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Les principales causes et perspectives de développement pour la lutte contre la pauvreté urbaine à  Kinshasa

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par Isaac MAYELE
Université catholique du Congo  - Gradué en économie et développement 2008
  

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I.2. BREFS REGARDS SUR LE CONCEPT » PAUVRETE »

La « pauvreté » ne renvoie pas qu'au manque de revenu, elle est un concept multi dimensionnel. Pour le courant WELFARIST, l'utilité est une fonction croissante de la consommation, c'est-à-dire une fonction croissante du revenu d'un individu ou d'une nation. Il fallait dès lors accroître la richesse pour améliorer les conditions de vie. D'autres courants mettent l'accent sur les besoins de base, soit sur les capacités. Il a fallu attendre une période relativement récente pour voir apparaître des théories proposant une vision plus large du développement humain.

C'est dans ce contexte qu'intervient l'approche par les capacités d'ARMATYA SEN4(*). Il remet en question le lien direct entre les ressources dont dispose un agent et son niveau de bien-être. D'après lui, il existe quelques points qui ne garantissent pas l'équivalence entre les ressources d'une personne et son niveau de bien-être. Il part ainsi de deux faits, à savoir :

· Le niveau de vie d'une personne ne dépend pas de ses ressources (Commodities) mais aussi de sa capacité à les transformer en paniers de biens dont il peut disposer (Entitlement).

· L'usage qu'une personne peut faire des ressources dont il dispose et qui dépend d'un certain ensemble de caractéristiques personnelles et sociales.

Ces différents faits déterminent en soi l'espace de choix possible d'une personne. Plus l'espace des capacités est réduit, plus l'individu sera pauvre en termes de choix de vie. SEN note l'existence d'un lien étroit entre les dénis de libertés qui conduisent à l'impossibilité de développer ses facultés individuelles et le maintien des revenus à un niveau bas. Il considère dès lors la pauvreté comme une privation des capacités de base et non pas comme simplement un revenu faible. Les différents dénis de libertés qui ne font qu'accentuer la pauvreté des ménages sont principalement : la famine, la sous alimentation, la malnutrition, les conditions de logement précaires, l'accès à l'éducation et aux soins de santé, les conditions d'existence précaires, le bas niveau d'éducation et d'instruction, l'exclusion du monde de travail, les discriminations sexuelles et la réduction des libertés civiles et politiques. L'auteur ajoute que, la pauvreté est un monde complexe, multiforme, qui exige une analyse précise de toutes ses nombreuses dimensions car les êtres humains sont extrêmement divers de par leur mode de vie.

La définition de la pauvreté varie généralement selon deux types d'approches, l'une plus globalisante et l'autre basée sur les trois dimensions de la pauvreté suivante : l'alimentation, les revenus et les besoins fondamentaux. Cette dernière approche est celle qui est souvent la plus utilisée. Elle englobe dès lors trois types de pauvreté :

· La pauvreté alimentaire ;

· La pauvreté monétaire et ;

· La pauvreté humaine.

Il sied à ce stade de spécifier que les auteurs distinguent généralement la pauvreté en l'opposant à la richesse. Les indicateurs qu'ils utilisent pour appréhender peuvent être différents. Suivants les pays et /ou les contextes, l'idée qu'on se fait de la pauvreté change. Si l'opposition entre la pauvreté et la richesse reste permanente, elle prend néanmoins des sens très différents. A chaque contexte correspond une conception de la pauvreté. La plupart des auteurs ont essayé de donner une définition de la pauvreté. Mais un parcours cursif des définitions proposées montrent combien chaque auteur se sent « limité » pour donner une définition précise.

Certains auteurs évoquent seulement l'aspect argent pour distinguer le pauvre du riche, mais cela ne suffit pas, il faut y ajouter quelque chose de plus pour faire cette distinction. Parmi ces auteurs, nous pouvons évoquer le cas de WRESINSKI (1987) qui définit la pauvreté en la distinguant de la précarité. Pour lui, la pauvreté est l'absence d'une ou de plusieurs sécurités notamment celle de l'emploi qui permet à la personne d'assurer ses obligations professionnelles, familiales et sociales et de jouir de ses droits fondamentaux. Tandis que GILLIS (1990) définit la pauvreté en parlant de l'individu qui s'estime pauvre parce que privé des avantages dont jouit autrui dans la société. L'auteur, dans ce sens, a mis l'accent sur le caractère relatif et subjectif de la pauvreté. VANDERSCHUEREN (1996), quant à lui, définit la pauvreté comme l'incapacité pour un individu, une famille ou une communauté de satisfaire certains besoins minima. L'accent est mis chez lui sur le caractère absolu et objectif de la pauvreté. CAMARA (2001) désigne par la pauvreté comme un certain niveau de manque ou d'insuffisance dans l'existence ou le bien être de l'homme. Pendant que KALONJI NTALAJA (2001) catégorise trois sortes de pauvreté, à savoir : la pauvreté primaire, secondaire et tertiaire. Selon lui, la pauvreté primaire est un manque intrinsèque de capacités d'actions nécessaires à une existence humaine alimentaire, dont la responsabilité n'incombe pas à la personne concernée (un handicapé physique ou un retraité par exemple).

L'existence d'un système de sécurité sociale efficace permet de pallier cette catégorie de pauvreté. La pauvreté secondaire, selon le même auteur, est une pénurie intrinsèque des capacités d'actions nécessaires à la satisfaction des besoins de base surtout l'alimentation, la santé, et l'instruction par une personne physique ou morale apte. La pauvreté tertiaire ou de performance, d'après lui, est une pénurie des capacités d'actions instrumentales ou fonctionnelles indispensables pour obtenir et/ou soutenir certaines performances, nécessaires à un fonctionnement viable5(*).

En dehors des auteurs chercheurs, il y a aussi de grandes institutions qui s'intéressent au concept de pauvreté. Par exemple, le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), distingue trois types de pauvreté : la pauvreté monétaire, alimentaire et humaine.

Le PNUD parle de la pauvreté monétaire lorsqu'on est dans une situation où le revenu du citoyen est insuffisant pour satisfaire ses besoins de subsistance. Il parle de la pauvreté alimentaire en prenant en compte les besoins minima en termes alimentaires.

D'habitude, les Institutions des Nations Unies utilisent deux méthodes de la prise en compte de la pauvreté :

· La méthode de l'équilibre calorico-protéine de la FAO ;

· La méthode anthropométrique de l'OMS.

Selon la FAO, toute personne adulte qui consomme moins de 2 300 calories/jour est considérée comme pauvre. L'OMS, quant à elle, utilise le rapport anthropométrique chez les enfants. Cette méthode met l'accent sur le rapport poids/âge, le rapport poids/taille et le rapport taille/âge qu'elle compare aux indicateurs retenus pour une population d'enfants normaux.

Le PNUD définit la pauvreté humaine comme étant le manque de capacités humaines essentielles. La pauvreté humaine touche les aspects économiques de la pauvreté à travers les conditions de vie mesurables, par des indicateurs composites comme : accès à l'assainissement, au logement, à l'eau potable, aux soins de santé, à l'éducation, à l'espérance de vie, etc.

La Banque Mondiale mesure la pauvreté monétaire en fixant le niveau de revenu à 1 $ /personne/jour. Il est généralement mesuré en termes de parité de change pour pouvoir saisir le pouvoir d'achat.

Ces différentes définitions témoignent des difficultés et des divergences au sein parfois d'une même école ou discipline scientifique ou encore d'une même institution. C'est ainsi qu'il est incertain que les individus ressentent identiquement leur situation de pauvreté. Le relativisme de la situation de pauvreté émane des différences que l'on observe entre les différents groupes de référence des individus, entre les communautés, entre les pays. Ceci rend inévitablement difficile et hardeuse une définition univoque de la pauvreté. Néanmoins, la littérature autour du concept de pauvreté nous donne quatre éléments importants.

Le premier élément propose de faire la distinction entre le concept pauvreté et celui de la précarité comme un état de vulnérabilité. Elle est une insécurité qui devient "indicateur de pauvreté" quand elle affecte plusieurs domaines de l'existence, quand elle devient persistante et qu'elle compromet, pour un individu, les chances de réassumer ses responsabilités et de conquérir ses droits par lui-même, dans un avenir prévisible6(*).

Cette situation conduit les individus à perdre le sens de la perspective ou l'espoir de changement. Dans ce sens, on peut distinguer :

v Les pauvres chroniques touchés dans leur capital des dotations (en anglais "endowment") en termes physiques ;

v Les pauvres temporaires, qui nécessitent essentiellement une « aide- passerelle » pour traverser une période difficile, celui que les Kinois nomment en général Mpiaker, Mpiaka en français qui signifie dénuement temporaire ; 

v Les personnes invalides ou très âgées qui peuvent glisser vers l'état de pauvreté. Cette distinction met l'accent tant sur le caractère chronique que sur l'aspect multidimensionnel de la pauvreté.

Le deuxième élément explique que les définitions de la pauvreté sont souvent moins strictes. Cette tendance définit les pauvres comme ceux qui s'estiment privés des avantages dont jouit autrui dans la société où ils se jugent partie intégrante selon leur groupe de référence en termes psychologiques. Les définitions moins strictes mettent l'accent sur le caractère relatif et subjectif de l'individu (l'individu compare sa situation à celles de ses concitoyens).

Dans la troisième tendance, nous pouvons compter les organismes comme la Banque Mondiale qui définissent la pauvreté à partir d'un critère absolu. Ils décrivent la pauvreté comme l'incapacité pour un individu, pour une famille ou une communauté de satisfaire certains besoins minimums. Il s'agit notamment de l'avoir, du revenu, du niveau de consommation dont l'indicateur le plus usité est le seuil de pauvreté absolu d'1$ par jour et par personne.

Le quatrième élément est d'une importance capitale par son innovation de la définition de la pauvreté qui n'est plus décrite uniquement en terme instrumental du niveau de revenu et de capital humain. La pauvreté est alors défini comme un état des privations des capacités élémentaires qui permettent aux individus de réaliser un certain nombre de choses et de jouir de la liberté de mener la vie qu'ils ont raison de souhaiter et non une simple faiblesse des revenus même si l'absence de ceux-ci constitue la principale source de privation de capacités d'un individu. C'est d'ailleurs ce que développe ARMATYA SEN en identifiant la pauvreté en termes de privations des capacités, privations qui ont une importance intrinsèque (à la différence des revenus dont la signification est instrumentale).

En effet, d'autres facteurs influencent la privation des capacités ou la pauvreté réelle, hormis la faiblesse des revenus (le revenu n'est pas le seul instrument qui produise des capacités). La relation instrumentale entre pénurie des revenus et pénurie des capacités varie d'un pays à l'autre, d'une famille à l'autre, d'un individu à l'autre (l'impact du revenu sur les capacités est contingent et conditionnel).

Ces sont souvent des variations sur lesquelles le contrôle des individus est inexistant ou limité. En d'autres termes, il peut y avoir un couplage des avantages associant pénurie des revenus et difficultés à convertir ceux-ci en fonctionnements (capacités). Certains groupes n'ont pas de revenus, d'autres sont affectés par des difficultés de conversion qui se surajoutent à de faibles revenus. Enfin, l'approche de la pauvreté par le revenu peut être limitée par la nature de la répartition familiale du revenu. Si une part disproportionnée de revenu est affectée aux besoins de certains membres au détriment des autres, dans ce cas la prise en compte du revenu familial comme critère d'évaluation des politiques publiques d'aide ne va pas refléter nécessairement les privations auxquelles certains de ses membres sont confrontés.

En d'autres termes, ARMATYA SEN fait une distinction entre la pauvreté comme faiblesse des revenus et la pauvreté comme inadéquation ou privations des capacités (santé, éducation, alimentation, etc.). Il souligne également la relation étroite qui existe entre les deux réalités : pour un individu, le revenu est un moyen essentiel pour développer ses capacités et, le fait d'améliorer les capacités dont il dispose pour conduire sa vie, tend à faciliter ses possibilités d'accroître sa productivité et ses revenus. Non seulement l'accès à l'éducation et aux soins a des conséquences positives sur la qualité de la vie, mais il accroît la faculté d'une personne de gagner sa vie et d'échapper à la pauvreté par le revenu ou la pauvreté monétaire. L'approche de SEN en termes des capacités humaines de fonctionnement a fait évoluer le concept de développement vers celui de développement humain. Ce dernier permet de définir aujourd'hui la pauvreté non plus uniquement comme un état de pénurie matérielle et de détresse mais aussi en prenant compte de la dimension complexe et pluridimensionnelle de l'existence des individus par laquelle le phénomène de la pauvreté ou de la misère se manifeste. Les deux concepts « Développement humain » et « Pauvreté » ont donc un caractère complexe.

Dans ce sens, la notion de capacités-potentialités "endowments" de SEN couvre cette dimension complexe et multidimensionnelle de l'existence d'un individu en se définissant comme l'ensemble des opportunités dont il dispose mais aussi en fonction de ses souhaits et de ses volontés (un développement humain intégral prendrait donc en compte la spécificité de l'homme en favorisant l'épanouissement de toutes ses capacités). De cette façon la pauvreté est comprise comme l'impossibilité pour un individu ou une personne d'utiliser ses capacités ou les opportunités dont il est privé au cours de son existence.

Notre choix pour l'approche de SEN se justifie donc par sa vision plus globale du phénomène de la pauvreté (en termes de revenus et capacités) et par le fait qu'elle nous paraît être la plus adéquate pour analyser la situation de pauvreté que traverse notre pays, la République Démocratique du Congo. Comme la pauvreté est définie par SEN comme l'impossibilité pour un individu d'utiliser ses capacités, le déni de libertés (choix) et la privation des opportunités pour améliorer son existence, elle nous aidera de chercher à percevoir la situation de la pauvreté kinoise sous l'angle ci-haut présenté par ARMATYA SEN.

Toutefois, l'élément « manque » se retrouve dans presque toutes les définitions. Mais cet élément « manque » est difficile à établir et n'est pas toujours défini suivant les mêmes normes. Il reste cependant que, si on superpose tous ces essais de définitions, il se dégage quelques traits communs qui sont considérés comme indicateurs de pauvreté.

* 4 _ F.L. NZUZI, C.T. MBUYI, Op. Cit., p.26.

* 5 _ F.L. NZUZI, C.T. MBUYI, Op. Cit., p.28.

* 6 _ WRELINKI, Grande pauvreté et précarité économique et sociale (Rapport présenté au conseil économique et social), In : Journal Officiel de la République Française, 23 Février 1987, pp.1-4.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery