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Financement de navires verts : une rentabilite incertaine ?

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par Guillem Salles
Université Paris I Panthéon-Sorbonne - Master 2 Transports Internationaux 2011
  

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b) Un effet d'engrenage qui aurait tendance a gagner le secteur privé

Nous l'avons vu plus haut, l'industrie maritime essaye de « verdir son image », notamment par le biais de la commande de navires respectueux de l'environnement pour des compagnies maritimes telles que Maersk, Wilh Wilhelmsen ou Louis Dreyfus Armateurs. Les exemples ne manquent pas dans ce domaine.

Il n'y a qu'à consulter les sites internet ou les rapports annuels de toutes ces compagnies pour s'en apercevoir : le shipping vert est mis a l'honneur, chacun se voulant plus vert et plus « qualitatif » que son voisin.

En outre, un suivi attentif de la presse spécialisée dans le shipping (Lloyd's List, Tradewinds) vient corroborer ces constatations. Il n'est pas un jour sans qu'un article ou un éditorial aborde la question de la législation NOx/SOx, des solutions pour réduire les émissions de CO2 du secteur ou des actions des compagnies maritimes en faveur de l'environnement.

Cette permanence des thématiques vertes malgré la santé fragile du secteur suite à la crise 2008 et à une surcapacité désormais structurelle montre bien l'importance de la thématique au sein de l'industrie.

Certaines initiatives isolées tendent a s'institutionnaliser progressivement, réunissant armateurs et chargeurs autour de certaines pratiques vertueuses, rendant possible l'émergence d'un « engrenage vert » vers un transport maritime de qualité.

Ainsi, des initiatives telles que le Clean Cargo Group réunissent chargeurs et armateurs autour de l'incorporation de pratiques sociales et environnementales dans le shipping. Le but est de parvenir a une harmonisation des conduites et à un partage des informations accru en matière environnementale entre chargeurs et armateurs.

Dans le cadre d'une démarche commune, les membres du Clean Cargo Group se sont associés au sein du programme Beyond monitoring -au-delà de la surveillance- visant à partager et à publier les données environnementales de chacun des membres.

Le groupe Ikea a calculé que 80% de ses émissions de Co2 provenaient des transports qu'elle utilisait. Elle a donc demandé aux transporteurs auxquels elle a recours de lui fournir leurs chiffres en matière

d'émissions de Co2, afin de travailler conjointement à leur réduction. Wal-Mart a également mis en oeuvre de tels systèmes de partage des données avec ses transporteurs72.

Toutes ces initiatives marqueraient donc l'avènement de « pratiques vertes »73 dans l'industrie maritime, pratiques dont le but serait de réduire l'empreinte écologique du transport maritime par le biais d'un management environnemental mettant l'accent sur la réduction des émissions, des produits polluants (ex : peintures antisalissures toxiques), des déchets et la préservation des ressources dans les opération de manutention et de distribution des marchandises.

Selon Kee-Hung Lai et al.74, ces pratiques tendraient à devenir la norme pour les grandes compagnies maritimes, notamment pour les armements conteneurisés.

Trois facteurs pousseraient les compagnies à adopter ces pratiques vertes :

- L'existence d'un renforcement de la régulation environnementale par les groupes privés.

- La présence de normes industrielles institutionnalisées sur la protection de l'environnement (ex : l'initiative Beyond monitoring).

- Un renforcement de la demande et des exigences environnementales par les chargeurs.

Or du point de vue des auteurs, ces trois critères sont aujourd'hui respectés dans l'industrie maritime, ce qui tend a accréditer la thèse d'un effet d'engrenage vert.

Au-delà de ces « pratiques vertes » le slow steaming -réduction de la vitesse commerciale des navires destinée à économiser du fioul et à allonger les temps de voyage afin de lutter contre la surcapacité- s'est fortement développé depuis 2008, année de la crise qui a fortement impacté l'industrie maritime.

Cette pratique, qui touche essentiellement le secteur de l'armement de ligne conteneurisée75 a
contribué à faire reculer les émissions de Co2 du transport maritime de 11% entre 2008 et 201076.

72 Kee-Hung Lai et al., Green shipping practices in the shipping industry: Conceptualization, adoption, and implications, Resources, Conservation and Recycling 2010.

73 Ibid.

74 Ibid

75 L'armement conteneurisé ne représente que 4% des navires de la flotte mondiale mais 20% des émissions du transport maritime. In Pierre Cariou, Is slow steaming a sustainable means of reducing CO2 emissions from container shipping?, Euromed-Management, 2010.

76 Ibid.

Considérée comme une solution temporaire pour lutter contre la surcapacité et les prix élevés du pétrole en 2008, le slow steaming s'est pourtant généralisé, a tel point qu'il touchait 79% du service sur les lignes Europe/Asie et 42% du service en cours sur les lignes Asie/Amérique du Nord en janvier 201077 (Voir Tableau ci-dessous).

Tableau 6 : Principales caractéristiques des services de ligne régulière conteneurisées, Janvier 2010

Source : Pierre Cariou, Is slow steaming a sustainable means of reducing CO2 emissions from container shipping?, Euromed-Management, 2010.

Les armements conteneurisés ont donc vite adopté le modèle du slow steaming, dans des proportions qui ont permis de réduire considérablement les émissions de Co2 du secteur (Voir tableau ci-après).

77 Ibid.

Tableau 7: Impact du slow steaming sur les émissions de Co2 par ligne (période 2008-2010)

Source : Pierre Cariou, Is slow steaming a sustainable means of reducing CO2 emissions from container shipping?, Euromed-Management, 2010

Outre cet effet immédiat sur les émissions de Co2, le slow steaming a également contribué à répartir de manière plus harmonieuse les trafics portuaires du fait du ralentissement des rythmes de desserte des ports78.

Cet étalement de la congestion des ports a contribué à renforcer la fiabilité du service -cruciale pour l'organisation des chaînes d'approvisionnement logistiques des clients du secteur- et à réduire les retards, responsables entre autres de surconsommations de fioul par des navires voguant à vive allure entre deux escales pour rattraper ce retard79.

Cette dernière observation a son importance lorsque l'on sait que dans son récent Manifeste The new normal l'armateur Maersk Line a fait part de son intention de faire de la fiabilité de son service la pierre angulaire de ses développements futurs80.

78 Theo Notteboom et Bert Vernimmen, The effect of high fuel costs on liner service configuration in container shipping, Journal of Transport Geography, 2009.

79 Ibid. Les auteurs affirment sur ce point que la surconsommation de fioul pour cause de retard sur un service standard entre l'Europe et l'Asie peut entraîner une augmentation des coûts de soute de 20%.

80«Reliability is the new rate war». In The new normal, a manifesto for changing the way we think about shipping, Maersk Line, 7 juin 2011.

Le slow steaming, que l'on pensait éphémère, est en train de s'institutionnaliser dans le secteur conteneurisé. L'engrenage vert semble fonctionner de ce point de vue.

Et ce n'est pas Eivind Kolding, PDG de Maersk Line qui dira le contraire, lui qui avait affirmé début 2010 que le slow steaming était « parti pour durer »81.

Cette pratique est en outre profitable pour les banques commerciales.

En mobilisant plus de navires -même en période de faible activité- elle garantit à ces derniers un emploi et des revenus susceptibles faciliter le remboursement prêts par les emprunteurs.

D'autre part, en abaissant les coûts de soutes, elle permet à l'emprunteur de gagner une marge de manoeuvre vis-à-vis de ses coûts fixes, mais également vis-à-vis du breakeven de son navire (Voir figure11 page48).

Ce breakeven, terme anglais utilisé en analyse crédit maritime, correspond au niveau de revenus que le navire doit atteindre pour rembourser ses coûts d'exploitation ainsi que le remboursement du prêt -le « principal »- ainsi que des intérêts y afférents.

Si le breakeven diminue alors que les revenus restent constants, l'armateur augmente son profit tout en se ménageant une marge de manoeuvre financière supplémentaire vis-à-vis du remboursement de son crédit (voir infra figure 11).

En abaissant de manière considérable le besoin énergétique des navires et les coûts de soute y afférents, les solutions technologiques et opérationnelles décrites plus haut garantissent la profitabilité des navires, et ainsi la capacité des emprunteurs à honorer leurs traites.

Toutefois, certaines incertitudes principalement liées a l'impact des mesures environnementales sur l'économie des navires et au comportement des banques quant a l'octroi de crédits pour les navires verts pèsent comme autant d'épées de Damoclès sur le financement de ces derniers.

81 In http://www.maersk.com/AboutMaersk/News/Pages/20100901-145240.aspx

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon