise à l'occasion de la gestion ».

3. La faute commise à l'occasion de la gestion

Le troisième et dernier cas prévu par les articles L223-22 et L225-251 du Code de commerce est celui de la « faute commise dans la gestion » par le dirigeant. On attend du dirigeant qu'il se comporte en « bon père de famille », ainsi, une obligation de moyen pèse sur lui en matière de gestion. Ce n'est pas sans peine que le chef d'entreprise doit donc allier prudence et prise de risque. Ainsi, s'il ne déploie pas tous les moyens utiles et nécessaires à la bonne santé financière de son entreprise, sa responsabilité civile peut être engagée.

La difficulté est que cette notion de « faute de gestion » n'a pas été définie par le législateur. Aussi, les tribunaux distinguent selon que l'action est intentée par des actionnaires ou associés, ou par des tiers à la société.

Si ce sont les actionnaires ou associés qui exercent l'action, alors il appartient aux tribunaux d'apprécier, au cas par cas, si le comportement du dirigeant, action ou omission, constitue ou non une faute de gestion.

Concrètement, l'éventail des fautes retenues à l'encontre des dirigeants est très vaste. Il peut aussi bien s'agir d'une négligence ou d'une simple imprudence que d'une manoeuvre frauduleuse, commise par un dirigeant de droit ou de fait.37(*). Ainsi, il a été jugé qu' « a commis une faute de gestion le gérant d'une SARL qui passant outre les instructions formelles et réitérées de l'associé majoritaire de la société, a laissé un tiers prendre le contrôle d'une filiale »38(*).

Les juges apprécient très largement la faute de gestion, et n'exigent pas du dirigeant qu'il ait eu l'intention de nuire. Une telle souplesse met le chef d'entreprise dans une situation délicate puisque les tribunaux s'attachent seulement aux conséquences de l'action, ou de l'omission, du dirigeant, peu important qu'il ait voulu, ou eu conscience de nuire à la société.

Concernant les tiers à la société, des conditions supplémentaires ont été posées par le juge pour leur permettre de mettre en cause la responsabilité du dirigeant.

Si les conditions de droit commun doivent évidemment être remplies39(*), les tribunaux exigent également du tiers qu'il prouve que la faute du dirigeant est détachable ou séparable de ses fonctions et qu'elle lui est imputable personnellement40(*).

Dans un célèbre arrêt du 20 Mai 2003, la chambre commerciale de la Cour de Cassation a considéré qu'une faute détachable est une faute «commise intentionnellement par le dirigeant, d'une particulière gravité, et incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales ».41(*) Le dirigeant doit avoir eu conscience qu'il causait un préjudice à un tiers.

Ces critères jurisprudentiels visent à protéger les dirigeants contre des mises en cause intempestives de leur responsabilité. Il faut bien comprendre que cela n'est pas forcément en la défaveur du tiers puisque ce dernier peut toujours engager la responsabilité de la société personne morale pour obtenir réparation de son préjudice.

En pratique, les tribunaux ont une vision plutôt extensive de la « faute détachable », de sorte que le dirigeant éprouve dans certains cas beaucoup de difficultés à prouver que la faute qui lui est reprochée n'était pas intentionnelle ni détachable de ses fonctions. Ainsi les juges de cassation ont validé un jugement condamnant un dirigeant social qui s'était abstenu de payer la prime d'assurance d'un véhicule de société et qui avait laissé un salarié utiliser le véhicule sans l'informer du fait qu'il n'était pas assuré42(*). Les juges ont considéré que le salarié, n'étant ni actionnaire ni associé, était un tiers à la société et que la faute devait être considérée comme détachable des fonctions du dirigeant. Cette solution est discutable, et discuté, car il s'agissait d'un véhicule de service, mis à disposition dans le cadre du travail par un dirigeant à son salarié. Cette largesse d'appréciation a pour but de protéger les tiers à la société, en leur assurant une réparation du préjudice subi, et s'inscrit dans un mouvement de responsabilisation des dirigeants sociaux.

Toutefois, le dirigeant n'est pas totalement démuni d'armes pour se défendre contre les actions intentées contre lui.

Il peut notamment s'exonérer de sa responsabilité s'il apporte la preuve de son hostilité à prendre la décision, considérée comme constitutive d'une faute. Ses contestations doivent être explicites et consignées dans le procès verbal de la réunion au cours de laquelle la décision a été prise. De même, les tribunaux admettent que la responsabilité d'un dirigeant notoirement inexpérimenté n'est que partielle, si les associés ont eux-mêmes commis une faute en le désignant pour lui confier des tâches difficiles.

A travers les articles L 223-22 et L 225-251 du code de commerce, le législateur a organisé trois cas de mise en cause de la responsabilité du dirigeant mais a permis, par la largesse des termes employés, de couvrir une multitude de situations, que les tribunaux apprécient souverainement. Et c'est dans le même esprit que des cas d'engagement de la responsabilité civile du dirigeant ont été prévus lorsque la société est dite « en difficulté ».

B. Le cas particulier de la responsabilité du dirigeant d'une entreprise en difficulté

Lorsque la société est soumise à une procédure collective, le dirigeant peut voir sa responsabilité engagée. Par procédure collective, il faut entendre la liquidation judiciaire, le redressement judiciaire, et la procédure de sauvegarde des sociétés43(*). Pour les expliciter d'une manière succincte, on peut dire qu'il s'agit de « procédures qui placent toute personne, physique ou morale, de droit privé  exerçant une activité économique, qui se trouve en état de cessation des paiements, ou menacée de tomber dans cette situation, sous le contrôle de la justice et la fait notamment bénéficier de la suspension des poursuites »44(*). L'état de cessation de paiement correspond à l'impossibilité pour la société de faire face au passif exigible avec son actif disponible. Depuis janvier 2006, cette procédure bénéficie également aux professions libérales.

Quand une procédure collective est ouverte à l'égard d'une société, le tribunal peut décider de sanctionner le dirigeant, mais seulement à la condition qu'il ait commis une faute de gestion. En pratique, le juge apprécie au cas par cas cette notion de « faute de gestion », comme nous l'avons vu précédemment. Mais, il en a une vision encore plus extensive lorsque la société n'est pas in bonis, et ce, dans le but d'indemniser le tiers créancier et de sanctionner le dirigeant qui a conduit l'entreprise à la cessation des paiements.

Aussi, le dirigeant peut voir sa responsabilité civile mise en cause sur le terrain de l'action en comblement du passif telle qu'elle est prévue par l'article L651-2 du code de commerce (autrement appelée « action en paiement de l'insuffisance d'actif »), ou se voir imposer une faillite personnelle (article L 653-4 du code de commerce), ou encore une interdiction de gérer (article L653-2 du code de commerce).

Avant d'expliciter ces trois sanctions, il est important de souligner qu'elles s'appliquent tant aux dirigeants de droit qu'à ceux de fait, ainsi qu'aux anciens dirigeants et parfois à leurs héritiers en cas de décès. Il est indéniable que le législateur n'a pas cantonné l'action aux seuls dirigeants de droit, en activité, pour augmenter la chance pour les tiers créanciers d'être remboursés de ce que la société leur doit. Mais pour le dirigeant cette logique indemnitaire accroît son exposition au risque de voir sa responsabilité civile engagée.

Les actions en responsabilité contre les dirigeants d'entreprise en difficulté peuvent être intentées par le ministère public ou les organes de la procédure collective, à savoir le liquidateur ou le mandataire judiciaire, ou en cas de carence de ce dernier par les créanciers, dans le délai de prescription de trois ans.

En outre, il est important de préciser dès à présent que l'ordonnance du 18 Décembre 2008 a supprimé l'obligation aux dettes sociales. Cette sanction civile était en fait une sanction patrimoniale qui ne trouvait à s'appliquer que dans les cas limitativement énumérés à l'ancien article L652-1 du code de commerce45(*), correspondant à des comportements spécifiques du dirigeant.

Elle avait été instituée par le législateur, dans la loi n°2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des sociétés, pour atténuer la responsabilité qui pesait sur le chef d'entreprise. Il s'agissait de limiter la possibilité d'intenter l'action d'obligation aux dettes sociales à la seule hypothèse dans laquelle la faute de gestion qu'avait commis le dirigeant avait contribué à la cessation des paiements et non pas seulement à l'insuffisance d'actif. Ainsi, cette action n'était possible que lorsque la société était placée en liquidation judiciaire. Un simple redressement judiciaire n'était pas suffisant. Le législateur voulait protéger les dirigeants, et par la même restreindre les possibilités du juge de le condamner. Cette action avait récemment été appliquée par la Cour d'appel de Paris le 9 septembre 200846(*) afin condamner des dirigeants pour détournement de l'actif social.

Mais depuis le 15 février 2009, l'obligation aux dettes sociales est supprimée et l'action en comblement du passif est modifiée. Parallèlement, les fautes visées par l'ancien article L652-1 sont reprises dans l'article relatif à la faillite personnelle47(*).

L'ordonnance de 2008 vise clairement à rendre la procédure de sauvegarde plus accessible et plus attractive pour les dirigeants. Elle affiche pour objectif premier de faciliter le recours aux procédures d'insolvabilité, en modifiant le critère d'ouverture de la sauvegarde, et en réduisant le rôle des organes de la procédure au profit du dirigeant notamment. Un tel dispositif a logiquement pour conséquence de faire peser un poids supplémentaire sur les épaules de ce dernier.

L'ouverture d'une procédure collective ouvre donc la voie à diverses sanctions à l'encontre du dirigeant de droit ou de fait d'une entreprise qui, ne s'étant pas montrer assez vigilent, aurait conduit l'entreprise à l'état de cessation des paiements, notamment : l'action en comblement du passif (1), la faillite personnelle (2), ou l'interdiction de gérer (3). Le dirigeant peut aussi faire l'objet de sanctions pénales telle que la banqueroute, prévue aux articles L654-1 à L654-7 du code de commerce48(*), mais cela ne sera pas l'objet de notre étude.

1. L'action en comblement du passif

Cette action, également dénommée « action en paiement de l'insuffisance d'actif », est régie par les articles L651-249(*) à L 651-4 du code de commerce. Depuis l'ordonnance du 18 décembre 2008, elle est définie comme suit : « le passif social peut être mis en tout ou partie à la charge du dirigeant en cas de constatation par le tribunal de fautes de gestion lui étant personnellement imputables et ayant contribué à l'insuffisance d'actif ». Ainsi désormais le dirigeant ne peut être poursuivi en comblement du passif qu'en cas de liquidation judiciaire faisant apparaître une insuffisance d'actif. La résolution du plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire ne permet plus d'agir contre lui comme c'était le cas sous le régime issu de la loi du 26 juillet 2005.

Cette action permet de faire supporter le paiement des dettes sociales au dirigeant lorsque l'actif de la société ne permet pas de couvrir les dites dettes.

Néanmoins, les juges ont posé des critères pour que la responsabilité du dirigeant soit engagée. Deux exigences doivent être satisfaites : la preuve de la faute de gestion et un lien de causalité entre la faute de gestion et l'insuffisance d'actif.

Comme nous l'avons vu précédemment, la faute de gestion est appréciée différemment selon que l'action en responsabilité est intentée par des associés ou actionnaires, ou alors par des tiers à la société. Dans le premier cas, les tribunaux apprécient au cas par cas si la gestion a été fautive. Et ils considèrent en pratique que, toute faute de gestion, même légère, toute imprudence ou négligence peut entraîner la mise en cause de la responsabilité du dirigeant social. Dans le second cas, les juges exigeront en plus que la faute soit séparable des fonctions du dirigeants et qu'elle ait été commise volontairement. Il est exigé en outre que le tiers n'exerce cette action que pour des faits antérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective, et qu'il prouve que le préjudice allégué lui est bien « personnel et distinct de celui des autres créanciers ».50(*)

La jurisprudence a ainsi établi que constitue une faute de gestion susceptible d'être reprochée au dirigeant social dans le cadre d'une action en comblement du passif : la non-déclaration de la cessation des paiements, la réalisation d'investissements hasardeux, le non-paiement des dettes envers le Trésor ou les organismes de sécurité sociale, le paiement préférentiel en période suspecte, ou encore la tenue d'une comptabilité irrégulière. Ainsi, le dirigeant qui s'est abstenu de restructurer les filiales du groupe, ce qui a provoqué des pertes importantes qui se sont amplifiées alors que le directeur financier l'avait alerté sur ce phénomène et sur la dégradation des finances de la holding, a été condamné sur le fondement de l'article L 651-2 alinéa 1er du code de commerce51(*).

Il faut cependant savoir que l'action en comblement du passif intentée conte le dirigeant social n'est pas cumulable avec une action en responsabilité pour faute de gestion fondée sur les articles L223-22 et L225-251 du code de commerce, ni sur celle de l'article 1382 du code civil. Cela pourrait être quelque peu rassurant pour le dirigeant mais seule la gestion antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective peut donner lieu à une action en comblement du passif. De sorte que les fautes de gestion postérieures à l'ouverture de la procédure peuvent faire l'objet d'une action fondée sur les articles L223-22 ou L225-251 du code de commerce, ou sur l'article 1382 du code civil.

Toutefois, et c'est un point important pour les dirigeants, le comblement du passif n'est qu'une sanction facultative. Le tribunal dispose d'un large pouvoir d'appréciation et peut toujours écarter une condamnation pour comblement du passif.52(*) En pratique de nombreux facteurs sont pris en considération par les tribunaux : la procédure suivie, les causes de la défaillance de l'entreprise, l'attitude du dirigeant et l'importance relative des dettes impayées principalement.

On perçoit aisément la situation d'incertitude dans laquelle se trouve le dirigeant. Ses agissements peuvent être qualifiés de fautifs alors même qu'il ne voulait pas nuire à la société, et un agissement fautif peut ne pas être sanctionné selon la volonté du juge... La faculté d'appréciation du juge met le chef d'entreprise dans une situation délicate. Et il en va de même au regard du régime de la faillite personnelle tel qu'il a été modifié par l'Ordonnance de 2008.

2. Faillite personnelle

La réforme de 2008, bien que supprimant l'obligation aux dettes sociales, maintient le régime de la faillite personnelle. Celle-ci est régie par les articles L653-453(*) et L653-554(*) du code de commerce. Le dirigeant sera condamné pour faillite personnelle en cas de fautes spécifiques, énumérées à l'ancien article L652-1 du code de commerce55(*) : usage de biens ou de crédits contraire à l'intérêt de la personne morale, poursuite d'une exploitation déficitaire, détournement ou dissimulation de l'actif, majoration frauduleuse du passif, tenue de comptabilité fictive entre autres. 

Le dirigeant ne peut être frappé de faillite personnelle que lorsque la société est mise en liquidation ou en redressement judiciaires. Cette action touche les dirigeants en activités, les anciens dirigeants qui ont contribué à la cessation des paiements de l'entreprise, mais pas les héritiers des dirigeants décédés. Cette exclusion est somme toute logique puisqu'il s'agit d'une sanction personnelle.

Tout comme l'action en comblement du passif, elle est facultative, ce qui laisse planer une épée de Damoclès sur la tête du dirigeant.

Néanmoins, ici le législateur n'a pas totalement laissé libre court à l'appréciation des juges. Il a encadré cette sanction qui frappe personnellement le dirigeant. Ainsi, il est exigé que la faillite personnelle ne soit prononcée que pour une durée déterminée, qui ne saurait excéder quinze ans (tout comme l'interdiction de gérer d'ailleurs, que nous verrons ultérieurement)56(*). A titre d'illustration, le dirigeant d'une société en liquidation judiciaire qui a fait des biens de cette société un « usage contraire à l'intérêt de celle-ci » en payant à une autre société, dont il était associé et dirigeant, une somme importante en exécution d'une convention d'assistance et de conseil conclue entre les deux sociétés a été condamnée à quinze ans de faillite personnelle57(*).

Concrètement, la faillite personnelle entraîne des déchéances de droits pour le dirigeant (droits civiques, politiques, professionnels, honorifiques et capacité d'exercer une fonction publique élective notamment). De surcroît, elle est accompagnée d'une interdiction de diriger, de gérer, d'administrer, ou de contrôler, directement ou indirectement, une entreprise, quelle qu'en soit la forme ou son activité, et toute personne morale. Elle prive le dirigeant de son droit de vote aux assemblées générales. Les tribunaux peuvent même enjoindre au dirigeant de céder ses parts ou ses actions sociales détenues dans la société en difficulté. Cette injonction peut aller jusqu'à devenir une cession forcée.

Il est donc évident que cette sanction générale est très lourde de conséquences pour un dirigeant.

Néanmoins, les juges ont le pouvoir souverain d'opter entre la faillite personnelle et l'interdiction de gérer, qui s'avère être moins contraignante pour le dirigeant.

3. Interdiction de gérer

La sanction d'interdiction de gérer peut être prononcée dans tous les cas de faillite personnelle, comme nous venons de l'aborder. Mais elle peut aussi être prononcée de manière autonome et frapper les dirigeants de mauvaise foi qui, par exemple, n'auraient pas remis au mandataire judiciaire, à l'administrateur ou au liquidateur judiciaire les documents nécessaires pour réaliser l'inventaire qui suit le jugement d'ouverture de la procédure collective.58(*)

Cette sanction est moins lourde que la faillite personnelle car elle n'est pas générale. Ainsi le juge peut décider de ne la prononcer qu'à l'égard d'une société déterminée, ou la limiter à une certaine forme de société par exemple. Néanmoins, comme en cas de faillite, le dirigeant est privé du droit de vote dans la société et peut être tenu de céder ses actions ou parts sociales.59(*)

Il est toutefois nécessaire de souligner que cette interdiction de gérer est aussi une sanction facultative, et le juge dispose donc de larges pouvoirs d'appréciation. C'est bien ce qui met le dirigeant dans une situation délicate. Ne sachant pas comment les tribunaux considèreront sa gestion, s'ils seront « cléments » ou non, il a tout intérêt à déployer des moyens de prévention pour éviter de se retrouver à la merci du juge. L'audit et la gestion des risques juridiques lui offrent des clefs pour tenter de remédier à ces problèmes.

II. Les moyens mis en oeuvre par la Gestion des risques juridiques pour éviter l'engagement de la responsabilité civile du dirigeant

Afin de se protéger contre une mise en jeu de sa responsabilité civile, tels que certains des cas que nous venons de développer, le dirigeant a la possibilité de souscrire une assurance (A). Il peut aussi mettre en place des garde-fous en interne à l'entreprise, telle qu'une collaboration étroite avec le juriste d'entreprise, ou créer un contrôle de gestion (B).

A L'assurance de la responsabilité civile du dirigeant social

Pour faire face aux risques auxquels il est exposé et pour s'en prémunir, le dirigeant dispose de garanties d'assurances qui ont été spécialement conçus à son intention.

L'étendue de la protection offerte par ces assurances présente des avantages incontestables pour les dirigeants, mais encore faut-il pouvoir en bénéficier, c'est-à-dire avoir la qualité d'assuré et s'assurer de rentrer dans l'objet de la garantie (1). Et il faut de même bien admettre que le recours à l'assurance présente des limites (2).

1. La qualité d'assuré et l'objet de la garantie

Le recours à l'assurance est depuis longtemps utilisé par les chefs d'entreprise. Originairement le management des risques était d'ailleurs presque totalement axé sur cet aspect assurantiel. Mais aujourd'hui, des contrats d'assurance responsabilité civile ont été élaborés pour prendre en compte les besoins particuliers des dirigeants d'entreprise. Il est à noter que très peu de compagnies proposent ce type de contrat à ce jour60(*). Et, d'une manière générale, les clauses proposées par les assureurs sont presque similaires, même si évidemment des nuances existent. Nous nous attacherons donc à présenter les dispositions que l'on retrouve plus habituellement dans ces contrats et nous soulignerons leurs atouts pour le dirigeant dans le cadre de la gestion des risques.

Tout d'abord, il faut savoir qu'il s'agit de contrats présentés sous la forme de garanties « tous risques SAUF ». Ainsi ils listent expressément les activités qui sont exclues de la protection assurantielle. Cette forme présente l'avantage pour le dirigeant de pouvoir faire entrer dans le cadre de la protection ses activités les plus occasionnelles, à partir du moment où elles ne sont pas exclues, quand bien même elles n'auraient pas été expressément prévues dans le contrat. Ainsi, le champ de couverture de l'assurance des dirigeants est variable. Il peut porter sur les seules activités habituelles du dirigeant de droit autant qu'il peut être étendu à des activités plus occasionnelles ou même à d'autres mandats sociaux exercés par le dirigeant, aux dirigeants de fait, et aussi aux conjoints. Cependant, la garantie ne peut être acquise qu'aux personnes nommément visées au contrat au moment de sa souscription. Donc en pratique ce n'est que lorsqu'un dommage s'est produit que la garantie des dirigeants de fait est envisagée au cas par cas avec l'assureur. Il s'agit en effet d'un risque mal délimité. La qualification même de dirigeant de fait implique que la fonction n'a pas été expressément confiée à la personne, et en conséquence que l'assureur n'avait pas connaissance de ce risque supplémentaire à protéger.

Il faut savoir que ce type de contrat d'assurance est souscrit par la société elle-même, et non pas par le dirigeant. Ce dernier pourra toujours souscrire en parallèle et de son propre chef, une assurance personnelle qui viendra compléter les précautions déjà prises par l'entreprise.

En outre, il est d'usage que la garantie subsiste pour le dirigeant au-delà du moment de la cessation de ses fonctions. C'est-à-dire qu'il reste protégé par le contrat pour les actes qu'il a accompli au cours de l'exercice de son mandat, et il en va de même pour ses héritiers en cas de décès.

L'assurance des dirigeants est donc un instrument très utile dans le cadre d'une gestion des risques, car il permet de protéger plusieurs personnes à la fois, et surtout de prévenir plusieurs risques en n'utilisant qu'un seul outil.

En effet, à la lecture de divers contrats d'assurances responsabilité civile des dirigeants, on remarque que leur objet est très large. Ils couvrent, dans la grande majorité des cas, la responsabilité tant délictuelle que contractuelle du dirigeant.

D'une manière générale, ces assurances garantissent les dirigeants contre les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile qu'ils encourent du fait de « fautes, erreurs, oublis, omissions, inexactitudes, fausses interprétations de textes légaux ou règlementaires commises dans l'exercice de leurs fonctions à l'égard des tiers ». A cet égard, le Droit des assurances considère que sont des tiers61(*) : les actionnaires individuels qui peuvent agir pour demander réparation d'un préjudice qui leur est propre, les actionnaires quand ils exercent une action ut singuli en lieu et place de la société, et les tiers au sens strict (à savoir les créanciers divers, les fournisseurs et clients, las administrations sociales et fiscales,...). Cette large acception des tiers offre en pratique une grande protection au dirigeant.

Les contrats d'assurance peuvent également prendre à leur charge les frais de défense, y compris pénale, les frais de gestion de crise, et les frais de reconstitution d'images62(*). Elles peuvent même proposer d''étendre leur portée aux conséquences fiscales et sociales d'une condamnation pénale (pour faute non intentionnelle).

On peut donc dire que les contrats d'assurance responsabilité civile des dirigeants présentent l'avantage incontestable d'avoir un objet très large, et une souplesse dans la définition du dirigeant protégé. Néanmoins, même si cet outil assurantiel apporte des garanties aux dirigeants, son champ d'application n'est pas absolu. Et il faut bien admettre qu'en réalité un certain nombre d'exclusions en limitent la portée.

2. Les limites du recours à l'assurance

Les limites à la portée des contrats d'assurance propres aux dirigeants sociaux sont de deux ordres : il y a tout d'abord les fautes pénales intentionnelles, puis les engagements personnels pris par la société souscriptrice.

Dans un premier temps, les fautes pénales intentionnelles correspondent aux infractions pénales dans leur ensemble : les contraventions, les délits et les crimes.

En effet, en application de l'article L 113-1 du Code des assurances63(*), le contrat d'assurance ne peut pas couvrir les conséquences de fautes intentionnelles commises par le dirigeant dans le cadre de son activité64(*). Cet article pose donc deux conditions pour que le contrat ne trouve pas à s'appliquer : la faute doit être intentionnelle et commise dans le cadre de ses activités par le dirigeant.

Dans un second temps, les engagements personnels de la société souscriptrice ne rentrent pas dans le champ d'application des contrats d'assurance des dirigeants. Concrètement, sont notamment concernées par cette exclusion, les conséquences d'absence de versement de toutes sommes dues à des organismes publics (redevances, impôts, taxes, cotisations,...), les actions exercées par un actionnaire majoritaire, celles exercées par des membres de la famille du dirigeant, les actions sociales exercées par les dirigeants légaux ut singuli, et celles relatives à des détournements d'actifs ou d'abus de biens sociaux.

Sont aussi exclues des contrats d'assurance les fautes antérieures à la souscription du contrat, et parfois les réclamations faites par des associés ou actionnaires détenant une certaine quotité du capital social et/ou les conséquences d'une action en comblement du passif intentée contre le dirigeant.65(*)

Une des principales limites du recours à l'assurance est qu'il y a toujours un plafond de garantie par sinistre et un autre par année de garantie. Même si généralement le contrat d'assurance du dirigeant ne comprend pas de franchise, il n'en demeure pas moins qu'il est difficile pour lui de deviner s'il va rester dans les limites du plafond accordé. Et il faut savoir que si les sommes mises à la charge du dirigeant par une condamnation dépassent le montant de la protection accordée par l'assurance, la part excédentaire sera à la charge du dirigeant. Il devra personnellement en assumer le paiement.

L'assurance du dirigeant intervient donc toujours après que les dommages aient été réalisés. Dans ce contexte la mise en place d'une gestion des risques présente l'avantage de permettre au dirigeant de souscrire le contrat d'assurance le plus adéquat avec sa situation, car il a analysé les différents risques auxquels il s'expose66(*). Néanmoins, il s'agit toujours d'un outil de réparation et non de prévention. Le chef d'entreprise a alors tout intérêt à déployer d'autres procédés pour agir en amont sur la mise en cause de sa responsabilité civile. Il peut notamment organiser des « garde-fous » en interne à son établissement.

B. La mise en place de « garde-fous » par la gestion des risques juridiques

Le juriste de l'entreprise a incontestablement un rôle à jouer dans la gestion des risques juridiques (1), et il en va de même du contrôleur de gestion (2).

1. Le rôle déterminant du juriste dans la gestion des risques juridiques

Le dirigeant a tout intérêt à placer le juriste au coeur de la gestion des risques juridiques pour organiser des mesures permettant d'éviter de voir sa responsabilité civile, contractuelle ou délictuelle, mise en cause. En effet, de par ses compétences, le juriste peut déterminer les vulnérabilités juridiques de l'entreprise, garantir un niveau de risque acceptable pour l'organisation intégrant l'environnement juridique, technique, économique, humain et organisationnel dans lequel il évolue. Pour lui, professionnellement, il s'agit de nouvelles opportunités à saisir, qui enrichissent incontestablement ses compétences. Il passe ainsi d'une vision règlementaire et juridique à une vision plus méthodologique, organisationnelle et transversale. Ainsi, Frédéric Reliquet et Stéphane Baller affirmaient lors d'une conférence organisée les 6 et 7 juin 2008 par le cabinet Ernst and Young : « Les perspectives de généralisation de la gestion des risques au sein des entreprises représentent aujourd'hui une véritable opportunité pour les juristes de se positionner comme une référence à l'origine d'une politique de gestion des risques vers laquelle s'orientent la plupart des entreprises »67(*).

Concrètement pour prévenir la mise en cause de la responsabilité civile du dirigeant, le juriste peut mettre en place plusieurs outils.

Tout d'abord il peut rédiger et diffuser dans l'entreprise un guide des bons rapports contractuels. Il s'agit de sensibiliser le personnel aux règles à respecter lorsque l'on collabore par la voie contractuelle avec ses partenaires68(*). A titre d'exemple il peut rappeler que des précautions sont à prendre lorsque l'on met fin à une relation commerciale durablement établie avec un partenaire, sous peine de sanctions prévues par le code du commerce.69(*) A ce guide des bons rapports contractuels, le juriste peut lier des notes de sensibilisation sur un aspect précis de la législation ou réglementation en vigueur. Dans le même ordre d'idées, il peut également organiser une veille juridique afin de se tenir informé des nouvelles législations. Un tel dispositif pourra notamment prévenir la mise en cause du dirigeant pour manquement aux « dispositions législatives et règlementaires », hypothèse que nous avons développée précédemment.

En outre, le juriste peut aussi introduire des clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité dans les contrats. Elles ont pour effet de limiter la responsabilité du dirigeant sur certains aspects. Toutefois, la jurisprudence se montre assez stricte en ce qui concerne les clauses exonératoires, et elles sont parfois interdites. Les juges n'entendent pas laisser le chef d'entreprise organiser son impunité. C'est pourquoi ce type de clause est à manier avec précaution car elles peuvent être déclarées nulles Ainsi, à titre d'exemple, la Commission des Clauses Abusives considère que ces clauses ne doivent pas avoir pour effet d'interdire l'exercice des actions en justice ou des voies de recours par le cocontractant, ou encore d'imposer par le biais d'une clause compromissoire, le recours à l'arbitrage pour un litige qui n'est pas encore né70(*).

Le juriste peut également mettre en place un outil de Gestion des Contrats. Il s'agit d'une base de données ayant pour vocation essentielle de répertorier l'ensemble des contrats souscrits par l'entreprise. Les objectifs principaux de cette application sont d'avoir une vision exhaustive et classifiée des engagements de l société, d'assurer une meilleure maîtrise des engagements financiers et des échéances contractuelles, et d'être une source de renseignement fiable et rapide pour les membres de l'entreprise. Si cette base est avant tout un outil pour l Juridique et pour la Comptabilité (en vue d'optimiser la gestion des échéances contractuelles et financières, des flux de prestations et de leur règlement), elle est tout aussi utile pour le dirigeant qui a ainsi accès à l'ensemble des engagements dont il a la responsabilité.

Mais le juriste doit évidemment collaborer avec l'ensemble des membres de l'entreprise pour que les outils qu'il met en place soient efficaces. Il doit par exemple être en relation avec la direction commerciale pour ce qui concerne la politique contractuelle, avec la direction marketing pour tout ce qui attrait à la propriété intellectuelle, ou encore être en lien avec la direction informatique pour ce qui concerne les NTIC.

En théorie, les outils que le juriste peut organiser au sein de l'entreprise pour agir en prévention de la mise en cause de la responsabilité du dirigeant sont efficaces. Mais il s'agit beaucoup de sensibilisation du personnel à la législation en vigueur ou aux engagements contractuels à respecter. Ainsi, les actions menées par le juriste dans le cadre de la gestion des risques ne seront efficaces que si l'ensemble des membres de la société sont réceptifs. Afin de s'en assurer, il est indispensable que le juriste soit soutenu par sa direction, et que la sensibilisation soit durable, pour éviter que le « soufflet ne retombe ».

De surcroît, si les compétences du juriste sont importantes pour mettre en place des garde-fous afin d'éviter que la responsabilité du dirigeant soit mise en cause, il n'en demeure pas moins que la gestion des risques est une discipline qui requiert des compétences qui vont au-delà du droit. Il est effectivement nécessaire d'avoir des connaissances en finance, en stratégie, et en techniques mathématiques aussi71(*). C'est pourquoi le dirigeant opte souvent pour la création d'un contrôle interne de gestion. En principe, cet organe lui permet d'éviter d'être mis en cause pour faute de gestion notamment (cas que nous avons mis en exergue dans un développement précédant).

2. L'organisation d'un contrôle interne de gestion

Le contrôleur de gestion participe à la définition des prévisions budgétaires et des objectifs financiers de l'entreprise. Il veille à leur respect au cours de l'année, analyse les écarts et propose des mesures correctrices. Ainsi il peut alerter le dirigeant si les finances de l'entreprise deviennent critiques. Le contrôle de gestion, comme son nom l'indique, permet alors au dirigeant d'éviter de commettre une faute de gestion et de prendre les mesures nécessaires lorsque l'organisation connaît des difficultés, et par la même éviter d'engager sa responsabilité. Il permet une transparence accrue de la communication financière et une meilleure prise de décision managériale72(*).

Cet organe permet aussi de prévenir l'engagement de la responsabilité civile du dirigeant en ce qu'il vérifie que l'utilisation des fonds est légale, que les déclarations sont réalisées conformément aux dispositions législatives et règlementaires en vigueur, tant sur la forme que sur le fond.

Le contrôle de gestion est un instrument qui est de plus en plus développé dans les entreprises. A ce constat, plusieurs explications sont possibles. D'une part, des études ont montré que les investisseurs privilégient les entreprises dont le contrôle interne de gestion est efficace. D'autre part, depuis 2006 le contrôle de gestion fait partie des compétences que l'on attend du contrôleur des comptes73(*). Cette précision n'est pas sans importance. Elle signifie que le contrôleur de gestion devient un acteur essentiel du monde de l'entreprise.

Néanmoins, l'inconvénient du contrôle de gestion réside premièrement dans son coût qui peut paraître excessif, et deuxièmement dans le ralentissement des activités qu'il provoque en interne, au moins durant le temps nécessaire à sa mise en place. En effet, à titre d'illustration, une facture qui doit être validée par deux personnes mettra plus de temps à entrer en comptabilité. Mais cette procédure de double signature, qui peut être instituée par le contrôle de gestion, ne représente pas une perte de gain, seulement une perte de temps. En l'occurrence on peut penser que c'est le prix à payer pour se protéger contre une sanction pour irrégularités dans la comptabilité74(*) ou encore contre une condamnation pénale pour faux75(*). Il est effectivement important de souligner que le contrôle de gestion est un outil qui permet au dirigeant d'éviter que sa responsabilité civile ne soit mise en cause, pour faute de gestion notamment, mais aussi pour prévenir de l'engagement de sa responsabilité pénale. Le contrôleur peut par exemple prévenir le dirigeant que les comptes sociaux établis par le comptable ne sont pas fidèles à la situation réelle de l'entreprise, et par conséquent lui éviter de voir sa responsabilité pénale engagée pour publication de comptes infidèles.

Nous venons de mettre en exergue quelques outils que le dirigeant peut mettre en oeuvre pour éviter la mise en cause de sa responsabilité civile. Il convient désormais d'étudier quelques cas d'engagement de la responsabilité pénale du chef d'entreprise, et les moyens développés par la gestion de risques pour les éviter.

Chapitre 2. La gestion des risques, un outil de prévention de la mise en jeu de la responsabilité pénale des dirigeants sociaux

Le principe en Droit pénal est : « nullum crimen nulla peona sine lege »76(*). Autrement dit, la responsabilité pénale d'une personne ne peut être engagée que si l'infraction qu'elle est accusée d'avoir commise a été prévue dans un texte répressif, ainsi que les sanctions qui s'y rattachent. C'est ce que l'on appelle le principe de la légalité des délits et des peines en matière pénale.

Le Droit français a prévu une multitude d'infractions, aux conséquences lourdes, dont pourrait se rendre coupable le dirigeant social. En effet, pèsent sur ses épaules de nombreuses obligations règlementaires et légales dont le non respect serait susceptible d'engager sa responsabilité pénale. C'est le cas par exemple en matière du droit du travail, du droit des sociétés, ou encore du droit de la concurrence. Cependant, il est intéressant de souligner dès à présent qu'un mouvement de dépénalisation du monde des affaires a été entrepris.

Il est vrai que depuis quelques années, il a été considéré que le droit pénal des affaires présentait une pénalisation excessive et peu efficace donc plusieurs lois sont intervenues afin de réduire l'exposition des dirigeants. D'une manière succincte on peut dire que ce mouvement de dépénalisation a débuté avec la loi n° 2000-647 du 10 Juillet 2000, dite « loi Fauchon ». Elle prévoit principalement qu'en ce qui concerne les délits non intentionnels, en cas de causalité indirecte, la responsabilité des personnes morales et physiques sont indépendantes, puisque la responsabilité des premières sera retenue en cas de faute simple, tandis que les dirigeants sociaux jouissent d'une immunité pour une faute d'importance comparable. Ensuite, la loi dite « NRE » du 15 Mai 200177(*), est venue supprimer un certain nombre de sanctions pénales en droit des sociétés, notamment en ce qui concerne le devoir d'information des associés par le dirigeant. Puis la loi dite de « sécurité financière » du 1er août 200378(*) et l'ordonnance du 25 Mars 200479(*) relative à la simplification du droit des sociétés ont également supprimé de nombreuses infractions parmi lesquelles on peut citer à titre d'exemple : le défaut de convocation aux assemblées générales des titulaires d'actions nominatives dans le délai légal (ancien article L 242-11 du code de commerce). Le décret du 11 Décembre 200680(*) a poursuivi le mouvement de dépénalisation et a supprimé de nombreuses infractions qui pouvaient être retenues à l'encontre des dirigeants de SARL notamment. Et enfin, le rapport Coulon, déposé le 20 Février 2008 à l'Assemblée nationale a préconisé le transfert vers la justice civile de plusieurs infractions très rarement poursuivies aujourd'hui81(*) : telle que la condamnation au paiement d'une amende de 3 750 euros prévue par l'article L 242-15 du code de commerce82(*).

Nous allons désormais développer quelques cas d'engagement de la responsabilité pénale du dirigeant (I), et les moyens mis en oeuvre dans le cadre de la gestion des risques pour les éviter (II).

I. Quelques cas de mise en jeu de la responsabilité pénale des dirigeants

La responsabilité pénale du dirigeant peut être engagée dans de nombreuses hypothèses. A défaut de pouvoir être exhaustif, nous développerons d'une part l'hypothèse dans laquelle le dirigeant se rend coupable de manquement aux règles d'hygiène et de sécurité (A), puis nous étudierons quelques infractions prévues par le Droit des sociétés (B) : l'abus de biens sociaux et la présentation ou publication de comptes infidèles.

Mais avant toute chose, il est nécessaire de préciser que tant le dirigeant de droit que celui de fait, qui exerce le pouvoir effectif de direction ou d'administration générale de la société, peut voir sa responsabilité pénale engagée dans les cas mis en valeur dans les développements suivants.

A La responsabilité pénale du dirigeant pour manquement aux règles d'hygiène et de sécurité

Si l'article 1384 alinéa 5 du code civil83(*) prévoit que le dirigeant peut être responsable du fait de ses préposés, en matière pénale le principe reste que « nul n'est responsable pénalement que de son propre fait »84(*). Toutefois, des nuances ont été apportées à cette règle.

Les juges répressifs ont en effet décidé qu'il appartient au dirigeant de veiller, dans son entreprise, au respect de la législation dans son ensemble85(*). Cette obligation est reprise dans l'article L 4121-1 du code du travail86(*) concernant l'hygiène et la sécurité au travail. L'article précise que : « l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels ; des actions d'information et de formation ; la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ». Par conséquent, si une infraction aux règles d'hygiène, de sécurité et de salubrité applicables à une entreprise est commise par un salarié, alors la responsabilité du dirigeant peut être engagée87(*).

Pour être constituée l'infraction suppose, en premier lieu, la violation d'un texte légal. En matière d'hygiène et de sécurité il s'agit principalement des dispositions de la quatrième partie du code du travail, intitulée «  Santé et Sécurité au travail ». En second lieu, l'élément matériel de l'infraction peut être une action ou une omission. Et enfin, il faut qu'il y ait une intention de commettre une infraction, ou alors qu'une faute ait été commise. En la matière, les juges considèrent qu'une faute non intentionnelle commise par imprudence, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité suffit à engager la responsabilité pénale du dirigeant. L'infraction sanctionne alors le manque de diligence du chef d'entreprise.

Et en pratique il faut admettre que la notion de « faute » est très largement entendue par les tribunaux. Ils considèrent en effet que le seul fait qu'une infraction ait été commise par un salarié démontre bien la négligence du dirigeant88(*).

La doctrine se montre très critique face à cette position des juges car il est matériellement impossible pour le dirigeant d'être derrière chaque salarié pour vérifier ses actions. En outre, il lui est très difficile concrètement de prouver qu'il n'a pas été négligent.

Il faut bien comprendre que le chef d'entreprise peut être condamné alors même qu'aucun dommage n'a été causé. Le manquement à la législation suffit. D'où l'intérêt pour lui de bien connaître la législation en matière d'hygiène et de sécurité.

Dans le même ordre d'idée, le dirigeant peut aussi être condamné pour avoir exposé autrui à un danger89(*). Néanmoins il est exigé dans ce cas qu'il ait intentionnellement violé une règle spéciale90(*) d'hygiène ou de sécurité91(*), même s'il n'avait pas pour but de causer un dommage. Ou alors, il faut que le dirigeant ait commis une « faute caractérisée ». C'est-à-dire qu'il doit avoir exposé autrui à un risque d'une particulière gravité, qui sera appréciée in concreto par le juge. Et l'auteur doit avoir eu conscience d'exposer autrui à ce risque.

En pratique, le juge apprécie au cas par cas tous ces éléments et il jouit d'un grand pouvoir d'appréciation, ce qui ne rassure évidemment pas le dirigeant. Ce dernier peut notamment craindre de voir ses intentions requalifiées par un juge en soif de répression.

On comprend donc aisément que le dirigeant se trouve dans une situation délicate. Il n'est pas chose facile que de devoir assumer seul le respect de la législation relative à l'hygiène et à la sécurité dans une entreprise. En outre, les juges bénéficient d'un grand pouvoir d'appréciation en matière de faute intentionnelle ou non, et de « diligences normales ». C'est la raison pour laquelle le chef d'entreprise a tout intérêt à organiser une gestion des risques pour savoir quelles activités de son établissement sont le plus exposées à un risque, lesquelles présentent des procédures de sécurité moins rigoureuses, ou encore quels sont les salariés les moins expérimentés. Ce dispositif lui permet de mettre en oeuvre des outils pour prévenir l'engagement de sa responsabilité pénale, telle que la délégation de pouvoir, instrument que nous développerons dans la seconde partie du présent chapitre (page 46).

En outre, une gestion des risques lui permet de mettre en place une veille juridique afin de connaître les obligations qui s'imposent à lui. Ce n'est pas dénué d'intérêt car il faut bien comprendre que les juges ont une vision très stricte du respect des obligations en matière d'hygiène et de sécurité92(*).

Le dirigeant peut également voir sa responsabilité pénale engagée s'il viole le droit des sociétés. Ce sera notamment le cas s'il commet un abus de biens sociaux ou s'il ne respecte pas toutes les obligations relatives aux comptes sociaux.

B. Deux exemples d'infractions pénales prévus par le droit des sociétés

La responsabilité pénale du dirigeant peut être engagée s'il se rend coupable du délit d'abus de biens sociaux (1), ou du délit de présentation de comptes infidèles (2).

1. L'abus de biens sociaux

L'abus de biens sociaux est prévu par les articles L241-3 alinéa 493(*) et L 242-6 alinéa 394(*) du code de commerce.

Ce délit est puni par cinq ans d'emprisonnement et une amende de 375 000 euros.

Les textes répriment le fait pour le dirigeant d'abuser de mauvaise foi des biens sociaux, pour un usage personnel, contraire, ou non conforme, aux intérêts de la société. Mais l'absence de définition plus précise de l'abus de biens sociaux par les textes a laissé le champ libre à l'interprétation du juge. Il a ainsi réprimé des comportements très variés. A titre d'illustrations, a pu être déclaré coupable d'abus de biens sociaux le dirigeant de fait d'une société mise en liquidation judiciaire qui avait fait des biens sociaux un usage contraire à l'intérêt de la société, à des fins personnelles, en se faisant « consentir un contrat de travail anormalement avantageux et une rémunération inhabituelle dont l'importance et le mode de détermination ne faisaient aucun cas de l'intérêt social »95(*). Ou encore, a été condamné le dirigeant qui a usé des biens de la société contrairement à l'intérêt de celle-ci en faisant effectuer des travaux à des fins personnelles en utilisant les fonds sociaux 96(*).

Les juges estiment que quel que soit l'avantage à court terme qu'elle peut procurer, l'utilisation des fonds sociaux ayant pour seul objet de commettre un délit, tel que la corruption, est contraire à l'intérêt social en ce qu'elle expose la personne morale au risque anormal de sanctions pénales ou fiscales contre elle-même et ses dirigeants et porte atteinte à son crédit et à sa réputation.97(*) Donc, l'usage de biens d'une société est considéré comme nécessairement abusif lorsqu'il est fait dans un but illicite.98(*) En outre, le fait de prélever des fonds sociaux de manière occulte pour les dirigeants sociaux est considéré par la Cour de Cassation comme ayant été nécessairement réalisé dans leur intérêt personnel, direct ou indirect.99(*)

Les juges estiment aussi qu'il n'est pas nécessaire que l'abus ait eu pour effet de compromettre l'intégrité de l'actif social100(*) pour que son auteur voie sa responsabilité mise en cause.

Le pouvoir d'appréciation des juges en matière d'abus de biens sociaux est très large. Ils peuvent ainsi incriminer des faits d'abstention ou d'omission, en réalité commis intentionnellement par le dirigeant, et donc réprimer éventuellement une tentative d'abus de biens sociaux alors même qu'aucun texte spécifique ne le prévoit. Le principe de légalité est donc « étiré » par le juge pénal, dans le but d'accroître son pouvoir d'appréciation et de sanction, ce qui peut tout de même être discutable d'un point de vue juridique.

Néanmoins, si le juge a étendu l'objet de l'infraction d'abus de biens sociaux, il n'en demeure pas moins qu'il reste soumis aux conditions posées par les articles du code de commerce.

La première condition posée par les textes est l'élément intentionnel de mauvaise foi. Il doit être établi, afin de condamner le chef d'entreprise d'abus de biens sociaux, que l'usage qu'il a fait de ses pouvoirs était contraire aux intérêts de la société101(*). Cependant, aux termes de l'article 121-3 du code pénal, l'intention coupable se réduit en fait à la « simple connaissance de cause »102(*) Or les juges estiment que les dirigeants ont « nécessairement une bonne information » et disposent des « connaissances et des moyens utiles pour accomplir leurs missions » 103(*), en d'autres termes, ils considèrent que le dirigeant est présumé savoir ce qui se passe dans son établissement. Cette jurisprudence implique que l'élément intentionnel est toujours présent, car le chef d'entreprise a nécessairement connaissance des infractions réalisées dans son établissement et en a volontairement laissé faire leur réalisation.

La seconde condition est l'usage non-conforme ou contraire à l'intérêt social qui doit être fait des biens. Mais les tribunaux ont aussi sur ce point un large pouvoir d'appréciation. Il a ainsi été jugé que le simple fait de faire courir un risque à la société est constitutif d'un abus de biens sociaux, quand bien même il n'aurait causé aucune perte ou il aurait été autorisé par le conseil d'administration, le directoire ou le conseil de surveillance104(*).

En outre, les dirigeants sociaux doivent avoir conscience de l'application par la jurisprudence d'une présomption selon laquelle les débours et prélèvements non justifiés dont ils font état (déplacements, réceptions de clients, expositions par exemples) se trouvent automatiquement considérés comme non-conformes à l'intérêt social si ne sont pas produits les justificatifs de ces dépenses105(*), ou s'ils s'attribuent de leur propre chef des rémunérations excessives106(*)

L'abus de biens sociaux peut également être constitué dès lors que le chef d'entreprise a employé les biens sociaux dans l'intérêt de la société mais en a fait un usage illicite, sans même en tirer un avantage personnel. Néanmoins, la jurisprudence est fluctuante sur ce point, et il semble que les juges apprécient au cas par cas, c'est pourquoi il est recommandé aux dirigeants de constituer un dossier prouvant que les fond ont été prélevés dans le seul intérêt de la société.107(*)

La troisième condition pour retenir la qualification d'abus de biens sociaux réside dans le fait que le dirigeant doit avoir agi dans son propre intérêt. Les juges encore une fois ont une vision très large de ce critère. Ainsi, le chef d'entreprise qui avait prélevé des fonds le but de protéger la réputation de sa famille108(*), ou pour rendre service à des amis109(*), a été reconnu coupable d'abus de biens sociaux par les juridictions pénales alors même qu'il s'agissait plus d'un intérêt moral que d'un intérêt personnel.

Par conséquent, compte tenu de l'interprétation extensive de la notion d'abus de biens sociaux par les tribunaux répressifs, il est nécessaire pour les dirigeants de mettre en place des garde-fous pour éviter de voir leur responsabilité pénale engagée.

Il est évident que ces instruments ne sont mis en place que dans les entreprises dont le dirigeant est de bonne foi, ou dans celles qui ont plusieurs dirigeants. La gestion des risques ne peut pas empêcher un dirigeant qui a de mauvaises intentions de commettre un délit, et d'ailleurs celui-ci n'a aucun intérêt à organiser des outils qui le gêneraient dans ses plans.

Le dirigeant peut aussi voir sa responsabilité engagée s'il a commis des infractions relatives aux comptes sociaux.

2. Infraction relative aux comptes sociaux : la publication ou présentation de comptes infidèles

Les dirigeants sociaux sont tenus d'accomplir un certain nombre de formalités dont certaines sont sanctionnées pénalement, telles que : les immatriculations au registre du commerce ou des métiers, les déclarations qui doivent être faites à l'inspection du travail ou aux organismes de sécurité sociale par exemples.

Un grand nombre d'incriminations pénales peuvent être retenues contre les dirigeants sociaux en matière de comptes sociaux, c'est la raison pour laquelle nous ne retiendrons dans les développements suivants que l'hypothèse de la présentation ou publication de comptes infidèles.

Tout d'abord, il faut savoir que l'une des principales obligations des dirigeants consiste à établir des comptes annuels, un rapport de gestion et un inventaire à la fin de chaque exercice. Les articles L 241-4110(*) et L 242-8111(*) prévoient que ne pas respecter cette obligation sera sanctionné par une amende de 9 000 euros. Mais à cela se greffe d'autres obligations. Il faut notamment que les comptes présentés ou publiés soient fidèles à la situation réelle de l'entreprise.

En pratique, il est « monnaie courante » dans la jurisprudence de voir des cas d'engagement de la responsabilité pénale du dirigeant pour publication ou présentation de comptes infidèles112(*). Cette infraction prévue par l'article L241-3-3 du code de commerce113(*), consiste pour le chef d'entreprise à présenter à ses associés, en vue de leur approbation à l'Assemblée Générale, des comptes annuels ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidèle du résultat de l'exercice, de la situation financière et du patrimoine de l'entreprise, dans le but de dissimuler la véritable situation de la société.

Pour que cette infraction soit constituée, trois conditions doivent être remplies : il faut que le dirigeant présente des comptes annuels, que ces derniers ne donnent pas une image fidèle de la société, et que le but d'un tel comportement soit de dissimuler la véritable situation de la société. La sanction d'une telle infraction est de cinq ans d'emprisonnement et 375 000 euros d'amende.

Face à un tel risque, il convient donc pour le dirigeant de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que les comptes soient sincères, et surtout de se ménager des preuves pour démontrer sa bonne foi. Les juges ont en effet une vision extensive du caractère intentionnel, et peuvent considérer, au cas par cas, qu'une négligence du dirigeant prouve l'intention de celui-ci de présenter des comptes non fidèles. Ainsi si sa responsabilité pénale est mise en cause, le chef d'entreprise éprouvera beaucoup de difficultés à prouver qu'il n'avait pas d'intention frauduleuse. De ce fait, c'est en amont que la gestion des risques intervient : elle permet d'encadrer la procédure d'établissement des comptes, d'organiser une procédure pour garantir une transparence, et de se ménager des preuves de la bonne foi du chef d'entreprise.

On constate, suite aux deux exemples développés d'engagement de la responsabilité pénale du dirigeant, que celui-ci est dans une situation délicate. Il est soumis à l'aléa de l'appréciation souveraine des juges et il faut bien constater que les sanctions à la clef sont loin d'être négligeables. Le chef d'entreprise manoeuvre dans une sphère à hauts risques. Mais face à une telle exposition, inutile de faire preuve de pessimisme. Il a à sa disposition des outils performants dont il peut user pour éviter d'être déclaré « coupable ». Ces instruments sont évidemment déployés lors de la mise en place d'une méthode d'audit et de gestion des risques juridiques.

II. Moyens développés par la gestion des risques juridiques pour éviter l'engagement de la responsabilité pénale du dirigeant

Afin d'éviter de voir sa responsabilité pénale engagée, le dirigeant social peut mettre en oeuvre différents outils. Il est important de préciser dès à présent que, comme nous l'avons vu dans un développement précédant, l'organisation d'un contrôle de gestion est un outil qui est très utile aussi bien en ce qui concerne la prévention de la mise en cause de la responsabilité civile du dirigeant que pour éviter la mise en cause de celle pénale. En l'occurrence, pour ce qui est des infractions pénales sus-exposées, le contrôle de gestion peut être utile en ce que le contrôleur vérifie que les comptes publiés sont bien fidèles à la situation réelle de l'entreprise et en ce qu'il surveille l'utilisation des fonds et des biens sociaux. Nous ne détaillerons donc pas plus amplement ce point, pour nous attacher à deux autres procédures que peut mettre en oeuvre le dirigeant pour éviter de voir sa responsabilité pénale engagée.

D'une part, il peut déléguer certaines de ses missions à un de ses subordonnés (A).D'autre part, il peut organiser des contrôles internes au sein de l'entreprise pour prévenir les comportements transgressifs à la réglementation pénale, telle que l'organisation d'un Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions du Travail (ci-après dénommé CHSCT) ou l'instauration d'un code de bonne conduite(B).

A. La délégation de pouvoirs

L'intérêt de la délégation de pouvoir est de faire peser sur les véritables décideurs, et non pas sur le seul chef d'entreprise, les conséquences de leurs actes ou omissions. La Cour de Cassation qui estimait originairement qu'il s'agissait pour le dirigeant d'une manière de se décharger de ses responsabilités, estime aujourd'hui qu'il s'agit d' « un moyen de gestion dynamique des ressources humaines et de prévention des risques »114(*). Cependant l'utilisation d'une telle pratique est soumise à certaines conditions (1), et présente tout de même certains inconvénients (2).

Avant toute chose, il est nécessaire de bien distinguer la délégation de pouvoir de celle de signature. Cette dernière permet au supérieur hiérarchique d'autoriser un subordonné à signer des documents en son nom et pour son compte, mais n'a pas pour effet de le décharger de sa responsabilité concernant ces actes, dont il est présumé avoir eu connaissance.

1. Les conditions de la délégation de pouvoirs

La délégation de pouvoirs est « un acte juridique par lequel une autorité (le délégant) se dessaisit d'une fraction des pouvoirs qui lui sont conférés et les transfère à une autorité subordonnée (le délégataire) »115(*). Le délégataire doit alors assumer les obligations et les responsabilités liées aux pouvoirs qui lui ont été transmis, ce qui a pour principale conséquence de transférer la responsabilité pénale du délégant sur le délégataire, pour ce qui est des missions transférées uniquement.

Il existe plusieurs sortes de délégations. Est ainsi acceptée la co-délégation, ou délégation horizontale, correspondant à l'hypothèse dans laquelle un pouvoir est divisé et ensuite délégué entre plusieurs salariés intervenant dans le même secteur de l'entreprise, dans la mesure où elle ne désorganise pas la société, ni n'est « de nature à restreindre l'autorité des délégataires, ni à entraver les initiatives de chacun d'eux ».116(*)

La délégation verticale, ou « en cascades » est également admise par les juges. Elle consiste pour le délégant à transférer une partie des pouvoirs, qui lui avaient été délégués auparavant par un supérieur, à un de ses préposés.

Cette subdélégation, tout comme la première délégation, est soumise à certaines conditions.

Tout d'abord, la jurisprudence a dégagé des critères ayant attrait à la personne du délégataire. Elle exige qu'un lien de subordination existe entre le délégant et le délégataire. Ainsi, la délégation doit être consentie à un préposé, c'est-à-dire à un salarié titulaire d'un contrat de travail avec la société concernée.117(*) La jurisprudence a une conception très large de la notion de « préposé ». Dès le 22 avril 1966, la chambre criminelle a considéré qu'il pouvait s'agir de tout salarié, pourvu qu'il dispose de la compétence, des moyens et de l'autorité nécessaire pour veiller au respect des dispositions légales et règlementaires qui s'imposent à lui. Le délégataire doit donc disposer pleinement de la compétence, de l'autorité et des moyens humains, techniques, et matériels nécessaires pour accomplir la mission qui lui est confiée. En effet, il est nécessaire que le délégataire ait connaissance des obligations techniques et juridiques correspondant à ses nouvelles missions. Il doit avoir le pouvoir de donner des ordres et de les faire appliquer pour mettre en application les responsabilités qui lui ont été confiées. .118(*)

Le délégataire doit également jouir d'une indépendance pour accomplir sa mission. Il ne doit pas être contraint de rendre des comptes au délégant.

En outre, les juges exigent, pour que la délégation de pouvoirs soit régulière, que celle-ci intervienne dans une entreprise de taille d'une certaine importance. Ce critère assez large permet en pratique aux juges d'exercer leur pouvoir de libre appréciation sur l'opportunité de déléguer des pouvoirs ou non. En effet, ils estiment qu'une délégation ne sera permise que dans l'hypothèse où il serait impossible au délégant d'assurer personnellement une surveillance effective des activités et du personnel de l'entreprise.119(*) Cependant ils ne vont tout de même pas jusqu'à exiger du délégant qu'il prouve qu'il était dans l'impossibilité totale d'accomplir personnellement la mission qui fait l'objet de la délégation.120(*) En pratique, les tribunaux se réfèrent à un certain nombre de critères pour déterminer si l'entreprise est suffisamment importante pour recourir à la délégation de pouvoirs. D'une part, ils analysent la masse salariale, la complexité de la structure de l'entreprise et, d'autre part, la nature de l'activité de l'entreprise, ou encore l'organisation du travail.

La jurisprudence a aussi dégagé des critères tenant à la délégation elle-même. Elle doit être certaine et exempte d'ambiguïté. Le délégataire doit être clairement identifié, mais il n'est pas nécessaire que la délégation soit nominative pour autant.121(*) Elle doit avoir été acceptée, ou au moins mise en application, par le préposé122(*).

Il est de jurisprudence constante d'exiger également que la délégation soit limitée dans son champs d'application et dans le temps123(*), et qu'elle n'ait pas pour effet de priver le délégant de l'intégralité de ses missions et responsabilités. Mais elle doit tout de même être d'une durée suffisamment importante pour permettre au délégataire de « s'approprier » sa mission. Les juges imposent au délégant d'exposer clairement les missions confiées au délégataire : nature des pouvoirs transférés, étendue de la mission, réglementation applicable, responsabilité pénale à laquelle il s'expose. Cependant, la délégation n'est soumise à aucun formalisme. Elle peut être verbale ou écrite. Cette liberté peut poser des difficultés en pratique car il ne sera pas aisé de prouver que la délégation a été claire et précise, ni d'ailleurs d'en prouver le contraire.

En principe, une fois les conditions sus-évoquées remplies, la délégation entraîne l'exonération de la responsabilité pénale du délégant, pour ce qui concerne les missions et pouvoirs qu'il a confié au délégataire.124(*) Toutefois, des nuances sont à apporter.

2. Des limites importantes en pratique

Tout d'abord, le dirigeant n'est exonéré de sa responsabilité que s'il n'a pas pris part personnellement à l'infraction reprochée125(*).

Ensuite, la responsabilité du dirigeant de droit ne peut pas être engagée en parallèle de celle du dirigeant de fait : « le chef d'entreprise, tenu de veiller personnellement à la stricte et constante exécution des dispositions édictées par le Code du Travail pour les règlements pris pour son application en vue d'assurer l'hygiène et la sécurité des travailleurs, est pénalement responsable des infractions constatées à cet égard sur ses chantiers et ne peut être exonéré de cette responsabilité que s'il rapporte la preuve qu'il a délégué la direction du chantier à un préposé investi et pourvu de la compétence et de l'autorité nécessaires pour veiller efficacement à l'observation des dispositions en vigueur, auquel cas sa responsabilité est transférée à son délégué. Il s'ensuit qu'en cette matière, la même infraction ne peut être retenue à la fois contre le chef d'entreprise et contre le préposé délégué par lui ».126(*) Et les juges effectuent une appréciation au cas par cas des éléments attestant de la réalité de la délégation et de son effectivité. Ainsi, il a pu être jugé que la délégation ne saurait découler uniquement « de la seule définition d'un poste par une convention collective »127(*) ou « d'un organigramme imprécis »128(*), ou encore, à titre d'illustration, « d'une délibération du conseil d'administration d'une société qui confère au directeur général des pouvoirs identiques à ceux exercés par le président concurremment au siens »129(*).

Le juge n'est pas tenu par les qualifications retenues par les parties, de sorte qu'il pourra annuler une délégation et engager la responsabilité du délégant.

L'ampleur du pouvoir d'appréciation laissé au juge est tel qu'il a même été considéré que le défaut de délégation de pouvoirs au sein d'une structure complexe était une faute susceptible d'engager la responsabilité pénale du dirigeant130(*), dès lors qu'il était prouvé qu'il n'était plus en mesure de veiller lui-même au respect de ses obligations131(*).

La jurisprudence a d'abord été extensive pour admettre les délégations de pouvoirs et a ainsi considéré que le droit de déléguer des pouvoirs avait une portée générale. C'est-à-dire que la délégation pouvait concerner la quasi-totalité des incriminations pénales132(*). Néanmoins, les juges rappelle qu'il ne saurait être perdu de vue que le droit de déléguer ses pouvoirs pour le dirigeant ne doit pas avoir pour seule motivation d'organiser son impunité (si c'est le cas, il peut notamment être sanctionné sur le terrain de l'article 7 du Livre des Procédures Fiscales133(*)). Or ce sont les tribunaux qui apprécient ce caractère intentionnel. Il est toujours délicat de prouver une intention, c'est pourquoi le dirigeant, s'il est accusé d'avoir voulu organiser son impunité, éprouvera en pratique certaines difficultés à prouver sa bonne foi.

Concrètement, les délégations de pouvoir sont organisées par le juriste d'entreprise. On retrouve ici un des acteurs clefs de la gestion des risques, que nous avons présentés précédemment.

On peut dire que la délégation de pouvoir est un outil efficace pour le dirigeant pour s'exonérer de sa responsabilité pénale. Mais cet instrument est aussi très subtil à manier. Le chef d'entreprise peut déléguer mais il doit se plier à des conditions très strictes et peut toujours craindre que la délégation soit annulée. Ou il peut ne pas déléguer et à ce titre engager sa responsabilité pour faute. C'est la raison pour laquelle, d'autres moyens, complémentaires, peuvent être mis en place dans le cadre d'une gestion des risques, pour éviter au dirigeant de voir sa responsabilité pénale engagée.

B. Des garde-fous à organiser en interne

Le dirigeant peut déployer des moyens de prévention pour éviter que des infractions, qui engageraient sa responsabilité, ne soient commises. Il peut créer un Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail ou élaborer des chartes d'éthique et de bon usage dans son entreprise.

1. La mise en place d'un moyen de prévention pour la protection de la sécurité physique et psychologique des salariés : le CHSCT

L'un des moyens pour le dirigeant d'organiser une protection de la sécurité physique et psychologique des salariés dans son entreprise est la création d'un Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (ci-après dénommé CHSCT). Il s'agit d'une institution représentative du personnel à part entière dans le domaine des conditions de travail134(*), prévue par les articles L2381-1 et suivants du code de travail135(*). Le comité peut être défini comme étant l'instance où s'étudie la politique de l'établissement en matière de prévention et d'amélioration des conditions de travail. Il a un pouvoir de proposition et de promotion de la prévention des risques professionnels dans l'établissement136(*). C'est pourquoi le dirigeant a tout intérêt à participer activement à ce comité et à en favoriser les actions.

La constitution d'un CHSCT est obligatoire dans tous les établissements de plus de cinquante salariés sauf pour les entreprises du bâtiment et de travaux publics. Mais le gestionnaire des risques favorisera la création d'un tel comité même en l'absence d'obligation légale. En effet, il est dans l'intérêt de la société de prévenir les risques professionnels et d'améliorer les conditions de travail principalement pour augmenter la valeur de l'entreprise et son image, mais aussi pour prouver qu'il n'est pas négligent en la matière..

Le Comité a pour mission principale de « veiller à l'observation des prescriptions législatives et règlementaires prises en matière d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail137(*) ». Ce contrôle s'exerce par des inspections menées de façon régulière. Ainsi le dirigeant qui met en place un CHSCT bénéficiera de ses conseils et analyses pour assurer d'une manière optimum la sécurité des biens et des salariés. Il s'agit d'une collaboration qui aide le dirigeant à prendre toutes les mesures préventives nécessaires pour veiller aux bonnes conditions de travail et ainsi éviter d'être condamné pour avoir exposé autrui à un danger notamment.

En prévention toujours, le dirigeant peut élaborer et diffuser dans son entreprise une charte d'éthique ou de bon usage.

2. Charte d'éthique et de bon usage 

Comme l'indiquait Corinne Lepage en 1995, alors ministre de l'environnement sous le Gouvernement d'Alain Juppé, « Nous entrons dans un monde où l'éthique est devenue une demande de la société ». Largement généralisées aux Etats-Unis, les chartes d'éthique ou les codes de déontologie ont fait leur apparition depuis quelques années en France. Toutefois, ce mouvement ne s'est pas fait sans quelques heurts. En effet, si certains se sont inquiétés de voir l'émergence de chartes autoproclamées par le professionnels138(*), d'autres considèrent au contraire que les régulations professionnelles sont les plus efficaces pour discipliner les pratiques en entreprise car elles son conçues et négociées par les dirigeants et le personnel.139(*)

En sus de favoriser un dialogue social au moment de leur création, ces chartes permettent de préserver l'image de marque de l'entreprise, d'assurer le respect de l'autorité interne, et le respect de la réglementation en vigueur.

Ces chartes de bons usages développent généralement les mêmes thèmes : la protection des intérêts du personnel, des clients, le respect des règles de sécurité, la protection de la santé et de l'environnement et la loyauté des comportements vis-à-vis de l'entreprise et de ses biens.

Elles peuvent prendre la forme de simples déclarations de bonnes intentions, mais leur valeur juridique peut être renforcée si elles sont intégrées au règlement intérieur, voire au contrat de travail. L'utilité d'un tel outil est principalement de prévoir que son non respect constitue une faute lourde qui justifie un licenciement sans indemnités ni préavis.

Ainsi, ces chartes d'éthique ou codes de bonne conduite permettent au dirigeant de faire de la prévention, et de rappeler aux salariés leurs obligations. Il se ménage ainsi des éléments pour prouver qu'il n'est pas négligent en matière d'hygiène et de sécurité des salariés, ou au regard du respect des législations qui s'imposent à lui.

CONCLUSION

«Il y a bien des manières de ne pas réussir, mais la plus sûre est de ne jamais prendre de risques » disait Benjamin Franklin140(*). Alors certes le dirigeant doit prendre des risques mais il doit savoir prendre les bons. C'est le but de la gestion des risques. Cependant, il faut bien constater que cette méthode suscite encore aujourd'hui bon nombre de critiques.

Il lui est tout d'abord reproché d'avoir des référentiels141(*) trop complexes, et d'être difficile à mettre en oeuvre concrètement. En effet, il faut admettre que c'est un processus lourd et long que de devoir auditer chaque acteur dans l'entreprise. De surcroît, cela peut coûter cher, d'autant plus si l'entreprise fait appel à un risk manager.

Les outils développés par la gestion des risques sont d'ailleurs plus ou moins efficaces juridiquement. Comme nous l'avons vu, la délégation de pouvoirs a ses limites. Tout n'est pas assurable. Les individus peuvent être plus ou moins sensibilisés au risque et il est impossible de surveiller leurs agissements en permanence.

Néanmoins, certaines voix s'élèvent pour défendre cette méthode d'audit et de gestion des risques. Elles soulignent que c'est un outil profitable pour l'entreprise et pour ses dirigeants car elle permet de structurer l'organisation et d'apporter une vue d'ensemble et une transparence sur les activités de chacun. Elle favorise aussi une sensibilisation aux risques et une responsabilisation des salariés. Et, comme l'a affirmé Dominique PAGEAUD142(*), la gestion des risques permet indéniablement de faire baisser le nombre de contentieux des entreprises dans laquelle elle est mise en oeuvre. La responsabilité du dirigeant est moins souvent engagée lorsqu'il a mis en place une telle méthode. En parallèle elle offre la possibilité de prendre des risques juridiques en connaissance de cause (en ayant conscience des conséquences négatives et positives qui peuvent en résulter).

Et pour finir, aux détracteurs de la gestion des risques inutile de faire de grands discours, nous pouvons simplement leur présenter les dernières évolutions législatives en la matière143(*), qui démontrent d'elles-mêmes que cette méthode est plus que jamais d'actualité. Et, si des réticents persistent, rappelez-leur le vieil adage qui a fait ses preuves : « mieux vaut prévenir que guérir ».

XXX

BIBLIOGRAPHIE

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- Ouvrages généraux en Droit de la Responsabilité 

Articles :

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- Ordonnance n° 2008-1345 du 18 Décembre 2008.

- Décret n° 2009-160 du 12 février 2009.

- 8ème Directive 2006/43/CE du Parlement Européen et du Conseil du 17 mai 2006.

* 1 _ Michel Germain, Préface de l'ouvrage Le statut du dirigeant de société, de J. F. BULLE, Ed La Villeguérin, 1989, p462 - extrait de la Thèse de Lydie BROUSSARD, La responsabilité civile des dirigeants de sociétés commerciales, novembre 2000, Université de Nantes, Ecole doctorale Droit et Sciences Sociales.

* 2 _ Voir note n°1, page 6.

* 3 _ Louis De Broglie, mathématicien, physicien et académicien français, lauréat en 1929 du prix Nobel de physique pour sa « théorie sur la nature ondulatoire de l'électron ».

* 4 _M GUENAIRE, avant-propos à François Ewald, Histoire de l'Etat providence, 1996, p9: « La protection des individus, qui s'était jusqu'alors résumée à une protection de leurs droits devenait une protection contre tous les aléas de l'existence ». 

* 5 _ Les grands principes de l'assurance, Ed Argus de l'assurance

* 6 _ Economiste français, né en 1950, chercheur et enseignant du supérieur.

* 7 _ Dictionnaire Petit Robert, Ed 1996

* 8 _ Marie-Claude DELAVEAUD, Le risk Management en 5 étapes, Collection A savoir, Editions AMRAE, 2003

* 9 _ Directeur Général du Salon des Entrepreneurs

* 10 _ Dictionnaire d'analyse et gestion des risques, définition du « risque juridique » Hermès Science, Editions 2006, p383

* 11 _ Voir Annexe 1, page 58, « Les risques juridiques », Identifiez et maîtrisez vos risques juridiques, support du Cabinet d'Avocats Ernst and Young

* 12 _ Ben Hunt, L'irrésistible ascension de la gestion du risque, Article Les Echos.fr.

* 13 _ Voir supra note n° 11, page 9

* 14 _ Article 18 du Règlement 178/2002/CE : « La traçabilité des denrées alimentaires, des aliments pour animaux, des animaux producteurs de denrées alimentaires et de toute autre substance destinée à être incorporée ou susceptible d'être incorporée dans des denrées alimentaires ou des aliments pour animaux est établie à toutes les étapes de la production, de la transformation et de la distribution. »

* 15 _ Article 50 du Règlement 178/2002/CE : « Un système d'alerte rapide pour la notification d'un risque direct ou indirect pour la santé humaine dérivant de denrées alimentaires ou d'aliments pour animaux est établi en tant que réseau. Il associe les États membres, la Commission et l'Autorité. Les États membres, la Commission et l'Autorité désignent chacun un point de contact qui est membre du réseau. La Commission est responsable de la gestion du réseau. »

* 16 _ Circulaire DGT N° 2009/16 du 3 juillet 2009 du ministère du travail

* 17 _ Cass. crim. 16 septembre 2008 n° 08-80.204 (n° 4811 F-PF), B.

* 18 _ Voir annexe 2, page 59, « Les étapes clés de la gestion des risques »

* 19 _ Voir annexe 3, page 60, « Evaluation des risques résiduels »

* 20 _ Linda DUCRUET, quels risques et quelles protections pour le dirigeant ?,  GPO, le site d'information en ligne des dirigeants d'entreprise, Dossier responsabilités.

* 21 _ Article L 223-18 code de commerce : « La société à responsabilité limitée est gérée par une ou plusieurs personnes physiques (...) »

* 22 _ Cass. Crim, 12 Septembre 2000

* 23 _ Cass. Com, 16 avril 1996, D1996 I. R. 138

* 24 _ Cass. Com, 23 mars 1971. Bull Civ. IV n°91 : la participation du dirigeant de fait doit être active et positive, et ne saurait consister en de simples recommandations ou conseils.

* 25 _ CA Paris, 7 octobre 1997, Bull Joly 1998 n°55

* 26 _ Cass. Com., 6 février 2001

* 27 _ Cass. Com, 10 Octobre 1995

* 28 _ Article L 241-9 code de commerce : « Les dispositions des articles L. 241-2 à L. 241-6 sont applicables à toute personne qui, directement ou par personne interposée, aura, en fait, exercé la gestion d'une société à responsabilité limitée sous le couvert ou au lieu et place de son gérant légal ».

* 29 _ CA Rouen 23 mai 1978, Pajou c/ Avenel : JCP 1979 II n° 19235

* 30 _ Art. 1382 code civil : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. »

Art. 1383 : « Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. »

* 31 _ CA Paris 11 mai 1982 , Sté Laboratoires Pourquery et autre c/ Sté Groupe LDP et autres : « Considérant, en ce qui concerne la Société des Laboratoires Pourquery, que l'action individuelle ne peut procéder que d'un dommage éprouvé directement par un associé en cette qualité et résultant d'une atteinte aux droits personnels ou pécuniaires détenus par l'actionnaire (détournement d'un dividende versé à un actionnaire, détournement des fonds versés pour la libération des actions)(...) » 

* 32 _ Article L 223-22 du Code de Commerce : « (...) Si plusieurs gérants ont coopéré aux mêmes faits, le tribunal détermine la part contributive de chacun dans la réparation du dommage. »

Article L 225-251 du Code de Commerce : «  (...) Si plusieurs administrateurs ou plusieurs administrateurs et le directeur général ont coopéré aux mêmes faits, le tribunal détermine la part contributive de chacun dans la réparation du dommage. »

* 33 _ Articles L223-22 et L225-251 du Code de Commerce : « Les dirigeants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou règlementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion ».

* 34 _ Article L 123-1 Code de Commerce : « Il est tenu un registre du commerce et des sociétés auquel sont immatriculés, sur leur déclaration :

1° Les personnes physiques ayant la qualité de commerçant, même si elles sont tenues à immatriculation au répertoire des métiers ;

2° Les sociétés et groupements d'intérêt économique ayant leur siège dans un département français et jouissant de la personnalité morale conformément à l'article 1842 du code civil ou à l'article L. 251-4 ;

3° Les sociétés commerciales dont le siège est situé hors d'un département français et qui ont un établissement dans l'un de ces départements ;

4° Les établissements publics français à caractère industriel ou commercial ;

5° Les autres personnes morales dont l'immatriculation est prévue par les dispositions législatives ou réglementaires (...) »

* 35 _ Article L 232-23 Code de Commerce : « Toute société par actions est tenue de déposer, en double exemplaire, au greffe du tribunal, pour être annexés au registre du commerce et des sociétés, dans le mois qui suit l'approbation des comptes annuels par l'assemblée générale des actionnaires :

1° Les comptes annuels, le rapport de gestion, le rapport des commissaires aux comptes sur les comptes annuels, éventuellement complété de leurs observations sur les modifications apportées par l'assemblée aux comptes annuels qui ont été soumis à cette dernière ainsi que, le cas échéant, les comptes consolidés, le rapport sur la gestion du groupe, le rapport des commissaires aux comptes sur les comptes consolidés et le rapport du conseil de surveillance (...) »

* 36 _ Cass. Com. 3 décembre 2002 n° 1980 F-D, Sté Le Pin c/ Sté nouvelle Groupe Infi Ouest

* 37 _ Cass. Com, 7 Mars 2006

* 38 _ CA Lyon, 27 mai 2004, n° 02-6151, RJDA juillet 2005, n° 829

* 39 _ Voir supra note n°30, page 15

* 40 _ Cass. Com, 27 Janvier 1998, RJDA mai 1998, n° 610

* 41 _ Cass.Com, 12 Juin 2007 - Cass. Com, 7 Juillet 2004, RJDA novembre 2004, n°1223  - Cass. Com. 20 mai 2003 RJDA 2/09, n° 100- Cass. Com., Gonde c/ Maignien, 21 octobre 2008 n° 07-18.310 (n° 1038 F-D).

* 42 _ Cass. Com, 4 Juillet 2006, RJDA Février 2007, n° 166

* 43 _Procédures collectives prévues par le Livre VI Code de Commerce, articles L 610-1 à L 670-8 du Code de Commerce

* 44 _ Encyclopédie pratique du Droit et des Contrats (http://www.lawperationnel.com/EncyclopedieJur/Procedurecollective.html)

* 45 _ Ancien article L 652-1 code de commerce : « Au cours d'une procédure de liquidation judiciaire, le tribunal peut décider de mettre à la charge de l'un des dirigeants de droit ou de fait d'une personne morale la totalité ou une partie des dettes de cette dernière lorsqu'il est établi, à l'encontre de ce dirigeant, que l'une des fautes ci-après a contribué à la cessation des paiements :

1° Avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres ;

2° Sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel ;

3° Avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ;

4° Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale ;

5° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale.

Dans les cas visés au présent article, il ne peut être fait application des dispositions de l'article L. 651-2. »

* 46 _ CA Paris, 9 septembre 2008 : la Cour avait relevé un important écart entre la valeur de réalisation de l'actif et la valeur comptable déclarée, elle en a donc déduis que les dirigeants avaient détourné une partie de l'actif social.

* 47 _ Article L 653-4 code de commerce : « Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant, de droit ou de fait, d'une personne morale, contre lequel a été relevé l'un des faits ci-après :

1° Avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres ;

2° Sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel ;

3° Avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ;

4° Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale ;

5° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale. »

* 48 _ Article L 654-2 code de commerce : « En cas d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, sont coupables de banqueroute les personnes mentionnées à l'article L. 654-1 contre lesquelles a été relevé l'un des faits ci-après :

1° Avoir, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, soit fait des achats en vue d'une revente au-dessous du cours, soit employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;

2° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif du débiteur ;

3° Avoir frauduleusement augmenté le passif du débiteur ;

4° Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de l'entreprise ou de la personne morale ou s'être abstenu de tenir toute comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation ;

5° Avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions légales. »

* 49 _ Article L651-2 code de commerce : « Lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables.

L'action se prescrit par trois ans à compter du jugement qui prononce la liquidation judiciaire.

Les sommes versées par les dirigeants entrent dans le patrimoine du débiteur. Elles sont réparties au marc le franc entre tous les créanciers. Les dirigeants ne peuvent pas participer aux répartitions à concurrence des sommes au versement desquelles ils ont été condamnés.

* 50 _ Cass. Com, 7 mars 2006, n°04-16.536, Société Dédicace Informatique contre Legendre, Bull. civ. IV, n°61 : « la recevabilité d'une action en responsabilité personnelle engagée par un créancier à l'encontre du dirigeant d'une société mise en procédure collective, pour des faits antérieurs au jugement d'ouverture, est subordonnée à l'allégation d'un préjudice personnel distinct de celui des autres créanciers résultant d'une faute du dirigeant séparable de ses fonctions ».

* 51 _ Cass. Com, 25 juin 2002, RJDA décembre 2002, n° 1305, 1ère espèce.

* 52 _ Cass. Com, 25 juin 2002, RJDA décembre 2002, n° 1306.

* 53 _ Voir supra, note n°47, page 22, relative à l'article L 653-4 code de commerce.

* 54 _ Article L 653-5 code de commerce : « Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 contre laquelle a été relevé l'un des faits ci-après :

1° Avoir exercé une activité commerciale, artisanale ou agricole ou une fonction de direction ou d'administration d'une personne morale contrairement à une interdiction prévue par la loi ;

2° Avoir, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, fait des achats en vue d'une revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;

3° Avoir souscrit, pour le compte d'autrui, sans contrepartie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de l'entreprise ou de la personne morale ;

4° Avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers ;

5° Avoir, en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement ;

6° Avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables. »

* 55 _ Voir supra : note n°45, page 22.

* 56 _ Article L 653-11 code de commerce : « Lorsque le tribunal prononce la faillite personnelle ou l'interdiction prévue à l'article L. 653-8, il fixe la durée de la mesure, qui ne peut être supérieure à quinze ans. Il peut ordonner l'exécution provisoire de sa décision. Les déchéances, les interdictions et l'incapacité d'exercer une fonction publique élective cessent de plein droit au terme fixé, sans qu'il y ait lieu au prononcé d'un jugement. »

* 57 _ Cass. Com, 27 octobre 1998, RJDA février 1999, n° 207.

* 58 _ Article L 653-8 alinéa 1er code de commerce : « Dans les cas prévus aux articles L. 653-3 à L. 653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci.

L'interdiction mentionnée au premier alinéa peut également être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 qui, de mauvaise foi, n'aura pas remis au mandataire judiciaire, à l'administrateur ou au liquidateur les renseignements qu'il est tenu de lui communiquer en application de l'article L. 622-6 dans le mois suivant le jugement d'ouverture.

Elle peut également être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 qui a omis de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation. »

* 59 _ Article L 653-9 code de commerce : « Le droit de vote des dirigeants frappés de la faillite personnelle ou de l'interdiction prévue à l'article L. 653-8 est exercé dans les assemblées des personnes morales soumises à une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire par un mandataire désigné par le tribunal à cet effet, à la requête de l'administrateur, du liquidateur ou du commissaire à l'exécution du plan.

Le tribunal peut enjoindre à ces dirigeants ou à certains d'entre eux, de céder leurs actions ou parts sociales dans la personne morale ou ordonner leur cession forcée par les soins d'un mandataire de justice, au besoin après expertise. Le produit de la vente est affecté au paiement de la part des dettes sociales dans le cas où ces dettes ont été mises à la charge des dirigeants. »

* 60 _ Alexis CONSTANTIN, De quelques aspects de l'assurance de responsabilité civile des dirigeants sociaux, RJDA 2003, Etudes et Doctrine, Chronique, p 595.

* 61 _ Voir supra, note n° 60, page 28

* 62 _ Fédération Française des Sociétés d'Assurance, Centre de Documentation et d'Information de l'Assurance, L'assurance de la responsabilité des mandataires sociaux, FP 138, Décembre 2007 - Et voir supra note n° 19, page 11.

* 63 _ Article L113-1 du Code des Assurances, modifié par Loi n°81-5 du 7 janvier 1981 (art. 28 JORF 8 janvier 1981 rectificatif JORF 8 février 1981).

« Les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Toutefois, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ».

* 64 _ Cass. Com, 6 avril 2004 : « La faute intentionnelle, au sens de l'article L.113-1 du code des assurances, qui implique la volonté de créer le dommage tel qu'il est survenu, n'exclut de la garantie due par l'assureur à l'assuré, condamné pénalement, que le dommage que l'assuré a recherché en commettant l'infraction. »

* 65 _ Fédération Française des Sociétés d'Assurance - Centre de documentation et d'information de l'assurance- FP 138, Décembre 2007.

