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Placement sous écrous et dignité de la personne

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par Malick BA
Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise 2010
  

Disponible en mode multipage

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PLACEMENT SOUS ECROUS ET DIGNITE DE LA PERSONNE

ENCADREUR :MR BOUARE MARI MADY

MAITRE ASSISTANT ASSOCIE,AVOCAT

INTRODUCTION GENERALE 3

TITRE PREMIER : LA RECONAISSANCE D'UN DROIT A LA PRISON GARANT DE LA DIGNITE INHERENTE A LA PERSONNE EN MILIEU CARCERAL 4

CHAPITRE PREMIER : LE CADRE JURIDIQUE DU PRINCIPE DE LA DIGNITE DE LA PERSONNE DANS LA PROTECTION DES DROITS FONDAMENTAUX DES DETENUS 5

SECTION 1 : LA REGLEMENTATION INTERNATIONALE RELATIVE A LA DIGNITE DE LA PERSONNE 5

SECTION 2 : LES INSTRUMENTS JURIDIQUES INTERNES RELATIFS A LA DETENTION 6

SECTION 2 : L'ENCADREMENT JURIDIQUE LIE AUX RENFORCEMENTS DE L'EXECUTION ET A L'AMENAGEMENT DES SANCTIONS PENALES 8

TITRE DEUXIEME : UNE APPLICATION LIMITEE DU DROIT AU 10

CHAPITRE PREMIER : L'EXIGENCE DE CONDITIONS MATERIELLES DE DETENTION RESPECTUEUSES DE LA DIGNITE HUMAINE 11

SECTION 1 : LA PRISON : UN LIEU DE DESHUMANISATION ATTENTTATOIRE A LA DIGNITE 11

SECTION 2 : L'ARBITRAIRE CARCERAL 11

CHAPITRE 2 : VERS L'HUMANISATION ET LA REINSERTION DES DETENUS 13

SECTION 1 : L'HUMANISATION DES CONDITONS DE DETENTION 13

SECTION 2 : LE DEFI DE LA REINSERTION 13

CONCLUSION GENERALE : 15ABREVIATIONS

CPP : Code de procédure pénal

CP : Code pénal

CEDH : Cour européenne des droits de l'homme

CE : Conseil d'état

RPE : Règle pénitentiaire européenne

MAC : Maison d'arrêt et correction

TA : Tribunal administratif

CPT : Convention pour la prévention de la torture

R.U.D.H : Revue universitaire des droits de l'homme

OUA : Organisation de l'université africaine

UA : Union africaine

DUDH : Déclaration universitaire des droits de l'homme

CJCE: Cour de justice de la communauté européenne

D.A.P: Division de l'administration pénitentiaire

RI: Règlement intérieur

Art: Article

MJ : Ministère de la justice

JAP : Juge d'application des peines

INTRODUCTION GENERALE

Lorsqu'on examine la vie en société, on constate qu'elle est régie par des normes dont la violation est sanctionnée par le droit objectif. Ainsi, lorsque cette règle établie est transgressée par un des membres, celui-ci se rend débiteur de cette société là et il est logique qu'il s'acquitte de cette dette en acceptant d'être sanctionné. Cette peine est destinée à atteindre l'individu tant dans son physique, dans son honneur que dans ses biens, il s'agit de la peine d'emprisonnement qui porte certes sur la personne physique du condamné mais peut avoir des conséquences psychologiques et qui comporte un certain nombre de contraintes tant dans son mode d'exécution que dans le cadre prévu à cet effet par la loi. Ce cadre c'est la prison qui comme on le devine est un milieu différent du cadre de vie normal de l'individu.

La prison est devenue un élément fondamental du système pénal à partir de la révolution. Ainsi, en Europe, jusqu'à la fin du 18ème siècle, les prisons dont l'origine remonte à la plus haute antiquité, étaient considérées plus comme une mesure de sûreté et d'intimidation que comme moyen d'amendement .Mais cette conception archaïque de la prison a évolué au fil des temps, sous l'influence des idées nouvelles, plus moralistes, voire plus humanistes. Dès lors, le meilleur moyen de lutter contre la délinquance croissante ne résidait plus dans l'emprisonnement seulement mais dans la nécessité de faire sortir de prison des hommes et des femmes meilleurs qu'ils ne l'étaient en y entrant, autrement dit, plus armés moralement. Pour autant faut-il la considérer comme une conquête intangible ? En France les excès d'enfermement de la terreur de 1792 à 1794 conduiraient à répondre par la négative. Pourtant, la prison a remplacé des pratiques répressives encore plus douloureuses et humiliantes.

Au XVIIIe siècle un mouvement d'idée se fait jour, favorable à la substitution de l'enfermement individuel aux châtiments corporels. Inspirateur du droit pénal moderne, Cesare Beccaria s'élève contre la torture pour l'instruction du procès et contre la barbarie des peines infligées, y compris la mort. Il définit la peine du point de vue de son utilité social dans son ouvrage1(*) en précisant que : « Le châtiment a pour but d'empêcher le coupable de nuire désormais à la société et de détourner ses concitoyens de la voie du crime. » Mais là encore, l'enfermement n'est pas encore la clé de voute de l'arsenal répressif des crimes et des délits. Au sommet de l'échelle des peines subsistent la mort, les travaux forces  ou les galères. Mais la prison en constitue très vite un élément fondamental. En France, ce n'est qu'en 1970 qu'un droit de la prison émerge, droit régissant les conditions de détentions ainsi que le statut juridique du détenu.

Lorsqu'on examine la politique contre la criminalité en vigueur au Sénégal, on constate que celle-ci repose sur une philosophie que les pouvoirs publics rappellent souvent et qui se résume ainsi : " Répression sans cruauté inutile mais aussi sans faiblesse coupable ".Cela signifie que l'infraction à la norme établie sera réprimée avec rigueur sans tomber dans la cruauté mais aussi que l'auteur qui est soumis bénéficiera d'une compréhension sans pourtant verser dans une faiblesse coupable C'est en fonction de cette théorie de défense sociale que le décret 66-1081 du 31 décembre 1966 portant organisation et régime des établissements pénitentiaires fortement modifie prévoit un régime (pour condamné) qui aurait pour but de favoriser l'amendement en vue de le préparer au reclassement social .

Condition d'efficacité de la procédure pénale, la peine privative de liberté doit toujours être fondée sur la nécessité légitime de protéger la sécurité d'autrui et n'implique pas que la détention puisse être effectuée dans n'importe quelles conditions. La peine d'emprisonnement comporte donc l'imposition d'une contrainte afflictive au condamné, une souffrance physique qui l'atteint directement et personnellement dans sa liberté, dans son honneur, dans ses droits fondamentaux .De plus la privation de liberté ne peut entrainer d'autres restrictions aux droits du détenu que celles qu'entrainent nécessairement les exigences de sécurité et de contrôle de celui-ci .Ainsi l'ensemble des droits juridiquement reconnus ou droits moraux fondamentaux doivent êtres préservés. Cette étude rejoint celle des partisans de l'ingérence minimale et de la normalisation au sein de la prison de la situation du détenu.

C'est pourquoi aussi nul ne peut sérieusement contester que le principe de la dignité humaine à aujourd'hui acquis une place tout à fait prépondérante dans le cadre de la protection des droits fondamentaux. Dans le préambule de la Déclaration universelle des droits de l'homme, la dignité est présentée comme « le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde. »2(*) A la vérité, les droits de l'homme, à tout le moins les droits élémentaires sont substantiels à la personne humaine, ils reposent sur un fondement extra juridique constitué par le postulat de la dignité de la personne qui sert à protéger l'individu contre toute atteinte à ce qui fait de lui un être humain, quelle que soit du reste l'origine de cette atteinte. Il permet avant tout de préserver les individus de toute atteinte à leur égale humanité, fondatrice, dans l'idéologie humaniste dominante, de leurs droits individuels et collectifs et garante de la singularité de chacun .Sans entrer dans un débat philosophique sur la question, l'humanité, nous dit E. Kant, est par elle-même une dignité ; l'homme ne peut être traité par l'homme comme un simple moyen ou un objet, mais il doit être traité comme étant aussi une fin3(*). On peut distinguer, en gros, deux conceptions dominantes de la dignité : l'une qui en fait l'égal attribut de toute une vie humaine ; l'autre qui insiste davantage sur l'autonomie de la volonté en tant que seul élément véritablement digne. Quoiqu'il en soit l'usage du concept de « dignité » bénéficie du suffrage unanime de tous les courants de pensée, les philosophes, les morales autant que les religions. D'ailleurs on retiendra un exemple fourni par Gandhi qui déclare : « Nous sommes tous taillés dans le même patron ; mépriser un seul être humain, c'est mépriser le divin qui est en nous. »4(*)

Diffusant dans l'ensemble de l'ordre juridique, le principe de dignité humaine se voit de plus en plus évoqué dans le cadre des personnes placées sous écrous, tout spécialement celles privées de leur liberté. Il faut donc faire la distinction entre trois catégories de droits fondamentaux concernant les détenus : certains droits que les détenus ont perdu du fait qu'ils sont légalement privés de liberté ;des droits relatifs qui peuvent faire l'objet de restrictions pour des raisons valables et des droits absolus dont les détenus jouissent en pleine égalité avec les autres êtres humains et parmi lesquels figure en bonne place la dignité . S'il est incontestable que la prison comporte inévitablement l'infliction d'une souffrance, il est désormais acquis que ces privations inhérentes à la privation de liberté ne doivent pas dépasser un certain seuil, qui signifierait le non respect de la dignité de la personne détenue. Dans cet ordre d'idée « toute personne privée de sa liberté est traitée avec humanité et avec le respect inhérent à la personne humaine »5(*).Nier cette part d'humanité transforme l'individu en un être servile, l'avilit , l'inscrit dans une catégorie inferieure .La dignité est donc le socle de plusieurs droits fondamentaux ,elle est un principe matriciel, la raison d'être de l'ensemble des droits fondamentaux6(*), il constitue un véritable principe directeur dans le cadre du traitement des personnes privées de liberté . Il permet de rappeler avec véhémence que ces personnes font partie intégrante de la communauté humaine. Bien au contraire, leur situation spécifique en fait des sujets de droit qui nécessitent des mesures particulières. . Ainsi la protection du maillon faible répond à une double préoccupation, celle de placer sous écrous la personne incriminée car ayant occasionné un préjudice à autrui et en même temps être tenu par l'administration pénitentiaire au respect de la dignité du détenu. De nombreuses questions viennent se greffer à cette problématique de la détention et de la protection de la dignité inhérente à la personne. Le principe du respect de la dignité humaine s'accorde- t-il avec les exigences inhérentes à la détention ? Comment les textes encadrent-ils la détention ? Les conditions d'incarcération sont elles conformes aux textes en vigueur ou mieux encore le cadre juridique répond t-il aux aspirations du moment ? Bref le droit de la prison est-il toujours appliqué ? Y'a-t-il eu des avancées importantes allant dans le sillage d'une meilleure protection de la dignité durant l'emprisonnement ? Ne pas poser ce principe du respect de la dignité durant l'incarcération, c'est passer à coté de l'essentiel. Il est le moteur de toute politique pénitentiaire qui se prétend respectueuse des droits des détenus car il en est la source fondamentale. Tous les droits des détenus découlent de ce principe car aussitôt enfermé le mis sous écrous est systématiquement soumis à toutes sortes d'agressions physiques et psychologiques. Dans cet ordre d'idée il importe de se poser la question à savoir quelle est l'étendue de la protection de la dignité de la personne lors de l'incarcération ? L'article D349 du code de procédure pénale français dispose : « l'incarcération doit être subie dans des conditions satisfaisantes d'hygiène et de salubrité, tant en ce qui concerne l'aménagement et l'entretien des bâtiments, le fonctionnement des services économiques et l'organisation du travail, que l'application des règles de propreté individuelle et la pratique des exercice physiques ». En application de cette disposition, par un jugement en date du 27 mars 2008, le tribunal administratif de Rouen alloue une indemnité à un détenu en raison du comportement fautif de l'administration pénitentiaire du fait du non respect de la dignité inhérente à la personne humaine et de ses conditions de détention : exiguïté des lieux, promiscuité avec les autres détenus, cabinet d'aisance situé à proximité immédiate du lieu ou sont pris les repas.

Bons nombres d'instruments juridiques ont consacré ce principe. Au Sénégal il existe en l'état actuel des dispositions de droit interne reconnaissant de manière indubitable la garantie de ce droit fondamental dans son code de procédure pénale de 1965 fortement inspiré du code napoléonien de 1804 et consacre l'inviolabilité de la personne et sa sacralité7(*) dans sa constitution. De même l'arrêté ministériel du 21 mai 1987 portant règlement intérieur des établissements pénitentiaires traduit de fort belle manière le souci des autorités pour la protection de l'intérêt supérieur qu'est le respect de la dignité. Il est important de souligner que le législateur sénégalais a ratifié les conventions internationales s'inscrivant dans la même logique. Il y'a également un recours croissant à des normes spécifiques afin de se mettre en conformité avec les obligations consenties au titre de la Convention des Nations Unies. Dans cette optique des règles relatives aux détenus vulnérables ont été intégré dans le droit interne notamment celles relatives aux enfants8(*) et aux femmes. La dignité a également servi à rappeler que la prise en charge de la santé des personnes privées de liberté constitue une exigence primordiale pour les services pénitentiaires et de santé9(*) . Le contexte politique troublé (Casamance) et la pression internationale subséquente ont poussé le Sénégal à ratifier la convention10(*) et à adopter une loi introduisant l'infraction de torture11(*). En outre l'Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus12(*) trouve également son champ d'application au Sénégal montrant du coup que la dignité ne s'arrête pas à la porte de l'univers carcéral. Mieux encore le continent africain n'y est pas allé de main morte, plaçant la dignité au sens le plus fort de l'irréductible humain, tout au sommet de la hiérarchie des valeurs intangibles avec la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples13(*).

Par ailleurs l'évolution du droit de la prison est allée dans le sens d'une réelle prise en compte des conditions de vie des détenus en mettant l'état devant ses responsabilités. Ainsi Le Pape Clément XI avait ouvert la voie, lui qui faisait écrire en 1703, sur les murs de la prison Saint-Michel de ROME, cette phrase devenue célèbre : " Il ne suffit pas d'effrayer les hommes malhonnêtes par la menace de la peine, il faut les rendre honnêtes par son régime ".

Ces idées développées par l'école positiviste italienne animée par LOMBROSO, GARO- FALO et FERRI ont été systématisées par la doctrine de l'Ecole de la Défense Sociale Nouvelle avec comme précurseurs GRAMMATICA en Italie et MARC ANCEL, en France. Pour MARC ANCEL, il s'agit donc de s'attacher à la personnalité de chaque délinquant car l'infraction n'est qu'un symptôme d'une nature qu'il faut découvrir, aux fins de pouvoir le traiter. L'administration pénitentiaire doit assurer à chaque personne détenu une protection effective de son intégrité physique en tous lieux collectifs et individuels et lui assurer des conditions décentes de détention comme affirmé par la législation pénale nationale14(*) .

Le Sénégal après avoir ratifié le 18 octobre 2006 le protocole facultatif se rapportant à la convention des nations unies contre la torture, entend se conformer à ses obligations internationales. Le sens donné à la peine détermine le regard du citoyen sur la prison, le regard du détenu sur son temps de détention, le regard du personnel pénitentiaire sur les missions qui lui incombent. La peine est un moyen à la fois de réparation pour les victimes et de protection de la société. La réflexion sur la prison doit évidemment prendre en compte ces deux missions et ne jamais oublier l'impératif de sécurité qui s'y rattache. La dangerosité est une réalité du monde carcéral et l'excès d'angélisme serait aussitôt taxé de laxisme. Mais, au-delà de l'impératif de neutralisation, les réponses qu'on apporte à la question du sens de la peine traduisent les valeurs fondamentales d'une société. Ce sens devrait apparaître clairement à la fois pour l'auteur du délit ou du crime, et pour ceux chargés d'exécuter la sanction. Il ne saurait être l'enfermement pour l'enfermement. Celui-ci, quand il est nécessaire, doit avoir un objectif d'amendement en vue de la réinsertion. Il doit en être ainsi, que l'enfermement se déroule en prison ou en milieu ouvert. Ainsi les mécanismes mis en place notamment les lois nos 2000-38 et 2000-39 du 29 décembre 2000 et le décret n° 2001-362 du 04 mai 2001, relatifs aux procédures d'exécution et d'aménagement des sanctions pénales ont introduit le juge d'application des peines, de nouvelles sanctions alternatives à l'incarcération et de nouveaux organes de contrôle. . Le prononcé d'une peine par un tribunal ne signifie pas que son exécution doit être figée dans le marbre. Au contraire, la loi prévoit, dans un but de prévention de la récidive, que les peines peuvent être aménagées en cours d'exécution pour tenir compte de l'évolution de la personnalité et de la situation du condamné nonobstant l'existence d'un contrôle effectif. Comment appliquer et faire respecter le droit dans un espace clos, nécessairement soustrait à la pluralité des regards et des points de vue qui garantissent les libertés dans l'espace public ? L'entrée des avocats en prison, la mise en place d'une juridiction d'application des peines ou la définition de recours possibles vont dans le sens d'une plus grande ouverture et d'un plus grand respect. Plus fondamentalement, rappeler l'existence d'un droit commun, défini par ceux qui édictent les règles de la vie quotidienne de leurs concitoyens, c'est créer un pont et faciliter les passages entre la prison, les prisonniers et l'ensemble de la société.

Aujourd'hui tout le monde s'accorde a dire que la prison constitue un lieu de deshumanisation attentatoire à la dignité des placés sous écrous. L'état de surpopulation carcérale chronique comme c'est le cas à Rebeuss qui accueille aujourd'hui plus de 1500 détenus pour une capacité d'accueil de 800 , le manque d'entretien et la vétusté des établissements pénitentiaires sont autant de manquement à un système juridique qui se veut irréprochable. En France le Comité de Prévention contre la Torture(CPT) qui est un organe de visite et de contrôle à toujours estimé que « la qualité générale de la vie dans un établissement présente(...) une importance considérable »15(*). La qualification de traitement inhumain ou dégradant, de torture à laquelle peut conclure le CPT, résulte soit d'un élément spécifique, soit, d'une combinaison de facteurs tels que la surpopulation, l'absence d'installations sanitaires et l'insuffisance du régime alimentaire.

En plus la définition du sens de la peine et une claire perception de celui-ci par l'opinion publique doivent circonscrire les missions de l'administration pénitentiaire. Les états doivent s'assurer que les modalités d'exécution de toute mesure privative de liberté ne soumettent pas l'intéressé à une détresse ou à une épreuve d'une intensité qui excède le niveau inévitable de souffrances liées à la détention. Cependant une certaine procédure disciplinaire inadaptée combinée avec l'impuissance manifeste du personnel pénitentiaire traduit à juste titre l'arbitraire carcéral tant décrié au sein les établissements pénitentiaires, disposant par ailleurs d'un règlement intérieur qui détaille les fautes disciplinaires (refus de réintégrer sa cellule, possession d'objet interdit, violence, etc.). En cas de commission d'une faute, les détenus comparaissent, éventuellement assisté d'un avocat, devant une commission de discipline qui peut prononcer des sanctions, dont les plus graves consistent en un placement à l'isolement ou au quartier disciplinaire. Ainsi affirmé, en détention, les personnes incarcérées bénéficient d'un statut, impliquant des droits et des devoirs, qui encadre leur vie quotidienne et permet la sanction disciplinaire des comportements répréhensibles. Sanction existant également chez le personnel pénitentiaire avec la répression coupable. Dans cette même lancée si les détenus peuvent écrire librement à leur avocat, le reste de leur correspondance est contrôlée par l'administration pénitentiaire et ils peuvent en outre bénéficier de visite au parloir chaque semaine.

Si la délicate mission de garde est remplie par l'administration pénitentiaire, la mission de réinsertion a plus de mal à entrer dans les faits. Comment préparer une réinsertion sociale en un lieu qui désocialise et déresponsabilise ? L'exigence de réinsertion, et à travers elle la prévention de la récidive, est au coeur des missions confiées à l'administration pénitentiaire. Elle dispose pour ce faire de moyens certes limités mais relativement diversifiés: elle favorise tout d'abord le travail et la formation professionnelle rémunérée, afin de ne pas faire coïncider l'incarcération avec une période d'inactivité  .Cependant travail qui apparaît avant tout comme un instrument de gestion de la détention. Rares sont les cas où son contenu prépare à une nouvelle vie professionnelle. Et les conditions de son exercice, en dehors des règles du droit commun du travail, laissent un sentiment d'insatisfaction .Enfin, l'administration pénitentiaire développe de multiples partenariats afin par exemple de favoriser des actions de prévention sur le thème de la santé, ou bien de permettre un accès minimal à la culture (bibliothèque, concert). Des activités dérivatives à l'ennui ont été mises sur pied avec des ateliers de confection, de menuiserie métallique et bois L'administration pénitentiaire a mis en place une division chargée de la réinsertion des détenus. Un travail qu'elle faisait auparavant, mais pas dans un cadre formel .Il s'agit d'une division des oeuvres sociales chargée de la réinsertion des détenus au Sénégal. En définitive force est de noter que « les prisons doivent être gérées dans un cadre éthique soulignant l'obligation de traiter tous les détenus avec humanité et de respecter la dignité inhérente à tout être humain »16(*).

Faut-il aller vers la fin de la prison ou de la peine d'enfermement comme réponse aux délits, voire aux crimes ? Les rêveurs, les philosophes, ceux qui s'aventurent sur les chemins inexplorés dans l'espoir de répondre à des questions angoissantes ne répugnent pas à le penser. Déjudiciarisation par la médiation, fin du droit pénal et abolition de la peine comme l'ont prôné le hollandais HULSMAN ou l'italien BATTISTA ? Mais il faudra sans doute continuer à vivre avec la prison, car toutes les sociétés ont le droit et le devoir de se protéger des individus dangereux ou qui violent gravement la loi. Pour ces derniers, la privation de liberté doit garder sa place. A ce titre la reconnaissance d'un droit à la prison garant de la dignité inhérente a la personne en milieu carcéral (Titre premier) doit être envisagée sans occulter le fait qu'une application limitée du droit au respect de la dignité exige une analyse minutieuse (Titre deuxième).

TITRE PREMIER : LA RECONAISSANCE D'UN DROIT A LA PRISON GARANT DE LA DIGNITE INHERENTE A LA PERSONNE EN MILIEU CARCERAL

Le principe de dignité de la personne est le moteur de toute politique pénitentiaire qui se prétend respectueuse des droits de l'homme, car elle en est la source fondamentale. Elle est une affirmation sur la personne humaine et est le résultat d'une pensée historique. Elle réaffirme l'idée de grandeur, de droit au respect. Elle ne se perd pas, ne se dégrade pas. La dignité est le fondement même du droit, non un argument juridique. Il fonde le caractère obligatoire du système juridique. C'est un principe matriciel, un socle qui assoit la philosophie des droits de l'homme. La prison demeure un moment transitoire et un espace transitionnel. Autrement dit, l'emprisonnement nécessaire s'inscrit dans la perspective du retour au principe fondamental de la liberté individuelle, donc de la réinsertion dans la société. Et si elle survit encore au sein de l'arsenal répressif, elle devrait répondre à l'exigence du respect des conditions respectant indubitablement la dignité de la personne du détenu. Il s'établit manifestement entre le respect de la dignité et la non discrimination, de l'égalité et l'inviolabilité de la personne d'autre part, un lien de connexité historique toujours présent dans l'esprit de l'homme17(*) .Somme toute, on n'aurait rien fait, si on c'était contenté de proclamer la dignité de la personne. C'est leur réalisation qui importe et celle-ci suppose la mise en place de mécanisme de garantie qui soit au service et à la disposition des titulaires de ces droits. Cet impératif explique que bons nombres d'instruments juridiques l'ont consacré allant de la législation nationale au droit humanitaire en passant parle droit international. Au delà de cette reconnaissance sine qua none, le droit à la prison implique que des actes positifs soient mis en oeuvre pour relever le défi l'encadrement permanent des placés sous écrous. S'il apparaît en droit sénégalais que beaucoup de textes internationaux régissant le respect de la dignité humaine y est d'application effective (chapitre Premier), il n'en demeure pas moins que des avancées non moins importantes restent manifestes allant dans le sens d'une meilleure prise en charge de l'écroué (chapitre Deuxième).

CHAPITRE PREMIER : LE CADRE JURIDIQUE DU PRINCIPE DE LA DIGNITE DE LA PERSONNE DANS LA PROTECTION DES DROITS FONDAMENTAUX DES DETENUS

Le respect de la dignité n'admet ni restriction ou exception permanente, ni même dérogation temporaire. A la différence du droit à la vie, pour lequel on n'admet l'exception de la légitime défense, le droit au respect de la dignité est à protection absolue18(*) . Etudier le cadre juridique de la dignité revient à s'interroger d'une part sur la manière dont le droit international en assure la protection et d'autre part les stratégies internes tendant à garantir aux individus des droits que la puissance publique s'interdit de remettre en cause. Ainsi l'universalisme du concept de dignité n'est pas resté lettre morte. C'est pourquoi il existe des normes internationales générales telles que les conventions internationales, les normes internationales spécifiques et les déclarations de droit que devront respecter les états qui consentiront à être liés. Mais il est traditionnellement admis que les états sont libres de déterminer la manière dont il entend s'acquitter de ses obligations internationales. Le Sénégal afin de répondre aux exigences internationales et consolider les acquis a accepté de mettre en adéquation son droit interne en insérant dans sa constitution19(*), charte fondamentale et sa législation pénale 20(*) ,des dispositions garantissant le respect de la dignité de la personne du détenu. En outre L'administration pénitentiaire désignant l'ensemble des moyens matériels et humains constituant un service public destiné à assurer l'exécution des condamnations pénales, dans un but d'individualisation de la peine et dans le respect de la sécurité publique joue un rôle utile tant dans son organisation que dans son fonctionnement. Elément du noyau dur des droits de l'homme, droit intangible ne pouvant faire l'objet d'aucune atteinte, l'inviolabilité de la dignité est au centre de tous les instruments de protection des droits fondamentaux. Dans cette perspective d'analyse , il parait donc nécessaire sinon logique de déterminer l'ensemble des dispositifs juridiques internes relatifs à la détention au Sénégal (Section deuxième) .Mais auparavant ,entrevoir la réglementation internationale relative à la dignité de la personne (Section première) nous semble des plus indiqué compte tenu du caractère universel du concept.

SECTION 1 : LA REGLEMENTATION INTERNATIONALE RELATIVE A LA DIGNITE DE LA PERSONNE

L'un des aspects essentiels de la dignité de la personne réside dans sa consécration internationale par des textes déterminés qui ont vocation à s'appliquer en droit interne et donc incorporé en droit positif sénégalais. Ce mécanisme de protection peut procéder des systèmes institutionnels que connait la société internationale au niveau universel (Organisation des Nations Unies) et au niveau régional (Union Européenne, organisation de l'union africaine21(*) devenue Union Africaine...). Mais l'originalité de la protection internationale de la dignité réside essentiellement dans «  la mise en place de mécanismes spécifiques conventionnels »22(*) Il convient cependant de noter une nette tendance à l'augmentation du nombre de tels mécanismes et à un renforcement constant du degré de contrainte qu'ils comportent. On opposera ainsi les garanties internationales générales (Paragraphe I) et celles procédant des conventions spécifiques (Paragraphe II).

PARAGRAPHE 1 : LES NORMES INTERNATIONALES GENERALES

La dignité inhérente à la personne est la toile de fond des droits de l'homme. Subséquemment les conventions internationales relatives aux droits de l'homme et plus particulièrement à la dignité posent des normes que devra respecter le Sénégal qui a consenti à être lié .A contrario, les déclarations universelles sont de très beaux textes mais hélas les secours qu'ils offrent à l'opprimé sont purement symboliques. Toujours est-il que la jonction des deux allait contraindre les Etats à intégrer ces données et à rompre avec les principes les plus archaïques. Identifier les conventions internationales devient de facto opportunes (A) sans pour autant celer la déclaration des droits forts primordiales (A).

A- LES CONVENTIONS INTERNATIONALES

« ... Les obligations souscrites par les Etats contractants dans la convention ont essentiellement un caractère objectif, du fait qu'elles visent à protéger la dignité si fondamentale des particuliers contre les empiétements des Etats signataires.»23(*)Dans cette perspective nous distinguerons les conventions universelles (1) de celles régionales (2).

1- Les conventions universelles :

On ne peut parler de protection des droits de l'homme et partant de la dignité de la personne sans pour autant mettre en évidence la charte des Nations Unies si fondamentale au genre humain. Elle réaffirme avec force, la détermination des peuples au respect de la dignité, substrat des droits humains. D'elle découle différentes conventions ayant autorité avérée et touchant du doigt l'obligation au respect de la dignité de l'incarcéré. Cela étant, il faudrait articuler notre démarche de par un examen concret de ces multiples mécanismes de garantie. L'action de l'organisation des Nations Unies en faveur de la dignité appelle quelques remarques particulières, en raison du fait que c'est l'inscription de ce droit dans la charte qui a marqué l'origine de sa protection.

- La charte des nations unies : 

Les différents gouvernements, par l'intermédiaire de leurs représentants, réunis en la ville de San Francisco, et munis de pleins pouvoirs reconnus en bonne et due forme, ont adopté la Charte des Nations Unies et établissent du coup une organisation internationale qui prendra le nom de Nations Unies. Cette charte des nations unies du 26 juin 1945 mentionne la foi des auteurs du texte « dans les droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine ». Cette première consécration générale de la dignité de la personne dans un traité international fondamental inaugure son essor en les plaçant au coeur même des missions conférées à l'organisation universelle.

- Le pacte international relatif aux droits civils et politiques :

Adopté et ouvert à la signature, à la ratification et à l'adhésion par  l'Assemblée générale dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966. Entrée en vigueur: le 23 mars 1976 et ratifiée par le Sénégal le 24 Février 1978, conformément aux dispositions de l'article 49, revêt un caractère contraignant plus marqué, ce qu'atteste bien son article 2. Les Etats s'engagent à prendre «  les arrangements devant permettre l'adoption de telles mesures d'ordre législatif ou autre propres à donner effet aux droits reconnus dans le présent pacte qui ne serait pas déjà en vigueur » et à garantir un recours utile au profit de toute personne qui aura été victime d'une violation d'un droit reconnu. On est donc en présence de dispositions dont on considère que la réglementation juridique des Etats parties devrait déjà y satisfaire et dont la sanction juridictionnelle peut être immédiate dans l'ordre interne. En outre son article 10 affirme de manière constante la garantie de la dignité de la personne privée de liberté. Il énonce : « Toute personne privée de sa liberté est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine » Un comité des droits de l'homme est crée, qui peut demander aux Etats des rapports sur les mesures prises pour rendre effectifs les droits garantis et présenter toute observation aux Etats.

- L'ensemble des principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement :

Il est adopté par l'Assemblée générale dans sa résolution 43/173 du 9 décembre 1988. Il est fort révélateur et constitue un supplément au pacte international relatif aux droits civils et politiques. Son principe premier indique que « Toute personne soumise à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine ».Mieux encore le principe 3 insiste sur la nécessité au respect de ce droit lorsqu'il énonce que  «  Si une personne est soumise à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement, il ne peut être admis à son égard aucune restriction ou dérogation aux droits de l'homme reconnus ou en vigueur dans un Etat en application de lois, de conventions, de règlements ou de coutumes, sous prétexte que le présent Ensemble de principes ne les reconnaît pas ou les reconnaît à un moindre degré. » La dignité a donc un caractère absolu auquel aucune exception ne saurait être excipée et toute personne qui a lieu de croire qu'une violation du présent Ensemble de principes s'est produite ou est sur le point de se produire a le droit de signaler le cas aux supérieurs des fonctionnaires en cause ainsi qu'aux autres autorités ou instances de contrôle ou de recours compétentes.24(*)

Sur cette lancée les Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus qui sont un prolongement ceux évoqués plus haut indique que « Tous les détenus sont traités avec le respect dû à la dignité et à la valeur inhérentes à l'être humain »25(*)

2- Les conventions régionales :

Beaucoup de texte régionaux ont intégré la problématique de la dignité de l'écroué. L'Europe dans sa plus grande diversité a fait des pas de référence en matière des droits de l'homme notamment avec la prise en compte effective de la dignité si chère au genre humain. Mais l'Afrique n'est pas restée muette face à cette avancée de grande envergure et ce n'est pas pour rien que son insertion dans l'ordre juridique sénégalais a été majeure.

- En Europe :

L'article 1er de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne adoptée à Nice le 7 décembre 2000 proclame le caractère« inviolable » de la dignité26(*). Mais bien auparavant , si la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ne mentionne pas explicitement le principe de dignité, la Cour européenne des droits de l'homme a eu depuis longtemps l'occasion de préciser que « le respect de la dignité et de la liberté humaines est l'essence même des objectifs fondamentaux de la Convention »27(*) et que « les droits de l'homme constituent un système intégré visant à protéger la dignité de l'être humain »

En plus la Charte des droits fondamentaux des détenus réitère le droit à la dignité inhérente en considérant que l'emprisonnement des détenus, notamment des personnes pauvres et faisant l'objet d'une discrimination raciale, doit être traité avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine. Les mesures appliquées conformément à la loi et destinées exclusivement à protéger les droits et la condition particulière des femmes, surtout des femmes enceintes et des mères d'enfants en bas âge, des enfants, des adolescents et des personnes âgées, malades ou handicapées ne sont pas réputées être des mesures discriminatoires. Un détenu doit être traité par l'administration pénitentiaire en stricte conformité avec les conditions imposées par sa peine d'emprisonnement sans que soient davantage aggravées encore les souffrances inhérentes à une telle situation. Selon M. Delmas-Marty la convention européenne place la dignité de la personne du détenu au sens le plus fort de l'humanité28(*).

- Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples :

Adoptée le 27 juin 1981 à Nairobi, Kenya, lors de la 18e Conférence de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) et entrée en vigueur le 21 octobre 1986 après ratification de la Charte. Au regard de l'article 4 : « La personne humaine est inviolable. Tout être humain a droit au respect de sa vie et à l'intégrité physique et morale de sa personne: Nul ne peut être privé arbitrairement de ce droit ». En outre « Tout individu à droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine et à la reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes formes d'exploitation et d'avilissement de l'homme notamment l'esclavage, la traite des personnes, la torture physique ou morale, et les peines les traitements cruels inhumains ou dégradants sont interdites ». L'oeuvre de l'organisation de l'unité africaine parait singulièrement timide.la charte de l'OUA, signée le 25 MAI 1963 à Addis-Abeba, réaffirme pourtant l'adhésion de ses auteurs aux principes de la déclaration universelle des droits de l'homme(DUDH), tandis que l'article II fait figurer parmi les objectifs de l'organisation  la coopération internationale, en tenant dument compte de la charte des nations unies et de la Déclaration universelle. Mais ce n'est qu'en 1981 que fut adoptée par l'organisation une charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Il est loin de présenter le caractère contraignant de ceux institués en Europe et en Amérique ; le protocole portant création d'une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples adopté en 1998 vient de donner naissance à cette juridiction qui devrait permettre au système africain de gagner en efficacité.

B- LA DECLARATION DES DROITS :

Les déclarations de droits n'ont pas force contraignantes comme précédemment affirmées mais consacrent incontestablement la dignité de la personne humaine.

- La déclaration universelle des droits de l'homme :

Le 10 décembre 1948, les 58 Etats Membres qui constituaient alors l'Assemblée générale ont adopté la Déclaration universelle des droits de l'homme à Paris au Palais de Chaillot (résolution 217 A (III)) .Pour commémorer son adoption, la journée des droits de l'homme est célébrée chaque année le 10 décembre.

C'est une résolution de l'assemblée générale de l'organisation des nations unies, une action dépourvu de caractère obligatoire, a l'inverse d'un traité qui oblige les Etats qui le ratifient ou y adhérent. La commission des droits de l'homme, a l'origine du texte, avait souhaité aboutir rapidement à l'adoption d'un document énonçant les droits de l'homme. Le texte de la déclaration préfigure cependant de manière admirable ce futur des droits de l'homme : tant dans sa formulation que sa logique seront reprises par les traites internationaux concernant les droits de l'homme quoique dépourvu par lui-même de valeur contraignante , il constitue une base précieuse permettant aux divers organes de l'union de développer leur action de protection des droits de l'homme : c'est dire qu'il fixe de manière décisive le « droit interne de l'organisation » en la matière. Son préambule garantit formellement la dignité en Considérant «  que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ». Il s'y ajoute que les Etats « ont proclamé à nouveau leur foi dans les droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l'égalité des droits des hommes et des femmes »,

- La déclaration des droits de l'homme et du citoyen

La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen est décrétée par l'assemblée Nationale Française dans sa séance du 26 Aout 1789. Elle comporte 17 articles mais son enseignement a dépassé les frontières européennes. Elle est de ce fait dans le préambule de diverses constitutions. Le peuple du Sénégal souverain, affirme son adhésion à la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 dans sa constitution du 7 Janvier 2001. Ainsi  les représentants du peuple français, constitués en Assemblée nationale, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'homme, afin que cette déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs ; afin que les actes du pouvoir législatif et ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés ; afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous 29(*). Son article 6 dispose que tous les citoyens, étant égaux à ces yeux, sont également admissibles à toutes dignités.

PARAGRAPHE 2 : LES NORMES INTERNATIONALES SPECIFIQUES

La société qui prend en charge un délinquant et l'écroue, se voit désormais imposer un certain nombre de devoirs, ce qui constitue une nouveauté considérable. Ce concept de « duty of care », cher aux anglo-saxons30(*), permet d'assurer une prise en charge complète de la personne écrouée. Cette analyse est d'autant plus intéressante qu'elle s'accompagne d'une nouvelle perception de la personne privée de liberté, aujourd'hui perçue comme une personne vulnérable. Comme le relève notamment Diane ROMAN, le droit français contemporain connaît en effet « l'émergence d'une catégorie médiane, entre le capable et l'incapable : le vulnérable »31(*), rassemblant des personnes jouissant d'une capacité d'exercice, mais dont la situation particulière atténue cette capacité d'exercice. Avec le très important arrêt Kudla c/Pologne rendu le 26 octobre 2000, les Etats européens se voient imposer de nouveaux standards en matière de traitement des personnes privées de leur liberté. Ils sont désormais tenus « de s'assurer que tout prisonnier est détenu dans des conditions qui sont compatibles avec le respect de la dignité humaine »32(*). Ainsi on peut noter des normes internationales spécifiques aux détenus vulnérables (A) et des normes internationales touchant le traitement des détenus (B).

A- LES NORMES INTERNATIONALES SPECIFIQUES AUX DETENUS VULNERABLES

Le système pénitentiaire a considérablement diversifié son recrutement depuis quelques années en s'élargissant à de nouvelles populations qui posent de redoutables problèmes de gestion et de coexistence à une administration pénitentiaire prisonnière de ses traditions  La protection du détenu vulnérable revêt un caractère particulier à tel enseigne que l'organisation des Nations Unies a prévu une réglementation remarquable le régissant et est applicable au Sénégal. L'Union Européenne s'est inscrit dans cette même optique comme le démontrent aussi certaines décisions de justice récentes. Elle est relative aux mineurs (1), certes peu nombreux, mais dont les " incivilités ", la violence, l'absence de repères déconcertent et déstabilisent les personnels de surveillance les plus expérimentés  et aux femmes (2) dont deux principaux motifs expliquent leur présence en prison : les infractions à la législation sur les stupéfiants33(*) et les crimes de sang. Les personnes âgées, les malades et les malades mentaux font également parti de ce groupe de personnes vulnérables.

1- les règles spécifiques relatives aux droits de l'enfant

Ensemble des règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineur (règles de Beijing)34(*) et les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté35(*) :

- Les règles de Beijing ont été prises en compte par le Haut Commissariat des Nations unies aux Droits et adoptées par l'assemblée générale dans sa résolution 40/33 du 29 Novembre 1985. Etant entendu qu'un mineur est un enfant ou un jeune qui, au regard du système juridique considéré, peut avoir à répondre d'un délit selon des modalités différentes de celles qui sont appliquées dans le cas d'un adulte. Il faut noter que les limites d'âge dépendent expressément de chaque système juridique et tiennent pleinement compte des systèmes économiques, sociaux, politiques et culturels des Etats Membres. Il s'ensuit que toute une gamme d'âges relève de la catégorie des jeunes qui va donc de 7 ans à 18 ans ou plus. Cette disparité est inévitable eu égard à la diversité des systèmes juridiques nationaux et ne diminue en rien l'impact du présent Ensemble de règles minima. L'article 5 stipule que : « Le système de la justice pour mineurs recherche le bien-être du mineur et fait en sorte que les réactions vis-à-vis des délinquants juvéniles soient toujours proportionnées aux circonstances propres aux délinquants et aux délits ».

De la même façon, les décisions visant à la protection du délinquant juvénile peuvent aller plus loin qu'il n'est nécessaire et donc porter atteinte à ses droits fondamentaux, comme on a pu l'observer dans certains systèmes de justice pour mineurs. Le contacte avec le milieu carcéral doit être fait de manière à respecter le statut juridique du mineur, à favoriser son bien-être et à éviter de lui nuire36(*). En plus l'expression "éviter de [lui] nuire" est assurément vague et recouvre maints aspects de l'interaction possible (paroles, violence physique, risques dus au milieu). Avoir affaire à la justice pour mineurs peut en soi être "nocif" pour les jeunes, il faut donc interpréter l'expression "éviter de [lui] nuire" comme signifiant tout d'abord qu'il faut faire le moins de mal possible aux mineurs et éviter tout tort supplémentaire ou indu. L'article 17.3 prévoit également « que les mineurs ne sont pas soumis à des châtiments corporels ». En définitive il est donc important de restreindre le placement du mineur dans une institution comme l'indique les dispositions de l'article 19.1 « Le placement d'un mineur dans une institution est toujours une mesure de dernier ressort et la durée doit en être aussi brève que possible ». L'article demande donc que, si un jeune délinquant doit être placé dans une institution, la privation de liberté soit limitée le plus possible, que des arrangements spéciaux soient prévus dans l'institution pour sa détention et qu'il soit tenu compte des différentes sortes de délinquants, de délits et d'institutions. En fait, il faudrait donner la priorité aux institutions "ouvertes" sur les institutions "fermées". En outre, tous les établissements devraient être de type correctif ou éducatif plutôt que carcéral.

- Les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté

Adoptées par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/113 du 14 décembre 1990 sont déterminantes dans la prise en compte des intérêts du mineur. IL vient en compléments de la Convention internationale relative aux Droits de l'Enfant adopté le 20 Novembre 1989.La justice pour mineurs devrait comme le note les perspectives fondamentales de la charte «  protéger les droits et la sécurité et promouvoir le bien-être physique et moral des mineurs. L'incarcération devrait être une mesure de dernier recours ». Les règles posées servent alors de référence dans la perspective d'une meilleure administration du mineur placé sous écrous. La règle 12 illustre bien cette préoccupation lorsqu'elle l'envisage ainsi : «  La privation de liberté doit avoir lieu dans des conditions et des circonstances garantissant le respect des droits de l'homme des mineurs. Les mineurs détenus doivent pouvoir exercer une activité intéressante et suivre des programmes qui maintiennent et renforcent leur santé et leur respect de soi, favorisent leur sens des responsabilités et les encouragent à adopter des attitudes et à acquérir des connaissances qui les aideront à s'épanouir comme membres de la société ». Les mineurs doivent être détenus dans des conditions tenant dûment compte de leur statut et de leurs besoins particuliers en fonction de leur âge, de leur personnalité et de leur sexe. Il s'agit donc de respecter sans restriction sa dignité inhérente à sa personnalité. De ce fait son environnement physique a été pris en compte par la règle 31 aux termes duquel  les mineurs détenus doivent être logés dans des locaux répondant à toutes les exigences de l'hygiène et de la dignité humaine. Leur placement, leur environnement et leur logement doivent être conforme avec l'objectif primordial de garantir sa dignité37(*). Les mesures de contrainte physique ne doivent pas être humiliantes38(*). De même toute mesure disciplinaire doit assurer, le respect de soi-même et le respect des droits fondamentaux de chacun et est compatible avec le respect de la dignité inhérente du mineur. Pour protéger ce droit , les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté envisage des inspections, en évaluant le respect des règles concernant l'environnement physique, l'hygiène, les locaux de détention, l'alimentation, l'exercice physique et les services médicaux ainsi que tout autre aspect de la vie en établissement qui affecte la santé physique et mentale des mineurs39(*). Dans l'exercice de ses fonctions, le personnel de l'établissement doit respecter et protéger la dignité humaine et les droits individuels fondamentaux de tous les mineurs mais aussi de réduire au minimum les différences entre la vie à l'intérieur et à l'extérieur de l'établissement qui tendent à être préjudiciables au respect de la dignité des mineurs en tant qu'êtres humains.

-Convention internationale relative aux Droits de l'Enfant

Elle est adoptée par l'assemblée générale le 20 novembre 1989, ratifiée le 31 Juillet 1990 et s'attache à une catégorie de personne jusque le peu envisagé en tant que telle par les conventions internationales (à l'exception de l'article 24 du pacte sur les droits civils et politiques) C'est la raison pour laquelle  l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération dans toutes les décisions le concernant. 40(*) Aux termes de l'article 37 les Etats parties veillent à ce que : « Nul enfant ne soit soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ni la peine capitale ni l'emprisonnement à vie sans possibilité de libération ne doivent être prononcés pour les infractions commises par des personnes âgées de moins de dix-huit ans ; Tout enfant privé de liberté soit traité avec humanité et avec le respect dû à la dignité de la personne humaine, et d'une manière tenant compte des besoins des personnes de son âge. En particulier, tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que l'on estime préférable de ne pas le faire dans l'intérêt supérieur de l'enfant, et il a le droit de rester en contact avec sa famille par la correspondance et par les visites, sauf circonstances exceptionnelles ».Cette exigence est accentuée par l'article suivant .Ainsi les Etats parties reconnaissent à tout enfant suspecté, accusé ou convaincu d'infraction à la loi pénale le droit à un traitement qui soit de nature à favoriser son sens de la dignité et de la valeur personnelle, qui renforce son respect pour les droits de l'homme et les libertés fondamentales d'autrui, et qui tienne compte de son âge ainsi que de la nécessité de faciliter sa réintégration dans la société et de lui faire assumer un rôle constructif au sein de celle-ci . Plus d'un million d'enfants sont privés de liberté dans les commissariats, en garde à vue, dans les centres de détention et en prison.  Dans de nombreux pays le système de justice pour les mineurs, au cas où il existe, est extrêmement rudimentaire.  Le système de justice pénal dans beaucoup de pays est un système en dysfonctionnement Ainsi en Europe pour la chambre d'instruction de la cour d'Appel de Nancy le 1er mars 2007 «  la personne détenue est, du fait de la privation de sa liberté d'aller et de venir, incontestablement en situation de vulnérabilité, au point que des droits spécifiques ont été édictés en sa faveur par le législateur pour compenser son état d'infériorité et ne doivent pas portés atteinte a sa dignité »41(*) .

2 - Convention internationale relative aux droits de la femme

Le milieu carcéral reste principalement adapté aux détenus hommes et les problèmes spécifiques des femmes, qui constituent une part limitée, mais croissante, de leur population, restent souvent ignorés(Les femmes représentent environ 4,5 à 5 % de la population carcérale européenne cette proportion allant de 2,9 % en Pologne à 7,8 % en Espagne)42(*).Toute personne incarcérée doit être traitée dans le respect des droits de l'homme et que les conditions de détention doivent être conformes aux principes de dignité de la personne humaine. Aussi les besoins et situations spécifiques des femmes incarcérées doivent être pris en compte dans les décisions judiciaires, dans les législations pénales et par les institutions pénitentiaires des états. Etudier le cadre de protection de la femme est d'une dimension sans commune mesure car l'on sait aujourd'hui qu'une forte proportion des femmes détenues ont été victimes d'actes de violences, d'abus sexuels ou de maltraitance dans le cadre de leur famille ou de leur couple et que beaucoup d'entre elles se trouvent en situation de dépendance économique et psychologique; que tous ces éléments ont un lien direct avec leur passé délictueux et la présence de séquelles physiques et psychologiques, comme le stress post-traumatique.). Ce qui les place dans une situation de vulnérabilité et dans un état permanent d'incertitude et de stress. Ce qui pousse à prévoir des conditions spéciales de détention pour les femmes mais aussi la nécessité pour le système judiciaire de veiller au respect des droits de l'enfant lorsque l'on envisage les questions liées à la détention de la mère .C'est aussi la raison fondamentale qui pousse à recommander que les peines de substitution à l'emprisonnement soient davantage privilégiées, telles que des alternatives ancrées dans la société , en particulier pour les mères, dès lors que la peine encourue et le risque pour la sécurité publique sont faibles, dans la mesure où leur incarcération peut entraîner de graves perturbations dans la vie familiale. Autre particularité, le code de procédure pénale prévoit que la garde des femmes est assurée exclusivement par un personnel féminin. Les personnels de sexe masculin doivent être dûment autorisés par le directeur ou la directrice de l'établissement, pour se rendre dans un quartier femmes.

Il faut donc nécessairement concevoir des conditions de vie adaptées à leurs besoins dans des unités totalement indépendantes et aussi éloignées que possible du milieu carcéral ordinaire43(*).Pour le CE (17 décembre 2008, O.I.P.), « eu égard à la vulnérabilité des détenus et à leur situation d'entière dépendance vis-à-vis de l'administration, il (...) appartient (à celle-ci) de prendre les mesures propres pour protéger leur vie ». Ainsi l'intégrité physique d'une personne privée de sa liberté doit bénéficier d'une garantie absolue, en raison de son état d'infériorité. La femme se trouve donc être dans cet état. La décision Tomasi est évocatrice en ce qui concerne les personnes vulnérables44(*).

B- LES NORMES INTERNATIONALES SPECIFIQUES AUX TRAITEMENTS DES DETENUS

« Toute personne soumise à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine45(*) ». Pour garantir ce droit, des règles provenant de sources diverses ont été édictées afin de protéger au maximum la dignité du détenu.

- Les conventions contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 Décembre 1984 :

Il s'agit d'un droit essentiel au respect de la dignité humaine. L'article 3 de la convention européenne, l'article 7 du pacte et l'article 5 de la convention américaine (sous l'intitulé «  droit à l'intégrité de la personne ») convergent sur ce point conformément au désir de l'organisation mondiale qui est d'assurer le développement des droits de l'homme. La perspective dynamique que comporte cet objectif a d'abord conduit à l'adoption, d'une convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Mais la torture au sens de la convention des Nations Unies de 1984 a fait son entrée dans le code pénal le 28 Aout 1996 en vertu de la loi n° 96-15 qui y a inséré un nouvel article  295-1 qui se trouve dans la section consacrée aux « blessures et coups volontaires, non qualifiées meurtres, et autres crimes et délits volontaires ». Pour ce qui est des traitements cruels, inhumains et dégradants, il faut remarquer que l'article 295-1 du code pénal n'incrimine que la torture et ne fait aucune référence aux traitements. Toutefois certaines dispositions du code peuvent servir de base à l'incrimination et à la répression de ces traitements46(*). Ainsi constituent des actes de torture, des blessures, coups, violences physiques ou mentales ou autres voies de fait volontairement exerces par un agent de la fonction publique ou par toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec consentement formulé ou tacite, soit dans le but d'obtenir des renseignements ou des aveux, de faire subir des représailles ou de procéder à des actes d'intimidation, soit dans le but de discrimination quelconque47(*). La convention s'inscrit donc dans une perspective d'enrichissement de la protection conférée à certains droits de l'homme par les instruments internationaux. Elle met à la charge des Etats parties des obligations négatives (empêcher la perpétration d'actes de torture sur leur territoire et ce, quelles que soient les circonstances) et des obligations positives (incriminer les actes de torture, se mettre en mesure d'en juger les auteurs, assure une formation appropriée des personnels en charge des détenus pour rendre impossible l'usage de la torture.

-Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du 26 novembre 1987 :

La prohibition de la torture résultant déjà de l'article 4 de la convention européenne a institué un comité européen pour la prévention de la torture et autorise à visiter tout lieu ou des personnes sont privées de liberté. Si la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ne mentionne pas explicitement le principe de dignité, la Cour européenne des droits de l'homme a eu depuis longtemps l'occasion de préciser que « le respect de la dignité et de la liberté humaines est l'essence même des objectifs fondamentaux de la Convention »48(*) et que « les droits de l'homme constituent un système intégré visant à protéger la dignité de l'être humain ». A ce titre, le contentieux de l'article 3 de la Convention, qui prohibe de manière absolue la torture et les traitements inhumains ou dégradants constituent un élément essentiel de promotion du principe de dignité.

A cette convention s'ajoute les Règles Pénitentiaires Européennes (RPE) adoptées pour la première fois en 1973, révisées en 1987, puis en 2006, les règles pénitentiaires européennes visent à harmoniser les politiques pénitentiaires des 46 États membres du Conseil de l'Europe signataires et à faire adopter des pratiques et des normes communes. Elles s'inscrivent dans une logique de réalisme qui est autant le fruit de l'expérience acquise que le gage de véritables avancées futures49(*). Elles ont été rédigées par le Comité européen de coopération pénologique en lien avec les États membres; la France y a pris une part active. Elles tiennent compte des RPE antérieures, des normes de traitement des détenus établies par le Comité européen de la torture et des peines ou traitements inhumains et dégradants (CPT) et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). En effet avec la Recommandation n° R (87) 3 contenant les Règles pénitentiaires européennes, on apprend que les conditions de la détention doivent être respectueuses de la dignité humaine et selon la Règle n° 72.1 de la version de 2006, on sait que « Les prisons doivent être gérées dans un cadre éthique soulignant l'obligation de traiter tous les détenus avec humanité et de respecter la dignité inhérente à tout être humain »50(*). De même l'article 1er de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne adoptée à Nice le 7 décembre 2000 proclame le caractère « inviolable » de la dignité51(*) . Son article 3 pose que «  tout détenu a le droit d'être logé dans des locaux qui répondent à toutes les exigences sanitaires, compte dûment tenu du climat, notamment en ce qui concerne le cubage d'air, la surface minimale, l'éclairage, le chauffage et la ventilation ». Le droit à une alimentation décente et le droit aux soins de santé et aux soins médicaux sont affirmes par les dispositions 4 et 5.

 


-Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus :

Pour assurer la protection des personnes soumises a la détention ou a l'emprisonnement, les Nations unies ont élaboré un « ensemble de règles minima pour le traitement des détenus ». Adopté par le premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, tenu à Genève en 1955 et approuvé par le Conseil économique et social dans ses résolutions 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957  et 2076 (LXII) du 13 mai 1977 . C'est le document le plus connu, le plus exhaustif et le plus diffusé à l'échelle internationale qui régit les conditions de détention et le traitement des détenus dans le monde. Comme les renseignements qu'il contient sur le traitement des détenus sont plus détaillés que ce qu'on trouve généralement dans les conventions et les pactes internationaux, ces règles types sont devenues une référence de première importance en ce qui concerne la notion de traitement humain en milieu carcéral. Bien que l'Ensemble de règles minima n'ait pas force de loi en matière de protection des droits humains, les tribunaux nationaux et internationaux ainsi que les organismes non gouvernementaux de protection des droits de la personne s'y réfèrent pour éclairer l'interprétation des critères et des normes ayant force exécutoire dans ce domaine, comme le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.. Trois principes fondamentaux propres aux droits de la personne se dégagent clairement de l'ensemble des 95 articles que comprend l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus. Premièrement, il faut respecter la dignité du détenu et sa valeur en tant qu'être humain pendant toute la durée de son incarcération. Deuxièmement, la peine inhérente à la perte de la liberté du fait de l'incarcération est un châtiment suffisant. Enfin, les pénitenciers ne doivent pas être des lieux où l'on punit les détenus, mais plutôt où on les aide à se réadapter. Ainsi le droit universel et les politiques correctionnelles tiennent compte de ces règles fondamentales établies par les Nations Unies : des locaux convenablement chauffés, aérés et nettoyés, une alimentation saine, des vêtements et de la literie lavés régulièrement, de l'exercice régulier, l'accès à des services médicaux de même qualité que ceux dont dispose le grand public, l'accès à des livres et du matériel éducatif, des conditions spéciales pour les détenues enceintes, leur accouchement et le soin de leur enfant, l'interdiction des châtiments corporels.

-Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement :


Adopté par l'Assemblée générale dans sa résolution 43/173 du 9 décembre 1988. Ses principes sont assez expressifs et témoignent de l'intérêt de l'organisation des nations unies à élever la dignité au sommet de toute valeur. Le principe 6 réaffirme qu'aucune personne soumise à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement ne sera soumise à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Aucune circonstance quelle qu'elle soit ne peut être invoquée pour justifier la torture ou toute autre peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant. L'expression "peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant" doit être interprétée de façon à assurer une protection aussi large que possible contre tous sévices, qu'ils aient un caractère physique ou mental, y compris le fait de soumettre une personne détenue ou emprisonnée à des conditions qui la privent temporairement ou en permanence de l'usage de l'un quelconque de ses sens, tels que la vue ou l'ouïe, ou de la conscience du lieu où elle se trouve et du passage du temps. Le fait que beaucoup de pays, y compris le Sénégal, ont intégré ces principes et ces règles au cadre législatif de leur système correctionnel démontre bien qu'ils sont aujourd'hui considérés comme un élément essentiel des droits de la personne à l'échelle internationale et dans ces pays. Pourtant, bien des années après leur adoption, certaines de ces règles ne sont pas encore totalement appliquées et restent un défi pour les autorités correctionnelles. L'ensemble de ces règles au nombre de 39 sont corrélatifs aux traitements des détenus.

A cela il ne faut également pas occulter les principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus adoptés par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/111 du 14 décembre 1990 car tous les détenus sont traités avec le respect dû à la dignité et à la valeur inhérentes à l'être humain52(*).Ils sont au nombre de 10 mais demeurent la toile de fond de toute politique qui prêtent respecter la dignité de la personne. Toutefois le droit interne Sénégalais n'est pas resté de marbre.

SECTION 2 : LES INSTRUMENTS JURIDIQUES INTERNES RELATIFS A LA DETENTION

S'il est vrai que beaucoup de textes sont applicables au Sénégal par le truchement de l'article 79 de la Constitution sénégalaise de 1963 qui dispose que « les traites ou accords régulièrement ratifies ou approuves ont, des leur publication, une autorité supérieure à celle des lois », il est un fait vraisemblable qu'aussi bien la constitution que la législation pénale traitent des conditions de détention notamment dans le cadre du respect de la dignité (PARAGRAPHE 1). Le service public pénitentiaire participe à l'exécution des décisions pénales. Il contribue à l'insertion ou à la réinsertion des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire, à la prévention de la récidive et à la sécurité publique dans le respect des intérêts de la société, des droits des victimes et des droits des personnes détenues. Il est donc opportun d'appréhender les normes juridiques régissant l'administration pénitentiaire (PARAGRAPHE 2).

PARAGRAPHE 1 : DES NORMES CONSTITUTIONNELLES A LA LEGISLATION PENALE

La constitution qui est, il faut le préciser au sommet de l'architecture pyramidale des normes suivant la théorie de Hans Kelsen, réaffirme son attachement aux principes des déclarations et des conventions relativement à la prise en considération de la dignité mais aussi celles qui sont distinctifs aux détenus(A). Le législateur sénégalais est aussi passé par là avec l'adoption d'un code pénal d'un genre nouveau pour se départir de la loi coloniale applicable au Sénégal mais aussi pour mieux répondre aux exigences sociales(B).

A- LES NORMES CONSTITUTIONNELLES

Qu'il s'agisse des grandes religions ou des principaux courants philosophiques, ils ont en commun un effort pour détacher l'être humain de sa condition première, une lente progression vers l'hominisation. Et l'apparition très récente de concepts juridiques comme la dignité de la personne témoigne d'un processus encore inachevé mais en progrès. André Boissarie nous enseigne que les « les souverainetés nationales ont pour limite naturelle la sphère d'application des droits de l'homme ». Il n'est donc pas permis de porter atteinte à cette dignité. Les principes fondateurs de la dignité plongent leurs racines dans un certain nombre de textes dont l'élaboration et l'd'option ont constitué les moments les plus significatifs dans l'histoire des conquêtes de l'humanité pour une égale dignité pour tous les êtres humains sans distinction aucune53(*) . Le Sénégal l'a compris, sa Constitution a fait l'objet de plusieurs révisons successives qui ont un rapport direct avec l'évolution politique, institutionnelle et judiciaire. La dernière charte suprême en date a été adoptée le 7 janvier 2001 par référendum. L `article 7 pose la sacralité de la personne humaine, son inviolabilité et la protection de son intégrité corporelle. Le respect de la dignité du détenu doit faire l'objet d'une vigilance constante de la part de chaque individu. La détention en réalité n'efface pas tous les droits des détenus. Ainsi tout individu a droit au respect de la dignité inhérente a la personne humaine54(*) et toute sortes d'exploitations et d'avilissement de l'homme notamment la torture physique ou morale, et les peine ou les traitements cruels , inhumains ou dégradants sont interdites55(*) .Ainsi le régime pénitentiaire comporte en effet un traitement des condamnes dont le but essentiel est leur amendement et leur reclassement social.

B- LA LEGISLATION PENALE

Durant les années écoulées, les autorités sénégalaises ont pris un certains nombre de mesures positives pour rendre effectifs le respect des droits de l'homme dans des domaines ou elles ont essuyées diverses critiques. Cependant dés le début le Sénégal consacre la nécessité de promouvoir le respect de la dignité humaine lors de la détention. La loi n°65-61 du 21 Juillet 1965 portant code de procédure pénal traduit cette exigence. C'est ainsi que l'incarcération doit être subie dans des conditions satisfaisantes d'hygiène et de salubrité, tant en ce qui concerne l'aménagement et l'entretien des bâtiments, le fonctionnement des services économiques et l'organisation du travail, que l'application des règles de propreté individuelle et la pratique des exercice physiques. De telles énonciations permettent de mettre en exergue un aspect fondamental du droit interne qui est le soucis de sauvegarder les droits de l'homme et partant de la dignité qui en est le fondement. Mieux encore l'assemblée nationale saisie par un projet de loi du gouvernement relative à la pratique de la torture a, en sa séance du Vendredi 9 Aout 1996, délibéré et adopté la loi dont la teneur suit : « constituent des tortures, les blessures, coups, violences physiques ou mentales ou autres voies de fait volontairement exercés par un agent de la fonction physique ou par toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec consentement exprès ou tacite , soit dans le but d'obtenir des renseignements ou des aveux, de faire subir des représailles ou de procéder à des actes d'intimidation , soit dans le but de discrimination quelconque ...Aucune circonstance exceptionnelle quelle qu'elle soit ,d'instabilité politique intérieure de tout acte d'exception ne pourra être invoque pour justifier la torture». Il s'agit la de l'article 295-1 du code pénal promulgué le 28 Aout 1996 par le biais de la loi n°96-15 du 28 Aout 1996. En se conformant à la convention contre la torture, par l'incorporation dans son arsenal législatif de ces dispositions, l'Etat vient d'effectuer une avancée dans la lutte pour le respect de la dignité par l'interdit d'actes « odieux56(*) ».

PARAGRAPHE 2 : LES NORMES JURIDIQUES REGISSANT LES ETABLISSEMENTS PENITENTIAIRES

L'administration pénitentiaire désigne l'ensemble des moyens matériels et humains constituant un service public destiné à assurer l'exécution des condamnations pénales, dans un but d'individualisation de la peine et dans le respect de la sécurité publique. L'administration pénitentiaire possède deux missions principales :

Mettre en oeuvre l'exécution des condamnations pénales par la prise en charge des personnes placées sous main de justice, qu'elles soient incarcérées en milieu fermé ou simplement suivies en milieu ouvert. Dans l'exécution de cette mission, l'administration pénitentiaire est chargée de garantir la sécurité publique en assurant la surveillance des personnes détenues, favoriser l'individualisation des peines et la réinsertion sociale, dans un but de prévention de la récidive.

L'administration pénitentiaire organise et participe à de nombreux dispositifs d'insertion proposés aux condamnés en partenariat avec d'autres acteurs publics ou associatifs, afin de préparer ou d'accompagner la fin de la peine. Au Sénégal les établissements pénitentiaires pour assurer leur mission se fondent sur une certaine organisation(A) reposant sur un fonctionnement prédéfini(B)

.

A- L'ORGANISATION DES ETABLISSEMENTS PENITENTIAIRES 

Alors que la population carcérale était et reste constituée de meurtriers, d'assassins, d'empoisonneurs, d'escrocs, d'auteurs d'homicides involontaires, de vols simples et qualifiés... autrefois dominée par l'aristocratie des braqueurs et du grand banditisme autour d'un caïdat structurant, la prison accueille désormais une population de détenus, prévenus et condamnés, constituée pour sa plus grande part de délinquants sexuels, de malades relevant de la psychiatrie et d'auteurs d'infractions à la législation sur les stupéfiants : les malades mentaux et les toxicomanes représentent désormais, comme à l'étranger, les trois composantes essentielles de la population des prisons sénégalaises.

Le régime des établissements pénitentiaires et les conditions de détention sont définis par le décret n° 66-1081 du 31 Décembre 1966 portant organisation et régime des établissements pénitentiaires (modifié et complété par les décrets n° 68-583 du 28 mai 1968 et n° 86-1466 du 28 novembre 1986). Le Sénégal compte trente huit (38) Etablissements Pénitentiaires dont un (01) non fonctionnel. 

Il existe trois (03) catégories d'Etablissements Pénitentiaires au Sénégal :

 - Maison d'Arrêt : 02

Elle accueille les inculpés, prévenus et accusés soumis à la détention provisoire, ainsi que les condamnés à l'emprisonnement de police et les contraignables qui sont détenus dans des quartiers distincts. 

- Maison de Correction : 01

Elle accueille les condamnés à l'emprisonnement correctionnel d'une durée égale ou inférieure à un (01) an après le moment où la condamnation est devenue définitive.

 - Camp Pénal : 03 dont un (l'ex- Centre Pénitentiaire de Kédougou) non fonctionnel pour des raisons techniques :

Ils reçoivent les condamnés aux travaux forcés, à la détention criminelle et les condamnés à l'emprisonnement auxquels il reste à subir une peine d'une durée supérieure à un an ou plusieurs peines dont le total est supérieur à un an après condamnation définitive.

- Maison d'Arrêt et de Correction : 32

Un même établissement peut servir à la fois de Maison d'Arrêt et de Maison de Correction.

  Des annexes aux Maisons d'Arrêt servant de Maisons de Correction peuvent être créées par arrêté du Ministre chargé de l'Administration Pénitentiaire.

 

Il est prévu des Etablissements Pénitentiaires susceptibles de dispenser un enseignement scolaire ou professionnel pour les condamnés dont la peine doit expirer avant qu'ils aient atteint l'âge de 28 ans (prisons écoles) et des locaux pénitentiaires appropriés des formations sanitaires du lieu de détention où sont hospitalisés les séniles ou inaptes au travail, les malades et les psychopathes (hospices).

 

Les mineurs, les femmes, les militaires et les détenus politiques sont affectés dans des quartiers distincts de la Maison d'Arrêt ou de la Maison de Correction.

Les Inspections Régionales au nombre de 6 ont été créées en s'inspirant de l'organisation administrative, de l'organisation judiciaire, des zones militaires, des légions de Gendarmerie. Ces Inspections Régionales ont conduit logiquement à une nouvelle classification des Etablissements Pénitentiaires basée sur la capacité d'accueil, le plafond budgétaire alloué et à la spécificité des établissements. Ainsi on distingue les établissements hors classe : (08) les établissements de première classe : (16) et les établissements de deuxième classe : (13).

B- LE FONCTIONNEMENT DES ETABLISSEMENTS PENITENTIAIRES

Les détenus ont le droit d'être placés dans des établissements ou quartiers d'établissement distincts, en tenant compte de leur sexe, de leur âge, de leurs antécédents, des motifs de leur détention et des exigences de leur traitement57(*). Ainsi les hommes et les femmes doivent être détenus dans la mesure du possible dans des établissements différents. Dans un établissement recevant à la fois des hommes et des femmes, l'ensemble des locaux destinés aux femmes doit être entièrement séparé; les détenus en prévention doivent être séparés des condamnés; les personnes emprisonnées pour dettes ou condamnées à une autre forme d'emprisonnement civil doivent être séparées des détenus pour infraction pénale. Les jeunes détenus doivent être séparés des adultes. Les cellules ou chambres destinées à l'isolement nocturne ne doivent être occupées que par un seul détenu. Si pour des raisons spéciales, telles qu'un encombrement temporaire, il devient nécessaire pour l'administration pénitentiaire centrale de faire des exceptions à cette règle, on devra éviter de loger deux détenus par cellule ou chambre individuelle. Lorsqu'on a recourt à des dortoirs, ceux-ci doivent être occupés par des détenus soigneusement sélectionnés et reconnus aptes à être logés dans ces conditions. La nuit, ils seront soumis à une surveillance régulière, adaptée au type d'établissement considéré. Il faut disposer, dans la mesure du possible, d'établissements séparés ou de quartiers distincts d'un établissement pour le traitement des différents groupes de détenus.

Les condamnés dont la peine doit expirer avant qu'ils aient atteint l'âge de vingt-huit ans peuvent être détenus dans des établissements pénitentiaires susceptibles de dispenser un enseignement scolaire ou professionnel. Les condamnés séniles ou inaptes au travail, les condamnés malades et les psychopathes sont hospitalisés dans les locaux pénitentiaires appropriés des formations sanitaires du lieu de leur détention .L `article 691 précise aussi que les condamnés sont soumis dans les maisons de correction à l'emprisonnement individuel de jour et de nuit et, dans les camps pénaux, à l'isolement de nuit seulement, après avoir subi éventuellement une période d'observation en cellule.

CHAPITRE DEUXIEME : UNE AMELIORATION LEGISLATIVE CONSTANTE DU STATUT JURIDIQUE DES DETENUS

En détention, les personnes incarcérées bénéficient d'un statut, impliquant des droits et des devoirs, qui encadre leur vie quotidienne et permet la sanction disciplinaire des comportements répréhensibles. La vie quotidienne en détention diffère en fonction de l'établissement et du type de détenu (prévenu en détention provisoire ou condamné). Les établissements pénitentiaires disposent d'un règlement intérieur qui détaille pour ainsi dire l'encadrement juridique lié aux conditions de vie des détenus (SECTION 1). Pendant longtemps, le reflexe naturel de la société a été guidé par la volonté d'enfermement du délinquant qui doit subir une punition exemplaire et dissuasive58(*) . Mais elle n'avait pas pris en compte les conséquences liées à l'emprisonnement qui a rarement réussi la préparation du détenu à la vie sociale. Le moment était donc venu pur le législateur sénégalais, d'entreprendre une courageuse et nécessaire réforme du système carcéral pour l'adapter aux normes internationales fixées par les conventions internationales auxquelles le Sénégal est partie. Le décret n°2001-362 du 4 mai 2001 relatif aux procédures d'exécution et d'aménagement des sanctions pénales a joué un rôle majeur dans l'encadrement juridique lié au renforcement de l'exigence de la peine (SECTION 2).

SECTION 1 : L'ENCADREMENT JURIDIQUE LIE AUX CONDITIONS DE VIE DES DETENUS

Parler de l'encadrement juridique lié aux conditions de vie des détenus, c'est aller directement à l'essentiel en étudiant toutes les règles dégagées par les dispositions de l'arrêté ministériel n°7117M .INT.D.A.P du 21 mai 1987 portant règlement intérieur des établissements pénitentiaires, qui traduisent a la fois les droits et les devoirs des détenus, d'ou la question de son statu juridique. Et cette réglementation est effectivement élaborée dans le souci du respect de la dignité des incarcérés. Il en va ainsi de la gestion de leur bien et de leur entretien qui doivent être notés (PARAGRAPHE 1) sans omettre le travail et la discipline qui doivent répondre aux exigences de la dignité (PARAGRAPHE 2).

PARAGRAPHE 1 : LA GESTION DES BIENS ET L'ENTRETIEN DES DETENUS

L'arrêté ministériel n°7117M .INT.D.A.P du 21 mai 1987 portant règlement intérieur des établissements pénitentiaires tout en déterminant le cadre général des droits et devoirs des prisonniers donne également aux directeurs des établissements pénitentiaires la possibilité d'édicter leurs propres règlements intérieurs pour adapter les prisons aux utilités du moment. Si le régime alimentaire, l'achat, le pécule et l'habillement y sont importants(A), l'hygiène et la santé des détenus ne peuvent être occultées.

A- LE REGIME ALIMENTAIRE, L'ACHAT, LE PECULE ET L'HABILLEMENT

Aux termes de l'article 147, la composition du régime alimentaire des détenus est fixée par le Ministre chargé de l'Administration pénitentiaire. Ce régime comporte trois distributions journalières59(*) . Le règlement intérieur de la maison d'arrêt et de correction de Saint louis nous renseigne à bien des égards. En effet la cuisson des repas est assurée par les détenus. Le régime alimentaire, le menu et la quantité d'aliments destinés à l'entretien des détenus sont déterminés par arrêté du Ministre chargé de l'administration pénitentiaire. Le menu peut être amélioré par le Directeur de prison grâce au produit résultant du jardin potager crée à cet effet60(*). En outre, le détenu a la faculté de renoncer au repas de l'établissement et de faire venir de l'extérieur des aliments nécessaires à sa nourriture à condition que ces aliments puissent être consommés sans cuisson nouvelle. Le droit international va encore plus loin : «  Tout détenu a le droit à une alimentation ayant une valeur nutritive suffisante au maintien de sa santé et de ses forces, de bonne qualité, bien préparée et servie aux heures usuelles. Chaque détenu doit avoir la possibilité de se pourvoir d'eau potable lorsqu'il en a besoin 61(*)»). De même la règle 20 de l'ensemble de règles minima pour le traitement des détenus informe que tous les détenus doivent recevoir de l'administration aux heures usuelles une alimentation de bonne qualité, bien préparée et servie, ayant une valeur nutritive suffisant au maintien de sa santé et de ses forces.

Concernant l'achat et le pécule, l'article 148 souligne qu'à  moins d'en être privés par mesure disciplinaire, les détenus ont la possibilité d'acheter, sur leur pécule disponible divers objets ou denrées en supplément de ceux qui leur sont octroyés, selon les modalités prévues par le règlement intérieur. Le détenu conserve la gestion de ses biens patrimoniaux extérieure dans la limite de sa capacité civile. Toutefois, cette gestion ne peut s'effectuer que par mandataire, celui-ci devant être étranger à l'administration pénitentiaire L'article 146 précise que « Si le détenu meurt en prison avant l'expiration de sa peine, ses héritiers ont droit à son pécule, sous déduction éventuelle des sommes dues pour amendes, restitution ou frais de justice »e. Une fiche de pécule est ouverte pour chaque détenu et retrace toutes les opérations effectuées pendant la durée de la détention de son titulaire. Le détenu a la possibilité d'acheter avec son pécule disponible, divers objets ou denrées qui sont vendus à la cantine de l'établissement. Elle est alimentée par les sommes dont le détenu serait porteur lors de son incarcération, et par toutes celles qu'il reçoit de l'extérieur ou qu'il perçoit comme rémunération de son travail62(*). Le détenu est informé de la situation de son pécule par la communication de ses fiches. Il doit émarger et présenter ses réclamations éventuellement. Aussi le détenu condamné peut être employé à des corvées à l'extérieur de la prison au profit d'autres services. Ce travail lui donne droit à une rémunération qui obéit à une certaine règle de comptabilité :

La moitié (1/2) est versée au pécule disponible,

Le quart (1/4) est versé au pécule de garantie,

Et l'autre quart (1/4) au pécule de réserve.63(*)

L'habillement fait aussi l'objet de mesures particulières comme le dénote ainsi l'article 149 : « le règlement intérieur édicté par le Ministre chargé de l'Administration pénitentiaire fixe notamment l'habillement ...) ». Les vêtements et sous-vêtements laissés ou fourni au détenu, doivent être propres et maintenus en bon état par ces derniers. Ils disposent pour ce faire de temps libre les dimanches et jours fériés. Le port de vêtement doit être correct64(*). Mais l'ensemble de règles minima pour le traitement des détenus demeure plus expressif dés lors que la règle 17 enseigne que tout détenu qui n'est pas autorisé à porter ses vêtements personnels doit recevoir un trousseau qui soit approprié au climat et suffisant pour le maintenir en bonne santé. Ces vêtements ne doivent en aucune manière être dégradants ou humiliants. Tous les vêtements doivent être propres et maintenus en bon état. Les sous-vêtements doivent être changés et lavés aussi fréquemment qu'il est nécessaire pour le maintien de l'hygiène. Dans des circonstances exceptionnelles, quand le détenu s'éloigne de l'établissement à des fins autorisées, il doit lui être permis de porter ses vêtements personnels ou des vêtements n'attirant pas l'attention. Lorsque les détenus sont autorisés à porter leurs vêtements personnels, des dispositions doivent être prises au moment de l'admission à l'établissement pour assurer que ceux-ci soient propres et utilisables. Chaque détenu doit disposer, en conformité des usages locaux ou nationaux, d'un lit individuel et d'une literie individuelle suffisante, entretenue convenablement et renouvelée de façon à en assurer la propreté.

B- L'HYGIENE ET LA SANTE DES DETENUS

Il s'agit la de droits essentiels qui impliquent le respect de la dignité des détenus. L'article 149 de l'arrêté y montre les grandes lignes. Car le respect des droits fondamentaux passe par la garantie de la dignité du détenu. On doit exiger des détenus la propreté personnelle; à cet effet, ils doivent disposer d'eau et des articles de toilette nécessaires à leur santé et à leur propreté. Afin de permettre aux détenus de se présenter de façon convenable et de conserver le respect d'eux-mêmes, des facilités doivent être prévues pour le bon entretien de la chevelure et de la barbe; les hommes doivent pouvoir se raser régulièrement. Or l'article 21 du règlement intérieur de la prison de saint louis dispose : «  La propreté corporelle est exigée de tous les détenus. Ils doivent faire leur toilette à chaque réveil et se laver au moins une fois dans la journée. Des produits de première nécessité sont distribués périodiquement. L'entretien et la coupe des cheveux pour les hommes sont obligatoires. Pour les femmes, l'entretien et les tresses sans mèches des cheveux sont également obligatoires». De plus « il est alloué aux détenus une ration de savon par semaine. Des produits d'hygiène et d'entretien leur sont également distribués ».

Chaque établissement pénitentiaire doit disposer au moins des services d'un médecin qualifié, qui devrait avoir des connaissances en psychiatrie. Les services médicaux devraient être organisés en relation étroite avec l'administration générale du service de santé de la communauté ou de la nation. Ils doivent comprendre un service psychiatrique pour le diagnostic et, s'il y a lieu, le traitement des cas d'anomalie mentale.

A son arrivée dans l'établissement, le détenu est soumis autant que faire se peut à un examen médical destiné à déceler toute affection de nature contagieuse ou évolutive. Les principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus énoncent que «  les détenus ont accès aux services de santé existant dans le pays, sans discrimination aucune du fait de leur statut juridique ». Le détenu peut à tout moment demander assistance auprès du service médical de la prison pour recevoir des soins médicaux adéquats. L'admission à l'infirmerie de l'établissement est décidée par l'Infirmier Major. L'hospitalisation relève du Médecin traitant. Il faut aussi noter que le détenu malade bénéficie gratuitement des soins qui lui sont nécessaires ainsi que de la fourniture des produits pharmaceutiques dûment ordonnés par le médecin traitant. La gratuité des soins s'étend à tous examens ou traitements de spécialistes que requiert l'état de santé des détenus à l'exception des prothèses et des verres de correction65(*). Néanmoins a l'exception des expertises ordonnées par l'autorité judiciaire, les détenus ne peuvent même à leur frais, être examinés ou hospitalisés dans un établissement privé). Les règles minima précisent par ailleurs à propos des malades qui ont besoin de soins spéciaux, qu'il faut prévoir le transfert vers des établissements pénitentiaires spécialisés ou vers des hôpitaux civils. Lorsque le traitement hospitalier est organisé dans l'établissement, celui-ci doit être pourvu d'un matériel, d'un outillage et des produits pharmaceutiques permettant de donner les soins et le traitement convenables aux détenus malades, et le personnel doit avoir une formation professionnelle suffisante. Tout détenu doit pouvoir bénéficier des soins d'un dentiste qualifié. Somme toute, le médecin est chargé de surveiller la santé physique et mentale des détenus. Il devrait voir chaque jour tous les détenus malades, tous ceux qui se plaignent d'être malades, et tous ceux sur lesquels son attention est particulièrement attirée.

Le médecin doit présenter un rapport au directeur chaque fois qu'il estime que la santé physique ou mentale d'un détenu a été ou sera affectée par la prolongation ou par une modalité quelconque de la détention66(*).

PARAGRAPHE 2 : LE TRAVAIL ET LA DISCIPLINE EN MILIEU CARCERAL

L'exigence de réinsertion, et à travers elle la prévention de la récidive, est au coeur des missions confiées à l'administration pénitentiaire. Elle dispose pour ce faire de moyens certes limités mais relativement diversifiés : elle favorise tout d'abord le travail, afin de ne pas faire coïncider l'incarcération avec une période d'inactivité(A). Aussi les établissements pénitentiaires disposent d'un règlement intérieur qui détaille les fautes disciplinaires (refus de réintégrer sa cellule, possession d'objet interdit, violence, etc....). En cas de commission d'une faute, les détenus comparaissent, devant une commission de discipline qui peut prononcer des sanctions, dont les plus graves consistent en un placement à l'isolement ou au quartier disciplinaire(B).

A- L'AMENAGEMENT DU TRAVAIL EN DETENTION

Le travail est obligatoire pour tous les condamnés à des peines privatives de liberté pour des faits qualifiés crimes ou délits de droit commun. Il est réglementé par les articles 30 à 65 de l'arrêté. Toutefois la concession ou la cession de la main-d'oeuvre pénale à des particuliers, compagnies ou personnes morales de droit privé, ne peut se faire sans le consentement des détenus intéressés67(*) . Les condamnés de police peuvent demander qu'il leur soit donné du travail. Le travail pénitentiaire ne doit pas avoir un caractère afflictif. Il faut fournir aux détenus un travail productif suffisant pour les occuper pendant la durée normale d'une journée de travail. Ce travail doit être, dans la mesure du possible, de nature à maintenir ou à augmenter leur capacité de gagner honnêtement68(*) . L'organisation et les méthodes de travail pénitentiaire doivent se rapprocher autant que possible de celles qui régissent un travail analogue hors de l'établissement, afin de préparer les détenus aux conditions normales du travail libre. Lorsque les détenus sont utilisés pour des travaux qui ne sont pas contrôlés par l'administration, ils doivent toujours être placés sous la surveillance du personnel pénitentiaire. A moins que le travail soit accompli pour d'autres départements de l'Etat, les personnes auxquelles ce travail est fourni doivent payer à l'administration le salaire normal exigible pour ce travail, en tenant compte toutefois du rendement des détenus. Les précautions prescrites pour protéger la sécurité et la santé des travailleurs libres doivent également être prises dans les établissements pénitentiaires. Des dispositions doivent être prises pour indemniser les détenus pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, à des conditions égales à celles que la loi accorde aux travailleurs libres. Le travail des détenus doit être rémunéré d'une façon équitable et le règlement doit permettre d'utiliser au moins une partie de leur rémunération pour acheter des objets autorisés qui sont destinés à leur usage personnel et d'en envoyer une autre partie à leur famille69(*).

B- LE MAINTIEN DE LA DISCIPLINE

Les détenus doivent obéissance aux fonctionnaires ou agents ayant autorité dans la prison, en tout ce qu'ils leur prescrivent pour l'exécution des règlements (art 100). L'ordre et la discipline doivent être maintenus avec fermeté, mais sans apporter plus de restrictions qu'il n'est nécessaire pour le maintien de la sécurité et d'une vie communautaire bien organisée. Le règlement détermine aussi la conduite qui constitue une infraction disciplinaire; le genre et la durée des sanctions disciplinaires qui peuvent être infligées; l'autorité compétente pour prononcer ces sanctions. Aucun détenu ne peut être puni sans être informé de l'infraction qu'on lui reproche et sans qu'il ait eu l'occasion de présenter sa défense70(*). L'autorité compétente doit procéder à un examen complet du cas. Dans la mesure où cela est nécessaire et réalisable, il faut permettre au détenu de présenter sa défense par l'intermédiaire d'un interprète. Les peines corporelles, la mise au cachot obscur ainsi que toute sanction cruelle, inhumaine ou dégradante doivent être complètement défendues comme sanctions disciplinaires. Les peines de l'isolement et de la réduction de nourriture ne peuvent jamais être infligées sans que le médecin ait examiné le détenu et certifié par écrit que celui-ci est capable de les supporter. Il en est de même pour toutes autres mesures punitives qui risqueraient d'altérer la santé physique ou mentale des détenus. Il est interdit au détenu : tout acte individuel ou collectif de nature à troubler le bon ordre, toute communication clandestine ou en langage conventionnel, toute introduction d'arme, d'instrument dangereux notamment les rasoirs et les couteaux, l'introduction de boissons alcoolisées ou des matières inflammables71(*). Les instruments de contrainte tels que menottes, chaînes, fers et camisoles de force ne doivent jamais être appliqués en tant que sanctions. Les chaînes et les fers ne doivent pas non plus être utilisés en tant que moyens de contrainte. Les autres instruments de contrainte ne peuvent être utilisés que par mesure de précaution contre une évasion pendant un transfèrement, pourvu qu'ils soient enlevés dès que le détenu comparaît devant une autorité judiciaire ou administrative; pour des raisons médicales sur indication du médecin.

SECTION 2 : L'ENCADREMENT JURIDIQUE LIE AUX RENFORCEMENTS DE L'EXECUTION ET A L'AMENAGEMENT DES SANCTIONS PENALES

Mr KATUREEBE, Ministre de la justice d'Ouganda disait au sujet de l'épineux problème de l'incarcération que : Les systèmes pénitentiaires africains sont en crises. « Que peut-on faire ? La construction de nouvelles prisons n'est pas la solution. Il faut plutôt prévoir les peines alternatives qui réduiraient la surpopulation dans les prisons et permettraient l'amélioration des conditions de ceux qui resteraient incarcérés. » Le débat sur la mise en place de nouvelles modes de contrôles des peines et d'aménagement des sanctions pénales a occupé une place non négligeable dans les rencontres internationales. Au Sénégal cette angoisse a été prise en compte par le décret n°2001-362 du 4 mai 2001 relatif aux procédures d'exécution et d'aménagement des sanctions pénales. Il est courant de nos jours que l'opinion souhaite voir les délinquants emprisonnes au moindre délit, ne connaissant pas les effets de l'emprisonnement. Mais les prisons sont loin d'être des endroits idéaux pour la réinsertion. L'une des graves conséquences de cette philosophie est marquée par le fait que l'individu qui sort de prison emporte avec lui sa prison. Celle ci sera toujours un écran entre lui et les membres de la société qui sont portés à lui appliquer des mesures discriminatoires, d'exclusion et de rejet. Ainsi au nouveau cadre de l'aménagement des peines (PARAGRAPHE 2), il faudrait prévoir l'institution de nouveaux organes de contrôle dont l'importance est à démontrée (PARAGRAPHE 1).

PARAGRAPHE 1 : LE CONTROLE DE L'EXECUTION DES PEINES

Les prisons coutent chers. La seule réponse était de reformer notre approche de la punition. Un grand débat a été promu sur les conditions de détention, en encouragent l'intérêt public pour les établissements pénaux et en élaborant des reformes positives des dispositions pénales en générale. Dans cette optique, la reforme a introduit le juge de l'application des peines qui a fait son apparition dans le nouveau système pénal sénégalais(A).De même une commission de surveillance et un comité de suivi en milieu ouvert ont intégré l'appareil judiciaire(B). Cette option novatrice va dans le sens d'une évolution générale favorable à une conception plus volontariste de la dignité.

A- LA MISE EN PLACE D'UN JUGE D'APPLICATION DES PEINES

Le juge d'application des peines est le garant de l'application du droit après le jugement. Toutes les décisions judiciaires après condamnation prévues par le C.P et qui impliquent une restriction totale ou partielle de la liberté lui sont confiées, sous réserve de quelques exceptions prévues par le code. IL est introduit par le biais de la loi n°2001-39 du 29 décembre 2000. L'article 683 bis stipule qu'il est désigné au mois un juge de l'application des peines dans chaque tribunal régional par arrêté du garde des sceaux, Ministre de la justice. Le juge de l'application des peines contrôle l'application des décisions prises par le comité de probation et de surveillance, relative à l'aménagement des peines prononcées par le tribunal régional. Face à l'allongement de la durée des peines prononcées par les tribunaux, notamment en ce qui concerne les affaires de moeurs, à la part plus importante des jeunes et des délinquants sexuels au sein de la population pénale, aux revendications sécuritaires des syndicats des personnels de surveillance, face encore aux abus et violences dont peuvent être victimes les détenus, il importe de réfléchir au sens et à la place du droit en prison. Le juge d'application des peines détient des pouvoirs profusément étendus aussi bien en milieu fermé qu'en milieu ouvert. De la sorte, il a pour mission de surveiller l'exécution des peines et il est compétent pour les modifications de régimes à appliquer au condamné à savoir, la libération conditionnelle, les permissions de sortie, les placements à l'extérieur, les semi-libertés ...Face à l'augmentation des délits, la montée du sentiment d'insécurité fait craindre le pire. L'opinion, pessimiste, s'inquiète : elle demande de renforcer les murs et les grilles, d'allonger les peines et de les rendre incompressibles. En France en vertu de l'article 712-1 alinéa 1er du Code de procédure pénale, le juge de l'application des peines et le tribunal de l'application des peines constituent les juridictions de l'application des peines du premier degré qui sont chargées, dans les conditions prévues par la loi, de « fixer les principales modalités de l'exécution des peines privatives de liberté ou de certaines peines restrictives de liberté, en orientant et en contrôlant les conditions de leur application.

B- LA COMMISSION DE SURVEILLANCE ET LE COMITE DE SUIVI EN MILIEU OUVERT

Les établissements pénitentiaires font l'objet de contrôles de la part des autorités judiciaires, conformément aux dispositions de l'article 697, alinéa 1er, du CPP et de contrôle de l'autorité administrative. La commission de surveillance est instituée auprès de chaque établissement pénitentiaire. Sa mission est essentielle dans la protection du respect des droits des détenus et est aussi garant de sa dignité. Elle inspecte la prison, surveille tout ce qui concerne la salubrité, l'alimentation, la discipline, le travail, assure le service de santé et la réforme morale des détenus, la tenue des registres réglementaires, la conduite des agents de la prison. En plus de sa compétence et ses attributions, un décret fixe les conditions dans lesquelles certaines personnes peuvent être admises à visiter les détenus 72(*).Elle assiste le juge d'application des peines dans l'application des mesures de contrôle et dans la supervision du respect des obligations imposées aux condamnés à l'emprisonnement avec sursis probationnaire, à l'ajournement avec probation, au travail au bénéfice de la société, aux libéré conditionnels, aux semis libres. Elle assiste aussi le JAP dans la préparation de la réinsertion professionnelle ou social du condamné.

La loi n°2000-39 du 29 décembre 2001 a prévu en son article 683, un comité de suivi en milieu ouvert institué à-côté de chaque tribunal régional. Il joue un rôle fortement lié à celui effectué par les aux autres organes. Le JAP est membre de la commission de surveillance et est le chef du service du comité.

En France, la loi du 30 octobre 2007 instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté permet à la France de répondre aux exigences du protocole facultatif à la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants signé par la France. Le protocole préconise l'instauration d'un mécanisme national de visites régulières dans tous les lieux où des personnes sont privées de liberté sur décision de l'autorité publique. Il prévoit la mise en place par les pays signataires d'un mécanisme national de prévention indépendant dans un délai maximum d'un an après sa ratification. Elle répond également aux recommandations du Conseil de l'Europe telles que la nécessité d'un contrôle indépendant mené par une autorité qui rendra publiquement compte de ses conclusions.

PARAGRAPHE 2 : LE NOUVEAU CADRE DE L'AMENAGEMENT PENAL

Le prononcé d'une peine par un tribunal ne signifie pas que son exécution doit être figée dans le marbre. Au contraire, la loi prévoit, dans un but de prévention de la récidive, que les peines peuvent être aménagées en cours d'exécution pour tenir compte de l'évolution de la personnalité et de la situation du condamné. Certains aménagements portent sur les modalités d'exécution des peines d'emprisonnement inférieures à un an, d'autres aménagements sont relatifs à la durée de la peine d'emprisonnement (B). La sanction doit retrouver une vertu positive, sans être réduite à sa fonction répressive. Elle suppose de mieux faire participer le condamné à l'exécution de sa peine. L'exécution des peines « hors les murs » est la perspective proposée pour un avenir plus serein de notre société. Les peines substitutives quant à elles s'inscrivent dans une logique selon laquelle l'apprentissage de la vie en société se réalise mieux en liberté(A). Le large éventail des mesures existantes permet d'adapter la sanction aux différents types de délinquance.

A - LES NOUVELLES SANCTIONS ALTERNATIVES A L'INCARCERATION

Les peines alternatives à l'emprisonnement dites « peines de substitution » doivent progresser dans le vécu et l'opinion des uns et des autres. Il faut comprendre qu'il s'agit de vraies peines, sanctionnant un comportement social réprouvé, incluant un élément de contrainte de l'individu tout en affirmant une volonté de ne pas l'exclure de la communauté. En France les premières datent de 1975, il s'agissait de la suppression du permis de chasse ou de conduire. Elles prennent toute leur dimension à partir de 1983 avec le vote de la loi instituant le « travail d'intérêt général ». Peines de substitution à l'incarcération ou aménagement de peines, ces alternatives forment un ensemble hétérogène mais présentent un intérêt incontestable. Elles permettent non seulement de limiter les effets désocialisant de l'incarcération, mais aussi de soustraire les condamnés aux contacts criminogènes inhérents à la fréquentation de compagnons de cellule. Pour l'administration pénitentiaire, les alternatives à l'incarcération présentent deux avantages supplémentaires : celui de réduire la surpopulation carcérale et celui de limiter ses dépenses budgétaires ; leur coût est en effet très inférieur à celui de l'incarcération. Il s'agit, par ailleurs, d'abandonner les solutions traditionnelles utilisées pour réduire le peineux embarras de l'engorgement à savoir l'amnistie73(*), la grâce74(*) ou la construction de nouvelles prisons. Dans de nombreux pays d'Afrique, le taux de la surpopulation dans les prisons a atteint des limites inhumaines, il y'a manque certain d'hygiène, l'alimentation est insuffisante en qualité et en quantité, l'accès aux soins médicaux est difficile, les détenus manquent d'activités, ne reçoivent pas de formation et sont souvent dans l'incapacité de maintenir les liens familiaux. Et dans cette situation alarmante, la dignité ne peut être garantie. Ainsi la sanction alternative à l'incarcération annoncée par la réforme est spécifiée dans les articles 9,33-1, 35-1 à 35-3 du code pénal. L'article 35-1 procède par énumération. Il s'agit de la suppression du permis de conduire pour une durée de 5ans, de l'annulation du permis, du retrait définitif ou temporaire de la licence d'exploiter un véhicule, de l'interdiction, de l'interdiction de porter une arme pour une durée de 5ans , du retrait du permis de chasse... Les alternatives à l'incarcération peuvent intervenir à tous les stades de la procédure répressive : elles peuvent être décidées lors des poursuites (composition pénale) ou pendant l'instruction (contrôle judiciaire), mais également au moment du jugement (peine de jours-amendes, comme peine principale ou complémentaire (sursis simple ou avec mise à l'épreuve) ; enfin, lors de l'exécution de la peine, les condamnés peuvent bénéficier de mesures dans le cadre d'une libération anticipée (libération conditionnelle, semi-liberté, suspension de peine, chantier extérieur...).

B- LES NOUVEAUX MODES D'AMENAGEMENT DES PEINES

A condition que la gravité des faits commis et que le comportement de leur auteur ne s'y opposent pas, les modes d'aménagement peuvent concerner des prévenus ou des condamnés à qui elles permettent de rester libres sous réserve de se soumettre aux contrôles prescrits par les juges. Aux personnes incarcérées, elles offrent la possibilité de sortir plus vite de prison en exécutant leur peine ailleurs, sans être privées de leur liberté ou en subissant un régime de surveillance moins contraignant. Aux termes de l'article 44-2 les modes d'aménagement des peines fixés par la loi sont le sursis, la probation, le travail au bénéfice de la société, la semi liberté75(*), le fractionnement de la peine, la dispense de peine et l'ajournement. Certains aménagements portent sur les modalités d'exécution des peines d'emprisonnement inférieures à un an, afin d'éviter ou de remédier à l'effet désocialisant de l'incarcération. En effet, lorsque le condamné présente des garanties suffisantes en termes de réinsertion et de prévention de la récidive, le juge d'application des peines peut décider que la peine d'emprisonnement s'effectuera sous un régime déterminé. A cela il faudra y adjoindre la libération conditionnelle76(*) , le placement à l'extérieur77(*) ou la permission de sortir78(*). Le bracelet magnétique ou arrêt domiciliaire sous surveillance électronique, prévu par les lois du 19 décembre 1997 et du 15 juin 2000, est en place à titre expérimental depuis septembre 2000 en France. Adoptée à l'initiative de M. Guy-Pierre Cabanel, elle prévoit le placement sous surveillance électronique de détenus purgeant une peine de moins d'un an ou dont le reliquat de peine est inférieur à un an via un bracelet émetteur signalant au service chargé de la surveillance tout dépassement d'un rayon d'action fixé par le JAP. Cependant les modes d'aménagement des peines ne peuvent être appliques ou prescrits ni en cas de récidive, ni en matière criminelle et correctionnelle pour les infractions suivantes : détournements de derniers publics, délits douaniers, attentats à la pudeur, pédophilie, délits relatifs aux stupéfiants79(*).

Aux termes de cette revue rapide des principaux instruments internationaux et nationaux de protection de la dignité, on voit combien est grande leur diversité, ainsi que l'hétérogénéité des solutions institutionnelles adoptées pour assurer la garantie de ce droit fondamental. Cependant force est de constater que le droit s'arrête à la porte des prisons malgré des efforts réels.

TITRE DEUXIEME : UNE APPLICATION LIMITEE DU DROIT AU

RESPECT DE LA DIGNITE EN MILIEU CARCERAL

Le non-respect des dispositions du code de procédure pénale n'est bien évidemment pas ce qui choque au prime abord lors de visites dans les prisons. Les conditions difficiles de détention qui se traduisent par la promiscuité et le manque d'intimité sont véritablement le quotidien de la vie en prison ; le respect des dispositions législatives et réglementaires apparaît dès lors comme un impératif lointain, dépourvu d'implications concrètes aussi bien pour les détenus que pour le personnel surveillant ou d'encadrement. Il importe néanmoins d'en dire quelques mots afin de mesurer l'abîme qui sépare de facto les textes de la réalité carcérale. On demande aujourd'hui à la prison de réussir là où tous les autres intervenants (les familles, l'école,) ont échouéDu fait de la surpopulation, mais aussi d'une conception exagérément sécuritaire, et d'une religion de l'aveu, les atteintes à la dignité sont les plus criantes lors de l'incarcération. Constater que les conditions de détention dans les prisons sont souvent indignes d'un pays qui se targue de donner des leçons à l'extérieur dans le domaine des droits de l'homme et qui a été condamné à plusieurs reprises par la communauté internationale justement sourcilleuses en ce domaine. En France, le travail mené par la Cour européenne des droits de l'homme depuis 2001 constitue également un facteur important de dénonciation, mais également d'invitation faite aux Etats d'assurer des conditions de détention dignes, au risque de faire l'objet de condamnations multiples pour violation de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme. La Cour procède, désormais à un contrôle concret, pour de vérifier si les conditions matérielles de la détention ne violent pas l'article 3. Ainsi dans l'affaire Sulejmanovic c. Italie du 16 Juillet 2009 la CEDH se fonde sur des éléments tels que la privation d'air et lumière pour conclure à la violation de l'article 3. Des conditions déplorables de détention, parce que contraires au principe de dignité humaine, constituent un traitement inhumain ou dégradant. La montée en puissance du principe de dignité humaine n'a pas seulement servi à poser de nouvelles exigences en matière de conditions matérielles de détention. Il est même allé au-delà, en provoquant l'humanisation et l'encadrement de certaines pratiques pénitentiaires. De même dans sa décision du 20 janvier 1994, le Conseil constitutionnel précise que " l'exécution des peines privatives de liberté en matière correctionnelle et criminelle a été conçue, non seulement pour protéger la société et assurer la punition du condamné, mais aussi pour favoriser l'amendement de celui-ci et permettre son éventuelle réinsertion ". C'est là un véritable défi pour l'administration pénitentiaire. Il faudrait donc interdire les sorties de prison « sèches », sans mesures d'accompagnement effective, et encadrer leurs conditions. Il est, de plus, urgent d'axer de manière radicalement novatrice la réinsertion des détenu en associant leur famille. Nous nous sommes donnés pour ambition de prouver les atteintes à la dignité à travers une exigence des conditions matérielles de détention respectueuses de la dignité (chapitre I) et dans une seconde dynamique nous poserons les voies vers l'humanisation et la réinsertion des détenus (chapitre II).

CHAPITRE PREMIER : L'EXIGENCE DE CONDITIONS MATERIELLES DE DETENTION RESPECTUEUSES DE LA DIGNITE HUMAINE

Les personnes privées de liberté sont, du fait de cet état, d'une part en situation de fragilité, d'autre part entièrement confiées à la puissance publique. Il en résulte que celle-ci a une responsabilité particulière à leur égard. Cependant il est de jurisprudence constante que la dignité est très souvent rangée au panthéon de l'oubli. En prison, les détenus sont régulièrement exposés à des situations d'extrême gravité qui mettent en branlent la protection effective de leur droits fondamentaux. Plusieurs paramètres peuvent être envisagés pour mettre en relief cet état. Les locaux de détention et, en particulier, ceux qui sont destinés au logement des détenus ne satisfont pas aux exigences de respect de la dignité humaine et, de la vie privée, et ne répondent pas aux conditions minimales requises en matière de santé et d'hygiène, compte tenu des conditions climatiques, notamment en ce qui concerne l'espace au sol, le volume d'air, l'éclairage, l'aération. Les visites prolongées aux détenus ne se déroulent pas toujours conformément au respect de la dignité humaine. Mis en condition par la garde à vue, le présumé innocent est en fait présumé coupable : les formalités de l'écrou, de la fouille à corps, de la remise du paquetage, de l'incarcération au quartier des entrants, de l'affectation dans une cellule le plus souvent collective, des extractions avec menottes et entraves constituent autant d'étapes qui le dépouillent un peu plus de sa dignité80(*) . Ainsi dans la pratique, la prison est un lieu de deshumanisation attentatoire à la dignité (section Première) ou règne manifestement l'arbitraire carcéral (section Deuxième).

SECTION 1 : LA PRISON : UN LIEU DE DESHUMANISATION ATTENTTATOIRE A LA DIGNITE

Le Comité de prévention de la torture (CPT) en France depuis maintenant près de vingt ans, un organe de visite et de contrôle a toujours estimé que la qualité générale de la vie dans un établissement présente une importance considérable. A dire vrai, dans un pays qui se vante d'être un chantre de la démocratie, les prisons sont une honte pour un pays un tout petit peu respectueux des droits de l'homme. Police, parquet, prison ces trois P font des dégâts au Sénégal .Dans notre pays plus qu'ailleurs, la population carcérale est marginalisée. Les relations entre gardes et détenus sont presque militaires. Voire de maitre à esclaves81(*) . La prison sénégalaise, cet univers pas du tout comme les autres, foule à maints égards les droits de l'homme les plus élémentaires avec sans nul doute notre silencieuse complicité. Il n'est donc pas surprenant que la qualité générale de vie y soit déplorable (PARAGRAPHE1) plongeant ce haras dans l'empire de l'arbitraire carcéral (PARAGRAPHE 2).

PARAGRAPHE 1 : UNE QUALITE GENERALE DE VIE DEPLORABLE

Le milieu carcéral est loin d'être de tout repos. Cet hôtel zéro étoile renferme une quantité industrielle d'atteintes à la dignité du détenu. Parmi celles-ci, la surpopulation pénale impose ainsi aux directeurs d'établissement et aux surveillants des contraintes de gestion qui nuisent aux possibilités de réinsertion des détenus. La surpopulation aboutit au non-respect des textes, rend très difficiles les conditions de vie en détention et empêche l'administration pénitentiaire d'assurer correctement son rôle. En outre Albert Camus a dit qu' "une société se juge à l'état de ses prisons ». En vérité, la surpopulation, liée à un état de vétusté et de délabrement des établissements caractérisent les entorses à la dignité. Il parait donc opportun de voir l'état de surpopulation carcérale(A) avant d'analyser la vétusté et l'inadaptation des prisons (A).

A- LA SURPOPULATION CARCERALE

Elle traduit l'inadéquation matérielle entre le nombre de détenus et les places disponibles La surpopulation des maisons d'arrêt, est une " première violence de la prison", celle qui consiste à mettre deux détenus, voire trois ou cinq dans 9 m2, a les conséquences les plus graves sur les conditions de détention. La surpopulation pénale est donc à l'origine d'un traitement infligé aux détenus qui peut être considéré, à juste titre, comme inhumain et dégradant ; elle n'est bien évidemment pas non plus étrangère à la survenance de plus en plus fréquente d'actes d'auto-agressions (automutilations, tentatives de suicides ou suicides), d'agressions entre détenus, d'actes de violence envers les surveillants etc. Si la surpopulation est déjà un problème en elle-même, compte tenu du surcroît de travail qu'elle occasionne, ses effets induits sur la crédibilité et l'autorité de l'institution sont encore plus destructeurs. En effet, l'impératif de gestion se fait encore plus prégnant, car, outre le manque de places en cellule, c'est bien souvent l'ensemble des services qui dysfonctionne aussi. Cette situation conduit l'administration pénitentiaire à temporiser, à compenser. Les contacts avec la population pénale, l'observation, sont réduits, voire inexistants, laissant le champ libre aux leaders négatifs. On ne sait plus ce qui se passe, on gère des flux, on " fait tourner " selon l'expression souvent employée.

Que peut faire le surveillant lorsqu'il entre dans une cellule où il se retrouve face à cinq détenus ? Cette situation objective de surpopulation carcérale, couplée à des conditions matérielles de détention déplorables (cellules sales et infestées de cafards, de punaises et de poux, fenêtres obturées par des volets métalliques qui ne laissaient filtrer qu'une très faible lumière, confinement en cellule vingt-deux à vingt-trois heures par jour), constitue un traitement dégradant82(*). Mais c'est probablement l'affaire Kalashnikov c/ Russie du 15 juillet 2002 qui constitue l'illustration parfaite du refus actuel de la Cour d'accepter de telles conditions de détention. Dans cette espèce, le requérant était, ainsi que vingt-trois autres détenus, l'occupant d'une cellule de dix-neuf m², conçue pour huit. Cette surpopulation imposait l'utilisation de chaque lit par trois personnes, par rotation. Pour une application très récente, l'arrêt Bitchkov c/ Russie, du 5 mars 2009, où la violation de l'article 3 repose sur l'existence d'un espace de vie par détenu compris entre 0,65 et 1,3 m2 est constante. En France, jusqu'en 1996, la population pénale n'a cessé de croître. Selon une étude de M. Pierre Tournier, ingénieur de recherche au CNRS, la population carcérale en France a doublé de 1975 à 1995, pour atteindre quelque 54.000 détenus, tandis que, pour la même période, la population française n'augmentait que de 10 %. Le terme " d'inflation carcérale " a été utilisé pour caractériser cet accroissement du nombre de détenus, qui est sans commune mesure avec l'accroissement du nombre d'habitants. L'année 1996 marque une rupture dans cette évolution, puisqu'à partir de cette date la population carcérale diminue : au 1er janvier 2000, elle s'élevait à près de 51.500 détenus, soit 6,6 % de moins qu'en 1996. Toutefois, cette baisse n'a pas permis d'enrayer le surpeuplement carcéral en raison d'un allongement sensible de la durée des peines. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire qui fait partie des mécanismes de promotion des droits humains a dans son rapport indiqué que la plupart des prisons sont surpeuplées. C'est le cas à la Maison d'arrêt et de correction de Reubeuss où il a été dénombré 1 592 détenus. Alors qu'elle a une capacité de 800 personnes. Le Camp pénal de Liberté 6, la Maison d'arrêt des femmes et la Maison d'arrêt et de correction de Thiès sont également dans le lot. Mais ils n'ont pas avancé de chiffres à ce sujet. Seul éclair dans la grisaille, la Maison d'arrêt et de correction de Saint-Louis qui n'enregistre que deux détenus de plus sur une capacité de 25083(*). Il faut rappeler, pour conclure, que ces conditions de détention rendues particulièrement pénibles et désocialisantes du fait de la surpopulation sont imposées à des personnes qui, soit sont prévenues et bénéficient à ce titre de la présomption d'innocence, soit condamnées à de très courtes peines et destinées à retourner très rapidement à l'extérieur.

B- LA VETUSTE ET L'INADAPTATION DES PRISONS

L'Etat du Sénégal vient d'engager une réforme de l'Administration pénitentiaire. Cette réforme vise la modernisation de l'Administration pénitentiaire parce qu'il n'y a pas eu, depuis l'indépendance, de nouvelles constructions d'établissements. Donc, avec la vétusté des établissements et la surpopulation carcérale, le premier objectif, ce sont les infrastructures, la création, la modernisation des établissements pénitenciers. En effet, ces bâtiments ne répondent pas aux exigences imposées par le code de procédure pénale en matière de conditions de détention : encellulement individuel des prévenus, locaux devant répondre aux exigences de l'hygiène, notamment en ce qui concerne le cubage d'air, l'éclairage, l'aération, fenêtres suffisamment grandes pour permettre de lire et de travailler à la lumière naturelle et de faire entrer l'air frais. Aujourd'hui, plus de la moitié des établissements au Sénégal se caractérisent par des structures traduisant des conceptions pénitentiaires dépassées et inadaptées aux régimes modernes de détention. Il y'a une nouvelle population pénale pour une prison inchangée. La croissance du nombre des condamnés depuis vingt ans s'est parallèlement accompagnée d'un bouleversement de la structure de la population carcérale : les délinquants sexuels, les malades mentaux et les toxicomanes représentent désormais, comme dans les pays étrangers, les trois principales composantes de la population des prisons sénégalaises et posent de redoutables problèmes de gestion aux personnels pénitentiaires.

En France, le docteur Roland Broca a indiqué à la commission que près de 20 % des détenus étaient inculpés directement pour infraction à la législation sur les stupéfiants, tandis que 20 à 30 % des autres détenus sont incarcérés pour des délits liés à l'usage ou à l'obtention de drogues. Il s'agit d'une population fragile psychologiquement et très perturbée par le phénomène de manque. Elle est donc très exposée au risque de suicide et très dépendante des autres détenus dans sa quête de stupéfiants84(*).

Concernant les malades mentaux une véritable révolution s'est opérée : le credo de la psychiatrie moderne est désormais " d'ouvrir " les hôpitaux psychiatriques. Lorsque l'irresponsabilité est prononcée, le juge d'instruction est amené à se dessaisir en rendant une ordonnance de non lieu, le tribunal correctionnel prend une décision de relaxe et la cour d'assises doit évidemment prononcer un acquittement. L'infraction commise doit donc être oubliée ; elle n'a été qu'un révélateur de la maladie de son auteur. Mais ses troubles psychiques graves subsistent. Les psychiatres jouent aujourd'hui un rôle considérable dans le système judiciaire et pénitentiaire : ils peuvent établir l'irresponsabilité de l'accusé. Avec le droit français il convient cependant de rappeler que de l'article L. 348 de la santé publique permet (loi du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux), de placer l'auteur de l'infraction en hôpital psychiatrique.

De plus en raison de l'allongement de la durée des peines et de la modification de la structure de la population carcérale selon les infractions, les détenus sont de plus en plus vieux. Or, le vieillissement de la population carcérale n'est pas sans poser des problèmes à l'administration pénitentiaire. Parmi eux, certains sont physiquement dépendants, alors même que les établissements ne sont pas équipés pour accueillir une telle population. Non seulement les cellules ne sont pas adaptées, mais l'architecture des prisons n'a pas été conçue pour des personnes invalides. Ainsi, il n'existe pas d'ascenseur et les distances à parcourir pour accéder aux cours de promenades, aux parloirs ou encore aux unités de soins sont parfois importantes85(*) et difficiles.

Aussi l'évolution du nombre des incarcérations des mineurs ces dernières années révèle un phénomène préoccupant. Les actes de délinquance juvénile se caractérisent par une aggravation des infractions, souvent commises avec violence contre des personnes, notamment des représentants de l'autorité ou des services publics.

En outre on tend de plus en plus vers la prison refuge ? En dehors de cas exceptionnels récents, liés à la délinquance financière, la prison accueille avant tout une population plutôt défavorisée. Cette population arrive en situation d'échec : échec du système scolaire, échec du milieu familial, échec du système économique et autre. Un grand nombre de détenus se retrouvent souvent " isolés ", ayant rompu nolens volens les liens familiaux, à la suite d'une rupture ou d'un divorce. Pour les jeunes adultes, la rupture avec le milieu familial les a plongés dans une " errance " et une misère, ayant pour conséquence une " délinquance d'appropriation ". La drogue a changé peu à peu les transgressions, rendant encore plus violente cette délinquance. Somme toute on trouve en prison des gens qui n'ont rien à y faire. Les prisons sont utilisées comme variable d'ajustement du système pénitentiaire. Elles mêlent, en effet, les prévenus et les condamnés. Elles accueillent par ailleurs depuis quelques années de nouvelles populations qui posent de redoutables problèmes de coexistence. C'est le cas des étrangers en situation irrégulière, des toxicomanes, des malades mentaux, des mineurs et jeunes adultes délinquants mais aussi des détenus âgés, et d'autres fragilisés par la maladie (le sida, la tuberculose, les hépatites), par des handicaps physiques et aussi par le développement de l'indigence consécutive au chômage et à l'exclusion. Pour toutes ces catégories de personnes, les structures pénitentiaires classiques se révèlent tout à fait inadéquates. Elles signifient l'exclusion dans l'exclusion, qui conduit souvent au suicide.

PARAGRAPHE 2 : LE NON-RESPECT DES CONVENTIONS INTERNATIONALES LORS DE L'INCARCERATION :

Le Sénégal, avec la loi n° 2006-13 du 30 juin 2006 a ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adopté par l'Assemblée générale des Nations unies, le 18 décembre 2002. Le Sénégal a été le premier pays à signer ce texte majeur dans le domaine de la prévention de la Torture et des mauvais traitements. Le Protocole facultatif requiert vingt ratifications et se rapporte à la Convention contre la Torture et autres Peines ou Traitement cruels, inhumains ou dégradants, adopté par l'Assemblée générale des Nations unies, le 18 décembre 2002.Au delà de la qualification des traitements inhumains qui doit être envisagée(A), il s'agit d'actes préjudiciables à la santé et l'existence de vives souffrances(B).

A- LA QUALIFICATION DES TRAITEMENTS INHUMAINS

Au Sénégal, malgré, la signature et la ratification de la Convention relative à la torture et des peines et traitements cruels, inhumains et dégradants et du protocole facultatif à la convention des Nations Unies contre la torture, des agents des forces l'ordre continuent à pratiquer la torture sans qu'il ait l'ouverture d'une enquête judiciaire sérieuse qui suivra son processus jusqu'à terme. Bons nombre d'instruments relatifs à la protection de la dignité de la personne du détenu se trouvent inappliqués entrainant inéluctablement un traitement fort déplorable lors de l'incarcération. La qualification de traitement inhumain ou dégradant (voire de torture) à laquelle peut conclure le CPT en France, résulte soit d'un élément spécifique, soit, d'une combinaison de facteurs tels que la surpopulation, l'absence d'installations sanitaires et l'insuffisance du régime alimentaire. La torture suppose qu'aient été délibérément causées des souffrances d'une intensité et d'une cruauté particulière. Le caractère inhumain est établi par la constatation qu'on été causées de vives souffrances physiques et morales ayant entrainé de surcroit des troubles psychiques aigus, tandis que le caractère dégradant de ce que les techniques employées étaient de nature à créer en leurs victimes « des sentiments de peur, d'angoisse et d'infériorité propre à les humilier, à les avilir et à briser éventuellement leur résistance physique et morale86(*) ». En plus dans l'arrêt Ribitsch c / Autriche du 4 décembre 1995 la cour souligne « qu'à l'égard d une personne privée de sa liberté, tout usage de la force physique qui n'est pas rendu strictement nécessaire par le propre comportement de ladite personne porte atteinte à la dignité humaine et constitue en principe une violation du droit garanti par la convention.

Des détenus, s'appuyant sur la jurisprudence européenne, n'hésitent plus, en effet, à contester leurs conditions de détention devant le juge. Certes, à ce titre, l'arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de Cassation le 20 janvier 2009 ne laisse guère d'espoir pour l'avenir, en refusant l'examen par une juridiction judiciaire de la compatibilité avec la dignité humaine des conditions d'hébergement dans un établissement pénitentiaire. Le requérant, détenu dans une maison d'arrêt, se prévalait de l'article 225-14 du Code pénal qui condamne « Le fait de soumettre une personne, dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur, à des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine ». Les traitements inhumains au sens de la convention des nations unies de 1984 ont fait leur entrée dans le code pénal le 28 Aout 1996 en vertu de la loi n°96-15 en son article, 295-1.

On se rappelle de la mort du jeune Dominique Lopy âgé de 25 ans, le 7 avril 2007, dans les locaux du Commissariat de Kolda alors qu'il était en garde à vue après qu'il ait fait l'objet d'accusation du vol d'un poste de téléviseur, sans oublier le cas d'Alioune Badara Mbengue qui a été torturé par six (6) gardes pénitenciers le 20 novembre 2002 dans la prison de Rebeuss, il s'en est sorti avec les deux bras amputés. Dans la plupart des Etats africains des particuliers sont privés de leurs libertés pour des motifs politiques, juridiques et autres sans lien avec les normes et font l'objet de torture ou traitements qui leur font perdre leur dignité d'être humain sous le « regard complice » des autorités. Et pourtant au plan national l'art.7 de la constitution reconnaît le « caractère sacré et inviolable de la personne humaine et l'obligation pour l'Etat de la respecter et de la protéger ». A partir de ce principe constitutionnel, le Sénégal s'est doté de mesures de prévention et de répression de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants. Ces mesures préventives s'adressent à tous les agents d'application de la loi pouvant être en situation de porter atteinte à la sécurité et à l'intégrité physique de la personne humaine.

B- DES ACTES PREJUDICIABLES A LA SANTE ET L'EXISTENCE DE VIVES SOUFFRANCES

Dans un article paru le jeudi 17 Avril 2008 intitulé « Les sous hommes de Rebeuss », l'auteur y décrit une situation aux antipodes de tout respect à la dignité. La prison est devenue aujourd'hui, force est de le constater, un facteur aggravant. "Ala athio" est le cri de guerre de cette jeunesse mal famée, jeunesse qui se distingue de la société sénégalaise grâce aux colliers en caoutchouc qui ornent leurs chevilles, colliers baptisés sous le doux nom de "chaînes de l'esclavage". « Ala athiou », pour dire que la société les a vomis, ils continueront dans le mauvais chemin qui mène inéluctablement à Rebeuss. C'est ainsi que les multirécidivistes s'y comptent à la pelle. Et pourtant, ils étaient censés ne plus y mettre les pieds. La promiscuité des lieux y est pour quelque chose. Dans notre pays plus qu'ailleurs, la population carcérale est marginalisée .Pire encore, l'usage de cannabis en prison est monnaie courante. Il semble toléré dans un grand nombre d'établissements, l'administration fermant les yeux pour éviter des manifestations des détenus.

Le phénomène nouveau est celui des poly consommations. Plusieurs interlocuteurs, médecins, ont signalé que le fléau de l'alcoolisme ne devait pas être oublié, l'alcoolisme ayant un facteur " désinhibant ", expliquant le passage à l'acte d'un grand nombre de criminels, sexuels ou non. Si la consommation d'alcool est interdite en prison, le sevrage, sans mesures d'accompagnement, n'a aucune conséquence curative : le bar ainsi situé à proximité de toute maison d'arrêt qui se respecte fera le meilleur accueil aux sortants. En France, lors de son déplacement au Royaume-Uni, la commission a pu constater que la prison londonienne de Belmarsh pratiquait un " sevrage sec " de ses toxicomanes. L'injection de drogues par voie intraveineuse, les rapports sexuels non protégés, ainsi que les pratiques de tatouage, font peser sur les détenus un fort risque de contamination par le virus HIV et le virus de l'hépatite C. Plus récemment, dans l'affaire Kehayov c/ Bulgarie du 18 janvier 2005, la Cour juge que le fait que le requérant ait été contraint de vivre presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre, pendant près de six mois, dans une cellule surpeuplée dépourvue de lumière naturelle et sans pouvoir se livrer à aucun exercice physique ni à d'autres activités hors cellule « a certainement été préjudiciable à sa santé et a dû lui causer de vives souffrances87(*) ». Les victimes de torture, si elles ne meurent pas, ne s'en remettent que très difficilement de leurs blessures tant intérieures qu'extérieures et souvent elles ont de très grandes difficultés de prise en charge médicale, psychosociale mais aussi pour le droit à la justice.

SECTION 2 : L'ARBITRAIRE CARCERAL

Fondée à l'exception de quelques rares références législatives sur les dispositions réglementaires surabondantes du cpp et sur une multitude de circulaires et de notes de service, l'application du droit pénitentiaire est largement arbitraire. La prison est régie par autant de règlements intérieurs que d'établissements et leurs dispositions sont appliquées le plus souvent à la discrétion des personnels de direction et de surveillance : selon les cas, on sanctionnera plus ou moins l'usage de drogue, on utilisera selon une fréquence variable le quartier disciplinaire comme outil habituel de gestion de la population carcérale. Au-delà des conditions matérielles de détention, les détenus pâtissent également des dysfonctionnements des différentes administrations, le " droit de la prison " restait largement illusoire. Le cadre législatif de la détention, posé par le cpp, est particulièrement succinct. Le " droit de la prison " est en effet avant tout de nature réglementaire, Alors que le détenu est normalement privé de la seule " liberté d'aller et de venir ", de nombreuses libertés sont supprimées en prison, ou inapplicables, en dehors même de celles qui deviennent inapplicables en raison de la surpopulation pénale. Ces différentes dispositions réglementaires sont naturellement orientées pour assurer la meilleure sécurité des établissements pénitentiaires. L `arbitraire se manifeste alors à travers une procédure disciplinaire montrant qu'il s'agit d'une prison dans la prison (PARAGRAPHE 1) et l'existence d'un personnel pénitentiaire impuissant (PARAGRAPHE 2).

PARAGRAPHE 1 : LA PROCEDURE DISCIPLINAIRE : UNE PRISON DANS LA PRISON

L'administration pénitentiaire ne favorise guère la réinsertion des détenus lorsqu'elle recourt à des pratiques comme l'isolement ou les transferts imposés, en tant que sanction des plus récalcitrants ou du moins présumés dangereux, le tout sans procès équitable permettant de démontrer les faits, pour des durées illimitées et sans le moindre contrôle judiciaire. Les réponses que le droit peut apporter sur de tels sujets résident dans l'interdiction du maniement de l'isolement comme outil disciplinaire(A). De même la sanction étant à la discrétion de l'administration, il s'ensuit que les punitions deviennent dégradantes et angoissantes(B)

A- L'ISOLEMENT

L'isolement est réglementé par l'article 18 de l'arrêté ministériel portant règlement intérieur de l'administration pénitentiaire. Telle sanction interrompt des formations ou études en cours, rendent leur commencement impossible, détruisent des familles, et privent les uns et les autres de revenus. Avec cela non seulement l'individu est privé de la liberté d'aller et de venir mais parce que, dans sa vie quotidienne, tout est organisé pour lui rappeler qu'il est puni et qu'il doit obéir, le refus d'obéissance se paie cher en détention. Il est évident que la prison déresponsabilise et infantilise, surtout dans les premiers temps. Les relations dans la prison sont fondées sur la méfiance, voire le mépris réciproques, alors que le contrat suppose au contraire la reconnaissance de l'autre comme un semblable. Le règlement intérieur du Mac de Saint-Louis prévoit la mise en cellule punitive qui va de 8 à 30 jours en son article 13.La prison constitue une microsociété, avec des lois, non écrites pour la plupart, mais prégnantes. L'une d'entre elles énonce qu'il ne faut jamais pactiser avec l'« ennemi ». Le surveillant se méfie du surveillé potentiellement dangereux. Le surveillé se méfie lui du surveillant qui détient le pouvoir de violer son intimité lors des fouilles ou des rondes et qui dispose, de par la réglementation, de toute une panoplie de sanctions dont il pourra déclencher le mécanisme au moindre manquement à la discipline. Si l'arrivant nourrit à cet égard quelques illusions, ses codétenus le mettront vite en condition, racontant à l'envi comment les « matons » peuvent se livrer aux pires excès répressifs. Proclamer que l'on se fait respecter de l'« ennemi » pose le personnage dans le milieu carcéral88(*) .

L'isolement en France est une sanction qui peut être prononcé quelle que soit la faute disciplinaireSeul le délai maximal de mise en cellule disciplinaire varie : il est de quarante-cinq jours pour les fautes du premier degré, trente jours pour les fautes du deuxième degré, quinze jours pour une faute du troisième degré, les mineurs de 16-18 ans disposant d'un régime " allégé ". En résumé, un détenu de plus de 18 ans peut faire quinze jours de " mitard " pour une faute du troisième degré. Par exemple : " jeter des détritus ou tout autre objet par les fenêtres de l'établissement ", " communiquer irrégulièrement avec un codétenu L'article 726 du code de procédure pénale français est le fondement législatif du quartier disciplinaire : " Si quelque détenu use de menaces, injures ou violences ou commet une infraction à la discipline, il peut être enfermé seul dans une cellule aménagée à cet effet ".Juridiquement, les sanctions disciplinaires infligées aux détenus étaient, en tant que mesures d'ordre intérieur, insusceptibles de recours pour excès de pouvoir. La jurisprudence du Conseil d'Etat " Marie " du 17 février 1995 a considéré que le placement en quartier disciplinaire faisait échec à la théorie traditionnelle des mesures d'ordre intérieur.

B- LES PUNITIONS DEGRADANTES ET ANGOISSANTES

« Puissent certains professionnels des mondes judiciaire et pénitentiaire devenir non plus de froides machines à broyer, mais de réels interlocuteurs qui savent écouter et se remettre en question, sans utiliser parfois la loi ou le règlement comme instrument de pouvoir et d'écrasement sur les autres. Puissent ces professionnels devenir des personnes plus abordables (et non plus « intouchables »), plus sensibles et ouvertes à la détresse, plus transparentes, humaines et justes ; qu'elles puissent sanctionner et relever dans le respect de l'être humain et de sa dignité. C'est cela la vrai justice89(*) ».La loi est raisonnablement faite pour la dignité de l'homme, et non l'homme pour l'unique dignité de la loi. Le système punitif doit montrer l'exemple et devenir enfin globalement porteur de vie, de reconstruction et d'espoir pour tout ceux et celles qui subissent car ils ont commis une faute.

En France les conditions de détention au " mitard ", jusqu'au début des années soixante-dix, étaient particulièrement rigoureux. Le détenu n'avait parfois droit qu'à du pain sec et de l'eau, il vivait dans une obscurité quasi complète et ne disposait que d'un seau pour satisfaire ses besoins. Une commission a pu constater que certaines cellules disposaient encore de toilettes à la turque, d'une saleté souvent repoussante, avec un robinet. Le détenu dort sur un mince matelas, posé sur une dalle de béton. L'aération est parfois déficiente. La température peut y être glaciale en hiver, et suffocante en été90(*). La " promenade " consiste à se rendre seul, une heure par jour, dans une petite cour grillagée. A cet égard, comme le montre l'exemple de la maison d'arrêt de Varces, le détenu peut très bien ne pas voir le ciel, et déambuler dans un local à peine plus grand que sa cellule.

Au Sénégal des progrès importants ont été réalisés. Seul endroit des maisons d'arrêt où la règle de l'encellulement individuel est paradoxalement respecté, le quartier disciplinaire présent des conditions de détention naturellement perfectibles. L'état des " mitards " est variable et constitue d'ailleurs un bon indicateur du bon " fonctionnement " d'une prison. La prison brise les détenus, les dépersonnalise, les déstructure durant des années au point de transformer certains d'entre et de les rendre incapables de refaire face à la vie du dehors. Voici le témoignage d'un détenu français sur les conséquences de l'état d'angoisse en prison : « Je dis qu'on pousse les détenus à se suicider. Le suicide ne peut pas être le fait d'une désespérance, il est le résultat des pressions subies au quotidien sans possibilités de s'en défendre. La prison, qui soustrait au regard et au contrôle démocratique, permet toutes les formes d'arbitraire. Des femmes, des hommes sont humiliés, interdits, niés. Cela a pour conséquence le taux important de suicides en prison. Justice et administration sont coupables par ordonnance. L'Etat et ses représentants sont coupables de ces négligences assassines. Il est de notre devoir de combattre et de dénoncer ces morts par ordonnance, en éclairant notamment l'opinion. C'est l'acte le plus absolu que les hommes et les femmes du XXIème siècle auront accompli ; alors à ce moment peut-être croirons-nous à l'humanité. » 

PARAGRAPHE 2 : UN PERSONNEL PENITENTIARE IMPUISSANT :

Il est important de souligner le rôle nécessaire et ingrat des personnels de l'administration pénitentiaire ; ces derniers ont la charge du fonctionnement d'un service public qu'ils assument avec abnégation et courage en étant condamnés à passer la totalité de leur vie professionnelle derrière les barreaux, le plus souvent plus longtemps que les criminels reclus à perpétuité dont ils assurent la surveillance. Mais faute d'une évaluation claire de ces objectifs d'insertion, l'administration pénitentiaire tend à se recentrer sur l'impératif de sécurité(A).De même l'administration pénitentiaire a longtemps été le parent pauvre de la fonction publique, alors même qu'elle était confrontée à une explosion de la population carcérale. Les établissements pénitentiaires souffrent aussi d'un sous-effectif chronique(B).

A- UN PERSONNEL ORIENTE VERS LA SECURITE PLUTOT QUE VERS LA REINSERTION

Le service public pénitentiaire participe à l'exécution des décisions et sanctions pénales et au maintien de la sécurité publique. Il favorise la réinsertion sociale des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire91(*). En réalité, la différenciation entre la mission de sécurité et celle d'insertion est plus factice qu'il n'y paraît. Sans l'objectif de le réinsérer, la garde du détenu se révèle plus difficile et favorise la révolte et aussi la récidive. Il faudrait aujourd'hui inverser les priorités, sans négliger la vigilance sécuritaire. L'administration pénitentiaire n'est souvent pas en mesure d'assurer la sécurité des personnes placées sous main de justice. A l'ancien caïdat d'autrefois ont succédé la constitution de bandes, notamment de jeunes majeurs dans les grandes maisons d'arrêt proches des cités difficiles, le racket, les trafics en tout genre, les agressions, physiques et sexuelles entre détenus. En prison, malheur aux vaincus, aux solitaires, aux faibles personnalités souvent instrumentalisées par les nouveaux caïds .Le personnel pénitentiaire est peu et mal connu de l'opinion qui ne prend souvent conscience de la pénibilité et de la dangerosité du métier qu'à l'occasion d'événements tragiques. Dans les établissements pénitentiaires à gestion publique, qui souffrent d'une insuffisance de crédits chronique, le directeur et le personnel d'encadrement passent un temps non négligeable à résoudre des problèmes urgents d'intendance. Quant aux personnels de surveillance, ils doivent subir au quotidien la vétusté et le mauvais entretien des locaux dans lesquels ils travaillent. En outre, leurs relations avec les détenus s'en trouvent modifiées : il est en effet beaucoup plus difficile de faire respecter la règle lorsque l'administration que l'on représente n'est pas capable d'assurer des conditions matérielles décentes aux détenus. La situation présente est insatisfaisante : le surveillant a l'impression d'être dépossédé de la plus grande partie de son autorité. Confiné dans un rôle de « porte-clefs » sans possibilité d'initiative, il a une autorité au contenu exclusivement négatif, répressif et surtout disciplinaire. Il a également l'impression, à juste titre, que tout le côté gratifiant de la mission pénitentiaire a été confié aux intervenants extérieurs qui viennent animer des activités dans l'établissement. Cependant les mots sont souvent révélateurs du sens que l'on donne aux choses ou aux personnes. Le nom de « gardien » demeure une survivance dont l'opinion publique, comme les médias, a du mal à se défaire. La surveillance a été associée à la garde. Aujourd'hui, on utilise le terme d'« agents pénitentiaires » afin de donner l'image d'un métier réel actif et pas seulement cantonné à la garde. Du terme de surveillance on peut retenir pourtant l'idée de la veille, d'une attention soutenue et d'un souci de la personne. Surveiller c'est garder, mais c'est aussi veiller sur. C'est le sens plein de surveillance qu'il faut impérativement retrouver et non seulement son sens restrictif. Il y a un grand besoin de reconnaissance des personnels pénitentiaires.

B- LA FAIBLESSE DES MOYENS ECONOMIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES

Le manque de personnel et la faiblesse des moyens ne datent pas d'au jour d'hui face une population carcérale galopante. Par rapport au manque de personnel, le directeur a annoncé un recrutement de 500 agents chaque année pendant 5 ans. Une façon de doter l'administration pénitentiaire de personnel en nombre afin de renverser le ratio actuel d'un agent pénitentiaire pour 6 détenus. Le Sénégal compte aujourd'hui une population carcérale de plus 7000 détenus répartis dans 37 établissements pénitentiaires. En ce qui concerne les conditions de travail des agents pénitentiaires, on a noté une  amélioration importante de leur statut. Depuis l'indépendance, il n'existait pas de cadres supérieurs de l'Administration pénitentiaire. Aujourd'hui, avec la sortie des 22 inspecteurs de cette Administration, la première promotion de ce corps, une vieille doléance pour avoir des cadres de la hiérarchie A1 vient d'être résolue. Ils devront pouvoir procéder à des transferts de détenus dans les lieux qu'ils commandent, explorer le volet partenariat et entreprendre des démarches pour mieux soulager les conditions carcérales des détenu . Avec le décret n°2007-951 du 07 août 2007, le personnel de l'Administration Pénitentiaire est réparti en trois (03) corps hiérarchisés. A la date du 08 Mai 2009, le personnel pénitentiaire se chiffre à mille cinq cent vingt (1520) agents tous grades confondus. La frange des Surveillants de Prison composée de mille trois cent vingt huit (1328) agents dont cent soixante treize (173) femmes, constitue une partie essentielle de l'effectif global. La plupart de ces personnels sont titulaires à part entière dans leur fonction (1493 dont 191 femmes), tandis que le personnel commissionné composé de travailleurs sociaux, de travailleurs sanitaires, de décisionnaires et autres se chiffre à vingt sept (27) dont dix sept (17) femmes92(*).De plus Tous les agents semblent regretter l'absence de concertation avec l'administration centrale. L'information circule, mais à sens unique, en apportant aux établissements les orientations retenues par la direction de l'administration pénitentiaire. Il n'y a pas de dialogue et les personnels pénitentiaires ont le sentiment que leur opinion n'est pas prise en considération.

Tout lieu de parole institué dans un établissement et rassemblant les différentes catégories et les différents corps de personnels sera toujours un atout. Il favorise le sentiment d'appartenance à une collectivité, l'appropriation des finalités et la reconnaissance des places différentes dans l'institution, une identité des personnels qui ont des repères et qui partagent leurs difficultés avec les autres. Il offre aussi une possibilité d'expression, au lieu de ressasser des frustrations ou des rancunes, trop facilement exploitées. Comme dans les autres administrations, il est nécessaire de s'interroger sur l'importance du temps de parole pour le personnel, pendant lequel les messages peuvent être passés, le sens des missions clarifié et précisé, les malentendus dissipés.

CHAPITRE 2 : VERS L'HUMANISATION ET LA REINSERTION DES DETENUS

Quel est le rôle de la prison aujourd'hui ? Doit-elle garder sa fonction de "lieu de privation de liberté", ou bien guider les prisonniers vers leur réinsertion ? La première technique ne fonctionne pas du tout. Elle fabrique de la récidive, elle fabrique de la violence. Elle transforme les condamnés en véritables fauves. Il s'agit en réalité d'un schéma électoral : les méchants, qui ont fait des choses horribles doivent bien sur payer. Nous avons tous le même réflexe. Seulement, si nous prévoyons que ces derniers sortent, il nous faut repenser la façon dont ils sont détenus. Il faut bien les traiter. La plupart des délinquants sont fragiles socialement et psychologiquement. Si en plus, on les détient dans des conditions inhumaines contraires au respect de la dignité et que l'on ne leur apprend rien, il est évident que l'on va aggraver le problème. Nous livrons alors à la société des gens en pire état qu'ils ne l'étaient en rentrant. Les personnels se sont installés dans une sorte de rivalité en miroir avec la population pénale, alimentée par l'idée « qu'on en donne plus » aux détenus qu'à eux-mêmes, « qu'on fait tout pour les détenus » et rien pour eux-mêmes. L'image est, en fait, celle des vases communicants : ce qui est accordé à l'un est retiré à l'autre, ce qui avantage l'un désavantage l'autre. Alors que les améliorations de conditions de vie des détenus ont un effet direct sur l'amélioration des conditions de travail du personnel et réciproquement. Plus fondamentalement, rappeler l'existence d'un droit commun, défini par ceux qui édictent les règles de la vie quotidienne de leurs concitoyens, c'est créer un pont et faciliter les passages entre la prison, les prisonniers et l'ensemble de la société. Associer de manière trop univoque sécurité et droit, d'une part, réinsertion et éducation des détenus, dispositifs sociaux et mesures d'accompagnement, d'autre part, contribue à creuser un hiatus artificiel. Retrouver sa place dans la société, après un temps de mise à l'écart nécessaire, n'est-ce pas, d'abord, pour tout homme, redevenir pleinement sujet de droit93(*) ? Ainsi après l'humanisation des conditions de détention (Section 1) il nous faut également penser au défi non négligeable qu'est la réinsertion (Section 2)

SECTION 1 : L'HUMANISATION DES CONDITONS DE DETENTION

Au sein de l'article 8 de la CEDH, la vie privée est entendue dans un sens strict (de secret et d'intimité), mais aussi dans un sens large. Ce dernier comprend, entre autres droits, le droit de nouer et d'entretenir des contacts avec autrui.  Concernant le respect de ce droit en prison, Commission et Cour ont reconnu que la détention constitue en soi une ingérence dans la vie privée, entraînée par la simple mise en détention d'une personne. Dès lors, pour que ces ingérences soulèvent des questions au regard de l'article 8, il faut qu'elles dépassent cet effet automatique de la détention. Ce dépassement peut ainsi être provoqué par l'intervention mais aussi par l'abstention des autorités pénitentiaires. Car la détention crée à l'égard de l'administration pénitentiaire également une obligation positive, celle de prendre toutes les mesures nécessaires afin d'assurer au détenu l'exercice effectif du droit au respect de sa vie privée94(*). Pour ce qui est du droit des détenus de maintenir et de nouer des rapports privés avec autrui, les détenus ont le droit de nouer de tels contacts avec l'extérieur mais aussi avec la communauté carcérale. Il est donc évident que la surpopulation peut aggraver les difficultés, inhérentes à la détention, d'assurer aux détenus le respect effectif de cet aspect de la vie privée et familiale (PARAGRAPHE 1). De même, quand le surveillant ne sait plus vraiment ce qu'on attend de lui, parce qu'il est soumis à une double injonction contradictoire (le double band), il est mis dans l'impossibilité de remplir sa mission. D'un côté, il fait respecter la discipline et applique le règlement et on lui reproche amèrement ses lacunes. D'un autre côté, on lui demande de faire en sorte qu'il « n'y ait pas de problèmes » et de régler au mieux les situations conflictuelles. Acceptera-t-il d'affronter l'incident quand la situation l'exige au risque d'être critiqué pour l'avoir mal négocié, ou consentira-t-il à quelques entorses au règlement, se montrant plus complaisant pour que son service se déroule calmement, au risque de se voir soupçonné d'être trop laxiste et « social » avec la population pénale ? L'attente de l'administration à son égard n'est pas toujours claire et lisible et il faut nécessairement encadrer certaines pratiques carcérales (PARAGRAPHE 2)

PARAGRAPHE 1 : LE DROIT A LA VIE PRIVEE ET FAMILLIALE

Les principaux moyens de l'entretien des contacts avec l'extérieur sont la correspondance et les visites, mais plus particulièrement ces dernières. Or, si le nombre des détenus ne constitue plus une raison justifiant des limitations du nombre des lettres et des correspondants, en revanche, tel est bien le cas concernant les visites. Ces contacts peuvent être sérieusement limités par des obstacles forts pratiques ne permettant pas d'effectuer des visites fréquentes ou d'une qualité assurant que celles-ci constituent de véritables moments de vie privée. Force est de constater que le problème le plus évident que pose la surpopulation carcérale concerne l'intimité des rapports entre détenus. Sa garantie exigerait d'assurer aux détenus au moins le droit de vivre seuls dans la cellule, et, à défaut, le droit de choisir leurs compagnons. Aussi, le droit des détenus au droit au respect de la vie privée dans leurs rapports avec les codétenus est limité dans un sens négatif, celui de ne pas être involontairement mis à l'écart de la communauté carcérale par les mesures d'isolement. Les visites et les correspondances étant garanties(A), l'intimité du détenu doit tant bien que mal être respecté(B)

A- LES VISITES ET LA CORRESPONDANCE

Les instances sénégalaises laissent une grande marge d'appréciation à l'administration pénitentiaire pour organiser les visites Elles n'en exercent pas moins un contrôle afin de s'assurer que toutes les mesures nécessaires aient été prises afin de permettre aux détenus d'entretenir des contacts effectifs avec leurs proches  comme l'affectation du personnel nécessaire, l'aménagement des lieux et de l'emploi du temps des détenus. On doit normalement entendre par « contacts effectifs » à propos des visites, celles qui ont lieu dans des conditions telles qu'elles puissent constituer de véritables moments de vie privée à savoir de moments de vie affective et intime. Les visites ont lieu le dimanche, mercredi et jours fériés. Les horaires de visites sont fixés par le régisseur suivant l'emploi du temps établi dans l'établissement. Ils ne devront pas cependant être inférieur à trois heures le matin et trois heures l'après-midi. La durée d'une visite est de 15 minutes au moins95(*). La correspondance de tous les détenus doit être lue tant à l'arrivée qu'au départ à l'exception, cependant, des lettres adressées par les prévenus et accusés à leur défenseur ou que ce dernier leur fait parvenir, sous les garanties que détermine l'Administration pour assurer que la lettre émane bien du défenseur96(*). Le droit des personnes détenues au maintien des relations avec les membres de leur famille s'exerce soit par les visites que ceux-ci leur rendent, soit, pour les condamnés et si leur situation pénale l'autorise, par les permissions de sortir des établissements pénitentiaires. Les prévenus peuvent être visités par les membres de leur famille ou d'autres personnes, au moins trois fois par semaine, et les condamnés au moins une fois par semaine.
L'autorité administrative ne peut refuser de délivrer un permis de visite aux membres de la famille d'un condamné, suspendre ou retirer ce permis que pour des motifs liés au maintien du bon ordre et de la sécurité ou à la prévention des infractions97(*). L'autorité administrative peut également, pour les mêmes motifs ou s'il apparaît que les visites font obstacle à la réinsertion du condamné, refuser de délivrer un permis de visite à d'autres personnes que les membres de la famille, suspendre ce permis ou le retirer .Les permis de visite des prévenus sont délivrés par l'autorité judiciaire .Les décisions de refus de délivrer un permis de visite sont motivées. Enfin, un effort particulier doit être entrepris pour maintenir les liens familiaux. D'abord, l'accueil des familles doit être amélioré. Les familles sont aujourd'hui culpabilisées lorsqu'elles rendent visite à leurs proches. Certes, le " trafic " au parloir existe, mais dignité et fermeté doivent être conciliées pour éviter de stigmatiser les familles et, d'une manière plus générale, l'ensemble des visiteurs. Il convient aussi d'introduire des améliorations élémentaires dans les établissements, en aménageant une salle d'attente avec des chaises en nombre suffisant et un coin enfants, des toilettes propres à la disposition des visiteurs, des parloirs suffisamment grands et clairs pour accueillir toute une famille .En plus le détenu peut à ses frais téléphoner à partir d'un appareil fixe installé à cet effet entre 09h et 17h les jours ouvrables98(*)

B- L'INTIMITE DU DETENU

La priorité des priorités c'est de voir consacrer un droit à l'intimité généralisée et généralisable et voir enfin émerger une vraie révolution pénitentiaire. Dans son rapport pour 2008, le Contrôleur général des personnes privées de leur liberté pointe également de très mauvaises conditions matérielles de détention qui, ajoutées à la promiscuité en cellule, sont « la cause d'une atteinte manifeste à l'intimité des personnes et même une véritable atteinte à la dignité99(*) ». On feint de découvrir que le détenu n'a aucun droit à « l'intégrité physique », pas de droit à la vie privée (puisque cela implique qu'il puisse bénéficier d'une intimité en cellule) ; pas de droit à un parloir intime ni même d'un droit au travail ; sans parler des fouilles étroites, de l'isolement à discrétion ; des droits électoraux, de la liberté d'expression et du téléphone bannis. Mais citoyen libre ou incarcéré, la garantie des droits est la même. Le détenu n'étant privé que de sa liberté d'aller et venir. Or, l'enquête nous montre qu'ici, comme partout ailleurs, les ruses de la dissimulation s'organisent, les secrets nécessaires prolifèrent, malgré l'oppression et les sujétions de chaque instant. Sans elles, l'homme privé n'existe pas. Jouissance et « disposition de soi » interdites, le détenu ne peut guère s'engager ou se perdre, s'identifier ou promettre, se ressaisir ou se rallier à un désir, une idée ou une cause. Replié ainsi sur chacun de ces instants qu'on lui dérobe, il ne reste plus à l'homme amputé de soi que quelques occasions à soustraire des coulisses. La sauvegarde de la société se gagne lorsque l'homme privé, son fort intérieur, sa grandeur d'âme ainsi que la mesure et l'ordre de ses actes et de ses paroles sont libres et protégés100(*). Essentiellement opérationnelles, les intimités infusent dans l'institution un peu de leurs propres fins, une réflexivité stratégique ou une rétrospective personnelle favorable, s'approprient même ponctuellement une marge de jeu, luttent pour arracher un bref moment secret, sauvegardent un geste du regard, ou protègent, ne serait-ce qu'un instant, la confidence d'un échange. Se glissent aussi des changements dans la façon dont les individus sont amenés à prêter sens à leurs conduites, à leurs devoirs, à leurs plaisirs et à leur résistance. La bataille est sur chaque instant, fragile et menacée, toujours minée et négociée avec le personnel pénitentiaire. Mais le détenu comprendra vite, devant l'étalage des morceaux de son intimité, qu'en prison l'usuelle distinction entre ce qui relève du privé et du public n'a plus cours101(*) .

PARAGRAPHE 2 : L'ENCADREMENT DE CERTAINES PRATIQUES CARCERALES

Le meilleur moyen de réinsérer les détenus est de faire en sorte que le droit, rien que le droit, mais tout le droit, les concerne, à la fois dans les contraintes qu'il suppose et dans les facultés qu'il encadre. Rien n'est plus anti-pédagogique qu'un système qui fonctionne sur du sous-droit. En effet un exemple de l'irrespect du droit commun réside dans les violences institutionnelles consistant à réaliser sur la personne des détenus, de manière répétée, des fouilles corporelles en la forme intégrale. Ces atteintes évitables à la dignité des personnes, les praticiens le savent bien, sont d'une parfaite inutilité. L'encadrement de certaines pratiques carcérales jugées dégradantes doit être vu (A).Le régime de détention est aussi sujet à réflexion. Un pareil système est très immoral ; c'est un grand mal sans doute que des condamnés inégalement coupables et de différents âges soient confondus dans la même prison ; mais ce mal ne devient-il pas affreux, lorsqu'on réunit ensemble les coupables condamnés, les prévenus qui peut-être sont innocents, et les débiteurs insolvables auxquels on ne reproche aucun délit(B).

A- LA PROHIBITION DE PRATIQUES CARCERALES JUGEES DEGRADANTES

On a dit au personnel pénitentiaire qu'il concourait à la mission fondamentale de réinsertion mais il ne sait pas selon quel contenu et par l'intermédiaire de quelles tâches. Doit-il être un surveillant « gardien » ou un surveillant « social » ? Si le droit pénitentiaire ne peut entièrement suivre le droit commun, en revanche, il n'est pas sain qu'il s'en éloigne par trop. Les fouilles doivent inéluctablement être justifiées par la présomption d'une infraction ou par les risques que le comportement des personnes détenues fait courir à la sécurité des personnes et au maintien du bon ordre dans l'établissement. Leur nature et leur fréquence sont strictement adaptées à ces nécessités et à la personnalité des personnes détenues102(*). Les fouilles intégrales et répétées constituent un automatisme pénitentiaire et sont inhumaines et dégradantes103(*). Les détenus ne peuvent être fouillés que par des agents de leur sexe et dans des conditions qui, tout en garantissant l'efficacité du contrôle, préservent le respect de la dignité inhérente à la personne humaine. L'efficacité de ces fouilles reste pourtant limitée, comme le démontre la réalité des trafics de stupéfiants en prison : le détenu apprend vite les " ruses " pour échapper à la fouille. Les mêmes règles de fouille corporelle s'appliquent, quel que soit le degré de dangerosité de la personne. En France Les fouilles intégrales ne sont possibles que si les fouilles par palpation ou l'utilisation des moyens de détection électronique sont insuffisantes .Les investigations corporelles internes sont proscrites, sauf un impératif spécialement motivé. Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin n'exerçant pas au sein de l'établissement pénitentiaire et requis à cet effet par l'autorité judiciaire. Le port des menottes et des entraves est systématique pour les détenus. Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s'il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite104(*) . Un détenu étant, par définition, " susceptible de tenter de prendre la fuite ", le recours aux menottes pourra être systématique, l'établissement pénitentiaire se bornant à appliquer le code de procédure pénale. La hantise est encore et toujours d'éviter les évasions, les directeurs étant tenus responsables s'ils n'ont pas respecté à la lettre les dispositions du code de procédure pénale. Il est vrai que les détenus hospitalisés arrivent à l'hôpital, parfois dans un état de faiblesse très avancé, menottés pour la plupart, entravés pour certains. Il est vrai qu'un grand nombre d'évasions ont lieu à l'occasion de ces extractions.

B- LA PRISE EN COMPTE DES REGIMES SPECIFIQUES DE DETENTION

La France n'a pas progressé depuis le constat désabusé de Gustave de Beaumont et Alexis de Tocqueville en 1831 sur le système pénitentiaire français : " Dans les premiers jours du mois d'août dernier, l'un de nous, ayant eu l'occasion d'aller visiter la maison d'arrêt de Versailles, trouva réunis dans la même cour trois hommes prévenus d'assassinat, d'autres prévenus de vol, plusieurs condamnés à un emprisonnement d'une année, un délinquant forestier et un détenu pour dettes. Certes, rien ne rappelle mieux ce lit de l'Hôtel-Dieu, dans lequel Howard nous peint un convalescent, un malade, un moribond et un mort couchés côte à côte sous le même drap ».

Au Sénégal le régime de détention des détenus est déterminé en prenant en compte leur personnalité, leur santé, leur dangerosité et leurs efforts en matière de réinsertion sociale. Il faut une nouvelle classification des détenus selon le degré de dangerosité. Au Canada, l'évaluation des capacités du détenu et de sa dangerosité détermine l'affectation en établissement et conditionne son parcours d'insertion. Il n'y a plus dans ce système d'antagonisme entre sécurité et insertion : les deux principes répondent à une même logique de prévention de la récidive. Il en est de même en Espagne, où une nouvelle prison située dans une région isolée regroupe les détenus les plus dangereux. A Rebeuss la séparation selon les catégories pénales exigée par le CPP n'est pas encore à l'ordre du jour dans ce haut lieu de la délinquance. Certains y apprennent à fumer leur premier joint, d'autres glissent sur le chemin de l'homosexualité, d'autres encore apprennent les rudiments du banditisme sous le guide éclairé des grands caïds105(*). Les maisons d'arrêt sont utilisées comme variable d'ajustement du système pénitentiaire. Elles mêlent, en effet, les prévenus et les condamnés. Elles accueillent par ailleurs depuis quelques années de nouvelles populations qui posent de redoutables problèmes de coexistence. C'est le cas des étrangers en situation irrégulière, des toxicomanes, des malades mentaux, des mineurs et jeunes adultes délinquants mais aussi des détenus âgés, et d'autres fragilisés par la maladie (le sida, la tuberculose ou les hépatites), par des handicaps physiques et aussi par le développement de l'indigence consécutive au chômage et à l'exclusion.

SECTION 2 : LE DEFI DE LA REINSERTION

Jadis lieu de passage vers le châtiment réel, symbole de rupture entre l'Homme et la Cité, la prison nécessite aujourd'hui le maintien du lien vital qui unit ces hommes à la Cité. La prison doit donner un autre sens, une autre direction à la peine, un horizon tourné vers la collectivité. La prison interroge la société qui se trouve, en elle, confrontée à sa propre marginalité. Du fait de la transgression des règles établies par le délit ou le crime, la prison représente un point de rupture certaine. Rupture entre la société et les sujets dont elle est composée, rupture du contrat social, rupture de l'expression d'une citoyenneté réelle. Il convient alors de s'interroger sur l'appartenance des personnes détenues à la collectivité. Il y'a un réel décalage entre les missions qu'on demande à l'administration pénitentiaire d'accomplir (faire de la réinsertion, assurer aux détenus les conditions de détention les meilleures possibles) et les moyens financiers et humains qui leur sont parcimonieusement accordés. Quelle place peut-elle être faite à la réinsertion pour ceux qui effectuent la totalité ou la quasi-totalité de leur peine en détention provisoire ou pour ceux condamnés à de courtes peines ? Pour les premiers, rien ne peut être sérieusement envisagé durant cette période à la durée incertaine. Quant aux courtes peines, elles sont souvent vécues par une population souvent jeune, déshéritée et entrée dans un cycle de délinquance comme la confirmation et l'aboutissement d'un processus définitif d'exclusion sociale.

Elles brisent le délinquant sans lui donner les clés de la réinsertion. La peine de prison est encore trop souvent conçue comme une mise à l'écart, une manière de préserver la société des éléments dangereux. La réinsertion sociale des détenus est un vieux combat que mène l'administration pénitentiaire. Plusieurs efforts sont ainsi consentis, mais ne se faisaient pas dans un cadre formel. Chose faite aujourd'hui. Avant de voir la réforme du système pénitentiaire (PARAGRAPHE 2), nous explorerons les actions de préparation à la réinsertion sociale (PARAGRAPHE 1).

PARAGRAPHE 1 : LES ACTIONS DE PREPARATION A LA REINSERTION SOCIALE DES DETENUS

Chaque individu est lié par son existence même à la société. Chaque homme naît citoyen. Par conséquent, si la prison doit être pensée comme une sanction nécessaire, elle ne doit pas pour autant détacher les personnes détenues des autres citoyens, puisqu'ils seront amenés à se retrouver. Selon Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social «Les citoyens d'un même Etat, les habitants d'une même ville ne sauraient vivre toujours seuls et séparés.» Évidemment, il faut aussi que les prisonniers aient du travail. Les prisons doivent proposer de vraies formations, une vraie scolarité, à un niveau qui n'a rien à voir avec ce que l'on fait aujourd'hui. Il faut aussi repenser le temps de l'incarcération et le programme d'activités journalières, culturelles, éducatives et sportives. Apres avoir aborder le renforcement des activités dérivatives a l'ennui(A), nous verrons la favorisation du travail et de la formation(B)

A- LE RENFORCEMENT DES ACTIVITES CARCERALES DERIVATIVES A L'ENNUI

Depuis l'abolition de la peine de mort, toute personne condamnée est destinée un jour à sortir de prison. Toute personne détenue est donc, comme toute autre, une personne en devenir. Ainsi il est dans l'intérêt de tous de préparer cette sortie, et faire en sorte que « chaque détention soit gérée de manière à faciliter la réintégration dans la société libre des personnes privées de liberté. A cet égard, le système hollandais est un exemple d'équilibre. La réinsertion et l'organisation du temps de vie en prison sont l'objet d'une concertation entre personnels, détenus et intervenants extérieurs106(*). La pratique du sport en maison d'arrêt est étroitement liée à la taille des locaux et des terrains disponibles, mais également au nombre de moniteurs affectés à ces activités sportives. Alison Liebling, un auteur britannique qui a étudié le suicide en prison, a démontré que le fait de s'ennuyer est un facteur significatif qui pousse les condamnés à l'acte. La prison interpelle notre société, lui rappelle ses valeurs fondatrices. Elle est un reflet altéré mais nécessaire des différentes évolutions constitutives de nos moeurs et de nos institutions. Ce sont ces interrogations qu'il nous faut saisir et révéler, c'est ce lien perdu pourtant évident que nous devons créer et cultiver. La citoyenneté ne s'arrête pas aux portes des prisons. La réinsertion réussie des détenus fait partie des missions dévolues à l'administration pénitentiaire qui s'acquitte de cette tache en mettant sur pied des ateliers de confection, de menuiserie métallique et bois .La lecture est autorisée tous les jours et aux heures de promenade dans une bibliothèque aménagée, s'il en existe, dans l'établissement ou dans les dortoirs jusqu'à l'extinction des lumières. Les ouvrages sont mis gratuitement à la disposition des détenus. De plus les postes téléviseurs et les lecteurs vidéo sont autorisés dans les dortoirs, en raison d'un poste par chambre. Les téléviseurs peuvent être activés jusqu'à l'extinction des lumières, et les films suivis sur les lecteurs vidéo sont aussi réglementés107(*).

B- LA FAVORISATION DU TRAVAIL ET DE LA FORMATION

Des conditions de détention décentes peuvent s'accommoder d'une nécessaire rigueur carcérale. Il n'est que temps de donner à l'administration pénitentiaire les moyens d'un sursaut, celui-ci étant lié à une réflexion plus large sur le sens de la peine et le rôle de la prison. Le recours aux détenus volontaires et rémunérés, dans le cadre de la formation professionnelle, développé dans plusieurs établissements, est de nature à pallier les carences de l'administration tout en jouant un rôle de réinsertion pour les intéressés. Le service socio-éducatif a pour mission de participer à la prévention des effets désocialisant de l'emprisonnement sur les détenus, de favoriser le maintien des liens sociaux et familiaux et de les aider à préparer leur réadaptation sociale. Il nous faut surtout repenser l'après-prison. Nous sommes tous un peu comme des naïfs, à considérer qu'une fois que la peine est finie, le criminel s'arrête. Ce n'est pas comme un traitement antibiotique. L'arrêt de la délinquance est un problème forcément plus compliqué. Certains nécessitent plus que d'autres un accompagnement de longue durée à la sortie, accompagnement pourtant indispensable. Il faut ensuite évidemment penser logement, penser travail, penser famille et poursuite des soins si nécessaires.  Les  détenus  doivent être autorisés à travailler par le juge, ce qui représente une lourdeur administrative supplémentaire. Il existe deux types de travail en détention, fondamentalement différents : le travail délégué à un concessionnaire privé. Les postes sont extensibles à volonté, en fonction de la demande des entreprises et du nombre de concessionnaires ; les postes de travail liés au fonctionnement des établissements et appelés " service général " : les fonctions de maintenance et d'hôtellerie (restauration, blanchisserie, nettoyage) nécessitent un nombre non négligeable de détenus. Les indigents et les pointeurs constituent l'essentiel des auxiliaires du service général. Le détenu ne se trouvant en maison d'arrêt que pour un temps parfaitement indéfini, et parfois très court, il est difficile de lui proposer des formations, dont certaines s'inscrivent sur une durée longue, et notamment celle de l'année scolaire. La priorité de l'éducation nationale est de repérer les illettrés, afin qu'ils puissent bénéficier d'un (ré) apprentissage de l'écriture et de la lecture108(*). Mais l'enseignement est souvent en concurrence avec le travail. Pour envisager de " classer " un détenu au travail, on prend en compte : sa situation pénale ; son comportement, ses ressources, sa qualification professionnelle, les places disponibles. L'éducation nationale ne doit pas négliger les prisons. Il apparaît indispensable à la commission que tous les postes d'enseignants prévus soient pourvus, et d'aller au-delà, en affectant davantage de professeurs dans les prisons, et notamment dans les quartiers des mineurs afin de respecter l'obligation scolaire. Leur affectation, qui resterait fondée sur le volontariat, serait d'une durée limitée afin de tenir compte des difficultés de la fonction.

PARAGRAPHE 2 : LA REFORME DU SYSTEME PENITENTIAIRE

En France la récente réforme des services pénitentiaires d'insertion et de probation a engagé un grand bouleversement dans la vie des détenus. Auparavant, des travailleurs sociaux étaient affectés à chaque établissement tandis qu'à présent, chaque détenu a un travailleur social de référence qui n'est plus présent en permanence mais qui se présente une à deux fois par semaine.  Au Sénégal l'administration pénitentiaire a mis en place une division chargée de la réinsertion des détenus. Un travail qu'elle faisait auparavant, mais pas dans un cadre formel. Il est prévu une procédure de plainte, dont un formulaire est à la disposition du détenu au greffe ou au bureau du chef de cour. La lutte contre l'impunité doit être entrepris(B) mais la nouvelle division devrait être étudié(A).

A- LE NOUVEL DISPOSITIF SOCIAL CHARGE DE LA REINSERTION DES DETENUS

La question de l'insertion-réinsertion des détenus reste une problématique majeure pour l'Administration pénitentiaire. Il s'agit en effet de permettre à ceux qui sont dans les liens de la détention de réussir leur séjour carcéral socialement parlant, par des activités de socialisation. Dans cette dynamique, un ensemble de dispositions ont été mises en oeuvre pour permettre aux détenus de réussir leur réinsertion dans le tissu socio-économique, au terme de leur séjour carcéral. Ainsi, le décret 2001-362, relatif aux procédures d'exécution et d'aménagement des sanctions pénales, institue un service socio-éducatif au sein de chaque établissement pénitentiaire. Quatre missions sont dévolues à ces nouveaux démembrements de l'Administration pénitentiaire, mis en place depuis le premier trimestre de l'année 2009. Il s'agit d'abord de rapprocher le détenu de sa famille et de la société. Ensuite, lutter contre les effets de désocialisation de la prison. Puis, cerner la personnalité du détenu. Enfin, préparer le détenu à son retour dans la société après son séjour carcéral.

Le service socio-éducatif a pour mission de participer à la prévention des effets désocialisant de l'emprisonnement sur les détenus, de favoriser le maintien des liens sociaux et familiaux et de les aider à préparer leur réadaptation sociale. Les travailleurs sociaux assurent les liaisons avec les divers services sociaux, éducatifs, médicaux et prennent tout contact qu'ils jugent nécessaires pour la réinsertion des détenus. S'y ajoute un nouveau dispositif pour le renforcement de la réinsertion sociale du détenu. Ainsi, a été demandé aux régisseurs d'améliorer, certes, les conditions de détention des prévenus mais également d'améliorer les conditions d'alimentation et de séjour des détenus dans les établissements. Il a été dans ce cadre demandé aux régisseurs d'aménager des potagers aux abords des établissements pénitenciers, de trouver des terrains de culture pour aménager des exploitations agricoles, entre autres activités telles que les ateliers, la formation professionnelle, l'alphabétisation et les loisirs». Les problématiques touchant les individus vivant et travaillant dans les établissements pénitentiaires, détenus, intervenants et travailleurs sociaux, de même que les politiques sociales, pénitentiaires et pénales, tendant à humaniser ce côté sombre de la société, influencèrent fortement les autorités étatiques dont les réactions hautement stratégiques constituent des réponses idoines à tous ces questionnements. Les autorités judiciaires sénégalaises ont opté pour la généralisation de la création de services socio-éducatifs dans les 37 établissements pénitentiaires du pays. La première mission du chef de service socio-éducatif dans un établissement pénitentiaire c'est de rapprocher le détenu de sa famille, de la société et de lutter contre les effets désocialisant de la prison. Parce que si le détenu est isolé, coupé de la société, il y a inévitablement des conséquences néfastes sur les plans sociologique et psychologique. L'année dernière, 14 chefs de service socio-éducatif avaient été formés. Ils sont actuellement en service dans 14 établissements pénitentiaires. 

