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Piraterie ou contrefaçon des oeuvres musicales: facteurs explicatifs, modes opératoires et impact sur les artistes-musiciens à  Yaoundé

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par Joel Christian NKENG à NKENG
Université de Yaoundé 1 - Master 2 en Sociologie 2010
  

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II.2- Piraterie des oeuvres musicales au Cameroun: jusqu'où peut aller la traque ?

Le 12 août 2009, au détour d'un point de presse que donnaient les responsables de la Commission de lutte contre la contrefaçon des oeuvres musicales, la guerre a été déclarée aux contrefacteurs de la ville de Yaoundé. Cette communication avait également pour but de sensibiliser et d'informer l'opinion publique contre ce phénomène aux conséquences fâcheuses, afin que celle-ci soit définitivement au courant de la loi sur le droit d'auteur et les droits voisins, et se conforme à ses dispositions. C'était donc le préalable avant de passer à l'action de répression. Quelques semaines plus tard, les principaux quartiers de la ville de Yaoundé, les marchés, les espaces publics et le Centre commercial ont été pris d'assaut. C'était sous la houlette du préfet du département du Mfoundi, sous forte escorte policière, qui venait prêter main forte à la SOCAM par le biais de la Commission de lutte contre la contrefaçon des oeuvres musicales. A l'issue de cette opération, de nombreux supports magnétiques ont été saisis par les forces de l'ordre. Ces produits de qualité douteuse ont été embarqués dans des sacs, puis transportés à bord de véhicules réquisitionnés pour la cause pour le quartier AHALA, où ils ont été jetés dans les flammes. Un exemple qui montre la détermination des autorités camerounaises à éradiquer le fléau.

Toutefois, au Cameroun, on a l'impression que la lutte contre la piraterie et la contrefaçon des oeuvres musicales ne concerne que les CD piratées. Aucune attention n'est portée sur la répression du téléchargement ou du piratage sur Internet, qui fait pourtant plus de mal aux artistes-interprètes que la vente des CD. Moumi NGINYA ne soulignait-il pas que 8 400 000 supports frauduleux échappent au circuit formel camerounais par an et que la quantité d'exemplaires de CD contrefaisants déversée sur le marché informel est supérieure à ce qui est produit légalement, les points de vente et de distribution étant plus efficaces et plus nombreux. Dans un tel contexte, la lutte contre la piraterie devrait être non seulement intensifiée, mais également permanente. Tant qu'elle va se limiter à quelques actions sporadiques, elle ne pourra jamais être efficace. Sur le terrain, elle devrait se traduire par des saisies régulières d'oeuvres musicales contrefaisantes, ainsi que des interpellations non seulement des pirates, mais également des consommateurs de ces oeuvres. Il doit également être procédé à leur traduction devant les tribunaux, afin qu'ils puissent répondre de leurs actes. Cela aurait pour effet de dissuader les contrevenants.

Les dispositions légales qui organisent la gestion du droit d'auteur et des droits voisins au Cameroun constituent une avancée considérable dans la lutte pour la préservation du patrimoine culturel. Elles arrivent certes en retard, mais ont tout de même le mérite de régir un domaine qui était jusque là voué aux oubliettes. L'originalité de cette loi camerounaise est sans doute la reconnaissance et la protection des oeuvres inspirées du folklore (Art.5). Une telle protection du folklore est une reconnaissance de la valeur culturelle des pratiques ancestrales africaines. De plus, à la lecture de cette loi, il ressort que les auteurs des oeuvres de l'esprit jouissent sur celle-ci, du seul fait de leur création, d'un droit de propriété exclusif et opposable à tous (Droit d'auteur), dont la protection est organisée par la présente loi. Des attributs d'ordre patrimonial et des attributs d'ordre moral sont conférés à l'auteur par cette loi. Toutefois, s'il est incontestable que « Nul n'est censé ignorer la loi », il est encore plus vrai que : « une loi ne peut avoir d'effet que si ceux pour qui elle est promulguée la connaissent et la comprennent », comme le dit si bien le dicton. Nos entretiens avec plusieurs acteurs de la piraterie des oeuvres musicales nous ont permis de constater que cette loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins reste encore très peu connue par ceux-ci. L'opacité communicationnelle qui l'entoure et son utilisation comme arme offensive pour condamner ou fustiger ce phénomène font de cette loi, un support de campagne destiné uniquement aux acteurs engagés dans la conquête des postes de responsabilité dans les sociétés de gestion collectives des droits d'auteur. Qui plus est, cette loi est souvent sujette à des interprétations contradictoires par plusieurs personnes. Ce qui nous amène à dire qu'elle devrait faire l'objet d'une diffusion plus large auprès du public par les professionnels du droit.

Sur un tout autre plan, l'incidence des TIC ou de l'Internet sur la piraterie impose que de nouvelles dispositions soient intégrées dans cette loi pour combattre le téléchargement des oeuvres musicales. En effet, d'après la Commission Européenne (CE), l'avenir du marché de la musique en ligne pourra s'élever à 8,3 milliards d'euros d'ici 2010 dans l'Union européenne (UE), et être multiplié par quatre entre 2005 et la fin de la décennie. Selon ces chiffres, d'ici 2010, les contenus en ligne représenteront environ 20% des recettes du secteur de la musique. Bien que le Cameroun ne soit pas membre de l'Union Européenne (UE), il apparait clairement que le marché de la musique en ligne est une véritable dimension qui mériterait déjà d'être organisée et régie par la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins.

En définitive, au regard du contexte socio-économique actuel, loin de prétendre éradiquer définitivement la piraterie, le combat, quelque soit son ampleur, ne peut en l'état actuel des choses se limiter qu'à réduire tout simplement les effets de la piraterie et la contrefaçon des oeuvres musicales. La lutte contre ce phénomène ne devrait pas être l'affaire des seules sociétés de gestion collective comme semble être le cas, même si elle leur incombe à titre principal et dans une moindre mesure, aux artistes eux-mêmes245(*). La loi met à leur disposition une série de mesures conservatoires ou provisoires (article 85), les mesures correctives civiles (Article 90) et les mesures coercitives (Article 82). L'Etat avait pourtant déjà pris une sérieuse option dans ce sens, en acceptant de prêter main forte aux artistes à travers la mise sur pied de la Commission nationale de lutte contre la piraterie, par décision n° 02/48/MINCULT/CAB du 11 décembre 2002. Celle-ci comprend une coordination nationale et des comités provinciaux, et sa composition est plurisectorielle.

* 245. Cf. Article 75 de la loi n° 2000/011 du 19 décembre 2000.

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"Ceux qui rĂªvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rĂªvent de nuit"   Edgar Allan Poe