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La valorisation des archives parlementaires du Sénégal: responsabilités administratives et démarches techniques

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par THIECOUMBA DIOUF
EBAD / Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Master en Sciences de là¢â‚¬â„¢Information et de la Documentation 2011
  

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I-5/ LE GRAND CONSEIL DE L'AOF (1947-1959)

Création du Grand Conseil

La loi instituant les Grands Conseils fut discutée en première lecture à l'Assemblée nationale française le 30 juillet 19475(*). Dans l'exposé des motifs, le Ministre de la France d'Outre-mer, Marius Moutet, souligna en particulier deux principes importants : les délégués au Grand Conseil seraient élus parmi les membres des Assemblées territoriales et la représentation des Territoires serait paritaire. Il s'en expliqua ainsi :

«Le Grand Conseil est le syndicat des intérêts communs ; il importe qu'il y ait un lien étroit entre les Assemblées territoriales qui gèrent les intérêts particuliers de chaque Territoire et l'Assemblée de groupe qui gère les intérêts communs aux Territoires.

Ce lien ne peut être établi que si chaque Assemblée territoriale envoie siéger au Grand Conseil un certain nombre de ses propres membres : ceux-ci ont la connaissance des intérêts particuliers du Territoire et sont à même d'apprécier comment les intérêts généraux du groupe se concilient avec les intérêts territoriaux».

Cette option donnait au Grand Conseil son caractère d'organe de liaison et de coordination entre les Assemblées locales plutôt que de représentation d'une collectivité (l'AOF) ayant une individualité propre.

En son sein, la représentation devait être paritaire pour que les Territoires pauvres puissent se faire entendre au même titre que les riches. L'application de ce principe a donné à l'Assemblée de groupe son véritable caractère fédéral, basé sur l'égalité des participants.

Après son adoption par l'Assemblée nationale, la loi vint le 11 août 1947 devant le Conseil de la République. Le rapporteur, Ousmane Socé Diop (Sénégal), proposa que le Grand Conseil soit habilité à statuer sur le mode d'assiette de tous les impôts perçus au profit des budgets locaux, mais que les Conseils généraux conservent la faculté d'en fixer le taux. Cette proposition fut adoptée.

Cette décentralisation fut jugée insuffisante par le sénateur Gaston Lagarosse (Côte-d'Ivoire) qui souhaitait réduire le plus possible les attributions conférées aux organismes dépendant du Gouvernement général. Son collègue Étienne Djaument alla plus loin : « Pour nous, les Gouvernements généraux sont les tombeaux de nos territoires.

Toutes nos ressources sont sucées, ce qui nous oblige à écraser nos populations d'impôts de capitation. Nos tam-tam sont impatients de célébrer leur mort6(*) ».

Venue en deuxième lecture à l'Assemblée nationale dès le 12 août 1947, la loi fut adoptée définitivement le même jour. Les premières élections eurent lieu le 3 novembre 1947.

Dès le 5 décembre 1947, les quarante Grands Conseillers (cinq pour chacun des huit Territoires composant l'AOF) se réunissaient pour la première fois dans le petit bâtiment qui abritait précédemment le Conseil privé (en face du Palais du Gouvernement général, aujourd'hui Maison militaire de la Présidence de la République du Sénégal).

Dans son discours de bienvenue, le Haut Commissaire Barthes dit notamment: «Vous avez avec vous la force que donne la liberté, vous avez avec vous la foi en son destin d'un peuple neuf et confiant, vous avez avec vous la très ancienne sagesse de l'Afrique. Comment n'atteindriez-vous pas aussi la joie que donne la réussite»?

Compétences du Grand Conseil

Les compétences du Grand Conseil étaient essentiellement financières. Mais par le vote du budget fédéral, cette assemblée exerçait un contrôle indirect mais effectif sur tous les services publics de la Fédération, et même sur les services locaux et les programmes d'équipement des Territoires par l'intermédiaire des subventions et ristournes.

Au chapitre des dépenses, en vertu du paragraphe 24° (b) de l'article 38 de la loi du 29 août 1947, le Grand Conseil était consulté sur les dettes et contributions exigibles, sur les dépenses des services du Gouvernement général et des exploitations industrielles qui étaient rattachées à ce dernier, sur les dépenses des services de contrôle, notamment l'inspection de la France d'Outremer, sur les dépenses de fonctionnement des services communs à l'ensemble des Territoires du groupe (justice, sécurité, enseignement supérieur, recherche scientifique), des travaux et des équipements généraux non compris dans les budgets locaux. En ces divers domaines, on a constaté, au cours de l'existence du Grand Conseil, une tendance à la décentralisation en faveur des Territoires.

Au chapitre des recettes, la loi du 29 août 1947 a validé les règles posées par l'article 7 du décret organique du 18 avril 1904, modifié par celui du 8 janvier 1942, attribuant au budget général « le produit de tous les impôts, taxes, contributions et droits indirects ».

En vertu des paragraphes 24 et 25 de l'article 38 et de l'article 39 de la même loi, le Grand Conseil n'était compétent pour instituer des taxes qu'au seul profit du budget général, les mêmes compétences étant réservées aux Conseils généraux en ce qui concernait les budgets locaux.

Une des responsabilités essentielles du Grand Conseil était la répartition des ristournes et subventions.

Les premières étaient reversées aux Territoires en proportion de leurs activités réelles de production et de consommation ; celles-ci étaient en réalité très difficiles à déterminer avec exactitude : Dakar et Abidjan, où étaient perçus les droits indirects, étaient en fait les portes d'entrée et de sortie plus ou moins exclusives des huit territoires.

Les subventions étaient attribuées en fonction des besoins exprimés par chaque Territoire : cette répartition était souvent l'occasion de marchandages sans dignité.

Le budget général de l'AOF était préparé et présenté par le Haut Commissaire et ses services. Il était discuté et arrêté par le Grand Conseil et rendu exécutoire par arrêté général du Haut Commissaire.

L'initiative des dépenses appartenait conjointement au Gouvernement général et au Grand Conseil en vertu de l'article 44 de la loi du 29 août 1947. L'exécution du budget était contrôlée in fine par le Grand Conseil.

Ces compétences budgétaires du Grand Conseil connaissaient un certain nombre de limites. L'Assemblée fédérale ne pouvait pas toucher à certaines dépenses obligatoires et aux dépenses du personnel. En ce dernier domaine, l'interdiction était absolue en cas de requêtes individuelles (pour décourager tout favoritisme ou clientélisme) et relatives pour les questions intéressant un corps de fonctionnaires ou d'agents pris dans sa totalité. De même, il ne pouvait pas y avoir de répartition nominale des crédits votés.

Le Grand Conseil était tenu de délibérer sur le budget qui lui était présenté et de le voter en équilibre. Si ces règles étaient transgressées, le Gouvernement général pouvait établir le budget par ordonnance.

A ces compétences générales du Grand Conseil s'ajoutaient la gestion des immeubles appartenant au Gouvernement général, la délibération sur la participation éventuelle au capital d'une société, la gestion des routes et voies de communication.

L'Assemblée était encore consultée sur les transactions supérieures à cent milles francs (100 000 FCFA), sur les conditions d'exploitation des ouvrages et services publics gérés par le Gouvernement général, sur les emprunts et garanties.

Le Grand Conseil avait plus qu'un droit de regard sur le Fonds d'Investissement et de Développement Economique et Social (FIDES), créé par la loi du 30 avril 1946, du fait que la Fédération participait au budget du FIDES et que celui-ci intéressait au premier chef les populations dont les Grands Conseillers étaient les représentants. Cependant, il devait tenir compte du fait que le FIDES s'inscrivait dans le plan plus général de développement de l'Union française.

Enfin le Grand Conseil donnait son avis sur l'octroi des concessions agricoles et forestières et sur les permis généraux de recherche.

Dans tous les domaines, il lui était loisible de formuler des voeux.

Il était évidemment impossible à l'Assemblée fédérale d'assumer toutes ses responsabilités dans le court délai de ses deux sessions ordinaires annuelles, et même de ses sessions extraordinaires. La Commission permanente était un organe de suppléance très important pour préparer les dossiers, suivre l'exécution des décisions prises et, dans les domaines où elle avait reçu délégation, trancher certains problèmes en suspens. Chaque Territoire y était représenté par un délégué titulaire et un suppléant, élus pour un an et rééligibles.

Les compétences du Grand Conseil étaient donc essentiellement financières et administratives. La politique n'avait-elle jamais de place dans son enceinte ?

La question fut posée lors de l'élection du bureau le 29 septembre 1948. Senghor appuyé par Apithy présenta une motion préjudicielle tendant à dépolitiser l'Assemblée en faisant une place au bureau à toutes les tendances politiques. La motion fut rejetée. Dix ans plus tard, le 5 avril 1958, Senghor souleva de nouveau le problème lors de la désignation des représentants du Grand Conseil dans divers organismes : «Plusieurs sociétés sont dans mon Territoire et, régulièrement, les représentants du Sénégal sont écartés, si c'est un acte politique, qu'on le dise» !

Sékou Touré demanda aussitôt la parole et s'écria: « Je suis heureux que notre ami, M. Senghor, ait bien qualifié la nature de l'acte ! Il est politique ! Il n'est pas irrationnel comme les précédents actes qui tendaient tout simplement, de tenir compte de l'origine des Grands Conseillers.

Tous les actes qui ont été commis au cours de cette session n'ont été que politiques. Il est temps d'abandonner le caractère territorial de nos positions ».

* 5 JO Débats de l'Assemblée nationale française, 85, du 31 juillet 1947 : 3712 ss.

* 6 J.O. Débats du Conseil de la République française, 95, 12 août 1947 : 1715 ss.

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