* 66 _ Voir supra : Introduction, pages 11 et 12, sur le déroulement d'une gestion des risques : étape de l'analyse des risques

* 67 _ Conférence du 6 et 7 juin 2008 organisée par Frédéric Reliquet et Stéphane Baller, membres du cabinet d'audit Ernst and Young

* 68 _ Voir Annexes 4 et 5, pages 61 et suivantes : note de procédure interne relative à la contractualisation et à la législation Informatique et Libertés

* 69 _ Article L442-6-I 5°code de commerce : « I.-Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :

(...)De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels (...) ».

* 70 _ Voir recommandation de la Commission des Clauses Abusives sur les clauses concernant les recours en justice, BOSP du 24 février 1979.

* 71 _ Voir Annexe n°6, page 68, Entretien avec Dominique PAGEAUD, Gestionnaire de risques, Société d'Avocats Ernst and Young.

* 72 _ Voir site relatif au contrôle de gestion : http://www.controledegestion.org/

* 73 _ Article 8 de la Directive 2006/43/CE du Parlement européen et du Conseil du 14 mai 2006 relative aux contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés, modifie les directives 78/660/CE et 83/349/CE du Conseil, et abroge la directive 84/253/CE du Conseil.

* 74 _ Cass. Com, 7 février 1992 - Arrêt n° 23

* 75 _ Articles 441-1 et suivants code pénal : « Constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d'expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques.

Le faux et l'usage de faux sont punis de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende ».

* 76 _ Expression que l'on attribue traditionnellement à Cesare Beccaria, philosophe italien du XVIIIème siècle, qui a notamment écrit « Des Délits et des Peines » en 1764.

* 77 _ Loi n° 2001-420 du 15 mai 2001

* 78 _ Loi n° 2003-706 du 1er août 2003

* 79 _ Ordonnance n° 2004-274 du 25 mars 2004

* 80 _ Décret n° 2006-1566 du 11 décembre 2006

* 81 _ Voir les Rapports de la Documentation Française : lien suivant : http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/084000090/0000.pdf

* 82 _ Article L 242-15 code de commerce : « Est puni d'une amende de 3750 euros le fait, pour le président ou les administrateurs d'une société anonyme : 1° Paragraphe abrogé. 2° De ne pas annexer à la feuille de présence les pouvoirs donnés à chaque mandataire ; 3° De ne pas procéder à la constatation des décisions de toute assemblée d'actionnaires par un procès-verbal signé des membres du bureau mentionnant : la date et le lieu de la réunion, le mode de convocation, l'ordre du jour, la composition du bureau, le nombre d'actions participant au vote et le quorum atteint, les documents et rapports soumis à l'assemblée, un résumé des débats, le texte des résolutions mises aux voix et le résultat des votes. »

* 83 _ Article 1384 alinéa 5 code civil : « (...) Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés (...) »

* 84 _ Article L 121-1 code pénal : « Nul n'est responsable pénalement que de son propre fait »

* 85 _ Cass. Crim, 7 décembre 1981, Bull. Crim. N° 525 - Cass. Crim, 28 février 1956, JCP 1956. II. 92304 : « la responsabilité pénale peut naître du fait d'autrui, dans les cas exceptionnels ou certaines obligations légales imposent le devoir d'exercer une action directe sur les faits d'un subordonné ».

* 86 _ Voir Quatrième partie du code du travail intitulée « Santé et Sécurité au travail »

* 87 _ Article L 121-3 code pénal : « Il n'y a point de crime ou délit sans intention de le commettre.

Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d'autrui.

Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait.

Dans le cas prévu à l'alinéa qui précède, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont crée ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer ».

* 88 _ Lefebvre 2009, Hygiène et sécurité, Division I Règles d'hygiène et de sécurité, Chapitre VIII Responsabilité pénale, n° 33600 et suivants

* 89 _ Article L 223-1 code pénal : « Le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende. »

* 90 _ Circ. DRT 7/94, n°1-2, page 63 et suivantes : « Spéciale », c'est-à-dire écrite et précise.

* 91 _ Cass. Crim., 14 mai 1993, 93-9 F1

* 92 _ Cass. Crim 19 juillet 1988 : « Les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité sont d'interprétation stricte ».

* 93 _ Article L 241-3 alinéa 4 code e commerce : « Est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 375 000 euros : (...) 4° Le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement (...) ».

* 94 _ Article L 242-6 alinéa 3 code de commerce : « Est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 375 000 euros le fait pour : 3° Le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d'une société anonyme de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement (...) ».

* 95 _ Cass. Com. 9 juillet 1991 n° 1060 D, Delafosse c/ Lebloy ès qual. : RJDA 11/91 n° 962.

* 96 _ Cass. Com. 24 septembre 2003 n° 1328 F-D, Blandineau c/ Couret-Guguen ès qual. : RJDA 1/04 n° 79, 1e espèce.

* 97 _ Cass. Crim., 27 octobre 1997, Dalloz 1997 - Informations Rapides, p251

* 98 _ Cass. Crim., 22 avril 1992

* 99 _ Cass. Crim., 20 Juin 1996, Dalloz 1996, p589 - Cass. Crim, 14 mai 1998, D 1999, p159 : « les fonds sociaux prélevés de manière occulte par un dirigeant social l'ont nécessairement été dans son intérêt personnel ».

* 100 _ Cass. Crim., 6 fev. 1997, Mouillot, J.C.P. éd G 1997, II. 22823, note M.Pralus - Cass. Crim., 27 oct. 1997, Carignon, J.C.P éd. G 1998, n°6, II. 10017, note M.Pralus

* 101 _ Cass. Crim, 16 février 1987, Bull. Crim. N°72 ; Rev. Soc., 1987. 613, note Bouloc.

* 102 _ Cass. Crim. 25 mai 1994, Bull. Crim. n°203.

* 103 _ Cass. Crim., 19 novembre 1996, Bull Crim n°413.

* 104 _ Cass. Crim. 10 décembre 1994.

* 105 _ Cass. Crim 28 novembre 1994, D. 1995, p507.

* 106 _ Cass. Crim, 13 décembre 1988, 257, note B. Bouloc.

* 107 _ Cass. Crim 6 février 1997, arrêt Michel Noir, Bull Crim n°48

* 108 _ Cass. Crim, 3 mai 1967, Bull Crim n°148

* 109 _ Cass. Crim, 19 juin 1978, Bull Crim n°202

* 110 _ Article L 241-4 code de commerce : « Est puni d'une amende de 9000 euros :

1° Le fait, pour les gérants, de ne pas, pour chaque exercice, dresser l'inventaire, établir les comptes annuels et un rapport de gestion ; (...) »

* 111 _ Est puni d'une amende de 9000 euros le fait, pour le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d'une société anonyme, de ne pas, pour chaque exercice, dresser l'inventaire et établir des comptes annuels et un rapport de gestion.

* 112 _Cass. Crim., 29 novembre 2000, N° 99-80324.

Cass. Crim, 4 novembre 2004, n° 03-82777 - CA Paris, 31 octobre 2008, RJDA 2009, n°1, p.37

* 113 _ Article L241-3 du code de commerce : « Est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 375 000 euros :

1° Le fait, pour toute personne, de faire attribuer frauduleusement à un apport en nature une évaluation supérieure à sa valeur réelle ;

2° Le fait, pour les gérants, d'opérer entre les associés la répartition de dividendes fictifs, en l'absence d'inventaire ou au moyen d'inventaires frauduleux ;

3° Le fait, pour les gérants, même en l'absence de toute distribution de dividendes, de présenter aux associés des comptes annuels ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice, de la situation financière et du patrimoine à l'expiration de cette période en vue de dissimuler la véritable situation de la société ;

4° Le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement ;

5° Le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des pouvoirs qu'ils possèdent ou des voix dont ils disposent, en cette qualité, un usage qu'ils savent contraire aux intérêts de la société, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou une autre entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement. »

* 114 _ M. Giacopelli-Mori, Rev Soc Crim 2000, n°3, 527

* 115 _ « La délégation de pouvoirs » Vade Mecum, Mouvement des entreprises de France, GPA Droit de l'entreprise, Décembre 2004

* 116 _ Cass. Crim., 6 juin 1989, n° 88-82266, Bull Crim, n° 243.

* 117 _ Cass. Crim, 17 octobre 2000, Bull Joly, mars 2001

* 118 _ Cass. Crim, 4 juin 1998, n° 97-81186 : « Une délégation de pouvoirs qui n'attribue au délégataire aucun pouvoir précis de sanction n'est pas valable ».

* 119 _ Cass. Crim, 11 mars 1993, Bull Crim, n°112, p 270.

* 120 _ Cass. Crim, 22 mars 1995, n°94-80117.

* 121 _ Cass. Crim, 30 avril 2002, n° 01-84405.

* 122 _ Cass. Crim, 23 mai 2007, RJDA 03/08 n° 276

* 123 _ Cass. Crim, 20 octobre 1999, n°98-83562.

* 124 _ Cass. Crim, 19 novembre 2002, n° 02-81730 : « hors le cas où la loi en dispose autrement, le chef d'entreprise, qui n'a pas personnellement pris part à la réalisation de l'infraction, peut s'exonérer de sa responsabilité pénale s'il rapporte la preuve qu'il a délégué ses pouvoirs à un personne pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires ».

* 125 _ Cass. Crim, 17 septembre 2002, RJDA 1/03 n°30.

* 126 _ Voir supra, note n° 117, page 46.

* 127 _ Cass. Crim, 25 février 1986, n° 80-91713.

* 128 _ Cass. Crim, 16 Juin 1971, Bull Crim, n°192.

* 129 _ Cass. Crim, 17 Octobre 2000, Bull Crim, n°300.

* 130 _ Cass. Crim, 1 octobre 1991, n°90-85024.

* 131 _ Danièle Meyer, L'influence du droit pénal sur l'organisation de la sécurité dans l'entreprise, Dalloz 1998, Chr. P256 : « La délégation constitue pour lui une véritable obligation dès lors qu'il n'est plus en mesure de veiller lui-même au respect des règles de sécurité de l'entreprise. En cas de manquement il sera pénalement responsable de ne pas avoir délégué ».

* 132 _ Voir supra, note n° 117, page 46.

* 133 _ Article L 267 LPF : « Lorsqu'un dirigeant d'une société, d'une personne morale ou de tout autre groupement, est responsable des manoeuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, la personne morale ou le groupement, ce dirigeant peut, s'il n'est pas déjà tenu au paiement des dettes sociales en application d'une autre disposition, être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal de grande instance, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 266. Cette disposition est applicable à toute personne exerçant en droit ou en fait, directement ou indirectement, la direction effective de la société, de la personne morale ou du groupement. »

* 134 _   Loi n°82-1097 du 23 décembre 1982 4ème Loi AUROUX Relative aux Comités d'Hygiène, de sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) - Décret n°84-981 du 2 novembre 1984 pris pour l'application de l'article L236-10 du code du travail (issu de la loi 821097 du 23-12-1982) modifié par la loi 84575 du 09-07-1984 (Article 58) et relatif à la formation des représentants du personnel aux Comités d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT)

* 135 _ Article L 2381 code de travail : « Les dispositions relatives aux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail figurent dans la quatrième partie relative à la santé et sécurité au travail ».

* 136 _ Voir site CHSCT.com, Le site d'information des élus et des représentants du personnel.

* 137 _ Voir note n° 135 page 50

* 138 _ Pascal Diener, Ethique et Droit des Affaires, Recueil Dalloz Sirey 1993, 3ème cahier

* 139 _ Pierre Lescoumes, Noir, Gris, Blanc, les contrastes de la criminalité économique, les Cahiers de la sécurité intérieure n°36, 1999

* 140 _ Illustre figue de l'Histoire américaine. Il co-rédigea et signa la Déclaration d'Indépendance des Etats-Unis d'Amérique de 1776. Il est l'un des pères fondateurs des Etats-Unis.

* 141 _ Référentiels COSO, FERMA

* 142 _ Voir Annexe n° 6, page 68, Entretien avec Dominique PAGEAUD, Gestionnaire de risques, Cabinet d'Avocats, Ernst and Young

* 143 _8ème Directive 2006/43/CE du Parlement Européen et du Conseil du 17 mai 2006 - Loi n°2008-649 du 3 Juillet 2008 - Ordonnance n° 2009-80 du 22 Janvier 2009






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