B - LA LUTTE CONTRE L'IMPUNITE

Le droit pénitentiaire, encore affecté de tares et de signes d'archaïsme profond, est entraîné, dans une lame de fond qui traverse tout le système juridique et à laquelle il ne peut échapper. Il y a encore seulement sept ans en France, aucun recours n'était ouvert aux détenus contestant les décisions les plus coercitives ou leur faisant grief, et notamment les décisions disciplinaires et d'application des peines. Ceci rendait impossible le moindre contrôle des normes qui étaient elles-mêmes sécrétées pour l'essentiel par l'administration pénitentiaire sous forme de circulaires, trop souvent en violation de la loi. La jurisprudence n'était pas plus en mesure de combler les nombreuses lacunes du droit. Ce sous-droit apparaissait de plus en plus inique et contraire aux fondements mêmes de notre société démocratique. Ces dernières années, notamment en 2000, le facteur médiatique a fait progresser les choses. En premier lieu, de nombreuses personnalités ont été mises en cause par le système pénal. Leur notoriété a permis que l'on accorde quelque crédit aux récits de prison qu'elles pouvaient faire, là où ceux des détenus plus modestes étaient tenus pour affabulations de grands voyous. Par ailleurs, le 14 janvier 2000, Le Monde publiait de larges extraits du livre de V. Vasseur, médecin-chef de la prison de La Santé, alors à paraître. Au-delà des rats, cafards ; d'autres vérités purent être dites : sous-droit ne régissant rien, inversion de la hiérarchie des normes, violation permanente de la loi, lacunes juridiques, absence de recours et de respect des principes fondamentaux. Sans attendre l'attention médiatique de 2000, le Conseil d'Etat avait, dans un arrêt du 17 février 1995, enfin ouvert des recours aux détenus objets de sanctions disciplinaires. La naissance d'une jurisprudence était absolument fondamentale à l'élaboration d'un droit pénitentiaire. Faute de jurisprudence, une matière juridique ne peut s'adapter aux changements et laisse libres les pratiques locales d'en dévier totalement109(*). Et par un arrêt du 15 juillet 2004, le Conseil d'Etat a admis la saisine de la juridiction administrative aux fins d'obtenir la désignation d'un expert pour faire constater les conditions de détention. Cet arrêt est important car il présente un lien direct avec les possibilités d'engager la responsabilité de l'Etat, comme le démontrent plusieurs affaires récentes. Dans un jugement du 27 mars 2008, le TA de Rouen estime que eu égard à la durée particulièrement longue de l'encellulement du détenu dans des conditions qui constituent un manquement aux règles d'hygiène et de salubrité, à la taille des cellules, à la promiscuité et l'absence de respect de l'intimité qui en est résulté, le requérant est fondé à soutenir qu'il a été incarcéré dans des conditions n'assurant pas le respect de la dignité inhérente à la personne humaine, en méconnaissance de l'article D. 189 du code de procédure pénale. Plus récemment, le TA de Nantes a condamné le 8 juillet 2009, l'Etat à payer des indemnités de 5 à 6.000 euros à trois anciens détenus de la maison d'arrêt de Nantes, pour des conditions de détention non conformes aux textes en vigueur. Pour le TA, « eu égard à la durée particulièrement longue de l'encellulement dans de telles conditions, à la taille des cellules, à la promiscuité et à l'absence de respect de l'intimité du requérant qui en est résulté », les requérants étaient fondés à soutenir qu'ils ont été incarcérés « dans des conditions n'assurant pas le respect de la dignité inhérente à la personne humaine » et donc « soumis à un traitement inhumain et dégradant ; que ces manquements constituent un comportement fautif de nature à engager la responsabilité de l'administration pénitentiaire »110(*). Au Sénégal alors que la loi 96-15 du 28 août 1996 a repris la définition de la torture telle qu'elle découle de l'art.1 de la convention contre la torture en l'art.296 du Code Pénal sénégalais, plusieurs cas de torture ou de peines, traitements cruels inhumains et dégradants non encore élucidés existent au Sénégal, c'est très rarement que des mesures administratives sont prises à l'endroit des agents de forces de l'ordre indexés ou responsables, encore moins des procédures judiciaires engagées jusqu'au bout. On se rappelle de la mort de Aliou Badara Diop âgé de 38ans, le 13 décembre 2007, dans les locaux du Commissariat de Ndorong à Kaolack après avoir été accusé d'abus de confiance par un policier en retraite qui avait demandé qu'on fasse la pression sur lui afin qu'il paye le reliquat d'une dette dont il était le garant, et celle d'Eric Manga. Avec ce constat, il est permis de dire qu'il y a un problème dans les procédures d'investigations des personnes appréhendées dans le cadre des enquêtes judiciaires. Mais aussi la problématique de l'impunité et de la faiblesse des mécanismes internes de prévention et d'enquêtes quand des fonctionnaires sont impliqués, est réelle et préoccupante.

CONCLUSION GENERALE :

C'est dans la dignité de la personne humaine que les droits de l'homme trouvent leur source immédiate111(*). Et en milieu carcéral, la dignité si fondamentale et essentielle n'est pas respectée la plupart du temps, dans les établissements pénitentiaires du Sénégal. Pourtant comme affirmé plus haut, le droit ne s'arrête pas aux portes des prisons .Passer d'une culture de la soumission à une culture de la responsabilité. Ainsi quelques remarques méritent d'être observés .L'administration pénitentiaire est au milieu du gué en réalité. Elle ne partage plus vraiment cette culture de l'ordre et de la soumission, sans porter encore celle de l'expression. Le dialogue au sein du personnel et entre les personnels et les détenus reste à construire certainement. La parole n'a pas acquis définitivement droit de cité. Le schéma d'une autorité responsable et aussi responsabilisatrice reste à trouver. L'équilibre ancien de la prison établi sur la base de l'obéissance est rompu. Un nouvel équilibre, fondé sur la confiance réciproque et la parole, est à inventer : confiance des personnels en leurs cadres, confiance des détenus en l'administration pénitentiaire, confiance du pays dans son administration112(*).Il faut donc développer les permissions de sortir, allonger la durée des parloirs, améliorer la configuration de ceux-ci, rendre impossibles les éloignements intempestifs, ouvrir largement l'accès au téléphone, reconnaître le droit à la sexualité, cesser de séparer des bambins de leur mère, etc. A travers notre démarche, nous sommes arrivés à la conclusion suivante : Il est évident que le gouvernement met entre autre en place de nombreux moyens de réinsertion tels que : l'enseignement, le travail, la formation professionnelle et les liens familiaux.

Cependant dans la réalité des choses ce n'est pas aussi arbitraire. En effet, les taux d'échecs de réinsertion sont très élevés. On voit cela à travers le fort taux de récidive mais aussi à
travers l'observation du mal-être en prison comme les suicides, la surpopulation...Enfin, nous réagissons sur le fait que le gouvernement ne modifie pas son fonctionnement devant une telle situation. En effet, plus le temps passe, plus il sévit ses méthodes, alors qu'il devrait plutôt chercher à encourager une diminution du nombre de personnes incarcérées. Aujourd'hui encore l'État Sénégalais fonctionne sur une base répressive et non préventive. L'intégration ou la réintégration des détenus est de nos jours encore marginalisée au lieu d'être considérée comme une priorité des priorités du système carcéral. De même avec un surveillant tuteur qui aurait pour tâche aussi de responsabiliser un groupe de détenus par un travail sur la règle et la socialisation. Il encouragerait l'apprentissage de la civilité, fondement d'une civilisation, du vivre ensemble, pour ceux qui lui sont confiés. Il aurait en effet un rôle de facilitateur et de médiateur auprès des différents partenaires pour tout ce qui concerne les démarches des détenus. Il favoriserait un retour réflexif sur tous les incidents qui émaillent leur parcours carcéral, afin d'en faire l'analyse et d'y remédier. Il présenterait les dossiers en commission d'application des peines pour l'octroi des mesures d'individualisation. Enfin, il aiderait et conseillerait le détenu dans l'élaboration d'un projet d'exécution de peine. Constats certes de première ordre mais il n'est jamais permis d'avilir ou de contredire la dignité humaine, même avec une intention bonne, quelles que soient les difficultés113(*) .La personne humaine compose une sorte d'absolu, qui exige un respect inconditionné de sa dignité. Elle ne peut jamais être transformée en un pur moyen, même lors du placement sous écrous. Les atteintes à la dignité sont nombreuses et variées. Le détenu doit être protégé eu égard à son état d'extrême vulnérabilité. Le laisser à lui même, c'est rompre ce lien insondable qui lui confère toute son humanité.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

I / OUVRAGES GENERAUX

· DELMAS-MARTY (M) : Criminalité économique et atteinte à la dignité de la personne, Paris, Edition de la Maison des Sciences de l'Homme, 1999

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· CUSSON (M) sous la direction de PRADEL (J) : Prison : Sortir avant terme, Edition Cujas, Paris, 1996

· LAÉ (J F) et PROTH(B), Les territoires de l'intimité, protection et sanction ; Presses Universitaires de France | Ethnologie française 2002/2 - Tome XXXVII

II / TEXTES

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· -Code de procédure pénal, loi n°65-61 du 21 Juillet 1965

· -Code pénal, EDJA ,1992

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· -Arrêté ministériel n°7117M .INT.D.A.P du 21 mai 1987 portant règlement intérieur des établissements pénitentiaires

· -Décret n°2001-362 du 4 mai 2001 relatif aux procédures d'exécution et d'aménagement des sanctions pénales

· -Règlement intérieur Maison d'Arrêt et de Correction de Saint-Louis, 2010

TEXTES INTERNATIONAUX

· -Pacte sur les droits civils et politiques, 10 Décembre 1966

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· -Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, OUA, Nairobi 27 juin 1981

· -Charte des nations unies du 26 juin 1945

· -Ensemble des principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement, résolution 43/173 du 9 décembre 1988

· -Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne adoptée à Nice le 7 décembre 2000

· -Règle pénitentiaire européenne, Adoptée pour la première fois en 1973, révisée en 1987, puis en 2006

· -Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus, Adoptés par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/111 du 14 décembre 1990

· -Déclaration universelle des droits de l'homme  Paris, 10 décembre 1948

· -Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, décrétée par l'assemblée Nationale Française dans sa séance du 26 Aout 1789

· -Ensemble des règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineur (règles de Beijing résolution 40/33 du 29 Novembre 1985

· -Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, résolution 45/113 du 14 décembre 1990

· -Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du 26 novembre 1987 

· -Loi pénitentiaire n° 2009-1436 du 24 novembre 2009, JORF n°0273 du 25 novembre 2009 page20192, texte n° 1 France

· -Convention internationale relative aux droits de la femme

III / DOCUMENT

· -Séance inaugurale du séminaire de recherche « Enfermements, Justice et Libertés » Université Paris I Panthéon - Sorbonne 15 septembre 2009 : Placement sous écrous et dignité de la personne, Jean-Manuel LARRALDE

· -Rapport du 5 février 2008 sur la situation particulière des femmes en prison

· -Rapport de commission d'enquête n° 449 (1999-2000) de MM. J.-J. HYEST et G.-P. CABANEL, fait au nom de la commission d'enquête de l'Assemblée Nationale, Déposé le 29 juin 2000

· -Observations préliminaires Groupe de travail sur la détention arbitraire du Conseil des Droits de l'Homme de l'Organisation des Nations Unies du 5 - 15 septembre 2009

· -Sénégal : Les « sous hommes » de Rebeuss, jeudi 17 Avril 2008

· -Avis Commission nationale de déontologie de la sécurité(CNDS) ,30 juin 2009

· -Projet n°269 Ceras, Prisons, les verrous et le droit : Entre exclusion et réinsertion Guy-Pierre Cabanel, Mars 2002

· -J.O. N° 6126 du samedi 27 septembre 2003, Surpeuplement, insuffisance de personnels, manque de moyens, Les prisons craquent

IV/ JURISPRIDENCE

· -Tribunal Administratif de Nantes ,8 juillet 2009,

· -Tribunal Administratif de Rouen, 27 mars 2008

· -Arrêt Mayzit c/ Russie, 20 janvier 2005

· -CEDH Kehayov c/ Bulgarie, 18 janvier 2005

· -Cour de Cassation, Chambre criminelle, 20 janvier 2009

· -CEDH Irlande c /royaume -uni ,18 JANVIER 1978

· -CEDH Ribitsch c / Autriche du 4 décembre 1995

· -CEDH, c/ Bulgarie, 9 juin 2005

· -Arrêt Bitchkov c/ Russie, du 5 mars 2009

· -Arrêt Kalashnikov c/ Russie du 15 juillet 2002

· -Conseil constitutionnel France, 20 janvier 1994

· -CEDH Sulejmanovic c. Italie, 16 Juillet 2009

· -CEDH, SW. C/ Royaume-Uni et C.R. c/ Royaume-Uni, 22 novembre 1995

· -CEDH Tomasi c/ France du 27 août 1992

· -CE 17 décembre 2008, O.I.P

· -Cour d'Appel de Nancy, chambre d'instruction, 1er mars 2007 

· -CEDH  Autriche contre Italie, 11 janvier 1961, req 788/60

· -CEDH, Kudla c / Pologne, 26 octobre 2008

· -CE, 30 Juillet 2003, n° 252712

TABLES DES MATIERES :

INTRODUCTION GENERALE 3

TITRE PREMIER : LA RECONAISSANCE D'UN DROIT A LA PRISON GARANT DE LA DIGNITE INHERENTE A LA PERSONNE EN MILIEU CARCERAL 4

CHAPITRE PREMIER : LE CADRE JURIDIQUE DU PRINCIPE DE LA DIGNITE DE LA PERSONNE DANS LA PROTECTION DES DROITS FONDAMENTAUX DES DETENUS 5

SECTION 1 : LA REGLEMENTATION INTERNATIONALE RELATIVE A LA DIGNITE DE LA PERSONNE 5

PARAGRAPHE 1 : LES NORMES INTERNATIONALES GENERALES 5

PARAGRAPHE 2 : LES NORMES INTERNATIONALES SPECIFIQUES 5

SECTION 2 : LES INSTRUMENTS JURIDIQUES INTERNES RELATIFS A LA DETENTION 6

B-L'HYGIENE ET LA SANTE DES DETENUS 8

SECTION 2 : L'ENCADREMENT JURIDIQUE LIE AUX RENFORCEMENTS DE L'EXECUTION ET A L'AMENAGEMENT DES SANCTIONS PENALES 8

PARAGRAPHE 2 : LE NOUVEAU CADRE DE L'AMENAGEMENT PENAL 9

A - LES NOUVELLES SANCTIONS ALTERNATIVES A L'INCARCERATION 9

TITRE DEUXIEME : UNE APPLICATION LIMITEE DU DROIT AU 10

CHAPITRE PREMIER : L'EXIGENCE DE CONDITIONS MATERIELLES DE DETENTION RESPECTUEUSES DE LA DIGNITE HUMAINE 11

SECTION 1 : LA PRISON : UN LIEU DE DESHUMANISATION ATTENTTATOIRE A LA DIGNITE 11

PARAGRAPHE 1 : UNE QUALITE GENERALE DE VIE DEPLORABLE 11

B-LA VETUSTE ET L'INADAPTATION DES PRISONS 11

PARAGRAPHE 2 : LE NON-RESPECT DES CONVENTIONS INTERNATIONALES LORS DE L'INCARCERATION : 11

SECTION 2 : L'ARBITRAIRE CARCERAL 11

PARAGRAPHE 1 : LA PROCEDURE DISCIPLINAIRE : UNE PRISON DANS LA PRISON 11

A-L'ISOLEMENT 11

PARAGRAPHE 2 : UN PERSONNEL PENITENTIARE IMPUISSANT : 12

CHAPITRE 2 : VERS L'HUMANISATION ET LA REINSERTION DES DETENUS 13

SECTION 1 : L'HUMANISATION DES CONDITONS DE DETENTION 13

PARAGRAPHE 1 : LE DROIT A LA VIE PRIVEE ET FAMILLIALE 13

PARAGRAPHE 2 : L'ENCADREMENT DE CERTAINES PRATIQUES CARCERALES 13

SECTION 2 : LE DEFI DE LA REINSERTION 13

PARAGRAPHE 1 : LES ACTIONS DE PREPARATION A LA REINSERTION SOCIALE DES DETENUS 13

B-LA FAVORISATION DU TRAVAIL ET DE LA FORMATION 13

PARAGRAPHE 2 : LA REFORME DU SYSTEME PENITENTIAIRE 13

A- LE NOUVEL DISPOSITIF SOCIAL CHARGE DE LA REINSERTION DES DETENUS 14

B - LA LUTTE CONTRE L'IMPUNITE 14

CONCLUSION GENERALE : 15

* 1 _ Des délits et des peines, 1784

* 2 _ Ce texte répétant dans le cinquième considérant la foi des peuples des Nations Unies « dans la dignité et la valeur de la personne humaine »10 Décembre 1948

* 3 _ Kant, Fondement de la métaphysique des moeurs, Traduction de Velbos, Paris 1959, p 162

* 4 _ M.Bedjaoui, La difficile avancée des droits de l'homme vers l'universalité, in R.U.D.H p 9

* 5 _ Pacte sur les droits civils et politiques, 10 Décembre 1966, art 10

* 6 _ Bernard Mathieu, Pour une reconnaissance de « principes matriciels » en matière de protection constitutionnelle des droits de l'homme, recueil Dalloz, 1995, p 211

* 7 _ Article 7, Constitution du 7 janvier 2001

* 8 _ Convention internationale relatif aux droits de l'enfant, 20 novembre 1989

* 9 _ Voir arrêt Kudla c / Pologne, 26 octobre 2000

* 10 _ Convention contre la torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants, New York, 1984, article 1

* 11 _ 28 Aout 1996, article 295-1 du code de procédure pénale du Sénégal

* 12 _ Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus, Genève, 1955

* 13 _ Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, OUA, 1981

* 14 _ Loi 65-61 du 21 juillet 1965, code de procédure pénale

* 15 _ Rapport d'activité 2008, p 76

* 16 _ Règle pénitentiaire européenne n° 72.1

* 17 _ Keba Mbaye, les droits de l'homme en Afrique, paris 1992

* 18 _ M.Delmas-Marty, Criminalité économique et atteinte à la dignité de la personne, Paris, Edition de la Maison des Sciences de l'homme, 1998, p 28

* 19 _ Constitution du 21janvier 2001

* 20 _ Code de procédure pénale du 21 juillet 1965

* 21 _ 'OUA, 25 MAI 1963 à Addis-Abeba

* 22 _ Patrick Wachsmann, Les droits de l'homme, 4 Edition Dalloz 2002, Paris

* 23 _ Décision du 11 janvier 1961, affaire Autriche contre Italie, req 788/60

* 24 _ Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement, Assemblée générale dans sa résolution 43/173 du 9 décembre 1988, principe 7 in fine

* 25 _ Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus, Adoptés par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/111 du 14 décembre 1990, principe premier

* 26 _ Et selon son Préambule, l'Union se fonde sur des valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de

Liberté, d'égalité et de solidarité. On peut par ailleurs ajouter que pour la CJCE, la dignité humaine constitue un

Principe général du droit communautaire (affaire Omega, Aff. C-36/02, 14 octobre 2004).

* 27 _ CEDH., 22 novembre 1995, SW. c/ Royaume-Uni et C.R. c/ Royaume-Uni.

* 28 _ M. Delmas-Marty, Criminalité économique et atteinte à la dignité de la personne, Paris, Edition de la Maison des Sciences de l'homme, 1998, p 28

* 29 _ Préambule de Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 

* 30 _ Voir, notamment, G. RICHARDSON, « Des droits aux attentes », in O. DE SCHUTTER, D. KAMINSKI,

L'institution du droit pénitentiaire, Bruylant /L.G.D.J., 2002, pp. 193 et s.

* 31 _ D ROMAN, « A corps défendant », Recueil Dalloz, p. 1284. Vo. également, X. PIN, La vulnérabilité en matière pénale, in F. COHET CORDEY (di.), Vulnérabilité et droit, PUG, 2000, p. 119 s.

* 32 _ § 94. Note F. SUDRE, Droit de la Convention européenne des droits de l'homme, La Semaine Juridique,

Chronique I, 291, 2001, pp. 128 s.

* 33 _ Il s'agit de l'achat, l'usage, de la vente de toutes les formes de drogue prévus par la législation

* 34 _ Haut Commissariat des Nations unies aux Droits résolution 40/33 du 29 Novembre 1985

* 35 _ Adoptées par l'Assemblée générale dans sa résolution 45/113 du 14 décembre 1990

* 36 _ Article 10, Ensemble des règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineur (règles de Beijing) résolution 40/33 du 29 Novembre 1985

* 37 _ Les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, l'Assemblée générale dans sa résolution 45/113 du 14 décembre 1990 règle 27, 28, 32

* 38 _ Les règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, l'Assemblée générale dans sa résolution 45/113 du 14 décembre 1990 règle 64

* 39 _ Règle 73 des Nations unies

* 40 _ Patrick Wachsmann, Les droits de l'homme, 4 Edition Dalloz 2002, Paris

* 41 _ 20 Vo. J. DANET, « Les conditions de détention et l'article 225-14 du code pénal », Recueil Dalloz, 20 p. 2218.

* 42 _ Rapport du 5 février 2008 sur la situation particulière des femmes en prison

* 43 _ Rapport du 5 février 2008 sur la situation particulière des femmes en prison

* 44 _ C.e.d.h arrêt Tomasi c/ France du 27 août 1992,

* 45 _ Ensemble des principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement, résolution 41 /173 du 9 Décembre 1988, principe premier

* 46 _ M. Delmas- Marty, Criminalité économique et atteinte à la dignité de la personne, Paris, Edition de la Maison des Sciences de l'homme, 1998, p 221

* 47 _ Article 295-1 Du code pénal du Sénégal

* 48 _ CEDH, 22 novembre 1995, SW. C/ Royaume-Uni et C.R. c/ Royaume-Uni.

* 49 _ Claude d'Harcourt, directeur de l'administration pénitentiaire

* 50 _ Recommandation Rec. (2006) 2 du Comité des Ministres aux Etats membres sur les Règles pénitentiaires

Européennes, adoptée par le Comité des Ministres le 11 janvier 2006, lors de la 952e réunion des Délégués des

Ministres

* 51 _ Selon son Préambule, l'Union se fonde sur des valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de

Liberté, d'égalité et de solidarité. On peut par ailleurs ajouter que pour la CJCE, la dignité humaine constitue un

Principe général du droit communautaire (affaire Omega, Aff. C-36/02, 14 octobre 2004).

* 52 _Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus résolution 45/111 du 14 décembre 1990, principe 1

* 53 _ S. kaba, les droits de l'homme au Sénégal, collection XAAM SAA YOON, octobre 1997, p 416

* 54 _ Préambule de la constitution du 7 Janvier 2001

* 55 _ Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, article 5

* 56 _ S. kaba, les droits de l'homme au Sénégal, collection XAAM SAA YOON, octobre 1997

* 57 _ Voir le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (résolution 2200 A (XXI) de

L'Assemblée, annexe, art. 10, par. 2 b)); et l'ensemble de règles minima pour le traitement des détenus

(Règles 8 et 68).

* 58 _ S. kaba, les droits de l'homme au Sénégal, collection XAAM SAA YOON, octobre 1997, p 305

* 59 _Arrêté ministériel n°7117M .INT.D.A.P du 21 mai 1987 portant règlement intérieur des établissements pénitentiaires

* 60 _ Article 32 Règlement intérieur mac de saint louis

* 61 _ Charte des droits fondamentaux des détenus, article 4

* 62 _ Article 41 Règlement intérieur mac de saint louis

* 63 _ Article 43 règlement intérieur mac de saint louis

* 64 _ Article 41 règlement intérieur mac de saint louis

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand