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Piraterie ou contrefaçon des oeuvres musicales: facteurs explicatifs, modes opératoires et impact sur les artistes-musiciens à  Yaoundé

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par Joel Christian NKENG à NKENG
Université de Yaoundé 1 - Master 2 en Sociologie 2010
  

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II.3- Au niveau culturel

La piraterie cause d'énormes préjudices aux créateurs et auxiliaires de la création musicale au niveau national et international. Elle occasionne au premier plan un dommage dans le chef des ayants droit. Celui-ci relève tant du préjudice matériel que moral, ne serait-ce, à côté des pertes économiques, que par la perte totale de la liberté qu'accuse, sur sa création musicale ou sa prestation, l'auteur ou l'artiste-interprète face aux produits de la contrefaçon. Les producteurs également ne perçoivent aucun revenu sur l'utilisation des oeuvres issues de leurs structures et voient diminuer leur part de revenus provenant de l'exploitation traditionnelle de leur phonogramme qu'est la vente. Par conséquent, ils ne sont plus en mesure de financer durablement la création musicale, si un frein n'est pas apporté au développement de ce marché parallèle.

Il est donc clair que dans ces conditions, aucun créateur d'oeuvres musicales ne peut continuer de travailler, tant que son environnement socio-économique le confine dans une situation de dépendance perpétuelle. A terme, c'est l'humanité qui se trouve privée d'oeuvres artistiques, pourtant nécessaires à son épanouissement.

a)- Facteur majeur de la baisse de la production artistique

Le constat est clair : la piraterie est en train de tuer la production des oeuvres artistiques au Cameroun. Elle est un facteur de la baisse de la production tant sur le plan qualitatif que quantitatif. Plusieurs producteurs ne savent plus à quel Saint se vouer. Beaucoup parmi eux ont fermé boutique ou alors produisent des artistes de façon sporadique, parce qu'il est difficile pour eux d'amortir leurs charges. On se rappelle que dans les années 1980-1990, la maison de production ``EBOBOLOFIO'' faisait le bonheur des artistes du bikutsi (rythme local). Cette écurie est inexistante aujourd'hui. La maison de production ``NKUL NNAM'' qui a longtemps produit les albums de plusieurs artistes comme K-TINO a à peine un siège à Yaoundé. La maison de production ``ANGOULA ANGOULA'' est presque en faillite. Les artistes de cette maison ont dû signer ailleurs. C'est le cas des artistes Lady PONCE ou AMA Pierrot. La jeune maison de production ``APPODISK International'' mise sur pied en 2004 par Appolonie EYEBE est aussi tombée en faillite. Ses artistes comme EBOA Show, Vincent Paradis, Veronik Fakture, ont dû aller se chercher ailleurs. JPS production de Jean Pierre SA'A va déménager de Paris pour s'installer à Douala au Cameroun.

D'autres producteurs comme le célèbre Mc Pop music ou MENDY Show ont simplement abandonné le secteur pour se consacrer à d'autres activités. Tous estiment que la piraterie a fait chuter leurs chiffres d'affaires. Aussi, ne peuvent-ils plus investir à perte. La plupart des artistes ont aujourd'hui des difficultés pour trouver un producteur. ABANDA Aviateur, Roger BEKONO, Govinal NDINGA ESSOMBA, tous des doyens du Bikutsi ont des maquettes qui n'attendent que des producteurs. Certains artistes sont donc obligés soit de s'auto-produire, soit d'exercer une autre activité pour pouvoir survivre. La piraterie est donc en grande partie à l'origine de la baisse de la production artistique au Cameroun. L'on était habitué à des sorties massives d'albums en fin d'année, mais tel n'est plus le cas aujourd'hui car, on compte à peine pour la fin de l'année 2009, seules quelques parutions artistiques. Et pourtant, selon PANETHIERE :

La musique enregistrée représente la vie musicale d'une société à un moment donné. Si les meilleurs artistes d'une nation ne sont pas enregistrés commercialement, leurs oeuvres ne sont pas préservées et les pertes subies par la culture locale sont incurables. Un élément clé de la mémoire historique de la nation est ainsi perdu.241(*)

Certains grands noms de la musique camerounaise ont presque rendu le tablier, à l'instar de NKOTTI François, MISSE NGOH, Grâce DECCA, Dina BELL, SAM FAN Thomas. Ils sont de moins en moins présents dans le showbiz Camerounais. Tous ces créateurs ont pourtant essayé de mettre sur pied des mesures visant sinon à éradiquer, du moins à freiner la progression de la piraterie.

b)- Une entrave à une gestion collective efficace des droits d'auteurs

La piraterie constitue l'une des entraves - sinon la principale - à une gestion collective efficace des droits d'auteur et des droits voisins au Cameroun. Du fait de la piraterie, l'artiste ne parvient plus à vivre de son art. Dans l'esprit de la loi du 19 décembre 2000, le principal bénéficiaire du droit, c'est l'auteur. Conformément à l'article 24 de ladite loi, la rémunération de l'artiste est proportionnelle aux recettes d'exploitation. Plus l'oeuvre est vendue, plus elle rapporte à son auteur.

En effet, l'actualité du côté des sociétés de gestion collective des droits d'auteur est marquée par des éternelles batailles autour de la gestion de ces droits depuis quelques années. Ces batailles détournent l'attention sur la piraterie qui mérite d'être mise au niveau des priorités. Pendant que les sociétés de gestion des droits sont dans la tourmente et la piraterie prospère, les artistes-interprètes sont manipulés, exploités et finalement marginalisés ou confinés dans une paupérisation sans précédent.

c)- Une gangrène pour l'art musical

Sur le plan culturel, la piraterie constitue une véritable gangrène pour l'art musical. La persistance de ce phénomène affaiblit ou asphyxie les industries culturelles en entrainant des pertes d'emplois pour les fonctions culturelles ; Ces industries culturelles sont pourtant sources d'emploi, de profit et de recettes tout en étant un vecteur essentiel de promotion de la diversité culturelle aux niveaux local et international. Elles constituent aujourd'hui des composantes importantes et reconnues du développement économique et culturel d'un pays. Elles ajoutent considérablement à la richesse nationale et en conséquence les activités de piraterie qui affaiblissent ces industries ont un effet négatif sur la richesse nationale. Selon PANETHIERE, D. :

Partout où la piraterie prospère, il est pratiquement impossible aux industries locales des logiciels, du cinéma et de la musique d'être compétitives, de se développer ou même, dans les économies émergentes, de prendre leur essor. Toutes ces industries ont besoin d'investissements importants, et même en l'absence de piraterie elles comportent des risques considérables pour les investisseurs étant donné le haut degré de concurrence sur les marchés de ces oeuvres et la difficulté de prédire les goûts et les désirs des consommateurs. Lorsque la piraterie sévit plus ou moins sur un marché particulier, diminuant encore les chances de succès, il n'est pas surprenant de voir les investisseurs se tenir à l'écart, avec la conséquence qu'il n'est pas produit de nouveaux films ou enregistré de nouveaux CD, et toutes les possibilités d'emploi et d'échanges qui auraient pu résulter de ces investissements sont perdues.242(*)

La piraterie est aussi la cause de la perte d'identité et de mémoire culturelle historique et un frein pour la créativité. Les pirates disposent aujourd'hui de matériels de reproduction performants. Ces équipements permettent de livrer sur le marché, des enregistrements de plus en plus fidèles aux originaux. De sorte que dans de nombreux pays, la piraterie a appauvri ou paralysé l'industrie musicale locale et la réalisation de nouveaux enregistrements.

En somme, la piraterie est un frein au développement durable. C'est pour cette raison que PANETHIERE, D. pense que : « en laissant vendre librement les produits musicaux pirates [sic] sur les marchés locaux, on élimine effectivement toutes les possibilités de développement d'une industrie nationale des enregistrements » 243(*).

Elle entraîne un manque à gagner substantiel à l'économie du pays, avec de nombreux emplois perdus dans l'industrie musicale. Pour les téléchargements, en plus d'être un délit répréhensible, ils entraînent avec elle des virus qui occasionnent plus de pertes encore, notamment des pannes d'ordinateur et même de téléphone.

* 241. PANETHIERE, D., op.cit., p.10.

* 242. PANETHIERE, D., op.cit., p.10.

* 243. Idem, p.9.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984