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Les principales causes et perspectives de développement pour la lutte contre la pauvreté urbaine à  Kinshasa

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par Isaac MAYELE
Université catholique du Congo  - Gradué en économie et développement 2008
  

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II.3.2 DE LA MEGACITE AUX MEGAPROBLEMES

Kinshasa vit de grandes mutations depuis 196014(*). Elle est de plus en plus peuplée et spacieuse. Avec un taux de fécondité d'environ sept enfants par femme, avec un taux de croissance de sa population estimé à environ 6% et avec un nombre moyen de 6,7 membres par ménage (MICS)15(*), la ville de Kinshasa compte aujourd'hui plus de 8 millions d'habitants.

En 1960, elle n'avait que 400 000 habitants, sa population a plus que décuplé, car elle est plus de 6 fois millionnaire. Les projections du FNUAP16(*) (1996) montrent que Kinshasa va continuer à se développer avec un taux supérieur à 3% par an entre 2000 et 2015 pour abriter un effectif de plus de 10 millions d'habitants. Ces chiffres montrent que l'explosion urbaine de Kinshasa ne va pas s'estomper de sitôt, bien que le taux de sa croissance démographique aille baisser par rapport aux années 90.

Entre 2000 et 2015, les villes de Dhaka, Heyderabad, Kerachi, Lagos, Lahore et Kinshasa vont continuer à se développer à ce taux supérieur à 3% l'an. En Afrique, seules Lagos et Le Caire seront plus peuplées que Kinshasa. Avec ses 10 millions d'habitants en 2015, Kinshasa fera partie du club très réduit des 30 plus grandes villes au monde. Plus précisément, elle occupera le 28ème rang avant Paris et Madrid. L'explosion de Kinshasa n'est pas seulement démographique mais aussi spatiale. Sa superficie urbanisée avait atteint déjà 60 000 hectares en 2 000 contre 18 000 en 1975, 13 000 en 1968, 4000 en 1960 et 2 300 en 1950. Kinshasa consomme beaucoup d'espace et la demande en logement croît rapidement. On estime à 500 000 le nombre de parcelles actuellement à Kinshasa.

Selon les experts de l'archidiocèse de Kinshasa (1990), Kinshasa s'établit sur 375 540 ha en 1989, 187 770 ha en 1975, 106 297 ha en 1967. L'accroissement naturel, l'exode rural et l'incorporation dans la ville des périphéries rurales sont les causes de l'explosion urbaine. Selon les experts de l'archidiocèse de Kinshasa, la ville s'étalait « sur plus de 30 km d'Est en Ouest et sur plus de 15 km du nord au sud ».

Les conséquences de cette explosion urbaine ne se font pas attendre : étirement des distances ; « squattérisassions » des espaces, construction sur des terrains non aedificandi, chômage, pollution urbaine, criminalité, déperdition scolaire, VIH/SIDA. En effet, Kinshasa est devenue une ville mastodonte très étalée. Se déplacer à Kinshasa pour le travail, pour se rendre à l'école ou au centre-ville est un besoin primordial de plus en plus difficile à satisfaire. Les distances à parcourir sont très longues. La marche à pied devient le mode le plus simple de déplacement à cause de l'insuffisance des transports publics. Les emplois urbains sont rares même pour les diplômés. Seul le secteur informel reste le gros pourvoyeur d'emplois. Kinshasa abrite de plus en plus d'agro-citadins qui font de l'agriculture intra et interurbaine. A titre d'exemple, la foire agricole organisée du 17 au 31 août 1996 à Mont-Ngafula (148 000 habitants) avait rassemblé les représentants des 15 000 exploitants agropastoraux de la commune répartis en quatre catégories : les concessionnaires et les fermiers, les maraîchers flottants et les pisciculteurs. Selon l'enquête du BIT, le secteur informel offre des emplois à plus de deux millions de travailleurs à Kinshasa (PNUD, 2000).

Parmi ces millions de travailleurs informels, il y avait en 1997 près de 7 255 agriculteurs urbains qui pratiquaient du maraîchage dans un espace total de 720 ha dans les vallées aménagées de Ndjili, Kimbanseke, Funa, Manzanza, Kinsenso, Tadi, Bandalungwa, Lemba-Umbu, Masina Pool, Bono, Mokali, Lukaya, Tshangu, Mangu et Dingidingi. Ils produisent par an 30 000 Tonnes de fruits et légumes. Plus ou moins 8 000 kinois font du jardinage parcellaire ou le long des artères principales. Malheureusement, le volume de leur production n'a jamais été étudié ou quantifié. Les femmes, quant à elles, subissent la ville. En effet, la pauvreté urbaine se féminise. Ce sont elles qui subissent de plein fouet les insuffisances des services urbains : non autonomisation, corvée d'eau, portage du bois de chauffe, impossibilité de soigner et de scolariser les enfants, femmes chef de ménage, discrimination sur le marché de l'emploi, violence faite aux femmes, VIH/SIDA, etc. La prise en considération des besoins des femmes et de leur association à la gestion de la ville est ignorée par les hommes.

Se loger à Kinshasa est un casse-tête à cause de la spéculation foncière et immobilière. Après les années fastes du boom du cuivre et confronté aujourd'hui à un lourd endettement, le gouvernement s'est engagé de la politique d'habitat qu'il avait pourtant très amorcé avec la création de la caisse d'épargne et crédit immobilier (CNECI) dans les années 70. Les graves conséquences se font aujourd'hui sentir. La bidonvilisation de Kinshasa est en marche. Des millions des kinois sont mal logés et des vastes bidonvilles (Pakajuma, grand mode, Bribano dans la commune de Limete) se sont développés au coeur de Kinshasa.

Or, la croissance rapide d'une ville impose non seulement de créer des nouveaux quartiers mais aussi de structurer en profondeur les établissements humains et les infrastructures publiques existantes. Hélas ! Rien de concret n'est fait. Les témoignages sur la crise du logement abondent. Ici, le Kinois ne ferme pas la porte de la chambre par ce que les jambes dépassent le seuil. Là, ce sont les voitures en panne dans les garages qui servent des couchettes. Plus loin sur le fleuve, le Kinois dort dans des épaves des bateaux en ruine. Sur le rail, ce sont des vieux wagons abandonnés qui sont transformés en logis. Il arrive que certains sans abris transforment les égouts ou encore les buses abandonnées en logis. C'est le cas dans les communes de Lingwala et de Kinshasa.

Kinshasa a perdu son éclat de Kin-la-belle des années 50 à cause de son insalubrité croissante. En haut sur les collines, les 1 625 000 Kinois produisent quotidiennement 1 500 m3 de déchets qu'ils éliminent en les jetant carrément dans les ravins destructeurs du site. En bas dans la plaine, l'état de l'environnement est tout autre. La crasse est partout. Ici, il n'y a pas des ravins où 4 375 000 kinois vont jeter les 3 500 m3 qu'ils produisent par jour. Par conséquent, les dépotoirs anarchiques s'implantent n'importe où et n'importe comment : dans les ronds-points, dans les marchés, dans les cours des édifices publics, dans les emprises ferroviaires et routières, sur les berges et cours d'eau et même dans les hôpitaux.

L'hôtel de ville s'en charge pour l'évacuation des ordures par l'entremise de PNA, mais nous remarquons que les résultats sur terrains ne représentent qu'une gouttelette dans la mer, faute de moyens. Faire face à cette insalubrité, la municipalité de Kinshasa lance presque toutes les années, les opérations « Kin propre », mais qui échouent par manque des moyens et de planification : la collecte, le transport, le traitement/élimination et la valorisation des ordures pas bien organisés. Il existe des asbl qui organisent à leur manière les opérations "Kin propre", mais celles-ci échouent également par manque des matériels efficaces.

En 1992, l'UNICEF a tenté la même opération, soit 400 000 USD utilisés pour protéger les enfants contre l'insalubrité et leurs conséquences. Cette fois-là encore les résultats furent mitigés. Cette insalubrité est à la base de la recrudescence dans la ville de certaines maladies comme la fièvre et la typhoïde. A Kinshasa, la structure argilo-sableuse du sol, les fortes pentes, la détérioration du système d'égout, l'urbanisation anarchique, le déboisement, la pluviométrie, etc. sont les facteurs à la base des ravinements des quartiers. Des grands ravins17(*), par des glissements de terrain, des éboulements, des affouillements causent beaucoup de dégâts à l'habitat, l'environnement et aux infrastructures socio-économiques au sud et à l'ouest de la ville.

Les études de NZUZI avaient inventorié 723 logements détruits par ces érosions cités ci-haut alors que 403 autres étaient menacés de destruction aux prochaines pluies, plus de 7 230 personnes sinistrées étaient sans logement et près de 5 000 autres étaient en instance de les perdre, des centaines d'élèves n'avaient plus d'écoles pendant que des milliers étaient menacés car leurs établissements risquaient d'être emportés lors des prochaines averses. Les pluies diluviennes de mai 2000 avaient tué 54 personnes sur les collines de l'Ouest de la ville. Malgré les forts dégâts, en matériel et en vies humaines, les travaux de génie civil de lutte antiérosive démarrent difficilement par manque de bailleurs. Du haut des collines, les érosions ravagent, alors que, dans la plaine, le relief est moins élevé et le site Est, à certains endroits marécageux et généralement inondé en saison pluvieuse. La boue et le sable des érosions, en amont, transportés par les eaux pluviales, se déposent en aval dans la plaine et bouchent les collecteurs et ensablent les lits des rivières. Ces masses de sable qui sont emportées par les érosions des versants et qui sont venus s'accumuler dans le fond de la plaine et des vallées modifient le tracé et la morphologie des rivières.

Ces cours d'eau deviennent incapables de charrier le sable et les ordures que la population y jette et leur profondeur se réduit progressivement. Les faibles valeurs des pentes empêchent aussi un écoulement rapide. Par conséquent, les eaux divaguent et leurs lits deviennent irréguliers. Elles débordent et inondent les vastes quartiers riverains sur une profondeur variant entre 0,5 et 1,5 m. Ces inondations s'aggravent parfois avec les crues du fleuve Congo, occasionnant ainsi des contre-courants dans les rivières.

Ce phénomène s'observe surtout sur les rivières Kalamu (Funa), Ndjili, Basoko, Lubudi, Lukunga, Mbinza, Ikusu qui sont des véritables collecteurs naturels de la ville. En 1997, le gouvernement avait financé le curage de la rivière Gombe (1,5 millions de $) pour assainir les quartiers environnants qui étaient souvent sous eaux, après les crues de ce cours d'eau. En 1999, le PNUD a financé le curage de la rivière Kalamu (400 000 $) pour les mêmes objectifs. Malheureusement, quelques années après, toutes ces rivières se sont de nouveau ensablées et bouchées par les ordures ménagères, et par conséquent, les inondations des quartiers environnants ont repris depuis belle lurette18(*).

* 14 _ Le 30 juin 1960, date de l'indépendance de la RDC ;

* 15 _ MICS : enquête nationale sur la situation des enfants et des femmes au Congo en 2001 ;

* 16 _ FNUAP signifie Fonds des Nations Unies pour la Population.

* 17 _ Des grands ravins ; sur les sites suivants : Masikita, Mataba I, Mataba II et III, Kisenso, Ndjili, Drève de Selembao, Kinsuka, Livulu, Ngafani, Unikin, Nguma, Maluku, Ngomba-Kinkusa, UPN, Ngaliema, Bolikango, Matadi mayo, etc.

* 18 _ F.L. NZUZI, C.T. MBUYI, Op. Cit, p48.

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