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Du contentieux constitutionnel en RDC. Contribution à  l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle

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par Dieudonné KALUBA DIBWA
Université de Kinshasa - Doctorat en droit 2031
  

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§2. Les conditions particulières de recevabilité de la requête

Devant le juge constitutionnel, l'initiative de la demande était reconnue, selon les cas, au Président de la République, au Bureau du Parlement, aux Cours et Tribunaux, au Procureur Général de la République, et à titre exceptionnel selon l'article 131 de la Constitution de la Transition du 04 avril 2003, aux Parlementaires. La Constitution du 18 février 2006 a innové en élargissant le cercle des initiatives de saisine aux particuliers. Dans le détail, voyons ce qu'il en est de chaque participant éventuel à la procédure.

A. La forme de la demande

Nous étudierons cette question, eu égard à chacune des initiatives procédurales prévues par la Constitution.

1. L'initiative émanant du Président de la République

Selon les dispositions des articles 131 et 132 de l'ordonnance - loi n° 82-017 du 31 mars 1982 relative à la procédure devant la Cour Suprême de Justice, le Président de la République peut, lorsqu'il constate, à travers les lois et règlements intérieurs du Parlement, des dispositions jugées par lui comme étant inconstitutionnelles, prendre l'initiative de procéder par voie de recours en appréciation de la constitutionnalité.

Il en est de même lorsqu'il se décide de déclencher la procédure d'interprétation de la constitution. Mais la loi précise qu'il doit, pour cela, adresser une demande au Procureur Général de la République.

Cette affirmation est contredite de nos jours par le texte exprès de la Constitution qui donne le droit de saisine au président de la République sans qu'il doive s'encombrer des services du Procureur général de la République. La saisine directe par le chef de l'Etat était déjà valable pendant la transition. L'on doit donc considérer que les dispositions de la procédure devant la Cour suprême de justice relatives à la matière constitutionnelle sont abrogées en ce qu'elles contredisent les prescrits de la Constitution qui, au demeurant, règle leur sort juridique aux termes de l'article 221 de la Constitution de 2006.

Toutefois, avant la promulgation d'une loi, la Constitution de la Transition offrait au Président de la République, lorsque celle-ci contient des dispositions jugées par lui, comme étant non conformes à la Constitution, la possibilité de saisir directement la Cour suprême de justice d'un recours tendant à faire déclarer celles-ci conformes ou non à la Constitution, et cela, par voie d'arrêt1026(*). Ici, le législateur congolais semble s'être aligné sur le constituant français1027(*)

Mais, il convient de relever que, dans ce cas précis, la requête du Président de la République ne peut se faire que dans le strict respect de la procédure applicable par devant la Cour suprême de justice. Est-ce à dire que sa requête doit être signée par un Avocat exerçant son ministère près cette Cour ?1028(*)

D'emblée, nous pouvons constater que la Cour suprême de justice n'a pas adopté le point de vue du Premier avocat général de la République Katuala Kaba Kashala.

Nous approuvons la Haute Cour sur ce point précis car, le Président de la République agissant sur pied de l'article 121 de la Constitution de la transition par exemple ne saurait être valablement soumis au prescrit de l'article 2 de la procédure devant la Cour suprême de justice.

En vertu de la hiérarchie des sources des normes juridiques, il est patent que le Constituant disposant que la Cour suprême de justice est saisie par le Chef de l'Etat, ce dernier qui est une institution soit obligée de recourir aux services d'un Avocat.

Du reste, il faut combiner cet article 2 de la procédure devant la Cour suprême de Justice avec les pertinentes dispositions de l'Ordonnance-loi organique du Barreau pour se convaincre que les règles qui imposent le recours obligatoire à un avocat à la Cour suprême de justice ne sont d'application qu'en matière de cassation. L'extension qui en est faite en toutes autres matières de la compétence de la Haute Cour nous parait dénuée de toute base légale. Cette question semble soulever cependant le problème tranché récemment par la Haute Cour qui est celle du monopole de représentation des parties par les avocats près cette Cour1029(*).

Les avocats à la Cour suprême n'ont de monopole obligatoire de représentation des parties qu'en matière de cassation aux termes de l'article 103 de l'Ordonnance-loi n°79/028 du 28 septembre 1979 portant organisation du Barreau, du corps des défenseurs judiciaires et du corps des mandataires de l'Etat.

A notre avis, la confusion serait partie de l'interprétation intéressée de l'article 2 du code de procédure devant la Cour suprême de Justice qui dispose tout simplement que « la requête introductive doit être signée par un avocat à la Cour suprême de justice ». Signer une requête n'emporte aucune représentation de la partie. La signature de la requête relève des actes de postulation et non de la comparution des parties qui pose le problème de la représentation.

S'agissant d'une procédure écrite et sans partie opposée, nous ne voyons pas pourquoi la représentation de l'avocat serait indispensable. C'est ainsi, qu'à notre avis, le débat du monopole brisé ou non des avocats près la Haute Cour est mal posé par les commentateurs de tout bord de l'arrêt RR 302.

De même, ce débat a l'inconvénient majeur d'être posé par des protagonistes de l'un ou l'autre barreau qui semblent s'intéresser à leurs intérêts professionnels plutôt qu'à une interprétation désintéressée de la Loi.

2. L'initiative émanant des bureaux des chambres parlementaires

La Constitution de la Transition indiquait clairement que, le Bureau de l'Assemblée nationale et celui du Sénat pouvaient, distinctement, initier un recours en appréciation de la constitutionnalité des lois et des actes du Président de la République ayant force de loi, en adressant une demande au Procureur Général de la République.1030(*)

Cette initiative leur est aussi reconnue dans les mêmes conditions lorsqu'ils veulent solliciter de la Haute Cour une interprétation précise d'une disposition constitutionnelle.1031(*)

La Constitution du 18 février 2006 renforce ce droit de saisine des bureaux des chambres parlementaires et plus précisément, désigne les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat pour agir en justice ès qualité.1032(*)

En désignant ainsi nommément les Présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, les bureaux de ces enceintes nationales seraient-ils démunis du pouvoir de saisir la Cour constitutionnelle ? En matière d'interprétation de la Constitution, il faut considérer qu'ils n'ont pas le droit de saisine qu'ils conservent par ailleurs à titre individuel en matière de contrôle de constitutionnalité.1033(*)

En est-il de même du gouvernement qui, lui, ne peut agir que collectivement ?

3. L'initiative du Gouvernement

L'initiative du gouvernement est une innovation de la Constitution du 18 février 2006 qui range cette institution dans le cercle des autorités qualifiées pour agir en interprétation constitutionnelle.

Cette innovation pose problème dans la mesure où le chef du gouvernement est démuni pour pouvoir de saisine personnel alors qu'il est autorisé par la même constitution à agir qualitate qua en inconstitutionnalité des lois en vertu de l'article 160, alinéa 4 de la Constitution.

S'agissant donc d'une institution collégiale, le premier ministre ne saurait agir au titre de chef de gouvernement en matière d'interprétation de la Constitution sans que la question soit ainsi posée au conseil des ministres qui opinera sur un procès-verbal de cette réunion. L'absence de ce procès-verbal sera de nature à disqualifier la saisine comme n'étant pas l'initiative du gouvernement.

Cependant, au nom du gouvernement, le premier Ministre et son ministre de la justice seraient autorisés à signer la requête introductive d'instance en interprétation. Il est entendu que ledit procès-verbal pour valoir preuve de ce que le gouvernement a décidé de saisir la haute Cour doit être produit en photocopie certifiée conforme à défaut de l'être en original.1034(*)

4. L'initiative du Procureur général de la République ou celle du Procureur général près la Cour constitutionnelle

Le Procureur Général de la République pouvait, d'office, prendre directement l'initiative de saisir la Haute Cour par voie de recours en appréciation de la constitutionnalité des lois, des actes législatifs et des actes du Président de la République ayant force de loi.

Mais la loi spécifie qu'en matière de recours en interprétation de la constitution, le Procureur Général de la République ne peut déclencher cette procédure qu'à la demande, soit du Président de la République, soit du Bureau du Parlement, soit encore des Cours et Tribunaux.

Selon Mabanga Monga Mabanga, c'est en vertu des dispositions de l'article 6, alinéa 1 du code d'Organisation et de Compétence Judiciaires que le législateur a permis au Procureur Général de la République de déclencher la procédure de contrôle de constitutionnalité lorsqu'il estime que la loi ou l'acte législatif dont lui et ses subalternes sont appelés à veiller à l'application est entaché d'inconstitutionnalité1035(*). Cette interprétation de la disposition légale susévoquée semble recueillir les suffrages d'une frange de la doctrine.1036(*)

Pour notre part cependant « surveiller l'exécution des lois » n'est nullement attributif d'une compétence en cette matière plutôt spéciale. En effet, la compétence du procureur général de la République au lieu d'être recherchée dans une disposition légale par trop générale se trouve confirmée tout simplement par l'article 131 de la procédure devant la Cour suprême de justice. L'on peut toutefois en dire que dans un contexte de monolithisme politique comme celui du texte de 1982, le procureur général de la République ne pouvait et n'a pu jouer que le rôle ingrat de surveillant de la légalité mobutiste c'est-à-dire celui de bras séculier d'une légalité qu'il fallait protéger de toutes impuretés idéologiques.

Le Procureur Général de la République disposait aussi de l'initiative de saisir la Cour suprême de justice en matière de contestation électorale, spécialement en ce qui concerne l'élection du Président de la République, mais uniquement en considération des réclamations qui lui sont adressées et ce, dans le délai de huit jours.

Cette procédure est modifiée heureusement par la loi électorale en vigueur depuis 2006. Il faut donc considérer qu'étant en flagrante contradiction avec le libellé précis du texte constitutionnel, les dispositions de l'ordonnance-loi relative à la procédure devant la Cour suprême de justice contraires au texte fondamental ont été abrogées et ne sauraient être d'application. En conséquence, le procureur général de la République n'a plus compétence de saisir le juge constitutionnel qu'en matière répressive et tant que le Procureur général près la Cour constitutionnelle n'aura pas été installé.

En revanche, le procureur généra près la Cour constitutionnelle dispose aux termes de la proposition de loi organique en chantier des attributions de ministère public près cette haute juridiction.1037(*) Il exercera ses attributions devant la Cour constitutionnelle soit par voie d'avis soit par voie de réquisitoire en matière répressive. Si les choses semblent réduire les pouvoirs qu'avait jadis le Procureur général de la République, en raison de la personnalité étouffante de certains locataires de la fonction, il n'est pas de même des parlementaires qui subissent depuis la transition une cure de jouvence.

5. Les parlementaires : députés et sénateurs

En cas de contestation électorale pour les élections parlementaires, ou pour les actes d'assemblée refusant la validation des pouvoirs ou constatant la démission d'office d'un parlementaire, la loi accorde au parlementaire ou au candidat lésé la possibilité de saisir directement la Cour suprême de justice de ses réclamations.1038(*)

Par ailleurs, la Constitution de la Transition précisait en son article 131 qu'avant la promulgation d'une loi par le Président de la République, et lorsqu'il existe dans ladite loi des dispositions jugées non conformes à la Constitution, au moins le dixième des députés ou le dixième des sénateurs peuvent saisir la Cour Suprême de Justice, par voie de requête, en vue de faire déclarer ladite loi non conforme à la Constitution.

La symbolique de la fraction donne à penser que ce droit n'est donné qu'à contrecoeur ou, à tout le moins, avec une arrière-pensée de récupération politicienne.

En doctrine cependant, l'on peut noter que les recours constitutionnels ouverts aux députés et sénateurs contre les actes législatifs visent en réalité à protéger la minorité parlementaire contre les excès et l'arbitraire de la majorité politique qui légifère.1039(*)

Du point de vue politique, si des membres de la majorité saisissaient le juge constitutionnel pour censurer une loi à laquelle ils sont théoriquement censés avoir adhéré, il y aurait indubitablement rupture de confiance dans la majorité du fait de ce manque de discipline nécessaire à la survie d'un parti.1040(*)

Cette disposition constitutionnelle déroge au principe érigé par les articles 131 et 132 du texte sur la procédure devant la Cour Suprême de Justice et abroge donc lesdites dispositions légales pour contrariété manifeste, laquelle subordonne pareille démarche à la requête du Procureur Général de la République.

C'est dans ce sens que par leur recours daté du 11 mars 2004 et déposé au greffe de la Cour Suprême de Justice, le 12 mars 2004, les honorables députés précités ont sollicité l'examen de la conformité à la Constitution de la Transition de la loi portant organisation et fonctionnement des partis politiques.

L'histoire dira plus tard quelles auront été les motivations réelles en soutènement du recours ainsi formé. Le silence qui l'a entouré et le peu d'intérêt que l'arrêt intervenu en cette cause a suscité en doctrine sont surprenants.1041(*) Le juge constitutionnel a décrété l'irrecevabilité du recours formé par ces députés pour cause d'insuffisance du quorum exigé par la constitution.

Cette possibilité constitutionnelle n'est pas encore envisagée par l'opposition politique de sorte que la jurisprudence congolaise est demeurée nulle en la matière. Ce qui n'est pas du tout le cas des particuliers, nouvelle catégorie, s'il en est, des usagers de la justice constitutionnelle.

6. Les particuliers :

Les particuliers sont des sujets de droit et d'obligations qui ne ressortent pas du cercle des institutions politiques. Par contre, le terme « particuliers » doit recouvrer ici tant les personnes privées que publiques territoriales autres que l'Etat.

a) Personnes physiques

La personne physique, être doué de raison et de chair, est autorisé aux termes de l'article 162 de la Constitution à agir en inconstitutionnalité. Ceci n'appelle guère de commentaire particulier tant il s'agit d'une rhétorique élémentaire de la science du droit. Cependant, les limites et exceptions de qualité et de capacité d'exercice que prévoit le droit civil congolais ou même le droit international privé congolais devraient sans conteste trouver application devant le juge constitutionnel.

En somme, il faut être né vivant et viable1042(*) pour être une personne physique, congolaise ou étrangère, pour agir en justice constitutionnelle. C'est légèrement la situation des personnes morales.1043(*)

b) Personnes morales

Les personnes contrairement aux personnes physiques sont des êtres de raison et non de chair. Il s'agit des intérêts juridiquement protégés sous la forme tant des sociétés, des établissements d'utilité publique ou même des associations sans but lucratif, pour ce qui est des personnes morales privées. Elles agiront conformément à leurs statuts sociaux et aux lois particulières1044(*) qui les régissent par leurs organes statutaires.

Il y a d'autre part, des personnes morales de droit public tant territoriales que spécialisées. Ainsi les entreprises publiques, les établissements publics, les provinces et les entités administratives territoriales décentralisées sont des personnes de droit public habilitées à agir devant le juge constitutionnel. Elles devront agir cependant selon le prescrit du texte de création ou de la loi qui les organise.1045(*) C'est le même régime qui s'impose à l'endroit des partis politiques, catégorie spéciale des personnes morales.

c) Partis politiques

S'agissant des associations des personnes majeures possédant la nationalité de l'Etat concerné, partageant une même idéologie politique et concourant à la conquête démocratique du pouvoir et à sa conservation, les partis politiques ont par ailleurs une nature hybride. A la fois, associations de droit privé dans leur création et leur fonctionnement, les partis politiques empruntent cependant des habits de droit public lorsqu'ils concourent à l'expression du suffrage populaire. Il s'agit même d'un statut constitutionnel.1046(*)

Pour agir, l'on déterminera la qualité de la personne physique habilitée à ester en justice au nom du parti conformément aux clauses des statuts notariés et déposés au Ministère de l'intérieur qui aura à la suite délivré un arrêté ministériel d'agrément. Il s'agit là de deux conditions préalables de recevabilité de l'action d'un parti politique en justice.

En outre, le récépissé délivré par le Ministère qualifié doit tenir lieu d'arrêté d'agrément car les lenteurs et les négligences de l'Administration, de jurisprudence constante, ne devraient pas nuire à l'administré qui a souscrit aux obligations qui lui ont été posées.

Si la recevabilité de l'action du parti politique semble aisée, celle des regroupements politiques pose problème.

d) Cas spécial des regroupements politiques

Le regroupement politique est une association pour la plupart des temps momentanée des partis politiques formée dans le but d'obtenir les suffrages de la population ou même de partager l'exercice du pouvoir politique.

Le regroupement politique qui se forme ainsi librement n'est pas doté de personnalité civile. Cependant, la loi électorale de 2005 cite parmi les personnes qualifiées pour agir en contestation électorale cette association momentanée. Si cela est compréhensible politiquement, la question qui se pose en droit de savoir si la simple citation dans une disposition légale à conféré la personnalité civile aux regroupements politiques.

Nous pensons qu'ils n'ont pas le pouvoir d'ester en justice sans que la loi ne leur ait accordé la personnalité civile cependant l'action engagée en leur nom doit l'être ut singuli par chacun des partis membres du regroupement. Autrement, une anomalie sera consacrée par notre droit positif qui perdra ainsi sa cohérence normative nécessaire à l'introduction de la cause devant le juge constitutionnel.

B. L'introduction de la cause et la publicité

En matière de recours en annulation et de recours de pleine juridiction, la loi prévoit qu'au delà des mentions obligatoires de la requête, celle-ci devra contenir un exposé des faits et des moyens1047(*). Cette exigence peut être nécessairement invoquée à l'appui de la requête saisissant le juge constitutionnel. Il appartient en effet au futur législateur organique de réintégrer cette disposition dans la procédure en matière constitutionnelle.

Les moyens dont parle la loi s'entendent des arguments tant de fait que de droit qu'un plaideur doit articuler à l'étai de sa demande ou de sa défense. Ceux-ci doivent du reste être exposés de manière claire pour écarter ainsi l'application de l'irrecevabilité qu'encourrait une demande obscure ou confuse. L'obscurité du libellé (obscuri libelli) est sanctionnée par l'irrecevabilité de la demande ou par le non fondement lorsqu'il s'agit d'une défense ainsi mal assurée.

De plus, la future loi organique spécifie que les requêtes portées au rôle de la Cour seront, à la diligence du greffier, signifiées dans les quinze jours de leur réception aux parties en vue de leurs conclusions.1048(*)

La jurisprudence de la Haute Cour arrête, unanimement, que le dépôt au greffe aux fins de publication ainsi que la consignation des frais pour ce faire constituent une preuve de la satisfaction de cette exigence, les négligences et lenteurs de l'Administration ne pouvant nuire aux particuliers1049(*).

Au titre des mesures complémentaires de publicité, vu que les arrêts de la Cour constitutionnelle sont opposables à tous, il est impérieux qu'ils soient publiés au journal officiel avec en annexe la requête qui a saisi la Cour ainsi que les autres actes de procédure qui ont été posés.

Ceci a l'avantage de permettre un contrôle par l'opinion qui est toujours le soubassement de la transparence démocratique dans l'Etat de droit que veut la République démocratique du Congo. En effet, le juge constitutionnel ne doit aucunement être dans l'ombre de la paperasserie administrative qui lui donnerait faussement l'impression bien malheureuse qu'elle est une sorte de loge mystique décrétant des oracles plutôt que des jugements humains. Pour éviter cette impression, la requête elle-même doit être transparente en contenant certaines mentions.

C. Les mentions de la requête introductive d'instance

L'étude des mentions que doit comporter une requête paraît redondante au regard du point dejà consacré à cette question. Cependant, il est utile de repréciser certaines mentions qui ont un intérêt procédural évident.

1. L'identification de la partie requérante

La partie requérante devant le juge constitutionnel doit être identifiée de manière on ne peut plus claire. Une faille à ce niveau aboutit inévitablement à une irrecevabilité. C'est ainsi que le requérant indiquera son nom 1050(*)avec tous ses éléments constitutifs, son domicile1051(*) ou sa résidence,1052(*) et fournira tous autres éléments susceptibles de l'identifier sans encombre.

2. L'identification de la partie adverse

L'identification de la partie défenderesse est une nécessité. Elle permet de savoir contre quelle institution est dirigé le recours constitutionnel de sorte que soit signifiée la requête en vue d'obtenir les conclusions ou le mémoire de cette partie.

Il est dès lors nécessaire de l'identifier à son tour. Comme il s'agira toujours d'une autorité publique, plus précisément d'une institution qui a pris un acte inconstitutionnel, il suffira d'indiquer la dénomination officielle de cette autorité, son siège légalement établi et éventuellement, la personne physique qui est censée avoir posé l'acte attaqué.

Cette manière d'identifier la partie défenderesse a l'avantage de faire éviter au requérant le risque d'une irrecevabilité pour mauvaise direction. Par ailleurs, le fait de solliciter des choses sur lesquelles le juge constitutionnel ne possède aucune compétence entrainera, à coup sûr, un arrêt d'incompétence qui n'empêche guère qu'un autre juge soit ressaisi.

Il en est de même de l'absence de l'objet clair et précis qui pourrait entraîner d'autres ennuis procéduraux.

3. L'objet de la demande

La requête en inconstitutionnalité comme toute requête devant le juge constitutionnel doit avoir un objet clair et précis. De la jurisprudence de la Cour suprême de justice, il appert que des requêtes contenant des objets confus, imprécis ou tout simplement flous ont été rejetées sans que les juges aient ressenti la nécessité de se justifier outre mesure1053(*). En effet, l'obscurité du libellé entraine inéluctablement l'irrecevabilité de la requête.

La demande doit être intelligible c'est-à-dire compréhensible par toute personne de bonne foi et de formation moyenne. Par ailleurs, le juge doit être mis dans la possibilité de comprendre ce que demande le requérant et les défenses que le défendeur oppose. Autrement, les demandes absurdes n'ont de place devant le juge constitutionnel. La clarté de cette demande dépend aussi des pièces que le requérant doit annexer à sa requête.

4. L'inventaire des pièces formant le dossier

L'inventaire des pièces est une formalité de transparence judiciaire car il permet à chaque partie au procès constitutionnel de connaître parfaitement les moyens et les pièces sur lesquelles chacune des parties élève ses prétentions.

Il est utile de former cet inventaire des pièces essentielles, celles qui ont un rapport direct et pertinent avec les articulations de la requête ou du mémoire contenant les conclusions du défendeur.

En effet, la décision attaquée ne saurait manquer dans l'inventaire des pièces. Toute autre pièce pouvant établir la qualité, le domicile et partant identifier la partie devra être produite aux débats pour assurer non seulement leur loyauté mais la transparence judiciaire qui est un corollaire du principe du contradictoire.

L'inventaire des pièces ainsi formé doit être signé et daté de la main même de la partie qui le produit et contresigné par le greffier qui le reçoit aux fins de publication et de signification.1054(*) Cette formalité met effectivement la cause en l'état de recevoir jugement devant le juge constitutionnel.

* 1026 Article 131 alinéa 1 point 1 de la Constitution du 04 avril 2003, in JORDC, n° spécial du 5 avril 2003, p.34

* 1027 Lire, pour les détails, DUBOUIS (L.) et PEISER (G.), Droit Public, 16ème édition, coll. Mémentos, Paris, Dalloz, 2003, pp.87-89.

* 1028 KATUALA KABA KASHALA, op.cit., p.8

* 1029 CSJ, 4 mai 2000, RR 302, MINOCONGO Sprl contre SOCIMEX, le Tribunal de Paix de Matadi et le Procureur Général de la République, Revue de droit africain, numéro 16, octobre 2000, R.D.J.A., Bruxelles, pp. 536-551. Lire les commentaires de Maître WASENDA N'SONGO et ceux de Vincent KANGULUMBA BAMBI MUTANGA et Raoul KIENGE-KIENGE INTUDI dans la même Revue.

* 1030 Article 131 de la Constitution de la transition.

* 1031 Article 150 de la Constitution de la transition.

* 1032 Article 161, alinéa 1er de la Constitution du 18 février 2006.

* 1033 Article 161, alinéa 1er de la Constitution du 18 février 2006.

* 1034 C'est la jurisprudence constante de la Cour suprême de justice qu'il faut sauvegarder car elle garantit les droits des parties.

* 1035 MABANGA MONGA MABANGA, Le contentieux constitutionnel congolais, Kinshasa, Editions Universitaires Africaines, 1999, p.61.

* 1036 KILALA Pene-AMUNA (G.), Attributions du ministère public et procédure pénale, tome 1, Kinshasa, Editions AMUNA, 2006, pp.82-84.

* 1037 Article 13 de la proposition de loi organique relative à la Cour constitutionnelle.

* 1038 Lire l'article 144 de la procédure devant la Cour suprême de justice.

* 1039 Lire ERGEC (R.), Introduction au droit public. Tome 1, le système institutionnel, 2ème édition, Bruxelles, Story Scientia, 1994, pp.154 et s.

* 1040 Lire avec intérêt TURPIN (D.), Droit constitutionnel, Paris, P.U.F., 1997, p.503 sur les développements qu'il fait à propos du rôle régulateur du Conseil constitutionnel , « rôle renforcé avec l'alternance de 1981 en agissant comme une sorte de frein sur le balancier politique, rappelant à travers son contrôle dû à l'inflation législative qu'une certaine continuité constitutionnelle l'emportait sur les bouleversements partisans, changement de majorité ne signifiant pas changement de régime » et pendant les cohabitations 1986-1988 et 1993-1995, le Conseil constitutionnel a eu à « départager plusieurs lectures contradictoires de la Constitution » ; VELU (J.), Droit public, tome 1, Le statut des gouvernants(I), Bruxelles, Bruylant, 1986, pp.211-266.

* 1041 Lire cependant KALUBA DIBWA (D.), La saisine du juge constitutionnel..., op.cit, pp.100-118.

* 1042 Code la famille, article 211.

* 1043 Code de la famille, article 213.

* 1044 Il s'adit du décret de 1887 relatif aux sociétés commerciales et de la loi n°004/2001 du 20 juillet 2001 portant dispositions générales applicables aux associations sans but lucratif et aux établissements d'utilité publique, JORDC, 42ème année, 15 aout 2001.

* 1045 C'est en effet le droit commun des personnes morales qui postule cette exigence qu'elles ne peuvent agir que par des personnes physiques attitrées notamment par l'acte constitutif.

* 1046 Lire article 6 de la Constitution du 18 février 2006.

* 1047 Article 76 de la procédure devant la Cour suprême de justice.

* 1048 Article 91 de la proposition de loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.

* 1049 CSJ, R.P. 30, 3 mai 1972, in B.A.C.S.J., 1973, p.52. Cet arrêt est reproduit par l'arrêt RA 278 du 21 décembre 1995, Archidiocèse de Kinshasa contre la République du Zaïre, BACSJ., 2003, pp.139-142.

* 1050 Code de la famille, article 56.

* 1051 Code de la famille, article 161.

* 1052 Code de la famille, article 169.

* 1053 Le rigorisme parfois excessif de la Cour suprême de justice est connu, lire dans ce sens DIBUNDA KABUINJI MPUMBUAMBUJI, Répertoire général de la jurisprudence de la Cour Suprême de Justice, Kinshasa, C.P.D.Z., 1990.

* 1054 Voir article 2 de la procédure devant la Cour suprême de justice.

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