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La lutte contre la criminalité financière au Cameroun

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par Arsène Gérard ESSONO EDOU
Université de Yaoundé II - Diplôme dà¢â‚¬â„¢Etudes Approfondies 2012
  

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A- Le renforcement des pouvoirs du Ministère public

Le renforcement des pouvoirs du Ministère public est une mesure pouvant être mise en oeuvre pour une lutte efficace contre la criminalité financière au Cameroun. Ce renforcement de pouvoirs inclue d'abord la liberté de mener des poursuites sans être limité, ayant sous son autorité la police judiciaire. Cela serait d'autant plus utile que le Ministère public a la possibilité de se déplacer plus facilement que le juge d'instruction, donc de mieux rechercher les éléments de preuve contre les criminels. De plus, certains pouvoirs du Ministère public, non utilisés de manière totale, le devraient pour permettre une lutte efficace des autorités camerounaises contre la criminalité financière.

Ainsi donc, étant un des acteurs centraux de la lutte contre la criminalité financière, le Ministère public devrait avoir la possibilité de poursuivre le délinquant en recherchant d'abord l'intérêt de l'Etat ou de la victime. Nous pensons qu'en permettant au Ministère public de transiger avec le prévenu, cette condition pourrait se réaliser. Nous l'avons déjà démontré, la principale conséquence de la criminalité financière est qu'elle pèse sur les intérêts de l'Etat. Cependant, l'instauration d'une quelconque transaction doit absolument éviter d'être partiale, de s'appliquer uniquement à certains cas. C'est pourquoi la Procédure pénale camerounaise pourrait adopter cette technique de manière générale, pour les infractions, mais elle devrait être bien réglementée.

Un constat qui peut être fait par rapport à la procédure pénale camerounaise est que la transaction existe déjà entre le délinquant et la partie civile108(*), avec la possibilité de mettre fin aux poursuites pénales à tout stade de la procédure, lorsque celle-ci a été mise en marche par le dépôt d'une plainte. Le retrait de celle-ci entrainera l'arrêt des poursuites pénales engagées contre le délinquant. Cela suppose que, la loi pénale camerounaise laisse la possibilité au délinquant d'engager des pourparlers avec la partie civile, afin de parvenir à un arrangement amiable du litige. En cas d'impossibilité de parvenir à un accord, les poursuites pénales suivront leur cours, et aboutiront soit à la reconnaissance de la culpabilité du prévenu, soit à son acquittement.

Ainsi donc, si la possibilité est déjà laissée aux deux premières parties au procès d'engager une transaction pouvant aboutir à tout stade de la procédure, le Ministère public devrait aussi pouvoir engager ce type de transaction. Défenseur des intérêts de l'Etat comme l'avocat de la partie civile défend ceux de la victime, le Procureur doit avoir la possibilité de négocier une issue du procès qui arrangerait l'Etat. Car, il n'est plus à démontrer que la condamnation à une peine d'emprisonnement et d'amende, quelle que soit sa sévérité, n'est pas toujours la meilleure solution pour la résolution d'un litige. De même que le juge se base sur son intime conviction, le Ministère public devrait pouvoir négocier une fin du litige en prenant en compte sa formation, son intime conviction et surtout, l'intérêt de l'Etat. Cette transaction devrait pouvoir s'appliquer à tous types d'infractions, se faire en collaboration avec la partie civile le cas échéant et les modalités de son déroulement fixées par la loi. De plus, l'accord conclu doit nécessairement avoir l'approbation du juge saisi de l'affaire, pour être adopté comme issue du litige. Enfin, cette transaction ne doit être possible que lorsque l'action publique a été engagée par le Ministère public lui-même, et non lorsque son engagement est le fait de la partie civile.

Ce mode de règlement des litiges a déjà été initié par l'Etat camerounais, avec l'institution du Tribunal criminel spécial. En effet, la transaction y est, comme nous l'avons précédemment démontré, admise. Cependant, cette issue du procès, qui est réglementée concernant des infractions particulièrement graves, devrait aussi, par souci d'équité, être reconnue aux délinquants financiers auteurs d'infractions moins graves. Car, si le but recherché par cette mesure est d'aider l'Etat à rentrer en possession de ses fonds, il faudrait éviter, par souci d'équité, de créer une différenciation entre les criminels graves, qui auront la liberté à condition de rembourser, et ceux moins graves qui seraient condamnés à une peine d'emprisonnement. Pour réglementer cette situation, nous proposons l'adoption d'un texte laissant la possibilité d'adopter la transaction de manière générale en matière de criminalité financière. Sur ce point, et afin cependant de punir l'intention délictuelle, il serait de bon ton de prévoir des peines complémentaires à appliquer au délinquant, en échange de la privation de liberté et contre remboursement. Ces peines pourraient par exemple constituer en des Travaux d'intérêt commun, le prononcé des déchéances ou l'interdiction d'exercice de certaines activités.

Un autre aspect du renforcement des pouvoirs du Ministère public concerne l'utilisation de manière adéquate de ces pouvoirs. En effet, la lutte menée au Cameroun contre la criminalité financière, en particulier contre le détournement des deniers publics, est souvent montrée du doigt par une partie de l'opinion comme étant instrumentalisée, comme étant utilisée comme un outil politique. Cela est dû au fait que, de manière générale, les actions engagées et très médiatisées dans la lutte contre ce type d'infractions, à travers des opérations de grande envergure109(*), visent très souvent des personnalités politiques célèbres. Afin d'enlever ce sentiment d'instrumentalisation de la lutte contre la criminalité financière, il faudrait laisser la possibilité au Ministère public d'avoir la possibilité d'accès à certaines informations concernant la situation financière des sociétés étatiques, ainsi que de celles dans lesquelles l'Etat est intéressé. En attendant la mise en place effective de la commission de la déclaration des biens, cela serait une mesure salutaire, permettant de poursuivre plus facilement les auteurs de crimes financiers.

Ainsi donc, le renforcement des pouvoirs du Ministère public semble être une mesure pouvant permettre l'amélioration de la lutte contre la criminalité financière sur le plan judiciaire. A côté de cette mesure, l'Etat camerounais peut aussi décider d'adopter la voie de l'atténuation du principe de l'irresponsabilité pénale des personnes morales.

* 108 Dans le cadre de la criminalité financière, la partie civile est constituée ici lorsqu'il s'agit des infractions financières touchant aux biens privés, telles que les infractions d'affaires, le vol ou l'escroquerie.

* 109 Comme l'opération Epervier, qui abouti à l'arrestation de plusieurs anciens membres du Gouvernement et Directeurs Généraux des sociétés publiques et parapubliques particulièrement célèbre. Cette opération est suivie avec une grande attention par les populations camerounaises, qui y voient le début de l'arrêt de l'impunité des gestionnaires de la chose publique.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault