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L'exploitation du monopole conféré par la propriété industrielle et l'exercice des pratiques anticoncurrentielles en zone OAPI ( organisation africaine de la propriété intellectuelle )

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par Brice WAKAP CHONGANG
Université de Dschang Cameroun - Master en droit option : droit des affaires et de l'entreprise 2013
  

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SECTION II : L'EXERCICE DU MONOPOLE DE PROPRIETE INDUSTRIELLE ET L'OPERATION DE CONCENTRATION D'ENTREPRISES

Les opérations de concentration d'entreprises179(*) incompatibles avec les marchés internes ou communs sont celles qui diminuent la concurrence ou auront vraisemblablement cet effet180(*). Il s'agit notamment d'opérations qui « restreignent sensiblement les possibilités de choix des fournisseurs et/ou des utilisateurs ; limitent l'accès aux sources d'approvisionnement ou aux débouchés ; ou créent des barrières à l'entrée en interdisant particulièrement aux distributeurs d'effectuer des importations parallèles »181(*). En fait, les concentrations prises en compte dans les politiques de concurrence de la zone sont davantage juridiques et opérées par le truchement de fusion ou acquisition d'entreprises182(*). Cependant, notons que les concentrations d'entreprises en rapport avec l'exploitation des droits de propriété industrielle, posent un problème particulier. On peut se poser les questions suivantes : la recherche d'importants portefeuilles de droits de propriété industrielle ne peut-elle pas pousser les entreprises à des concentrations ? Du coup, une telle concentration autour des monopoles de propriété industrielle ne risque-t-elle pas de renforcer de façon substantielle la domination des entreprises en cause sur le marché ? Ceci semble faire de l'instrumentalisation des droits de propriété industrielle pour l'édification de concentrations d'entreprises, un moyen potentiel de domination des marchés (paragraphe I). Mais la nécessité de relativiser la situation s'impose lorsqu'on pense non seulement au sens utilitariste des concentrations d'entreprises, mais aussi à la souplesse de sa réglementation en zone OAPI (paragraphe II).

Paragraphe I : Les concentrations d'entreprises autour des monopoles de propriété industrielle: un moyen de domination du marché

Les monopoles de propriété industrielle peuvent être à l'origine des fusions d'entreprises. En fait, l'acquisition et l'exploitation des droits de propriété intellectuelle peuvent être au coeur de l'analyse concurrentielle des opérations de concentration, en application de la théorie de l'effet de portefeuille.

L'effet de portefeuille renvoie à la nécessité pour les entreprises de s'accaparer et d'exploiter d'importants portefeuilles de droits de propriété industrielle, le plus souvent constitués par ceux jugés incontournables pour les consommateurs183(*). Pour ce faire, certaines entreprises peuvent donc être amenées à fusionner au dessein de mettre ensemble et de contrôler leurs différents monopoles de propriété industrielle. Vraisemblablement, une telle concentration d'entreprises autour de droits de propriété industrielle peut indubitablement participer à la déstabilisation de la structure d'un marché, et du coup produire un véritable impact anticoncurrentiel.

Cette situation pose directement un problème : l'opération de concentration d'entreprises autour de droits de propriété industrielle ne pourrait-elle pas constituer un moyen de domination des marchés en zone OAPI ? Une telle problématique mérite d'être envisagée. En fait, la préoccupation de concentrations d'entreprises autour des droits de propriété industrielle, trouve tout son sens lorsqu'on sait que le but du contrôle des concentrations est d'éliminer toute domination des marchés184(*). Par conséquent, l'objectif est de maîtriser la dimension économique et surtout technologique des entreprises concernées.

Aux USA en effet, ce problème est apparu de façon concrète. En effet, dès les années 1880, certaines firmes développèrent des stratégies de brevetage afin de s'assurer le contrôle monopolistique de secteurs industriels entiers185(*). En effet, après s'être assurées par contrat que les inventions de leurs employés dans leurs laboratoires de recherche appartiendraient à la compagnie, des firmes américaines comme General Electric, Westinghouse et Swan Electric Light Company ont réussi à développer d'importants portefeuilles de brevets, leur procurant ainsi un contrôle important dans leur secteur. En conséquent, elles ont concrétisé leurs capacités monopolistiques par une concentration grâce à des fusions hautement nocives pour le marché et préjudiciables pour les consommateurs. En ce sens, il a aussi été relevé que la société United Shoe Machinery, était une structure issue de concentrations d'entreprises autour d'importants brevets dominants186(*).

En Europe aussi, les affaires de fusions mettant en jeu des droits de propriété industrielle dont s'est saisie la Commission de l'Union européenne, ont fait apparaître la même préoccupation liée au risque de domination des marchés. C'est ainsi que certaines fusions d'entreprises détentrices d'importants portefeuilles de droits de propriété industrielle, ont fait craindre un impact irréversible sur la concurrence. A titre illustratif, la Commission de l'UE, dans l'affaire Boeing/ McDonnell Douglas187(*), a autorisée la fusion de deux entreprises exploitant d'importants droits de propriété industrielle, à la seule condition que les autres constructeurs d'avions puissent disposer de licences non exclusives portant sur les brevets et savoir-faire y afférents188(*). De même, dans l'affaire Ciba- Geigy / Sandoz189(*) les deux entreprises d'abord en position dominante sur le marché du metropène190(*), voulaient de surcroit s'unir. Au départ, la commission a soupçonné un moyen de domination de marché mais a vu ses craintes apaisées par l'engagement pris par elles, d'accorder raisonnablement des licences non exclusives de fabrication de la substance protégée.

Au final, de tels agissements sont susceptibles de dénaturer les droits de propriété industrielle qui, dans leur essence, se posent en mesure d'accompagnement de la concurrence et non en instrument anticoncurrentiel. Ainsi, l'innovation des entreprises risqueraient de devenir une façon de consolider la position de ces entreprises dominantes par une formidable dynamique de concentration industrielle. Au demeurant, le rapport droit de propriété industrielle et concentrations d'entreprises peut s'avérer limité eu égard à la position justifiable des concentrations d'entreprises en zone OAPI.

* 179 Celles-ci sont réalisées lorsque deux ou plusieurs entreprises antérieurement indépendantes fusionnent ou lorsqu'une ou plusieurs entreprises, acquièrent directement ou indirectement, que ce soit par prise de participation au capital, contrat ou tout autre moyen, le contrôle de l'ensemble ou de parties d'une ou de plusieurs autres entreprises , cf. Article 5 du Règlement CEMAC n°1/99 du 25 juin 1999 modifié, article 4.3 du Règlement UEMOA n°2/2002 du 23 mai 2002.

* 180 Article 14 (2) de la loi n°98 sur la concurrence au Cameroun

* 181 Voir article 7 (1) du Règlement CEMAC n°1/99 du 25 juin 1999 modifié.

* 182 Remarquons que le législateur de l'OHADA définit la fusion comme l'opération par laquelle deux sociétés se réunissent pour n'en former qu'une seule, cf. article 189 alinéa 1, AUSCGIE OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2008, p. 385.

De son côté, l'acquisition d'entreprises se perçoit comme tout transfert de la totalité ou parti des actions, actifs, droits et obligations d'une ou de plusieurs sociétés à une autre société, permettant à cette dernière d'exercer une influence déterminante sur la totalité ou une partie des activités des entreprises faisant l'objet du transfert, Voir article 15 b) de loi n°98 sur la concurrence au Cameroun ; cette opération est aussi l'objet des articles 176 à 178 de l'AUSGIE.

* 183 SANAE EL HAJOUI, Rapport de l'atelier « Le droit de la concurrence et la propriété intellectuelle », Rabat, le 15 mars 2007, p. 22, en ligne www.affaires-génerales.gov.ma/documents/Rapport %20. (Recueilli le 23 mai 2012)

* 184 Cf. article 6paragraphe 2 du règlement n°1/99 du 25 juin 1999 modifié, qui précise qu' « une opération de concentration est de dimension communautaire lorsque deux (2) au moins des entreprises partenaires réalisent sur le Marché Commun un chiffre d'affaires supérieur à un milliard de francs CFA chacune ou les entreprises parties à l'opération détiennent ensemble 30 % du marché ».

* 185 MAY et SELL, 2006 : 122-124, cité par GAGNON (M-A.), op. cit., p. 14.

* 186 ALEXANDER (W.), op. cit., pp. 48-49.

* 187 Déc. Commission UE du 30 juillet 1997, Aff. n° IV/M.877- BOIENG/MC DONNELL DOUGLAS, JOCE L336 du 8/12/97 P.0016-0047.

* 188Source: Rapport révisé du secrétariat de la CNUCED sur la politique de concurrence et exercice des droits de propriété intellectuelle, Genève, 3-5 juillet 2002, p. 12. (www.Unctag.org)

* 189 Déc. Commission UEdu 17 juillet 1996, Aff. Ciba-Geigy/Sandoz, n° IV/M.737, JO n° L 201 du 29 juillet 1997.

* 190 Ingrédient entrant dans la composition de produits destinés à éliminer les puces des animaux.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery