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Le règlement juridictionnel des conflits internationaux en matière commerciale.

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par Mody Fall DIAGNE
Université Cheikh Anta Diop de Dakar(UCAD) - Master 2 en Droit Public 2013
  

Disponible en mode multipage

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Année Universitaire 2013-2014

UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES

DEPARTEMENT DE DROIT PUBLIC

MEMOIRE DE MASTER 2 RECHERCHE EN DROIT PUBLIC

Spécialité : RELATIONS INTERNATIONALES

SUJET : LE RèGLEMENT

JURIDICTIONNEL DES CONFLITS

INTERNATIONAUX EN MATIèRE

COMMERCIALE

Présenté et soutenu par Sous la direction de

Mr Mody Fall DAIGNE Mr Mamadou Yaya DIALLO, docteur en Droit Public,

Maitre-assistant associé à la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université Cheikh Anta DIOP de Dakar(UCAD)

Dédicaces

Je dédie ce travail .

A ma chère maman, Mariama Diagne, partie très tôt. Que le Seigneur verse sur elle toute sa miséricorde !

A mes grands-pères, Cheikh Tidiane Diagne et Moustapha Gueye (dit grand Gueye), partis également. Que le Bon Dieu les accueille dans son paradis !

A mes grands-mères, Khady Gueye (arabe et indo), pour leurs prières

A mon papa, Alioune Fall Diagne et ma tante, Adam Dieng, pour leur affection et soutien.

A mon oncle, Amadou Diagne, pour l'éducation qu'il m'a inculquée et les immenses sacrifices qu'il a consentis dans mes études ; son soutien financier et moral me sont toujours avantageux. Qu'il soit heureux à jamais !

A mon père, Yakhya Diagne, un humaniste à juste titre, pour son soutien précieux et ses sages conseils. Egalement, à ma tante, Aminata Gaye, pour son appui incommensurable. Que leur bonheur soit sans fin !

A mes oncles . Idrissa Diagne, Mansour Gaye, Vieux Diagne, Souleymane Diagne et Amadine Diagne, pour leur soutien.

A mes tantes . Maty Diagne, Thilé Gueye, Méré Niass, Mbathio Mboup, pour leur immense générosité.

A mes frères et soeurs . Amet, Daouda, Habib, Cheikh, Khady, Assy, Ndaye Ami et Awa

A mes cousins et cousines . Lune, Makhtar, Serigne, Line Gueye, Cheikh, Rokhaya Fall, Ndaye Fatou Diagne, Loly, Ndaye Fall, Binta Gueye, Fatoumba, Thiothio, Sokhna, et Ndiolé.

A mes amis . Amara Cissokho, Arona.Seydou.Dia, Samba Dème, Abas Dia, Mbaye Ndiaye, Seydou.Moussa.Diop, Moustapha Diop, Mathieu Manga, Outhmane Diagne, Harouna Sow, Docteur.M.Gaye, Abdourahmane Ly, Sala Dia, Dieynaba Dia, Diaty Sow, Mariétou Niang, Comba Sagna.

A « wa place ba » . Bay Dia, Bay Ndiaye, Bay Kane, Amed Ndao, Aliou Cissé, Ousseynou Diop, Mor Kâ, Tapha Sall, Mbaye Sène, Khadime Ndiaye, Bassirou Sankhé et Galass Sankhé pour les soutiens et encouragements. Que le Seigneur leur accorde toute sa générosité !

A ma bien-aimée, j'espère profondément qu'elle souffre que je taise son nom, pour son amour et sa patience.

A ma future belle-famille.

Remerciements

Gloire à Allah, le Maitre de l'univers ! Qui a créé l'Homme d'une adhérence et lui a appris ce qu'il ne savait pas. Que sa Paix et sa Bénédiction soient sur Mouhamed (PSL), son prophète et son messager !

Je tiens, très sincèrement, à remercier Monsieur le Docteur Mamadou Yaya Diallo, pour avoir accepté de diriger ce travail. Il n'a ménagé aucun effort pour me pousser au bout de mes recherches. Je le remercie également pour sa disponibilité et ses sages conseils ; j'espère bien que ce travail soit à la hauteur de ses exigences.

Je ne saurais oublier le personnel de la bibliothèque de la Faculté des Sciences Juridiques et politiques, particulièrement ces généreuses dames, Aminata Ly et Rokhaya Diouf, qui m'ont apporté une aide considérable, me facilitant l'accès à la documentation. Qu'elles regardent, par ces modestes lignes, l'expression de toute ma reconnaissance.

C'est certainement l'occasion de remercier tous mes amis qui, si nous savons combien les amis participent à la formation de notre propre personnalité, ont été très généreux dans leurs conseils et leur appuie. Je leur remercie vivement.

Mes remerciements vont également à l'égard de toute ma famille, de Gaé comme d'ailleurs, qui m'a très tôt inspiré et inculqué de valeurs culturelles, philosophiques et surtout religieuses.

Qu'ils soient enfin remerciés ceux ou celles qui, de près ou de loin, ont participé à la réalisation de ce modeste travail.

Avertissement

L'Université Cheikh Anta Diop de Dakar et la Faculté des Sciences juridiques et politiques n'entendent donner aucune suite favorable ou défavorable aux opinions émises dans le présent mémoire. Celles-ci doivent être considérées comme propres à l'auteur.

Résumé

Les échanges internationaux ne peuvent saper les rapports de force qui caractérisent les relations internationales. C'est pourquoi, leur prévisibilité et leur développement ne peuvent se réaliser que lorsqu'ils sont régis par des règles juridiques et principes généraux claires, déterminés, cohérents et obligatoires, mais également à un contrôle systématique du respect desdits règles et principes.

Encore, faudrait-il que le non-respect de ces règles et principes soit réglé de façon tout à fait efficiente afin de rétablir immédiatement l'ordre commercial international. C'est à cette fin que souhaite répondre le mécanisme de règlement juridictionnel des différends commerciaux internationaux. Ce mécanisme s'effectue généralement de plusieurs manières lié certainement à la complexité et à la diversité des acteurs des opérations commerciales internationales. En effet, les conflits opposant les Etats, membres de l'OMC, sont principalement portés à la connaissance de l'ORD dont le caractère même est largement hybride, sus generis, alliant la diplomatie et le juridique. Ce qui le rend original et efficace. En outre, étant donné que les Etats partagent les relations commerciales internationales avec les particuliers, principalement les opérateurs économiques privés, les divergences qui naissent entre eux sont, le plus souvent, confiées à l'arbitrage. Celui-ci accorde aux parties en conflit moult avantages, tant sur la procédure que sur les sentences. C'est pourquoi, il demeure un mécanisme privilégié de résolution des conflits commerciaux internationaux.

Toutefois, efficient qu'il soit, le mécanisme juridictionnel de résolution des conflits commerciaux internationaux n'a pas échappé à des manquements, des difficultés, inhérents à tout système juridictionnel, auxquels il faut apporter des solutions tenables afin de le rendre beaucoup plus perfectible.

Mots clés : règlement juridictionnel, conflit international, ORD, arbitrage, commerce international, relations internationales.

SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE 1

PREMIERE PARTIE : LE REGLEMNT JURIDICTIONNEL DES DIFFERENDS

COMMERCIAUX INTERNATIONAUX : UN MECANISME AMBIVANLENT .6

CHAPITRE I : LES DIFFERENDS COMMERCIAUX OPPOSANT LES ETATS 6

SECTIION 1 : L'ORD, principal mécanisme de règlement des différends commerciaux

multilatéraux ..7

SECTION 2 : L'ORD, un mécanisme de règlement incluant un traitement spécial et

différencié en faveur des PED 26

CHAPITRE II : LES DIFFERENDS COMMERCIAUX OPPOSANT LES ETATS ET LES

OPERATEURS ECONOMIQUES ETRANGERS 31

SECTION 1 : L'arbitrage, mécanisme privilégié de règlement des différends commerciaux

entre Etat et opérateur économique étranger 31

SECTION 2 : L'arbitrage, mécanisme efficace de règlement des différends commerciaux

entre Etat et opérateur économique étranger .36

DEUXIEME PARTIE: LE REGLEMENT JURIDICTIONNEL DES DIFFERENDS

COMMERCIAUX INTERNATIONAUX : UN MECANISME EFFICIENT

.43

CHAPITRE I : UNE EFFICIENCE APPRECIABLE A DEUX NIVEAUX

.43

SECTION 1 : Un moyen de promouvoir l'effectivité du droit international général

.44

SECTION 2 : Un moyen de rationaliser les rapports commerciaux internationaux

51

CHAPIRE II : UNE EFFICIENCE ALTEREE PAR CERTAINES DIFFICULTES

57

SECTION 1 : Mais des difficultés quasi surmontables

57

SECTION 2 : Un mécanisme de règlement des différends perfectible

64

CONCLUSION GENERALE

70

BIBLIOGRAPHIE

72

TABLE DES MATIERES

79

Epigraphe

« Nul ne songerait à dire que le commerce international peut se passer du droit. Il a au contraire un besoin vital de droit. Mais la plasticité du droit et la diversité des fins qu'il permet de poursuivre n'assurent pas que chacun lui reconnaisse la même fonction [...] Il est à prévoir que la commerce international se déployant dans une société foncièrement hétérogène et où les conflits d'intérêts sont considérables et les enjeux énormes, toutes les fins du droit seront sollicitées. »

J.M. Jacquet et Ph. Delebecque, Droit du commerce international, Paris, Dalloz, 2ème éd. 2002, p 7

Sigles et abréviations

AFDI : Annuaire française de Droit International

AFRI : Annuaire française des Relations internationales

BIRD : Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement

CCI : Chambre de Commerce International

CCJA : Cour Commune de Justice et d'Arbitrage de l'OHADA

CIRDI : Centre International de Règlement des Différends relatifs à l'Investissement

CNUCED : Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement

CNUDCI : Conférence des Nations Unies pour le Droit Commercial International

FMI : Fond monétaire international

GATT : Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce

JDI : Journal du Droit International

LGDJ : Librairie Générale de Droit et de la Jurisprudence

MARD : Mémorandum d'Accord sur les règles et procédures régissant le Règlement des

Différends de l'OMC

NCPC : Nouveau Code de Procédure Civile française

OHADA : Organisation pour l'Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique

OMC : Organisation Mondiale du Commerce

ORD : Organe de Règlement des Différends de l'OMC

RCADI : Recueil des Cours de l'Académie de Droit International de la Haye

RCDIP : Revue Critique de Droit International Privé

RGDIP : Revue Générale de Droit Internationale Public

Rev. Arb. : Revue Arbitrage

Rev.dr.unif. : Revue de Droit Uniforme

Rev.int. dr. com. : Revue Internationale de Droit Comparé

RQDI : Revue Québécoise de Droit International

UNIDROIT : Institut International pour l'Unification du Droit Privé

INTRODUCTION GENERALE

Le commerce a toujours été et continue d'être un levier incontournable pour la promotion de la paix et de la sécurité entre les peuples. Depuis fort longtemps, pour éviter la guerre entre elles, les puissances de la haute Antiquité avaient efficacement mis en place des instruments et mécanismes techniques dont l'objectif principal était de faciliter un commerce entre elles si bien qu'elles arrivaient à garantir, pour quelques temps, un climat de paix, de solidarité et d'échange entre leurs populations. Il apparait ainsi que le commerce international ne date pas d'aujourd'hui, c'est une « révélation » de l'histoire (par exemple, le commerce triangulaire ou encore celui de la soie).1

Cependant, force est de constater que depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, avec la montée du courant libéralisme, les échanges commerciaux internationaux ont connu une expansion sans précédent2 couvrant ainsi les matières premières, les produits agricoles et les produits manufacturés.3 Ainsi, on nota une augmentation rapide de la production qui, d'ailleurs, ne manqua pas d'avoir des influences notoires sur la consommation mondiale.

A partir des années soixante-dix, les relations commerciales internationales, jadis concentrées sur le commerce des marchandises (des biens), se sont orientées de façon tout à fait significative vers le domaine des services. Ceux-ci, à l'heure actuelle, connaissent un développement fulgurent dans l'économie mondiale4 à côté des investissements (liés à la mobilité de la production agricole et la nécessité de s'introduire dans des marchés étrangers) et des droits de propriétés intellectuelles.

Partant de là, il est évident que, pour la sécurité et la promotion des échanges mondiaux, les Etats (acteurs principaux, sinon incontournables, des relations commerciales internationales) mettent en place des instruments juridiques nécessaires à la définition d'une bonne politique de leurs rapports commerciaux. Donc, faut-il un ensemble de règles juridiques applicables aux relations et opérations commerciales existant entre eux.

Le commerce international est devenu un champ fertile pour les nouveaux acteurs des relations internationales. Il n'est plus à douter du rôle important que jouent les entreprises multinationales,5 les organisations internationales économiques(OEI), les ONG et, dans une large mesure, les individus dans « la société commerciale internationale ». Le commerce international est donc l'oeuvre de plusieurs acteurs6 dont les rôles sont relativement différents mais complémentaires ; si certains essaient d'en fixer les règles, d'autres, au contraire, y agissent seulement.

1 Pour une étude supplémentaire et détaillée sur l'historique des rapports commerciaux internationaux, voir, Hugues. KENFACK, Droit du commerce international, Dalloz, 2002, p 1 et s

2 Cf. R. SANDRETTO, le commerce international, Paris, 1995, p 8 et s

3 Cf. J. M. JACQUET et Ph. DELEBECQUE, Droit du commerce international, Dalloz, 2000, p 1

4 Voir, S. CIABRINI, les services dans le commerce international, PUF, Que sais-je ? n°3179, 1996

5Voir, W. ANDREFF, Les multinationales, la Découverte, coll. « Repères », Paris, 1990. Voir également, pour plus d'informations sur leur rôle dans l'économie mondiale, l'étude de l'ONU, Les sociétés transnationales dans le développement mondial, 3ème étude, New York, 1983

6 H. KENFACK, op. cit, p 53

Ces nouveaux acteurs et domaines commerciaux ont fini par rendre les relations commerciales internationales plus complexes et plus diverses. Ainsi, il demeure nécessaire de mettre en évidence un corps de règles juridiques, spécifiques et efficaces, tendant à régir solidement, non seulement ces échanges commerciaux composites mais également ses acteurs divers qui constituent la réalité même du système commercial international. Tels sont les objets du Droit international économique et, par extension, du Droit international commercial.7 A ce titre, il convient de se rappeler de la pertinente affirmation de M. Pillet à la fin du XIX Siècle selon laquelle le commerce international «est un pur fait, mais un fait qui a donné naissance au droit international tout entier. »8

Comme il n'existe pratiquement pas une entité supra-étatique dotée incontestablement de souveraineté absolue au sein de la société internationale,9 ne serait-il pas étonnant de voir les Etats, jaloux de leur souveraineté, se heurter les uns contre les autres dans ce « marché apetissent » qui se vit dans les échanges commerciaux internationaux, au sein duquel d'ailleurs ils ne sont plus les seuls leaders. C'est pourquoi, déjà en 1941, il a été jugé indispensable de procéder à la réorganisation des relations économiques internationales dont la finalité était de permettre une libéralisation et une généralisation des échanges.10 Alors, commencèrent à voir jour les premières bases du système économique international. Ainsi, les conférences de Bretton Woods et de Hot Spring en 1944 donnèrent, pour une réorganisation sectorielle du Marché mondial, naissance au FMI et à la BIRD. Cette dernière, devant s'appuyer sur ses deux filiales,11 forma la Banque Mondiale. Ces deux institutions internationales, bien qu'ayant des caractéristiques analogues du point de vue structurelle, poursuivaient des objectifs distincts mais complémentaires. En effet, l'une avait comme tâche de relancer l'économie mondiale secouée par la Seconde Guerre Mondiale ainsi que reconstituer le développement des pays victimes, alors que l'autre devait veiller à la stabilité et à la prévisibilité du système monétaire mondial. Du 21 novembre 1947 au 24 mars 1948 s'était tenue à Havane une conférence internationale12 au sortir de laquelle devrait être instituée une Organisation Internationale du Commerce(OIC)13 par la signature d'une Charte (la Charte de Havane). A l'absence d'un accord favorable à la création d'une telle organisation, les négociations avaient quand même abouti à un accord provisoire qui allait

7 Il ne sera pas question, par souci de pragmatisme, de s'attarder à la définition de ces deux corps de règles(ou disciplines juridiques) et les relations qu'ils entretiennent ainsi que les éléments constitutifs qui les distinguent. Pour cela, il sera conseillé de se rapporter aux études de D. CARREAU et P. JUILLARD, Droit international économique, Dalloz, 4°ed, 2010, p 3 et s, mais également à celles de J. M. JACQUET et Ph. DELEBECQUE, op. cit. p 4 et s

8 Cf. PILLET, in RGDIP, 1898, p 72 cité par D.CARREAU et P.JUILLARD, op. cit. p 2

9Cf. Ludovic. LORENZO, Une nouvelle juridiction internationale : le système de règlement des différends interétatiques de l'OMC, thèse de doctorat en droit, Faculté de Droit et Science Politique, Université Lumière Lyon2, soutenue le 18 décembre 2003, p 3

10 Voir, l'article 3 de la Charte de l'Atlantique signée entre les Etats-Unis et l'Angleterre, le 14 août 1941

11 Ils s'agissent de l'Association Internationale pour le Développement (AID) et de la Société Financière Internationale(SFI)

12 Conférence des Nations Unies sur le commerce et l'emploi, tenue à Havane, Cuba, du 21 novembre 1947 au 24 mars 1948

13 Cette organisation internationale qui devait constituer le centre de codification des règles et pratiques des échanges mondiaux n'avait pas vu jour parce que simplement les Etats-Unis n'avaient pas pu procéder à la ratification de la Charte de Havane suite à l'opposition du Congrès qui avait considéré celle-ci comme insuffisamment libérale.

donner naissance au GATT de 1947.14 Celui-ci, n'étant juridiquement pas une véritable organisation internationale,15 ne pouvait efficacement administrer les rapports commerciaux multilatéraux car souffrant de quelques maladresses considérées comme des « défauts de jeunesse ».16 Ainsi, à la suite des rounds (cycles de négociations)17 et au sortir de l'un d'eux, d'ailleurs le plus long et le plus pertinent (Uruguay Round), a été mise sur pied l'Organisation Mondiale du Commerce(OMC).18

Du reste, il faut signaler que le commerce international n'est pas uniquement l'apanage des Etats. C'est la « construction » de tous les acteurs des relations internationales, y compris les sociétés multinationales. Celles-ci, à l'ère moderne de la Société internationale, jouent un rôle primordial dans le système commercial mondial. En fait, le souci de développement économique qui anime tous les Etats (ou entités territoriales) a occasionné une forte imprégnation de ces nouveaux acteurs qui, dans le cadre des politiques de développement économique mises en branle par les Etats, sont invités à apporter leur contribution-par des investissements notoires-à l'effort de développement socio-économique. C'est ainsi que les investissements des opérateurs économiques privés ont connu une augmentation de grande envergure si bien que certains pays « faibles » économiquement en ont profité et commencé à enregistrer des résultats encourageants en terme de croissance économique.19 Face à ce constat, selon lequel l'Etat est devenu un contractant dans le cadre des accords d'intérêt public,20 il a été trouvé essentiel d'encadrer, surtout au niveau national,21 ces investissements en vue, non seulement de promouvoir leur développement mais aussi de mesurer leur étendue et leur efficacité aussi bien dans le temps que dans l'espace.

Aussi encadrées qu'elles puissent l'être, les relations commerciales internationales ne peuvent manquer de soulever de tensions, des heurts, des conflits entre les acteurs, principalement liés au non-respect des engagements contractuels, dont la résolution impose, le plus souvent, l'intervention d'une juridiction. Cela amène, de surcroît l'objet de notre étude, à réfléchir sur le règlement des différends commerciaux internationaux par la voie juridictionnelle.

14C'est l'Accord signé à Genève, le 30 octobre 1947 et entré en vigueur le 01 janvier 1948

15 M. BELANGER, Les institutions économiques internationales, introduction au Droit International Economique, economica, Paris, 1981, p 58

16Cf. Khady. Fédéra. DEMBADIANG, Le règlement des différends dans le cadre de l'OMC, mémoire de maitrise, F.S.J.P-UCAD, 2006-2007, p 34

17 Pour plus d'informations sur ces cycles de négociation, voir D. CARREAU et P. JUILLARD, op.cit. pp 110151

18 L'Accord de Marrakech, signé le 15 avril 1994 et entré en vigueur le 01 janvier 1995

19 Voir, Marlyse.Quéré-MESSING, « Le rôle de l'arbitrage dans l'assistance aux pays sous-développés », AFDI, Vol 6, 1960, p 435

20 Avec la renonciation de plus en plus frappante de « l'Etat-gardien du marché » au profit de « l'Etat interventionniste », l'implication des Etats dans les relations contractuelles avec les personnes privés étrangères a pris des proportions importantes. Ceux-ci sont devenus de véritables commerçants. A cet effet, ils sont appelés à conclure des contrats commerciaux avec les opérateurs économiques étrangers soumis à des régimes juridiques divers. Voir, J.M.JACQUET, Les contrats du commerce international, Cours à l'Institut Universitaire des Hautes Etudes Internationales (IUHEI) de Genève, Suisse, 2006 ; « L'Etat, opérateur du commerce international », JDI, 1989

21 Voir, Ousmane. MBAYE, Les contrats d'Etats passés par le Sénégal, thèse de doctorat en droit, Université Cheikh Anta Diop de Dakar, 26 novembre 2006

Pour cogiter sur cette préoccupation, il sera nécessaire au préalable de revenir sur certaines notions qui la composent. D'abord, une « résolution juridictionnelle ». Elle s'avère difficile à appréhender car englobant un terme dont la définition est tout à fait compliquée à cerner. C'est celui de la juridiction. La notion, bien qu'étant fréquemment utilisée dans la littérature du droit, présente des complexités évidentes par rapport à son appréhension. Cependant, force est de constater, dans nombreux conceptions classiques, que la juridiction renvoie à trois éléments constitutifs et cumulatifs. En effet, une juridiction est un organe qui met fin à un problème par une décision obligatoire-revêtant de l'autorité de la chose jugée-rendue en application du droit.22 Est juridictionnel donc, la manière par laquelle un organe ou une institution tranche un litige, opposant deux ou plusieurs parties, de manière obligatoire en appliquant la règle de droit.23 Ensuite, un « différend international ». Il s'entend d'un conflit, d'une contestation de droit ou d'obligation qui oppose deux ou plusieurs personnes n'appartenant pas à la même sphère territoriale. C'est un conflit qui transcende les frontières nationales. Par exemple, est international un différend qui oppose deux ou plusieurs Etats, ou celui qui nait entre un Etat et un opérateur privé étranger ou encore une contestation opposant deux ou plusieurs opérateurs économiques de nationalité différente. En fin, une « activité commerciale internationale ». Elle renvoie à l'ensemble des opérations d'échange, commercial ou financier, réalisées par des personnes dont les intérêts sont situés dans des Etats différents.24 Il peut s'agir donc d'opérations ou de transactions existant entre Etats, ou entre un Etat et des personnes privées étrangères ou encore entre des personnes privées appartenant à des pays différents. Cette dernière considération ne sera pas abordée dans cette présente étude. Par contre, l'analyse sera portée sur les opérations d'échanges qui se nouent entre Etats et celles mettant en jeu les intérêts d'un Etat et un opérateur privé étranger, étant entendu que ces opérations sont plus développées et plus complexes que celles qui existent entre deux ou plusieurs opérateurs économiques privés.

Au regard de ces précisions, il sera l'occasion pour nous de nous interroger sur la portée même du mécanisme de règlement juridictionnel des différents découlant de ces opérations commerciales internationales à l'heure du « Nouvel Ordre Economique Mondial ».

Notons que les litiges liés aux transactions commerciales internationales peuvent être tranchés par le juge étatique.25 Cependant, ce mode de règlement des différends commerciaux internationaux ne sera pas pris en compte dans cette étude, car estimons-nous qu'il demeure « névralgique » au commerce international, étant donné que le juge national, lorsqu'un litige est porté à sa connaissance, aurait toutefois tendance à privilégier ses nationaux ou les normes nationales, lesquelles normes peuvent échapper complétement aux cocontractants étrangers, au détriment des usages et principes du commerce international. Donc, il sera retenu le mécanisme de règlement des différends de l'organisation mondiale du commerce(OMC) et celui de l'arbitrage commercial international.

22 Voir, Carlo. SANTULLI, « Qu'est-ce qu'une juridiction internationale ? Des organes répressifs internationaux à l'ORD », AFDI, vol 46, 2000, p 61

23 Voir, P. MEYER, OHADA, Droit de l'arbitrage, Bruxelles, Bruylant, 2002, p 24 et s

24 Voir, Bernard. JADAUD et Robert. PLAISANT, Droit du commerce international, Paris, Dalloz, 3ème éd, 1987 p 1

25 Cf. H. KENFACK, op.cit. p 26

L'étude de ce sujet naîtra d'une convergence d'approches, systémique et critique. Systémique, dans la mesure où il s'agira de revenir sur le mécanisme juridictionnel de résolution des différends commerciaux internationaux tel qu'il se présente, c'est dire que nous procéderons à une sorte description de son système de fonctionnement qui, au demeurant, reste très complexe. Cette démarche sera par ailleurs fondée sur des textes juridiques et sur des décisions de justice. Critique, parce que nous essayerons de réfléchir de façon analytique sur ce qu'il est et, selon notre propre perception, ce qu'il devrait être. Pour atteindre cette fin, notre réflexion s'articulera autour de deux grands axes. En première partie, nous verrons le caractère ambivalent de ce mécanisme. En deuxième partie, nous tenterons d'analyser son efficience.

PREMIERE PARTIE

LE REGLEMENT JURIDICTIONNEL DES DIFFERENDS COMMERCIAUX INTERNATIONAUX : UN MECANISME AMBIVALENT

Le caractère ambivalent du règlement juridictionnel des conflits commerciaux internationaux résulte essentiellement de la diversité des acteurs des relations commerciales internationales. En effet, les échanges internationaux font intervenir principalement les Etats et les opérateurs économiques privés dont les intérêts, faut-il le signaler, sont ou peuvent être largement divergents ; ce qui provoque inéluctablement des situations conflictuelles qu'il faut résoudre, le plus rapidement possible, pour rétablir l'ordre commercial international. Si la résolution des liges commerciaux entre Etats (Chapitre I) est principalement confiée à l'OMC à travers son système de règlement des différends, il est alors hors de doute que celle des conflits opposant un Etat et un opérateur économique étranger (Chapitre II) est généralement l'oeuvre de l'arbitrage.

CHAPITRE I : LES DIFFERENDS COMMERCIAUX OPPOSANT LES ETATS

Si certains historiens et politistes ne cessent de prétendre qu'il existe des dimensions anarchiques au sein de la société internationale, du fait de l'inexistence d'autorité supérieure aux Etats disposant de l'utilisation légitime de la force, ayant la capacité de défendre la justice, et le droit ainsi que le pouvoir d'arbitrer les conflits entre eux et les contraindre à respecter ses décisions,26 c'est parce que celle-ci telle qu'elle existe( et se présente) ne peut garantir une égalité « parfaite » entre les sujets. Il en est ainsi, par exemple dans le cadre des relations entre Etats dont les niveaux de développent économique ne sont pas les mêmes, en plus de leur « obsession souverainiste » qu'ils mettent à chaque situation en avant dans leurs rapports, l'équilibre et la stabilité de cette société ne serait, malheureusement, qu'illusoire, par conséquent s'occasionne effectivement une divergence d'intérêt. Celle-ci se manifeste encore beaucoup plus rude lorsqu'elle met en jeu les intérêts économiques.

Les relations commerciales multilatérales sont régies par les Accords de Marrakech instituant l'OMC, qui sert un cadre institutionnel commun pour conduire les relations commerciales entre ses membres.27 L'OMC dispose ainsi de larges pouvoirs en ce qui concerne l'interprétation des dispositions de tels accords et le règlement des conflits qui peuvent surgir dans l'application desdites dispositions. Elle réalise cette fin par le biais de son système de règlement des différends, à travers l'ORD (Section 1) qui, en soi, est un mécanisme original de résolution des conflits commerciaux internationaux. Cette originalité s'apprécie même au niveau du traitement spécial et différencié qu'il accorde aux PED (Section 2) au sein du mécanisme.

26 Cf. Pierre. De SENARCLENS, La mondialisation, théories, enjeux et débats, Dalloz, Paris, 2001, p 183

27 Article II§1 de l'Accord de Marrakech

SECTION 1 : L'ORD, principal mécanisme de règlement des différends commerciaux multilatéraux

L'un des principaux sucés des négociations d'Uruguay est la mise sur pied de l'OMC. Cette organisation internationale à vocation universelle a pour objectif principal de faire disparaitre graduellement et progressivement les barrières tarifaires et non tarifaires aux échanges internationaux. Fondée sur les deux solides piliers que sont la CNPF (clause de la nation la plus favorisée) et la CTN (clause du traitement national), l'OMC se veut être le gardien du nouveau système commercial multilatéral.28 Savons-nous d'emblée que l'idée qui transcende la résolution des conflits commerciaux multilatéraux est d'arriver à une conciliation entre les parties, mais non pas de « répudier » la partie fautive dans les relations commerciales29 ; ce qui pourrait, à coup sûr, désorganiser le système si toutefois celle-ci y pèse lourdement. C'est par souci que le GATT de 1947 avait pris comme fondement, dans son système de règlement des différends, la consultation.30 Cette procédure était prévue aux articles XXII et XXIII de l'accord. Cependant, vu son importance dans la préservation du commerce multilatéral, elle n'est point négligée, tout comme la médiation, les bons offices, dans le nouveau mécanisme de règlement des différends (à travers l'ORD) de l'OMC.31

L'OMC, pour résoudre les différends qui peuvent inéluctablement surgir dans les rapports commerciaux entre ses membres, tout en protégeant la libéralisation des échanges, doit non seulement prendre en compte la procédure sus visée, mais également celle dite « juridicisée » prévue dans le Mémorandum d'Accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends(MARD),32 qui d'ailleurs demeure une réalité de l'avancement du système de règlement des différends de l'OMC par rapport à celui du GATT, en ce qu'il constitue une codification des règles et de la procédure.33

Le mécanisme de règlement des différends de l'OMC allie à la fois souplesse et rigidité. Ce qui le rend, sans hésitation, efficace (Paragraphe 2). A cela, s'ajoute le fait qu'il s'applique à tous les accords de l'OMC et touche l'ensemble des conflits relatifs à l'application desdits accords ; lorsqu'un membre ne respecte pas ses engagements en violant les normes de l'organisation, il reste la seule voie autorisée pour les autres membres de le faire revenir à

28 Cf. Julien. BURDA, « L'efficacité du mécanisme de règlement des différends de l'OMC : vers une meilleure prévisibilité du système commercial multilatéral », RQDI, n°18.2, 2005, p 2

29 Sous la plume de G. MALINVERNI on a pu lire : « l'objectif premier des procédures de règlement des différends en matière économique n'est pas de décider qui a tort ou qui a raison ou d'établir la responsabilité d'un Etat, mais de faire en sorte que les violations, même importantes, ne soient que temporaires et puissent cesser le plus rapidement possible. », cité par Safiah. SY, in Le règlement des différends dans les Organisations Internationales Economiques : exemple la Banque Mondiale(BM), le Fond Monétaire International(FMI) et l'Organisation Mondiale du Commerce(OMC), mémoire de maitrise, F.S.J.P-UCAD, 2007-2008, p 22

30 Voir, P. Van. Den BOSSCHE et G. MARCEAU, « Le système de règlement des différends de l'OMC : analyse d'un système particulier et distinctif », Revue du marché unique européen, 1998, p 40. Voir également, Amélie. FONDIMARE, Le système de règlement des différends de l'OMC et les pays en développement, mémoire de DEA en Droit international économique, Université de Paris ( Panthéon-Sorbonne), 1998-1999, p 5

31 Article 5 du Mémorandum d'Accord

32 Annexe II de l'Accord de Marrakech

33 Voir, Thomas. A. ZIMMERMANN, « L'OMC : un bilan intermédiaire après dix ans de règlement des différends », Revue de politique économique, 2004, p 66

l'ordre. C'est effectivement une originalité du mécanisme de résolution des conflits commerciaux internationaux (Paragraphe 1).

PARAGRAPHE 1 : L'ORD, un mécanisme original de règlement des différends commerciaux internationaux

Le mécanisme de règlement des différends de l'OMC est considéré comme le succès réel de cette organisation. L'ORD est ainsi aperçu comme son « le bras armé ».34 Lorsqu'un membre estime que des mesures commerciales prises par un autre membre, dans le cadre de sa politique commerciale intérieure ou extérieure, lui causent un dommage ou rétrécissent ses avantages ou encore violent les dispositions des Accords de Marrakech, il peut engager une procédure devant l'ORD afin de faire revenir celui-ci dans le respect de ses engagements envers les présents Accords. Nul n'ignore que ce mécanisme a pour champ d'application le règlement des litiges opposant les Etats membres dans le cadre de leurs relations commerciales, encadrées par les textes de l'OMC.35 C'est pourquoi, il est non seulement global et intégré(A) mais également interétatique(B).

A) Un mécanisme intégré et global de règlement des différends commerciaux internationaux

Le mécanisme de résolution des conflits commerciaux multilatéraux à travers l'ORD de l'OMC constitue effectivement « un élément essentiel pour la sécurité et la prévisibilité du système commercial multilatéral. Les membres reconnaissent qu'il a pour objet de préserver les droits et les obligations résultant pour les membres des accords visés, et de clarifier les dispositions existantes de ces accords conformément aux règles coutumières d'interprétation du droit international public. Les recommandations et décisions de l'ORD ne peuvent pas accroitre ou diminuer les droits et obligations énoncés dans les accords visés36 En s'attachant à cette stipulation, il apparait clairement que ce mécanisme peut être considéré comme un système « intégré », étant donné qu'il embrasse tous les litiges relatifs à l'application des normes visées dans l'Accord de Marrakech. Ainsi, dans l'affaire Article 1105(plainte des Communautés européennes), le groupe spécial a soutenu que « tous les accords visés par l'Accord sur l'OMC forment un seul système juridique intégré. »37 Il se caractérise par une intégration aussi bien de toutes les règles de procédures que celles du droit applicable dans un instrument unique.38 Le Mémorandum d'accord constitue alors une sorte de catalogue, faisant intégralement partie de l'Accord de l'OMC, qui sert une uniformisation du traitement de tous les litiges nés de l'application dudit accord, comme déjà le fait savoir le professeur Yves Nouvel en ces termes: « tous les litiges issus du système sont canalisés vers un mécanisme de règlement unique devant lequel, de surcroît, ils font l'objet d'un traitement

34 Cf. Olivier. BLIN, L'organisation mondiale du commerce, Paris, Ellipses, 2004, p 13. Voir également, Annie. Krieger-KRYNICK, L'organisation mondiale du commerce. Structures juridiques et politiques de négociation, Paris, Vuibert, 2005, p 91. Elle confia ceci : « le système de règlement des différends est devenu la pièce maitresse du fonctionnement de l'OMC. »

35 Ludovic. LORENZO, op.cit. p 137

36 Article 3§2 du Mémorandum d'Accord

37Affaire Etats-Unis-Article 1105 de la loi des Etats-Unis sur les droits d'auteurs. 2000. OMC. Doc. WT/DS160/R, parag 6.185. Rapport du Groupe spécial [Article 1105]

38 D.CARREAU et P. JUILLARD, op.cit. p 95

uniforme. »39 Toutefois, il n'est pas sans intérêt de rappeler que cette unicité de l'instrument n'entraine pas ipso facto l'unification des procédures, car il existe des différends spécifiquement nés des Accords commerciaux multilatéraux constitutifs des Accords de Marrakech dont le règlement renvoie aux procédures sus visées dans le Mémorandum et ceux nés d'autres accords, et qui ne remettent pas en cause l'équilibre du système commercial international, auxquels la résolution ne nécessite pas forcement le recours aux procédures du Mémorandum.40

Etant intégré, le mécanisme est encore global. Le Mémorandum d'accord sur les règles et procédure de règlement des différends(MARD) se veut être un instrument global.41 Ainsi, les procédures et les règles inscrites dans le Mémorandum d'accord s'appliquent à tous les litiges résultants des Accords de Marrakech (énumérés à l'Appendice 1 du Mémorandum)42 ; également elles s'appliquent aux différends entre les membres relatifs à leurs droits et obligations en vertu de l'Accord instituant l'OMC, en conséquence ceux-ci se trouvent dans une obligation de se conformer simultanément et cumulativement à toutes les obligations issues de ces accords. C'est du moins la position de l'Organe d'appel dans l'affaire des produits laitiers (une plainte des Communautés européennes) où il précise qu' « il est maintenant établi que l'accord sur l'OMC constitue un · instrument unique· et, par conséquent, toutes les obligations contractées dans le cadre de l'OMC sont en général cumulatives et les membres doivent se conformer simultanément à la totalité d'entre elles. »43

Il convient de retenir que pour certains des accords commerciaux dits plurilatéraux44 le mémorandum ne s'applique pas ipso jure. C'est dire que son application est en effet subordonnée, selon l'Appendice 1, à une manifestation de volonté des parties. Ainsi, les parties à chaque accord commercial plurilatéral vont adopter non seulement une décision qui soumettra cet accord au mémorandum, mais également elles vont déterminer les modalités particulières de l'application du Mémorandum à cet accord. Cependant, si ces modalités particulières aboutissent à la création d'une règle ou procédure nouvelle, cette règle ou procédure devra être notifiée à l'ORD, car c'est à lui qu'il revient en définitive de mettre en oeuvre le Mémorandum.45 Dans la même perspective, il est important de rappeler que certains accords annexés à l'accord sur l'OMC-visés à l'Appendice 2 du Mémorandum46-prévoient

39 Yves. NOUVEL, « L'unité du système commercial multilatéral », AFDI, n°46, 2000, p 663

40 D. CARREAU et P. JUILLARD, supra note 32

41 Ibid. p 93

42Art 1-1 du Mémorandum d'Accord. Les accords commerciaux multilatéraux visés à l'Appendice 1 comprennent l'Accord instituant l'OMC, l'Accord relatif au mémorandum, l'Accord sur les marchandises (annexe1 A), l'Accord sur les services, AGCS (annexe1 B) et l'Accord sur ADPIC/TRIPS (annexe 1 C).

43L'affaire Corée-Mesures de sauvegarde définitive appliquée aux importations de certains produits laitiers, 1999(adopté le 12 janvier 2000), OMC, Doc WT/DS98/AB/R parag 74, Rapport de l'Organe d'appel [produits laitiers]

44Voir, Annexe IV de l'Accord de Marrakech. Les accords commerciaux plurilatéraux sont maintenant deux. Il s'agit de l'Accord sur le commerce des aéronefs civils, 12 avril 1979, R.T. Can.1980 n°39 et de l'Accord sur les marchés publics, 12 avril 1979. R.T. Can. 1981. n°39

45 Cf. D. CARREAU et P. JUILLARD, op. cit. p 94

46 Ces Accords sont entre autres, l'Accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires (annexe1A) de l'Accord de l'OMC,14 avril 1994, 1867.R.T.U.N.508, l'Accord sur les textiles et les vêtements (annexe1A) de l'Accord de l'OMC, 14 avril 1994, 1867.R.T.U.N.3, l'Accord relatif aux obstacles techniques au commerce, 12 avril 1979 entré en vigueur le 1 janvier 1980. R.T. Can. 1980. n°41, l'Accord sur la mise en oeuvre

des règles et procédures spéciales ou additionnelles en matière de règlement des conflits auxquels le Mémorandum d'accord s'applique ipso jure. Dans ce cas, il apparait que ces règles et procédures spéciales peuvent entrer en collision avec celles dites générales sus visées dans le Mémorandum. Alors, le Mémorandum d'accord fournit quelques directives pour remédier ce problème. La première est de caractère impératif et une application classique du principe specialia generabilus derogant selon lequel : « Dans la mesure où il y'a une différence entre les règles et procédures du Mémorandum et les règles et procédures spéciales ou additionnelles indiquées à l'Appendice 2, ces dernières prévaudront. »47 La seconde directive consiste pour les parties, à l'occasion d'un seul et même conflit exigeant l'interprétation et l'application aussi bien d'un accord visé à l'Appendice 1 que d'un autre prévu par l'Appendice 2, à s'entendre sur le choix des règles et procédures applicables. En cas d'échec, le Président de l'ORD visé au paragraphe 1 de l'article 2 du Mémorandum, en consultation avec les parties en conflit, déterminera les règles et procédures à suivre dans les dix(10) jours suivant la demande de l'un ou l'autre membre.48 En fin, la troisième directive - subséquemment liée à la seconde- est, lorsque le Président de l'ORD exerce sa mission, d'utiliser de préférence les règles et procédures spéciales.49

Si le mécanisme de règlement des différends commerciaux multilatéraux de l'OMC est intégré et global, il n'en demeure pas moins qu'il est, dans une large mesure, interétatique.

B) Un mécanisme interétatique de règlement des différends commerciaux internationaux

Le mécanisme de règlement des différends dans le cadre l'OMC est considéré de jure interétatique. Cela est aisément compréhensible puisqu'il résulte de l'oeuvre d'une organisation intergouvernementale. En effet, les Accords de Marrakech sont conclus entre Etats. Ce qui fait que le cadre du mécanisme de règlement des différends de l'OMC soit largement interétatique.

La résolution des conflits dans le cadre de l'OMC est un système réservé aux seuls Etats50 en tant que membres de l'organisation. Il s'en suit que les opérateurs privés n'y ont pas accès bien qu'il soit tout à fait difficile de concevoir que le contentieux du commerce international reste par nature interétatique, étant donné qu'il est de facto l'oeuvre des commerçants, qui sont

de l'art VI(mesure antidumping-annexe 1A) de l'Accord de l'OMC, 14 avril 1994,1867.R.T.U.N.335, l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires( annexe 1A) de l'Accord de l'OMC,14 avril 1994, 1867.R.T.U.N.515, l'Accord sur la mise en oeuvre de l'art VII(évaluation en douane-annexe1A) de l'Accord de l'OMC, 14 avril 1994, 1867.R.T.U.N.418. Pour d'autres informations supplémentaires, voir le tableau minutieusement dressé par D. CARREAU et P.JUILLARD, op.cit. p 95

47 Art 1-2 du Mémorandum d'accord

48 Ibid

49 Ibid

50 Il importe de retenir à ce niveau que la qualité d'Etat n'est pas une exigence restrictive car, l'Accord vise « tout territoire douanier qui jouit des pleines compétences dans ·la conduite de ses relations commerciales extérieures
·
· et pour
·
·les autres questions traitées
·
· par les accords de l'OMC peut en devenir membre
». Par exemple, la Communauté européenne n'est pas un Etat, de même que Hong Kong, mais ils sont tous membres de l'OMC. Voir, Charles-Emmanuel COTE, Mondialisation et Droit international, la participation des personnes privées au règlement des différends internationaux économiques : l'élargissement du droit de porter plainte à l'OMC, Bruxelles, Bruylant, 2007, p 78

généralement les opérateurs économiques privés.51 L'Organe d'appel, dans son rapport du 10 mai 2002(affaire Etats-Unis/Imposition de droits compensateurs), avait considéré que l'ORD constituait un mécanisme purement intergouvernemental auquel les personnes privées n'avaient pas accès sauf à titre amicus curiae.52 Les Accords de Marrakech ne lient que les membres sans pour autant avoir un effet direct sur leurs ressortissants en tant que un nouvel ordre juridique. Cette position est clairement réaffirmée53 par le Groupe Spécial dans l'affaire Section 301(une plainte des Communautés européennes) où il précise substantiellement que ni le GATT, ni l'accord sur l'OMC n'ont été interprétés jusqu'à présent par les organes du GATT/OMC comme un ordre juridique déployant des effets directs et dont les sujets seraient à la fois les parties contractants et leurs ressortissants.54

La récusation des personnes privées à l'utilisation du mécanisme de règlement des différends de l'OMC, même si elle est compréhensible, peut paraitre décourageante dans la mesure où la tendance du droit international économique est de préparer les opérateurs privés à l'accès aux mécanismes internationaux de résolutions des litiges, lorsque leurs droits se trouvent compromis par l'action des Etats. Qui plus est, certains accords, notamment l'Accord ADPIC/TRIPS et l'Accord sur le commerce des services(GATS), visent ou créent des droits et obligations à l'égard des particuliers. Par exemple, l'Accord sur le commerce des services visent explicitement les fournisseurs de services.55 De la même manière, l'Accord sur les services financiers du 12 décembre 1997 implique un certain nombre d'obligations pour les fournisseurs de services bancaires et d'assurances.56

En outre, lorsque les règles du système commercial international sont violées, c'est du fait de ces opérateurs autant que celui des Etats, et ces violations font plus tort aux opérateurs qu'aux Etats.57Ainsi, ces opérateurs peuvent être amenés à vouloir régler ce préjudice par le biais de leurs Etats.58 Cela va certainement engendrer l'apparition des groupes de pressions

51Cf. E. Canal-FORGUES, « Mutations de l'ordre juridique international et le système de règlement des différends de l'OMC », p 2, disponible sur le site, www.Cedroma.usj.edu.Ib /pdf/OMC/ECF, vu le 05 juin 2014 à 16h. 25mn

52Voir, Affaire Etats-Unis-Imposition de droits compensateurs sur certains produits plats en acier au carbone traité contre la corrosion en provenance d'Allemagne. 2002. OMC. Doc WT/DS213/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Acier au carbone]

53 Effectivement, cette position est une consécration de norme communautaire européenne. Suivant les conclusions de la CJCE, affaire Allemagne c/ Conseil, 1994, le Conseil des Communautés européennes a rappelé que : « par sa nature, l'Accord instituant l'Organisation Mondiale du Commerce, y compris ses annexes, n'est pas susceptible d'être invoqué directement devant les juridictions communautaires et les Etats membres. », Communauté Européenne, Décision 94/800, 22 décembre 1994 relative à la conclusion au nom de la Communauté, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords de négociations multilatérales du Cycle de l'Uruguay(1986-1994).

54 L'affaire Etats-Unis-Articles 301à 310 de la loi de 1974 sur le commerce extérieur. 1999, (Rapport du Groupe spécial), OMC, Doc WT/DS152/R au parag 7.72

55 Cf. E. Canal-FORGUES, op.cit. 3

56 Voir l'annexe sur les services financiers, Accord sur le commerce des services (GATS/AGCS), annexe 1B de L'Accord de Marrakech du 14 avril 1194

57 D.CARREAU et P. JUILLARD, op.cit. p 91

58 Il sera très difficile, sinon impossible, de ne pas voir les opérateurs économiques privés, à l'instar des multinationales, se réfugier derrière leurs Etats d'origines, membres de l'OMC, afin que soit résolue l'activité de l'autre Etat membre leur faisant grief. Cela va faire surgir irrécusablement le phénomène de protection diplomatique. Ce qui favorisera davantage un danger du système commercial multilatéral comme s'inquiète déjà Virgile. PACE en ces termes : « les grandes multinationales sont tentées de se servir de l'OMC, via les Etats,

(lobbies). Pour s'en convaincre, il suffit de méditer sur l'affaire Hormones,59 dans laquelle l'action poignante des grands groupes alimentaires comme Monsanto et Cargill n'est pas à nier. En fait, les Etats-Unis avaient contesté la législation sanitaire européenne plus contraignante sous la pression de ces firmes internationales bien que certaines associations de consommateurs américaines eussent soutenu ladite mesure.60

Cependant, il importe de retenir que les particuliers ne sont pas totalement exclus du mécanisme de règlement des différends de l'OMC.61 Comme nous l'avons signalé en haut, ils peuvent être invités à titre amicus curiae (ami de la juridiction). Ainsi, par exemple dans l'affaire Crevettes,62 en application de l'art 13 du Mémorandum, il a été décidé en premier lieu que seules les informations sollicitées par les panels (groupes spéciaux) pouvaient être prises en compte, et rien n'empêchait les Etats-Unis, s'ils le souhaitaient, d'inclure « des arguments des ONG dans leurs propres conclusions » même si les panels disposent un pouvoir discrétionnaire dans l'appréciation des renseignements ou informations communiqués par de sources non gouvernementales. Egalement, dans l'affaire Bananes III,63 la question de la participation d'avocats privés (qui ne sont pas des agents de l'Etat) aux procédures de règlement des différends, particulièrement devant l'Organe d'appel, avait été soulevée à la demande du gouvernement Sainte-Lucie. Ainsi, après avoir examiné le droit international coutumier et la pratique pertinente des tribunaux internationaux, l'Organe d'appel a répondu qu'il appartenait à chaque membre de l'OMC de déterminer la composition de sa délégation lors d'une procédure devant l'Organe d'appel. Cette position a été ultérieurement confirmée et étendue aux procédures devant les groupes spéciaux dans l'affaire Automobiles64 où l'Indonésie avait choisi deux avocats et les présentait comme membres de sa délégation pour la défendre.

Considéré comme mécanisme original de règlement des différends, le système de règlement des différends de l'OMC est aussi efficace.

PARAGRAPHE 2 : Un mécanisme efficace de règlement des différends commerciaux internationaux

Le mécanisme de règlement des différends de l'OMC est un fait mixte, participant à la fois de l'approche diplomatique et de l'approche légaliste.65 Le Mémorandum d'accord, la base

pour faire valoir leurs intérêts privés. Il y'a là un risque qui ne doit pas être sous-estimé. Les Etats, sous la pression des lobbies, peuvent être amenés à utiliser le mécanisme de règlement des différends de l'OMC pour s'attaquer à des législations étrangères qui ne servent pas les intérêts des grands groupes privés ». Voir, Virgile. PACE, « Cinq ans après sa mise en place, la nécessaire réforme du mécanisme de règlement des différends de l'OMC », R.G.D.I.P. Tome 104, n°3, 2000, p 651

59 Affaire Communautés européennes-Mesures communautaires concernant les viandes et les produits carnés (plainte des Etats-Unis), 1999, OMC, Doc WT/DS26/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Hormones]

60 Voir, J. BURDA, op.cit. p7

61 Voir, B. STERNE, «L'intervention des tiers dans le contentieux de l'OMC », RGDIP, 2003, pp 257-303

62 Affaire Etats-Unis-prohibitions à l'importation de certaines crevettes et de certains produits à base de crevettes, 1998, OMC. Doc, WT/DS58/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [crevettes].

63 Affaire Communautés européennes-Régime applicable à la vente et la distribution de bananes, 1997, OMC. Doc, WT/DS27/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Bananes III]

64 Affaire Indonésie- Automobiles, 1998, OMC. Doc. WT/DS54/AB/R- Rapport du Groupe spécial [Automobiles]

65 Cf. Charles-Emmanuel COTE, op.cit, p 75

juridique essentielle du mécanisme, comporte des procédures « qui sont à mi-chemin entre la négociation diplomatique et le règlement juridictionnel »66des différends. Il s'inscrit ainsi dans le cadre d'une nouvelle approche de résolution des conflits commerciaux multilatéraux conformément à l'esprit de l'organisation. L'OMC est un « cadre institutionnel commun pour la conduite des relations commerciales entre ses membres en ce qui concerne les questions liées aux accords et instruments juridiques connexes repris dans les annexes du présent accord67 C'est un mécanisme qui est souple dans la mesure où il accorde une place capitale aux instruments politiques de règlement des différends à côté des mécanismes juridiques qui renvoient directement à l'aspect rigide du système. Cela constitue une efficacité du nouveau système de règlement des différends commerciaux multilatéraux.

L'efficacité du mécanisme de règlement des différends de l'OMC peut être appréciée à deux niveaux. D'une part, on peut relever cette efficacité au niveau de la procédure(A) et d'autre part au niveau des décisions(B).

A) Une efficacité par rapport à la procédure

Le mécanisme de règlement des différends prévu par le Mémorandum d'accord peut être qualifié de droit commun.68 Mais, pour une efficacité du règlement des litiges, le mécanisme allie le politique et le juridique en ce qui concerne la procédure. En effet, il prévoit des phases procédurales que l'on peut juger de politiques(1) étant entendu qu'elles s'inscrivent dans une perspective diplomatique de résolution des conflits internationaux. Egalement, à côté des phases « politiques », il y'a celles qui sont spécifiquement « juridictionnelles » sinon « quasi-juridictionnelles » (2).69

1- Une procédure politique ou non juridictionnelle

Cette procédure renvoie directement aux modes alternatifs de règlement des différends (ADR selon le sigle anglais, le plus répandu : « alternative dispute resolution ») qui sont très fréquents dans la résolution des conflits commerciaux internationaux. Ils comprennent, notamment, la conciliation, la médiation, les bons offices.70 Ces modes de règlement des

66 Voir, Th. FLORY, L'Organisation mondiale du commerce. Droit institutionnel et substantiel, Bruxelles, Bruylant, 1999, p 21

67 Article 2§1 de l'Accord instituant l'OMC

68 Cf. D. CARREAU et P. JUILLARD. op.cit. p 96

69 Cette qualification n'a pas manqué de soulever une opposition dans la doctrine. Ainsi, selon le Pr SANTULLI, l'ORD et les groupes spéciaux « sont des quasi-juridictions en juridictionnalisation progressive, ils produisent une quasi-jurisprudence dont la juridicité est croissante. » Voir, Carlo. SANTULLI, op.cit. p 70. Alors que le Pr H. Ruiz-FABRI retient le caractère juridictionnel du mécanisme, estimant que : « l'exclusion de l'approche contentieuse ne semble(...) pas être incompatible avec la qualification juridictionnelle si les critères de celle-ci sont par ailleurs satisfaits.» Voir, H. Ruiz-FABRI, « Le règlement des différends au sein de l'OMC : naissance d'une juridiction, consolidation d'un droit » in Souveraineté étatique et marchés internationaux à la fin du 20èm Siècle : A-propos de 30 ans de recherche du CERDIMI, mélanges en honneur de P. Kahn, Université de Bourgogne-CNRS, travaux du Centre de Recherche sur le Droit international des marchés et des investissements internationaux, vol. 20, Paris, Litec, 2000, p 303 et s ; « Le Juge de l'OMC : ombres et lumières d'une figure judiciaire singulière », RGDIP, 2006, n°1, pp. 39-83

70 Article 5 du Mémorandum d'accord

différends sont repris dans le mécanisme de règlement des différends de l'OMC à côté des consultations.71

Le système de règlement des différends de l'OMC comporte des règles et procédures qui « s'appliquent aux différends soumis en vertu des dispositions relatives aux consultations et règlement des différends des accords énumérés à l'appendice 1 du mémorandum d'accord. »72 En vertu des dispositions du mémorandum d'accord, la nouvelle procédure de règlement des différends de l'OMC prévoit les consultations comme la première phase de la procédure de règlement des différends. Elle intervient a priori, c'est-à-dire avant que le différend ne naisse. Un membre constate simplement qu'un autre membre a pris des mesures sur son territoire qui compromettent l' « ordre public international commercial » et l'affectent concrètement. Alors, le membre victime pourra lui adresser des « représentations » en vertu desquelles il l'invite à observer des possibilités de consultation sur ses « représentions ». C'est la voie diplomatique qui est mise en oeuvre. Cette demande de consultation est notifiée aussi bien à l'ORD qu'aux autres organes de l'OMC, notamment les Conseils et les Comités compétents.73

La phase des consultations constitue le maillon du système de règlement des différends de l'OMC. Elle sert un cadre de discussion « courtoise » pour les parties. Ces dernières vont échanger des renseignements et éventuellement mesurer leur divergence afin d'arriver à une solution efficace du litige. L'Organe d'appel l'a clairement affirmé dans l'affaire Sirop de maïs au cours de laquelle il a précisé qu' : « à la faveur des consultations, les parties échangent des renseignements, évaluent les points forts et les points faibles dans leurs thèses respectives, réduisent la portée des divergences qui les séparent et, bien souvent, trouvent une situation mutuellement acceptable[...]Les consultations donnent aux parties la possibilité de définir et de circonscrire la portée du différend entre elle. »74 Elles sont importantes, vu le nombre de plaintes qui ont été résolues à ce stade. En effet, entre l'entrée en vigueur du mécanisme de règlement des différends de l'OMC, le 01 janvier 1995, et le 31 mars 2005, sur les 329 plaintes portées à l'ORD soixante-douze(72) ont été résolues au stade des consultations.75

Sous peine d'invalidité, la demande de consultation doit respecter un certain nombre de conditions formelles. En plus de sa notification à l'ORD, aux Groupes spéciaux et aux Comités compétents, la demande de consultation doit être écrite et motivée tout en comportant l'indication des mesures en cause et du fondement juridique de la plainte.76 Cependant, il convient de noter que certains accords visés à l'appendice 2 du Mémorandum exigent, en ce qui concerne les mentions formelles de la demande de consultation, des

71 Article 4 du Mémorandum d'accord

72 Article 1§1 du Mémorandum d'accord

73 Article 4§4 du Mémorandum d'accord

74 Affaire Mexique-Sirop de maïs, 2001, OMC, Doc WT/DS132/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Sirop de maïs]

75 Voir, Charles-Emmanuel COTE, op.cit. p 95

76 Article 4§4 du Mémorandum d'accord

éléments supplémentaires.77 A titre d'exemple, on peut citer les différends relatifs à l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires auxquels il est exigé d'exposer des éléments de la preuve disponibles au sujet de l'existence de la subvention et de la nature de la subvention.78 L'Organe d'appel a eu l'occasion à le préciser dans l'affaire Foreign Sales Corporation(FSC) où il considéra que ce sont les éléments de preuve du caractère de la mesure en tant que subvention qui doit être indiqués et non pas seulement ceux de la preuve ayant trait à l'existence de la mesures.79

Les consultations sont des droits que tout membre se réserve la latitude d'exercer dans une suite éventuelle de la procédure ; elles se déroulent entre les parties, et le Secrétariat de l'OMC n'est pas impliqué, parce que confidentielles qu'elles sont.80 Elles sont contrôlées par les Groupes spéciaux,81 mais ce contrôle se distingue selon qu'il soit dans une procédure ordinaire ou une procédure particulière. Concernant le contrôle des consultations dans une procédure ordinaire, on a constaté que les groupes spéciaux n'exercent pas un véritable contrôle mais se limitent-ils simplement à vérifier leur existence.82 Par contre, le contrôle des Groupes spéciaux est beaucoup plus consistant dans une procédure particulière. Par exemple, l'article 12 de l'Accord sur les sauvegardes exige des consultations préalables informelles fondées sur la chronologie des événements.83

Lorsque la demande de consultation est formulée en vertu d'un accord visé, le membre auquel la demande est adressée doit y répondre, sauf un accord mutuellement convenu, dans les dix(10) jours suivant la date de sa réception et engager les consultations de bonne foi, au plus tard trente(30) jours après la date de la réception de la demande afin d'arriver à une solution mutuellement satisfaisante.84

Toutefois, convient-il de noter que même si la consultation constitue une condition préalable aux procédures du Groupe spécial, elle connait un certain assouplissement. Ainsi, dans l'affaire Sirop de maïs, l'Organe d'appel avait considéré que : « si défendeur ne présentait pas expressément et en temps voulu une objection à une absence de consultation, il pouvait être considéré comme ayant renoncé au droit qu'il aurait éventuellement eu de consulter. »85 Nous constatons, à travers cette position, que la dénonciation de l'absence de consultations constitue une latitude au défenseur qui peut y renoncer.

77 Cf. Elias. El. BEYROUTHY, La procédure de groupe spécial devant l'Organe de Règlement des différends de l'OMC, mémoire de 4ème année, Institut d'Etude Politique de Lyon, 2004-2005, p 8

78 Voir l'article 4.2 de l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires (annexe 1A) de l'Accord de l'OMC

79 L'affaire Etats-Unis-Foreign Sales Corporation(FSC), 2000, OMC. Doc. WT/DS108/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Foreign Sales Corporation]

80 Article 4§6 du Mémorandum d'accord, voir également l'affaire Corée-Taxes sur les boissons alcooliques, 1999, OMC, Doc. WT/DS75/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Boissons alcooliques]

81 Article 6§3 du Mémorandum d'accord

82 Cf. El. BEYROUTHY, op.cit. p 10

83 Voir E. Canal-FORGUES, Le règlement des différends de l'OMC, Bruxelles, Bruylant, 2003, p 46

84 Article 4§3 du Mémorandum d'accord

85 Affaire Mexique-Sirop de maïs, supra note 74

Egalement, tout membre autre que ceux prenant part aux consultations peut, sous le respect de certaines conditions posées par le mémorandum, être admis à participer aux consultations si estime-t-il qu'il a un intérêt substantiel aux consultations.86

En fin, il importe de retenir qu'au cours des consultations une attention particulière doit être accordée aux problèmes et intérêts des pays en développement(PED).87

Si au terme des consultations les parties ne sont pas parvenues à la résolution du différend, elles auront à choisir soit l'établissement d'un Groupe spécial, soit le recours à d'autres modes pacifiques de résolution des conflits internationaux.

A côté des consultations, il y'a, déjà rappeler au-dessus, d'autres modes amiables de règlement des différends dans le système de règlement des différends de l'OMC. Ce sont les bons offices, la conciliation et la médiation. Ils sont laissés à l'appréciation des parties en conflit comme on peut le voir dans cette stipulation : « les bons offices, la conciliation et la médiation sont des procédures qui sont ouvertes volontairement si les parties au différends en conviennent ainsi. »88 A la lecture de cette disposition, nous constatons une certaine « nonchalance » du Mémorandum concernant l'étendu de ces modes alternatives de règlement des différends. Le Mémorandum d'accord ne s'efforce, ni de donner une définition qui leur concerne, ni de déterminer leur distinction, mais simplement se contenter de les énumérer les uns les autres. Cependant, la doctrine en fournit quelques éléments de définition. Nous pouvons retenir qu'ils s'agissent des procédures politiques ou diplomatiques qui « appartiennent à l'arsenal des modes de règlement les plus classiques et les plus anciens. »89 Pour le professeur N. Quoc Dinh, les bons offices et la médiation sont deux modes d'origine coutumière et codifiés par la Convention de la Haye du 29 juillet 1899 et du 18 octobre 1907 tandis que la conciliation a été apportée par la convention de Vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969.90

Etant confidentiels,91 ces modes de règlement des différends prévus par le Mémorandum peuvent être demandés à tout moment de la procédure par l'un des membres parties en conflit et peuvent être mis fin à tout moment.92 Ainsi, le Directeur Général, dans l'exercice de ses fonctions, peut apporter ses bons offices, sa conciliation ou sa médiation aux parties en vue d'arriver à une résolution de leur conflit.93 Toutefois, si les parties en consentent, ils peuvent continuer pendant que la procédure du Groupe spécial se poursuive.94

Partant de ces considérations, nous sommes en droit de dire que autant les consultations sont importantes, autant les bons offices, la médiation et la conciliation sont nécessaires dans la résolution des différends commerciaux multilatéraux. Mais, ils sont simplement mis en

86 Voir l'article 4§11 du Mémorandum d'accord

87 Article 4§10 du Mémorandum d'accord

88 Article 5§1 du Mémorandum d'accord

89 P. M. DUPUY, Droit international public, Paris, Dalloz. 4°ed, 1998, p 467

90 N. Quoc. DINH, Droit international public, Paris, LGDJ, 7°ed, 2002, p 833 et s

91 Article 5§2 du Mémorandum d'accord

92 Article 5§3 du Mémorandum d'accord

93 Article 5§6 du Mémorandum d'accord

94 Article 5§5 du Mémorandum d'accord

branle dans cette phase que nous pouvons qualifier de « non contentieuse ». C'est pourquoi elle peut être qualifiée de procédure diplomatique ou simplement de procédure politique.

Toutefois, si cette phase n'aboutit pas à une solution satisfaisante du litige, les parties peuvent demander l'établissement des Groupe spéciaux et éventuellement recourir à l'examen de l'organe d'appel dont l'esprit même s'attache à une procédure juridictionnelle.

2- Une procédure juridictionnelle ou « quasi-juridictionnelle »

La procédure juridictionnelle ou « juridicisée »95de règlement des différends de l'OMC renvoie d'une part à l'établissement d'un Groupe spécial (Panels, déjà connus sous l'empire du GATT) dont la tâche consiste à l'examen de l'affaire en « première instance » et d'autre part, le recours à l'Organe d'appel permanent (qui est une nouveauté apportée par les Accords de l'OMC) servant en quelque sorte un « second degré » de juridiction96 ; il est habilité à examiner l'affaire en appel.

Dans un premier temps, si les parties en conflits n'arrivent pas à résoudre leur litige dans les soixante(60) jours suivant la date de la réception de la demande de consultation, la partie plaignante peut demander l'établissement d'un Groupe spécial.97 C'est alors que commence la phase que l'on peut considérer « contentieuse ». Cette procédure est régie par les articles 6 à 16 du Mémorandum d'accord, complétés par l'Appendice 3.

Si la partie plaignante le demande, un groupe spécial est établi, au plus tard, à la réunion de l'ORD qui suit celle à laquelle la demande a été inscrite pour la première fois à l'ordre du jour de l'ORD, à moins que ce dernier ne l'ait rejetée par un consensus négatif.98

La demande de l'établissement d'un Groupe spécial doit être faite par écrit ; elle doit préciser si les consultations ont bien eu lieu, indiquer les mesures spécifiques en cause et contenir un exposé bref du fondement juridique de la plainte.99 Selon l'Organe d'appel, dans l'affaire Brevets pharmaceutiques (une plainte des Etats-Unis), les parties à un différend doivent « dès le début, tout dire en ce qui concerne aussi bien les allégations en question que les faits en rapport avec les allégations. Les allégations doivent être clairement formulées. Les faits doivent être volontairement divulgués. »100 La formulation précise des allégations va justement constituer la base du mandat du Groupe spécial défini à l'article 7 du Mémorandum et servira une information pour la partie défenderesse, et pour les tierces parties un fondement

95 Cf. J. BURDA, op.cit. p 16

96 A bien des égards, certains juristes contestent ce rôle, du moins considèrent-ils que l'Organe d'appel joue plutôt un rôle de cassation, voir à ce sujet, D.CARREAU et P.JUILLARD, op.cit. p 100-101

97 Article 4§7 du Mémorandum d'accord

98 Article 6§1 du Mémorandum d'accord. Il s'agit d'une règle nouvelle insérée dans le cadre de l'OMC car, sous l'empire du GATT, la partie défenderesse pouvait s'opposer à l'établissement d'un Groupe spécial en imposant son véto. Ce consensus va permettre une désignation plus facile d'un Groupe spécial et la rendre relativement systématique étant donné que le consensus positif est devenu négatif « en ce qu'il n'est plus nécessaire pour l'adoption du rapport, mais pour son rejet. » Voir, B. TAXIL, L'OMC et les pays en développement, Montchrestien, 1998, p 138

99 Article 6§2 du Mémorandum d'accord

100 Affaire Inde-Brevets pharmaceutiques et les produits chimiques pour l'agriculture, 1997. OMC. Doc. WT/DS50/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Brevets pharmaceutiques]

juridique de la plainte.101 Une fois établi, le Groupe spécial est mandaté par les parties et s'applique automatiquement.102 Ce mandat est fondamental pour au moins deux raisons. D'une part, il permet de garantir une procédure régulière, assurant aux parties et aux tierces parties des renseignements suffisants relatifs aux allégations en cause, d'autre part il détermine le domaine de compétence du Groupe spécial103tel qu'il est régi au paragraphe 1. Cette compétence déterminée par le mandat constitue en quelque sorte une compétence d'attribution (rationae materiae), c'est-à-dire que le groupe spécial est lié par les termes du mandat ; il ne peut pas aller, ni au-delà, ni en deçà de ce qui a été déterminé par les parties dans le mandat, sinon il aura agi ultra petita.104 A cet effet, si le défendeur considère que les allégations portées par le demandeur sont hors du mandat, il doit formuler sa contestation en temps utile et non à un stade tardif de la procédure comme celui de l'examen du rapport intérimaire.105

Les Groupes spéciaux sont composés de personnes très qualifiées ayant ou non des attachements avec des administrations nationales. Ces personnes sont choisies parmi celles qui ont acquis une connaissance qualifiée et une expérience requise dans le domaine de la politique commerciale internationale ou de l'économie internationale (pour avoir été professeurs ou praticiennes).106 En outre, elles doivent être indépendantes et compétentes.107 Il demeure important de retenir qu'aucun ressortissant des membres dont le gouvernement est partie au différend ou à titre de tierce partie, à moins que les parties en conflits n'en conviennent autrement, ne siège au Groupe spécial à la connaissance duquel le litige est porté.108 Cependant, si le différend concerne un pays en développement (PED), à sa demande, le Groupe spécial pourra comporter au moins un ressortissant de celui-ci.109 Composés en principe de trois(3) membres, le Groupe spécial peut être augmenté à cinq(5) sur le consentement des parties dans un délai de dix (10) jours à compter de l'établissement du Groupe spécial,110 même si à l'heure actuelle aucun Groupe spécial n'a été composé de cinq(5) membres.111 Toutefois, si un accord sur la composition du Groupe spécial n'intervient pas dans un délai de vingt(20) jours après la date de l'établissement du Groupe spécial, le Directeur Général, à la demande de l'une ou de l'autre partie et en consultation avec le Président de l'ORD ainsi que celui du Conseil ou du comité compétent, détermine la

101 Voir l'affaire Communautés européennes-Régime applicable à la vente et la distribution des bananes, supra, note 61

102 Article 7§1 du Mémorandum d'accord

103 Voir l'affaire Brésil-Mesures visant les noix de coco desséchés (plainte des Philippines) ,1997. OMC. Doc WT/DS22/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Noix de coco]

104 Voir l'affaire Chili-système de fourchette de prix et mesures de sauvegarde appliquées à certains produits agricoles (plainte de l'Argentine), 2002. OMC.Doc.WT/DS207/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Mesures de sauvegarde aux produits agricoles]

105 Voir, l'affaire Etats-Unis-Acier au carbone, 2002.OMC.Doc.WT/DS184/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Acier au carbone]

106 Article 8§1 du Mémorandum d'accord

107 Article 8§2 du Mémorandum d'accord

108 Article 8§3 du Mémorandum d'accord

109 Voir l'article 8§10 du Mémorandum d'accord

110 Article 8§5 du Mémorandum d'accord

111 Cf. El. BEYROUTHY, op.cit. p 19

composition du Groupe spécial conformément aux différentes règles et procédures de l'accord visé ou à d'autres invoqués dans le différend.112

En cas de pluralité des plaignants sur une même question, l'établissement d'un seul Groupe spécial peut être effectué en tenant compte bien sûr des droits de tous les plaignants.113 Cela relève d'un souci de rapidité des procédures devant les groupes spéciaux mais également une efficacité du traitement de l'affaire, car ce Groupe spécial unique examinera l'affaire et présente à l'ORD ses constations dans les conditions du respect des droits des parties.114 Mais, si plusieurs Groupes spéciaux sont établis pour connaitre la même question, les mêmes plaignants « feront parties de chacun de ces Groupes spéciaux et le calendrier des travaux des Groupes spéciaux saisis de ces différends sera harmonisé. »115

Outre les intérêts des parties au différend, l'établissement des Groupes spéciaux tient également compte de ceux des tierces parties comme le prévoit l'article 10 aux paragraphes 1 et 4 du Mémorandum. Ainsi, tout membre qui a manifesté un intérêt substantiel dans une affaire portée devant un Groupe spécial et qui en a informé l'ORD a la possibilité de se faire entendre par le même Groupe spécial par des communications écrites ; ces dernières sont portées à la connaissance des parties au différend et prises en compte dans le rapport du Groupe spécial.116 Inversement, les communications de celles-ci à la première réunion du Groupe spécial lui sont présentées.117

Il est important de souligner que les Groupe spéciaux ont un rôle important à jouer dans le règlement des différends. En effet, les Groupes spéciaux ont une fonction « d'aider l'ORD à s'acquitter de ses responsabilités au titre du présent mémorandum et des accords visés. En conséquence, un Groupe spécial devrait procéder à une évaluation objective de la question dont il est saisi, y compris une évaluation objective des faits de la cause, de l'applicabilité des dispositions des accords visés pertinents et de la conformité des faits avec ces dispositions, et formuler d'autres constations propres à aider l'ORD à faire des recommandations ou à statuer ainsi qu'il est prévu dans les accords visés. Le Groupe spécial devrait avoir régulièrement des consultations avec les parties au différend et leur donner des possibilités adéquates d'élaborer une solution mutuellement satisfaisante. »118 Notons ainsi que les Groupes spéciaux se livrent à deux tâches. D'une part, ils s'attachent à l' « évaluation objective » des faits en établissant les faits et les qualifiant juridiquement en vertu des accords pertinents.119 D'autre part, ils fournissent un règlement positif du litige, c'est-à-dire établir des « justifications fondamentales » sur lesquelles s'appuient leurs constations et leurs recommandations.120 Il convient de remarquer que les Groupes spéciaux disposent une liberté sur l'appréciation du champ de leur propre compétence ; c'est une sorte d' « emprunt » au

112 Article 8§7 du Mémorandum d'accord

113 Article 9§1 du Mémorandum d'accord

114 Article 9§2 du Mémorandum d'accord

115 Article 9§3 du Mémorandum d'accord

116 Article 10§2 du Mémorandum d'accord

117 Article 10§3 du Mémorandum d'accord

118 Article 11 du Mémorandum d'accord.

119 Voir, affaire Communautés européennes-Hormones, supra, note 58

120 Voir, affaire Etats-Unis-Subventions concernant le coton Upland, 2005.OMC.Doc.WT/DS267/AB/R parag 276, Rapport de l'Organe d'appel

fonctionnement des juridictions nationales et arbitrales.121 Egalement, ils disposent une liberté d'appréciation implicite sur les allégations des parties. Cependant, ils ne peuvent traiter « que les allégations qui doivent l'être pour résoudre la question en cause dans un différend»122sus mentionnées dans leur mandat, et aller au-delà les exposerait à la censure de l'Organe d'appel.

Pour mener à bien la tâche qui leur est confiée, les Groupes spéciaux sont invités à suivre une procédure de travail bien établie à l'article 12 du Mémorandum d'accord et celles de l'Appendice 3.123 Ainsi, ils doivent suivre les procédures de travail énoncées dans l'Appendice sus rappelé sauf si les parties au différend n'en conviennent autrement.124 De surcroît, la procédure des Groupes spéciaux doivent offrir une flexibilité suffisante afin que leurs rapports soient de haute qualité conformément aux délais de travail.125 A cet effet, se réunissant en séance privée,126 les Groupes spéciaux sont enclins dans des délais relativement suffisants pour l'examen de l'affaire portée à leur connaissance. Pour un souci d'efficacité de la procédure, les Groupes spéciaux doivent examiner l'affaire dans un délai qui, en général, s'inscrit dans les six(6) mois sauf en qu'en cas d'urgence, et que le différend met en jeu un bien périssable, ils devront présenter leur rapport aux parties dans les trois(3) mois.127 Ces délais de six(6) ou de trois(3) mois devraient normalement suffire aux Groupes spéciaux dans leurs travaux, sanctionnés de rapports limpides et efficaces aussi bien dans la forme que dans le fond. C'est pour cette raison, s'ils estiment que ces délais de six(6) mois ou de trois(3)-selon les cas- leur semblent insuffisants pour établir leurs rapports, ils doivent informer l'ORD, par écrit, les raisons de ce retard en lui indiquant celui au terme duquel ils seraient en mesure de remettre leurs rapports aux parties.128

A toutes fins utiles, il convient de remarquer que les Groupes spéciaux, dans l'exercice de leur mission, sont habilités de jure à recours aux renseignements et avis techniques de toute personne ou tout organisme sur certains aspects de la question qui leur est soumise.129 Ils tiennent ainsi un pouvoir discrétionnaire sur cette prérogative. C'est à dire qu'ils ne sont pas tenus, dans chaque cas, de demander des renseignements ou avis aux experts individuels comme le fait déjà remarquer l'Organe d'appel dans l'affaire Hormones, puis confirmer ultérieurement dans l'affaire Argentine-Chaussures (une plainte des Etats-Unis) dans laquelle il convient qu'« groupe spécial n'est pas tenu de demander des renseignements dans chaque cas ni de consulter les groupes individuels. L'article 13 laisse au groupe spécial la liberté de

121 Cf. D. CARREAU et P.JUILLARD. op.cit. p 99

122 Affaire Etats-Unis-Mesures affectant les importations de chemises et blouses de laine tissés en provenance d'Inde.1997.OMC. Doc, WT/DS33/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Chemises et blouses de laine]

123 Paragraphe1 de l'Appendice 3 du Mémorandum d'accord

124 Article 12§1 du Mémorandum d'accord.

125 Article 12§2 du Mémorandum d'accord

126 Voir, Paragraphe 2 de l'Appendice 3 du Mémorandum d'accord, en conjugaison avec l'article 14 du Mémorandum d'accord sur le caractère confidentiel des délibérations des Groupes spéciaux.

127 Article 12§8 du Mémorandum d'accord

128 Article 12§9 du Mémorandum d'accord. Pour une étude approfondie sur la question des procédures et le calendrier de travail des Groupes spéciaux, voir El. BEYROUTHY. op.cit. p23 et s

129 Voir l'article 13§1 du Mémorandum d'accord mais aussi l'Appendice 4 sur les Groupes consultatifs d'experts

demander si l'établissement d'un groupe consultatif d'experts est nécessaire ou approprié. »130

Avant l'adoption des rapports, les Groupes spéciaux remettent aux parties en conflits les

sections descriptives de leurs projets de rapport, bien sûr après l'examen des
communications et arguments oraux.131 Cela s'inscrit certes dans une dynamique de transparence et de « bon jugement » dans les rapports, parce que permettent à l'une des parties, dans un délai fixé par les Groupes spéciaux, de demander à ceux-ci de réexaminer leurs rapports intérimaires avant de livrer leurs rapports finaux.132

Pour que les membres aient un délai suffisant pour examiner les rapports des Groupes spéciaux, l'ORD n'examinera ces rapports, afin de les adopter, que dans les 20 jours suivant la date de leur distribution aux membres.133 Si un membre a des objections concernant le rapport des panels, il peut exposer les raisons de ses objections par écrit « afin que ces exposés soient distribués au moins 10 jours avant la réunion de l'ORD au cours de laquelle le rapport sera examiné. »134

A moins qu'une partie au différend ne notifie formellement à l'ORD sa décision de faire appel ou que l'ORD décide, par consensus, de ne pas procéder à l'adoption du rapport dans les 60 jours après la date de distribution du rapport des Groupes spéciaux aux membres, celui-ci sera adopté lors d'une réunion de l'ORD.135 Cette étape est cruciale136 car elle donne suite à la destinée du rapport ; si toutefois l'une des parties n'est point satisfaite, elle pourra « interjeter » appel devant l'Organe d'appel permanent.

Il n'est point inopportun de rappeler que la phase de l'examen de l'affaire devant les Groupes spéciaux a quand même eu des résultats encourageants dans l'histoire du mécanisme de résolution des conflits de l'OMC. Effectivement, de janvier 1995 à mars 2005 sur les 329 plaintes adressées à l'ORD 84 ont été résolus à l'examen par un groupe spécial137ou à l'Organe d'appel.

La phase devant l'Organe d'appel permanent est une avancée évidente du nouveau mécanisme de résolution des litiges commerciaux de l'OMC par rapport à son ainé du GATT. D'aucuns diront que c'est un symbole de juridictionnalisation du système de règlement des différends de l'OMC.138 Dans les 60 jours suivant la remise du rapport d'un Groupe spécial aux membres de l'OMC, les parties, de leur bon vouloir, pourront interjeter appel devant

130 Affaire Argentine-Mesures affectant les importations de chaussures, textiles, vêtements et autres articles. 1998. OMC.Doc. WT/DS56/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Argentine-chaussures]

131 Voir, l'article 15§1 du Mémorandum d'accord 132Voir, l'article 15§2 du Mémorandum d'accord

133 Article 16§1 du Mémorandum d'accord

134 Article 16§2 du Mémorandum d'accord

135 Article 16§4 du Mémorandum d'accord

136 Voir, H. Ruiz-FABRI, « Le contentieux de l'exécution dans le règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce », J.D.I, p 605

137 Voir Charles-Emmanuel. COTE, supra note 75

138 Cf. H.GHERARI, « Le recours aux procédures intégrées des organisations internationales économiques : le système de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce », in Droit international de l'économie internationale, Pedone, Paris, 2004, p 949

l'Organe d'appel pour un autre examen du litige. Celui-ci pourra : « confirmer, modifier ou infirmer les constatations et les conclusions juridiques du groupe spécial. »139 Nous voyons bien que l'Organe d'appel se limite à la constatation des questions de droit et non celles de faits. C'est pourquoi, la dénomination peut nous paraitre bizarre. Car judiciairement, le terme appel renvoie à la possibilité pour la juridiction du second degré de réformer ou annuler le jugement rendu par la juridiction du premier degré, en se penchant, bien sûr, aussi bien sur les faits que sur les éléments juridiques. C'est en quelque sorte une remise en cause de la question de la chose jugée de la juridiction du premier degré. Or, selon le Mémorandum d'accord : « l'appel sera limité aux questions de droit couvertes par le rapport du groupe spécial, et aux interprétions de droit données par celui-ci. »140 Il emprunte ainsi les caractéristiques d'une juridiction de cassation dans la mesure où le pourvoi en cassation, comme on le sait, et ce qui est son cas, vise à sanctionner la violation des règles de droit que la juridiction inférieure aurait commise. Même si la qualification juridique des faits relève de son contrôle et de sa compétence,141 l'Organe d'appel refuse toujours de réexaminer les questions factuelles qu'il laisse aux groupes spéciaux d'en connaitre. Cependant, il peut soulever toute question ou tout argument juridique non soulevé par les parties. A contrario, l'Organe d'appel ne peut discuter ou répondre à une question qui est hors de son mandat, comme il eut déjà à le préciser dans l'affaire Produits laitiers : « En l'absence de constatations de faits établies par le Groupe spécial ou de faits non contestés dans le dossier du Groupe spécial[...]nous ne sommes pas en mesure, dans le cadre de notre mandat tel qu'il est énoncé à l'article 17 du Mémorandum d'accord, de mener à bien l'analyse. »142

Etabli par l'ORD, l'Organe d'appel est composé de sept(7) membres dont les trois(3) sont appelés à siéger en « section » pour chaque affaire.143 Ses membres ont un mandat de quatre(4) ans, renouvelable une fois.144 Sa composition sera, dans l'ensemble, représentative de celle de l'OMC et comprendra des personnes ayant une autorité reconnue relativement à leur connaissance du droit, du commerce international et des questions relevant des accords issus de l'acte final de Marrakech. Egalement, ces personnes devront être sans attaches avec leurs administrations nationales, leur qualité d'indépendance et de compétence seront déterminantes.145

L'Organe d'appel fonctionne selon une procédure particulière de travail qu'il fixe lui-même. Aux termes de l'article 17 paragraphe 9 du Mémorandum, l'Organe d'appel « en consultation avec le président de l'ORD et le directeur général, élaborera des procédures de travail qui sont communiquées aux membres pour leur information. » Ces règles de procédure ont été pour la première fois adoptées le 15 février 1996. Elles seront ultérieurement

139 Article 17§13 du Mémorandum d'accord

140 Article 17§6 du Mémorandum d'accord

141 Affaire Chili-Mesures de sauvegarde appliquées à l'agriculture, supra, note 107. Dans cette affaire, il est établi que « l'interprétation de la compatibilité d'un fait ou d'un ensemble de faits donnés avec les prescriptions d'une disposition conventionnelle donnée est une question de qualification juridique » qui ressort de l'Organe d'appel.

142 Voir, affaire Produits laitiers, supra note 39

143 Article 17§1 du Mémorandum d'accord

144 Article 17§2 du Mémorandum d'accord

145 Article 17§3 du Mémorandum d'accord

modifiées et remplacées par celles du 1 mai 2003, par la suite remplacées le 4 janvier 2005.146

Les décisions de l'Organe d'appel sont généralement prises par consensus.147A défaut d'un consensus, celles-ci seront prises à la majorité. Ainsi, les membres peuvent formuler des opinions « séparées » (pour ne pas dire dissidentes), mais dans un anonymat total.148 Une fois rédigées, les conclusions de l'Organe d'appel doivent être adoptées par l'ORD et acceptées sans condition par les parties en conflit. Le rejet de celles-ci n'est possible que lorsque l'ORD décide, par consensus, de ne pas procéder à son adoption dans les trente(30) jours suivant sa distribution aux membres.149 On constate bien la place éminente de l'ORD dans cette phase ; il est non seulement gardien de l'administration du mécanisme de règlement des différends, mais aussi il supervise la légalité et l'opportunité des solutions qu'aurait dégagées l'Organe d'appel à travers ses rapports. Ce qui laisse une marge de doute sur la qualité juridictionnelle de cette dernière instance.150

Au demeurent, il faut dire que la procédure devant l'Organe d'appel ne doit pas, en principe, dépasser soixante(60) jours,151à moins qu'il y'ait des circonstances exceptionnelles, lesquelles permettront de prolonger la procédure de trente(30) jours.152 En aucun cas, elle ne peut dépasser 90 jours.

Comme dit C. Mocquart : « les rapports adoptés par l'Organe d'appel ne constituent que la manifestation des droits et obligations que le membre s'est engagé à respecter. »153 C'est dire simplement que l'Organe d'appel ne prononce pas un arrêt ; il se borne modestement à présenter un rapport, lequel contient ses constatations et recommandations ou encore ses suggestions prévues à l'article 19 du Mémorandum d'accord, qui par ailleurs doit être mis en oeuvre.

Lorsque le rapport fait état d'une violation des accords de l'OMC, la partie incriminée doit mettre en exécution les décisions issues du rapport dont l'esprit renvoie à la levée des mesures illicites. Néanmoins, si elle estime que la mise en oeuvre de ce rapport ne peut se réalisée dans l'immédiat, un délai raisonnable-qui, en principe, ne dépasse pas quinze(15) jours- peut être trouvé.154 C'est souvent par le biais de l'arbitrage que les parties arrivent à la détermination de ce délai raisonnable.155

146 OMC.Doc WT/AB/WP/5(2005) sur Les Procédures de travail de l'examen en appel

147 Article 3§2 ibid.

148Voir à ce titre, l'article 17§11 du Mémorandum d'accord

149 Article 17§14 du Mémorandum d'accord

150 Cf. D. CARREAU et P. JUILLARD, op.cit. p 101

151 Voir l'article 20 du Mémorandum d'accord

152 Cf. J.BURDA, op.cit. p 25

153 Cf. Carine. MOCQUART, « Efficacité des sanctions et retraits des concessions dans le système de règlement des différends de l'OMC », R.C.A.D.I, 2003, p 39

154 Affaire Australie-Mesures visant les importations de Samous, 1999.OMC.Doc.WT/DS18/9 (Plainte du Canada). L'arbitre Said El-NAGGAR a établi qu' « en l'absence d'une solution mutuellement convenue, l'objectif premier [du mécanisme de règlement des différends] est habituellement le retrait immédiat de la mesure jugée incompatible avec l'un des accords visés. Ce n'est que s'il est irréalisable pour lui de le faire que le membre concerné a droit à un délai raisonnable pour la mise en oeuvre. »

155 Voir, article 21 du Mémorandum d'accord

Sous le bénéfice de ces précisions, nous pouvons, sans risque de nous tromper, dire que la procédure de l'organe de règlement des différends de l'OMC(ORD) est une procédure efficace car elle allie la diplomatie et le juridique ; la souplesse et la rigidité. Ceci évidemment se reflète dans ses décisions et recommandations.

B) Une efficacité par rapport aux décisions et recommandations

L'efficacité des décisions et des recommandations est appréciables à deux niveaux. Elle se manifeste, d'une part, au niveau des mesures de compensation(1) et au niveau des mesures de rétorsions ou suspension de concessions(2), d'autre part.

1- Les mesures de compensation

Afin que le conflit soit résolu efficacement dans l'intérêt de tous les membres de l'OMC, il demeure nécessaire, voire indispensable, d'appliquer dans les brefs délais les recommandations et décisions de l'ORD.156C'est-à-dire, le retrait définitif des mesures incriminées.

Toutefois, si le membre à qui il a été condamné à retirer ses mesures compromettantes ne se conforme pas aux recommandations et décisions de l'ORD dans un délai raisonnable, il devra procéder, après qu'une demande lui soit faite, à des négociations avec le membre « victime » dans le but de trouver une compensation mutuellement acceptable157en compatibilité avec les accords visés.158 La compensation est donc volontaire ; ce qui implique une dimension quasi politique, sinon diplomatique des compensations car, il faut le rappeler, c'est sous la base d'une négociation avec le membre « incriminé » qu'elles aboutissent.159

Encore, faudrait-il retenir que la compensation ne saurait remplacer l'obligation de mettre en oeuvre les recommandations de l'ORD. C'est la raison pour laquelle elle doit être temporaire dans l'attente du retrait définitif de la mesure incompatible. Cependant, il importe de noter que des difficultés peuvent être relevées à ce niveau, étant entendu que le Mémorandum d'accord n'apporte aucune précision, ni sur les règles concernant la valeur, ni sur la nature, encore moins sur l'objet de la compensation, même s'il retient que celle-ci reste volontaire et doit être compatible avec le droit de l'OMC.

A défaut de parvenir à une compensation satisfaisante dans les vingt(20) jours suivant la date au terme de laquelle le délai raisonnable arrive à l'expiration, la partie ayant subi les effets négatifs des mesures incompatibles avec les accords de l'OMC pourra solliciter de l'ORD pour l'autorisation en vertu de laquelle elle prendra des contre-mesures en forme de mesure de rétorsion ou de suspension des concessions.

156 Ibid.

157 Article 22§2 du Mémorandum d'accord

158 Article 22§1 du Mémorandum d'accord

159Faut-il noter que les parties ont donc vingt(20) jours pour achever leur négociation. Ce délai parait largement court pour permettre aux parties de procéder à des négociations sincères, d'ailleurs c'est pour cette raison que les recours à la compensation volontaire restent rares.

2- Les mesures de rétorsion ou suspension des concessions

Les mesures de rétorsion sont effectivement des prérogatives par le moyen desquelles un membre de l'OMC, victime des mesures illicites d'un autre membre dans le cadre de sa politique commerciale, et dans le cas où les négociations pour parvenir à une compensation mutuellement acceptable seraient soldées par un échec, est autorisé par l'ORD à suspendre ses concessions ou d'autres obligations à l'encontre du membre fautif.160 Notons-nous que le souci du mécanisme de règlement des différends de l'OMC est d'éviter une « justice privée » entre les membres dans la mesure où les règles régissant les relations internationales s'inscrivent dans le sillage de l'adage latin : Memo judex in re sua (nul n'est juge en sa propre cause). Le recours à ces contre-mesures, considérées de « mesures de légitime défense commerciale »161 doit respecter les conditions posées par le Mémorandum d'accord.

Selon G. Cohn, une mesure de rétorsion est celle qui, « tout en se tenant dans la limite de la loi, a pourtant pour fin un traitement particulièrement défavorable pour l'Etat contre lequel elle est dirigée162 Pour Ch.Leben, elle est juridiquement une action à laquelle un Etat fait recours à des représailles.163

La demande de recourir à des contre-mesures (la suspension des concessions) dans le cadre de l'OMC doit être motivée et doit déterminer les concessions et obligations qui seront suspendues.164Ainsi, le niveau de la suspension de concession ou d'autres obligations autorisées par l'ORD doit être en proportionnalité avec celui de l'annulation ou de la réduction des avantages.165 L'ORD dispose donc un pouvoir d'appréciation de ce niveau. C'est pourquoi, il n'accorde pas de suspension de concessions ou d'autres obligations qu'un accord visé a interdites.166 Dans le cas où le membre concerné contesterait le niveau de suspension de concession proposé en invoquant le non-respect des principes et procédures d'autorisation, il aura recouru à l'arbitrage.167 Et les concessions ainsi que les autres obligations ne seront pas suspendues à ce niveau.168 L'arbitrage examinera et déterminera si la suspension concessions et autres obligations proposée est autorisée au regard de l'accord visé.169

Le recours à des contre-mesures, dans le droit de L'OMC, est donc licite. Elles consistent en la suspension des concessions tarifaires pour le commerce des marchandises, la suspension

160 Voir l'article 22§2 du Mémorandum d'accord

161 Cf. Julien. BURDA, op.cit. p 27

162 Gérard. COHN, « La théorie de la responsabilité internationale », R.C.A.D.I, 1939, II. Vol 68, p 318

163 Cf. Charles. LEBEN, « Les contre-mesures inter-etatiques et les réactions à l'illicite dans la société internationale » in A.F.D.I, 1982, p 14

164 Voir, l'article 22§3 du Mémorandum d'accord

165 Voir, l'article 22§4 du Mémorandum d'accord

166 Article 22 §5 du Mémorandum d'accord

167 Article 22 §6 du Mémorandum d'accord

168 Ibid.

169 Article 22§7 du Mémorandum d'accord

des engagements prévus sur la liste annexée à l'AGCS pour le commerce des services, ou la suspension de l'exécution d'autres obligations ou découlant des accords visés de l'OMC.170

Il est clair ainsi que les mesures de rétorsions ou suspensions de concession sont moins diplomatiques que celles relatives à la compensation. Elles peuvent être qualifiées de juridictionnelle car sont-elles autorisées par l'ORD, conformément aux dispositions du Mémorandum d'accord, en réaction d'une violation des Accords de Marrakech commise par un membre. Ce qui permet de prétendre l'efficacité du système de règlement des différends de l'OMC. On pourrait en faire autant également si l'on prend en compte le traitement différencié accordé aux pays en développement(PED).

SECTION 2 : L'ORD, un mécanisme de règlement des différends incluant un traitement spécial et différencié au profit des PED

Les relations commerciales multilatérales animées par l'OMC s'inscrivent dans une perspective de développement économique de tous les membres de l'institution. Cela doit prendre en compte le caractère disparate du poids de développement de ceux-ci qui, dans un tel système, peuvent arriver à soulever des positions de « dominants » et de « dominés ». Or, le système se veut être un « cadre institutionnel commun » pour la conduite des relations commerciales entre ses membres. D'où la nécessaire prise en considération de la situation de faiblesse économique de certains membres communément appelés pays en développement (PED).171 Le mécanisme de règlement des différends de l'OMC tente, tant bien que mal, de tenir compte de la situation économique de ces pays en leur accordant un traitement spécial et différencié même si celui-ci laisse planer quelques manquements.

Il s'agira de s'attarder sur l'affirmation de ce traitement spécial (Paragraphe 1) avant de relever ses différents manquements (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : L'affirmation du traitement spécial et différencié

Il importe de rappeler que ce traitement spécial est le fruit d'un long processus de négociation, surtout dans le cadre du GATT de 1947.172 Ces acquis ont été quand même retenus sous l'évènement de l'OMC et insérés dans son mécanisme de résolution des conflits. En effet, le Mémorandum d'accord consacre un certain nombre de dispositions tendant à octroyer aux pays en développement un traitement particulier en considération de leur faible

170 Cf. Alice. Rocha. Da SILVA, L'articulation entre l'OMC et les accords commerciaux régionaux, Editions universitaires Européennes, 2012, p 269

171 Pour une étude approfondie sur l'apport des Accords de Marrakech dans la prise en compte de la situation des pays en développement, voir Ph. VINCENT, « L'impact des négociations d'Uruguay round sur les pays en voie de développement », R.B.D.I. 1995/2, pp 486-513. A compléter également, G. FEUER, « L'Uruguay round, les pays en développement et le droit international de développement » AFDI. pp 458-775 ; Aliou. NIANG, Le régime juridique des Membres peu développés post-Gatt : l'influence de l'inégalité économique sur les règles commerciales multilatérales de l'OMC, thèse de doctorat en droit, E.D/.J.P.E.G de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar, 9 mai 2014

172 Le point de départ résulte d'une proposition d'amendement de l'article XXIII du GATT faite par le Brésil et l'Uruguay en 1965. Cependant, même si tous les éléments de cette proposition n'ont pas été pris en compte, il n'en reste pas moins que l'initiative avait tout de même abouti à l'adoption de la Décision du 5 avril 1966 sur la procédure d'application de l'article XXIII. Pour plus de détail, voir, Amélie. FONDIMARE, op.cit. p 8 et s

niveau de développement économique.173 Ce traitement se manifeste tant au niveau des procédures(A) qu'au niveau de la mise en application des recommandations(B).

A) Au niveau des procédures

Un certain nombre de dispositions du Mémorandum d'accord sont consacrées au principe du traitement spécial et différencié favorable aux pays en développement. L'article 24 dans son paragraphe 1 estime qu'une attention particulière doit être accordée à un pays moins avancé (PMA) lorsqu'il est concerné dans une procédure de règlement de des différends, et à cet effet les « membres feront preuve de modération lorsqu'ils soulèvent des questions au titre des présentes procédures concernant un pays moins avancé Membre. » Ce traitement spécial découle des exceptions aux règles générales et communes du Mémorandum d'accord. Il en est ainsi notamment:

Au stade des consultations, les pays membres « devraient accorder une attention spéciale aux problèmes et intérêts particuliers des pays en développement Membres. »174 Cela devrait permettre aux pays en développement de mieux s'imprégner de la procédure de règlement des différends, étant donné qu'à ce niveau de procédure les négociations prévaudront sur le « contentieux proprement dit ». Dépourvus de moyens techniques et financiers pouvant leur permettre de solidifier leurs arguments devant ceux des « princes de l'économie mondiale », les pays moins avancés gagneraient mieux à régler le différend à ce niveau qu'au niveau de la phase contentieuse.

En outre, dans le cas où les consultations n'ont pas abouti à une solution satisfaisante, les pays en développement bénéficient d'un allégement de la procédure qui pourrait leur être favorable. En effet, le Directeur général ou le président de l'ORD, « à la demande d'un pays moins avancé Membre, offrira ses bons offices, sa conciliation et sa médiation en vue d'aider les parties à régler le différend avant qu'une demande d'établissement d'un groupe spécial ne soit faite. Pour apporter son concours, le Directeur général ou le président de l'ORD pourra consulter toutes sources qu'il jugera appropriée. »175 Il s'agit d'une latitude pour le pays moins avancé de demander les bons office, la conciliation ou la médiation du Directeur général aux fins d'une part de résoudre le conflit amiablement et d'éviter tant bien que mal la phase contentieuse de la procédure, d'autre part.

Par ailleurs, en raison de la situation d'extrême fragilité dans laquelle se trouve un pays en voie de développement lorsqu'il est en conflit avec un pays développé, le Mémorandum d'accord prévoit des aménagements de la procédure à son avantage au sujet de la composition des groupes spéciaux. En effet, aux termes de l'article 8 paragraphe 10 lorsqu'un différend oppose un pays en développement membre et un pays développé membre, le groupe spécial « comprendra, si le pays en développement le demande, au moins un ressortissant d'un pays

173 L'article 3§12 retient que lorsque une plainte est déposée par un pays en développement membre contre un pays développé sur la base de l'un des accords de Marrakech, le premier « aura le droit d'invoquer, au lieu des dispositions contenu dans les articles 4,5,6 et 12 du présent mémorandum d'accord, les dispositions correspondantes de la Décision du 5 avril 1966(IBDD, S14/19). »

174 Voir l'article 4§10 du Mémorandum d'accord, supra.

175 Voir article 24§2 du Mémorandum d'accord

en développement membre » alors qu'en règle général aucun ressortissant des membres, parties au différend, ne doive siéger au groupe spécial. Cette exception est aisément compréhensible puisque les PED sont extrêmement méfiants à l'égard des groupes d'experts étrangers, mais la participation d'un des leurs aux groupes spéciaux pourrait leur réconforter davantage sur l'impartialité et la neutralité des rapports de ces derniers.

En fin, pour leur faciliter l'accès à l'ORD, le Mémorandum d'accord précise que le Secrétariat pourra mettre à la disposition de tout pays en développement membre qui le demandera un expert juridique qualifié des services de coopération technique de l'OMC. Celui-ci aidera le PED membre de manière à maintenir l'impartialité du Secrétariat.176

Les pays en développement ayant bénéficié d'un traitement spécial et différencié dans les phases procédurales du règlement des différends de l'OMC sont aussi « favorisés » dans le cadre de la mise en oeuvre des recommandations de l'ORD.

B) Au niveau de la mise en application des recommandations

Nonobstant leur faible niveau de développement économique, les PED ne sont pour autant dispensés de l'obligation de mettre en application les recommandations. Cependant, ils peuvent bénéficier d'un traitement spécial relativement à un délai supplémentaire qui ne peut d'ailleurs excéder le « délai raisonnable ». Egalement, la mise en oeuvre des recommandations du Groupe spécial, se déroulant en principe sous la surveillance de l'ORD, tient aussi compte de la situation des pays en développement. Aux termes des dispositions du Mémorandum d'accord, il est précisé que lorsqu'une affaire est soulevée par un des leurs, l'ORD va étudier quelle suite il pourra y donner, qui soit appropriée aux circonstances.177 Dans la même optique, lorsqu'il s'agit d'un « recours déposé par un pays en développement Membre, en examinant quelle mesure il pourrait être approprié de prendre, l'ORD tiendra compte non seulement des échanges visés par les mesures en cause mais aussi de leur incidence sur l'économie des pays en développement Membres concernés. »178

Ces différents allégements en faveur des pays de faible développement économique montre le degré de souci du mécanisme de règlement des différends de l'OMC à vouloir préserver l'équilibre des chances dans les échanges commerciaux multilatéraux où consciemment ou non les « puissants » serraient tenter d'écraser les plus « faibles ». Toutefois, en s'attachant à la version pratique du traitement spécial que ledit mécanisme accorderait aux PED, nous arriverions à dénicher quelques problèmes qui ne manqueraient pas de trahir cette volonté affichée du mécanisme en leur faveur.

PARAGRAPHE 2 : Les manquements au traitement spécial et différencié

Le principe du traitement spécial et différencié accordé aux PED se heurte essentiellement à deux difficultés. Celles-ci renvoient, d'abord à son caractère facultatif ou tout au moins non

176 Voir, l'article 27§2 du Mémorandum d'accord

177 Article 21§7 du Mémorandum d'accord

178 Article 21§ 8 du Mémorandum d'accord

contraignant (A), ensuite au risque de prééminence des rapports de force dans la mise en oeuvre de décisions et les recommandations de l'ORD(B).

A) Le caractère non contraignant du principe de traitement spécial et différencié

Si nous regardons de près, à travers les dispositions du MARD visant le traitement spécial et différencié accordé au pays en développement, serons-nous en droit de penser que ce principe ne relève que de la recommandation faite par les membres de l'OMC. En effet, le MARD a utilisé le mode conditionnel pour préciser ce principe qui doit être pris en compte dans le règlement des litiges. Il convient de remarquer que l'utilisation du mode conditionnel en droit international public s'identifie textuellement à ce que l'on pourrait appeler une « invitation » ou tout au plus une « recommandation ». Or, la recommandation, selon une opinion répandue et acceptée au sein même des Nation Unies, s'appréhende négativement. C'est-à-dire qu'elle souffre de force obligatoire. Généralement, la recommandation est perçue au sein de la Société internationale comme un principe à valeur politique ou simplement morale.179 Par ailleurs, il faut dire que le mécanisme de règlement des différends de l'OMC ne précise aucune sanction efficace si toutefois il y'aurai violation de ce principe. Effectivement, au cours des consultations, le MARD se limite simplement à inviter, comme le prévoit l'article 4 paragraphe 10, les Etats membres à « accorder une attention spécial aux problèmes et intérêts particuliers des pays en développement.» Plus loin encore, relativement aux rapports du groupe spécial, il précise en son article 12 paragraphe 11 que lorsque l'une des parties est un « pays du Sud », le rapport du groupe spécial « indiquera » expressément « la façon dont il aura été tenu compte des dispositions pertinentes sur le traitement différencié et plus favorable pour les pays en développement Membres, qui font partie des accords visés et qui auront été invoquées par le pays en développement Membre au cours de la procédure de règlement des différends. » En fin, dans le cadre de la surveillance et de la mise en application des recommandations et décisions tel qu'il est précisé à l'article 21 paragraphe 8, au cas où un recours est déposé par un PED membre, l'ORD, en examinant quelles mesures « il pourrait être approprié de prendre », tiendra compte non seulement des échanges visés par les mesures en cause mais aussi de leur incidence sur l'économie des pays en développement, membres concernés. Disons qu'il n'est prévu aucune disposition qui contraint les Etats membres, lorsqu'un pays en développement est plaignant, à changer leur comportement dans les échanges multilatéraux.

Il serait donc utopique de croire que, sur la base du principe du traitement spécial et différencié que d'aucuns considèrent de « soft law »180 et avec les bons offices du Directeur général ou du Président de l'ORD, il aura une quelconque amélioration de la pratique des Etats développés devant l'ORD. Ce qui risque d'arriver dans la mise en application des décisions et des recommandations de l'ORD.

179 Voir, M. VIRRALY, « La valeur juridique des recommandations dans les organisations internationales », AFDI, 1956, Vol 2, n° 1, p 66

180 A. FONDIMARE, op.cit. p 69

181 Ph. VINCENT, « L'impact des négociations d'Uruguay round sur les pays en voie de développement », RBDI. 1995. Vol 2, p 511

B) Le risque de prééminence des rapports de force dans la mise en oeuvre des décisions et recommandations

Dans un système juridictionnel largement « inter-étatique » comme celui de l'ORD, la mise en application des décisions peut être sanctionnée par une certaine réticence de la part des parties en conflits, surtout si lorsque le condamné occupe une place très importante dans un tel système. Nonobstant son intention de trancher les différends conformément aux règles et principes de l'OMC, c'est-à-dire une solution mutuellement acceptable, l'ORD est confronté à cette triste réalité irréfutable dans les relations internationales : les rapports de force.

Il ne faut toutefois pas perde de vue que le système de règlement des différends de l'OMC n'ignore aucunement cette réalité. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle la mise en oeuvre des décisions et recommandations se fait dans une timidité avérée à tel point que l'on se doute même de l'efficience de celles-ci. En effet, dans un système aussi déséquilibré les plus faibles vont forcément subir les astuces des puissants ; ce qui fait que le MARD, en tenant compte de cette réalité, s'efforce de prévoir des décisions et recommandations qui vont de la compensation aux mesures de rétorsion. Or, ce qui devrait être le cas, c'était d'obliger le membre incriminé à retirer immédiatement sa mesure préjudicielle. En analysant le fonctionnement de l'ORD, l'on se rend compte qu'aucune procédure visant à obliger un Etat à enlever sa mesure compromettante n'est prévue. Dès lors, dans la mesure où un pays économiquement faible est victime des comportements illicites d'un pays développé, il serait moins convainquant d'espérer que l'autorisation donnée au premier de retirer des concessions offertes au second puisse, de quelconque manière que ce soit, modifier la politique commerciale de ce dernier. Ainsi, la seule solution favorable aux pays en développement aurait été la possibilité d'ordonner des mesures collectives de rétorsion contre l'Etat développé reconnu coupable. Cependant, force est de croire qu'il n'est bien entendu guère question pour les Etats développés d'accepter la possibilité de telles mesures.181

Nous venons de voir le fonctionnement du mécanisme de règlement des différends nés des relations commerciales entre Etats, membres de l'OMC en montrant qu'il y'a eu des avancées remarquables dans le système de résolution des conflits au sein de l'OMC à la grande différence de celui du GATT. Ce qui nous a permis de le considérer comme original dans la mesure où il est, non seulement interétatique mais également global et intégré. En outre, nous l'avons perçu comme efficace dans le sens où il adjoint la diplomatie à la procédure judiciaire dans le règlement des différends. De surcroît, il tente d'accorder, un traitement spécial et différencié aux PED membres, même si celui-ci s'est révélé dans la pratique entaché de quelques limites.

Retenons toutefois que si les conflits opposant les Etats membres de l'OMC sont tranchés par l'ORD, il ne faut point oublier que ceux qui les opposent aux opérateurs économiques étrangers, par leur complexité et l'enjeu des intérêts en cause, sont souvent portés à la connaissance de l'arbitre.

CHAPITRE II : LES DIFFERENDS COMMERCIAUX OPPOSANT LES ETATS ET LES OPERATEURS ECONONMIQUES ETRANGERS

La mondialisation de l'économie, due à la fois à l'augmentation du volume du commerce, au développement et l'action des groupe de sociétés et à la globalisation des marchés, fait étendre le champ des problèmes juridiques liés au commerce internationale. Avec la part considérable des opérateurs privés dans le commerce international, on ne se doute point sur les velléités éventuelles qui peuvent surgir à l'occasion de l'exécution de leur opération dans les territoires des Etats. En effet, ces opérateurs concluent des contrats, souvent dans le cadre de l'investissement lié au commerce, avec les Etats (sous l'appellation de contrats d'Etat ou convention d'établissement182) qu'ils s'engagent à exécuter de bonne foi. Cependant, quelles que soient les prévisions des parties, des litiges peuvent survenir à tout moment, ne serait-ce que sur l'interprétation des termes de leur engagement contractuel.183

Pour résoudre ces litiges, les parties font souvent intervenir un tiers, sous la base d'une convention, connu généralement sous le nom d'arbitre.184 L'arbitrage s'est donc révélé être le recours de prédilection en matière de règlement des conflits relatives aux transactions internationaux.185

L'arbitrage commercial international offre aux opérateurs économiques privés une garantie d'efficacité (Section 2) dans la solution du litige par rapport à la juridiction nationale de l'Etat contractant. C'est pourquoi, il demeure le mécanisme privilégié de règlement de règlement des conflits ayant opposé un Etat et un opérateur privé dans le cadre de l'exécution d'un contrat commercial international (Section 1).

SECTION 1 : L'arbitrage, mécanisme privilégié de règlement des différends commerciaux entre un Etat et un opérateur économique étranger

En commerce international, on a noté que l'arbitrage a connu une croissance phénoménale au cours des dernières décennies. Cela est peut-être dû au fait qu'il accorde aux parties de nombreux avantages, tant sur les procédures que sur les sentences.

Quand les parties à une opération du commerce international décident, par une convention arbitrale (Paragraphe 2), de porter leur divergence devant un arbitre, elles devront choisir les deux types d'arbitrage (Paragraphe 1) qui s'offrent à elles et qui, de surcroît, leur conviennent comme mode de règlement de leur litige.

PARAGRAPHE 1 : Les différents types d'arbitrage

Il s'agit généralement de : l'arbitrage ad hoc (A) et l'arbitrage institutionnel (B).

182 Voir, Moustapha. SOURANG, La technique contractuelle dans les rapports Etats-entreprises étrangères : Contribution à l'étude des conventions d'établissement conclues par les Etats africains, thèse de doctorat d'Etat en droit, Bordeaux, 1980. p 43

183 Voir, H. KENFACK. op.cit. p 26

184 Cf. J.M.JACQUET et Ph. DELEBECQUE. op.cit. p 257

185 Voir Ph. FOUCHARD, L'arbitrage commercial international, Dalloz, Paris, 1985, p 18

A) L'arbitrage ad hoc

L'arbitrage ad hoc est le type d'arbitrage qui « n'est pas confié à une institution particulière et ne met donc en présence que les parties et les arbitres en dehors de toutes structures préexistantes186 Il est donc organisé par les parties sans l'aide d'une structure externe, par conséquent les parties disposent une plus grande liberté. Ce type d'arbitrage donne également une tâche importante aux arbitres qui doivent définir au moins les grandes lignes pour leur propre règlement d'arbitrage si les parties n'y on pourvu elles-mêmes.187 L'arbitrage ad hoc se révèle moins onéreux que l'arbitrage institutionnel.188 Il demeure plus difficile à organiser et la clause compromissoire doit être plus précise que possible. Toutefois, il est possible que les parties adoptent un règlement d'arbitrage sans que l'arbitrage ad hoc ne soit institutionnel conformément aux règles élaborées par la CNUDCI (Commission des Nations Unies sur le Droit et le Commerce International) en 1976.189

B) L'arbitrage institutionnel

Contrairement à l'arbitrage ad hoc, l'arbitrage institutionnel fait intervenir une institution d'arbitrage.190 L'institution, il faut le préciser, n'est pas une juridiction ; elle se limite simplement à administrer et à fournir un minimum d'infrastructure aux arbitrages qui se déroulent sous son égide.191 Par ailleurs, il convient de souligner que l'institution arbitrale peut être nationale, régionale ou internationale, spécialisée ou générale, privée ou para publique.

Dans le commerce international, nous pouvons, sans en avoir une liste exhaustive, retenir : l'Association américaine d'arbitrage(AAA), la Commission interaméricaine d'arbitrage commercial(CIAAC), la Cour arbitral de la Chambre de commerce internationale(CCI), le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements(CIRDI), la Cour d'arbitrage international de Londres(CAIL), la Chambre de commerce de Stockholm(CCS), la Cour commune de justice et d'arbitrage(CCJA).192

Pour un bon fonctionnement de l'institution arbitrale, un règlement d'arbitrage doit être élaboré, qui va déterminer les règles d'arbitrage et les pouvoirs ainsi que les obligations des arbitres ; également doit-être instituée une autorité chargée d'assurer l'administration de l'arbitrage ; en fin il sera mis en place un secrétariat chargé de coordonner les relations entre les parties, les arbitres, les experts tout en assurant les diverses tâches d'ordre matériel. En

186 Cf. J.M.JACQUET et Ph. DELEBECQUE, op.cit. p 320

187 Ibib

188 Voir, LATHAM & WATKINS, Guide de l'arbitrage international, p 17 publié sur le site : www.lw.com, vu le 14 juillet 2014 à 11h 20mn

189Voir, le Règlement d'arbitrage de la CNUDCI (Résolution n° 31-98 de l'Assemblée Générale des Nations Unies du 15 décembre 1976), Loi-type de la CNUDCI sur l'arbitrage commercial international, adopté 21 juin 1985(modifiée en 2006 avec la Résolution n°61-33 de l'Assemblée Générale des Nations-Unies, 4 décembre 2006)

190 Cf. René. DAVID, L'arbitrage dans le commerce international, Economica, 1982, p 49

191Voir, l'article 1-2 du nouveau Règlement de la C.C.I en vigueur à partir du 1er janvier 2012

192 Instituée par le Traité sur l'Organisation pour l'harmonisation du droit des affaires en Afrique(OHADA) du 17 octobre 1993 dont le siège se trouve à Abidjan, Côte d'Ivoire. Voir également, l'Acte Uniforme de l'OHADA du 11 mars 1999 relatif au droit de l'arbitrage

plus, l'institution d'arbitrage peut mettre à la disposition des parties des listes d'arbitres et clauses-types d'arbitrage.193

L'arbitrage institutionnel a l'avantage d'assurer une plus grande sécurité aux parties et leurs prétentions car l'arbitre est encadré et guidé par le règlement de l'institution d'arbitrage. En outre, il est bien organisé à telle enseigne que certaines difficultés peuvent être surmontées ou évitées. Cependant, il demeure très couteux.

Il est important, en cas de recours à l'arbitrage, d'avoir une idée sur la base juridique de celui-ci ; autrement dit, le support juridique avec lequel les parties se sont entendues lorsqu'elles ont senti le besoin de confier la solution de leur éventuel conflit à un tiers, qui n'est pas un juge étatique : l'arbitre.

PARAGRAPHE 2 : la convention arbitrale : la clause compromissoire

La convention d'arbitrage permet aux parties de surmonter la compétence de la juridiction nationale en portant leur différend à la connaissance de l'arbitre, soit, le plus fréquent, avant que ledit différend ne naisse (par une clause compromissoire), soit après sa naissance (par un compromis).

En matière d'arbitrage interne, le compromis et la clause compromissoire se distinguent, à bien des égards, par leur régime juridique. Mais dans le cadre de l'arbitrage international cette distinction est peu importante, sinon inexistante.194 Et, le constat indique qu'en matière de commerce international c'est la clause compromissoire qui est utilisée le plus. A ce propos,

M. de Boisséson confie que « Lorsqu'on veut atteindre l'arbitrage, c'est à la clause (compromissoire) que l'on s'attaque et non au compromis ; lorsqu'on entend favoriser le développement de l'arbitrage, c'est la clause que l'on valide et dont on s'efforce d'assurer l'efficacité. »195 C'est pourquoi, l'attention sera portée sur elle dans cette étude.

La clause compromissoire est définie comme « la convention par laquelle les parties à un contrat s'engagent à soumettre à l'arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à ce contrat. »196 Elle doit se présenter sous forme écrite197si elle est consignée dans un document signé par les parties ou dans tout autre moyen de communication qui en atteste l'existence. Il faut toutefois retenir que la clause compromissoire peut être insérée, soit dans un document unique, soit dans document connexe198 (la clause compromissoire par référence).199 En fin,

193Cf. J.M.JACQUET et Ph. DELEBECQUE, op.cit. p 319

194 Cf. H. KENFACK, op.cit. p 45

195 Cf. Mathieu. de BOISSESON, Le droit français de l'arbitrage interne et international, G.L.N. Joly, 1990. p 19

196 L'article 1442 du Nouveau code de procédure civile français(NCPC)

197 Voir, l'article 7.2 de la Loi-type de la CNUDCI, article 2 de la Loi ivoirienne n° 93-671 du 9 août 1993 sur l'arbitrage. La forme écrite de la clause compromissoire permet de mieux clarifier la dynamique d'arbitrage, ce qui, à coup sûr, rend le système plus perfectible. Le professeur F. EISEMANN retient : « Tout comme le système d'éclairage le plus perfectionné s'avère inutile en cas de défaillance de l'interrupteur qui le commande, le système juridique le plus favorable à l'arbitrage ne pourra porter ses fruits à défaut de clause d'arbitrage correctement rédigée », voir, F. EISEMANN, « La clause d'arbitrage pathologique », Mélange Minoli, p 129

198 Voir, article 3 de l'Acte uniforme de l'OHADA

199 Cette dernière a pendant très longtemps fait, en France, l'objet de contraste jurisprudentielle jusqu'à ce que la Cour de cassation en donne une position claire. Ainsi, dans l'affaire Bomar Oil II, le juge affirme qu' « en

elle doit désigner le ou les arbitres et éventuellement prévoir les modalités de leur désignation.200

Parallèlement, on a constaté que son autonomie(A) et sa validité(B) ont souvent soulevé des difficultés d'approches auxquelles il fallait apporter quelques éclaircissements.

A) L'autonomie de la clause compromissoire

La question du principe de l'autonomie de la clause compromissoire n'a pas manqué de soulever une opposition non moins sévère dans la doctrine française relativement au terme « autonomie ».201 Quoiqu'il en soit, l'autonomie de la clause compromissoire tend à assurer une indépendance fonctionnelle à la clause d'arbitrage pour que son efficacité ne soit pas altérée par les vicissitudes du contrat principal. La question était de savoir si la nullité du contrat principal entrainait celle de la clause d'arbitrage incluse dans ce contrat. La jurisprudence française répondait négativement puisqu'elle avait considéré, à travers la célèbre affaire Gosset rendue par la Cour de cassation relativement à une demande d'annulation d'une sentence arbitrale formulée sur la base d'une clause compromissoire concernant un contrat entaché de nullité en raison de sa contrariété à une interdiction d'importation, qu'en matière d'arbitrage international, « l'accord compromissoire, qu'il soit conclu séparément ou inclus dans l'acte juridique auquel il a trait, présente toujours, sauf circonstance exceptionnelle qui ne sont pas alléguées en la cause, une complète autonomie juridique, excluant qu'il puisse être affecté par une éventuelle invalidité de cet acte. »202 Cette position a été confirmée par la Chambre de Commerce Internationale(CCI) dans sa sentence de 1968. Elle précisait que « c'est aussi une règle maintenant admise en matière d'arbitrage international, ou en voie de l'être généralement », que selon la formule de la Cour de cassation française, l'accord compromissoire bénéfice une autonomie juridique par rapport au contrat dans lequel il est inséré.203 Toujours dans le courant jurisprudentiel français, l'autonomie de la clause compromissoire a été poussée à son extrême entendement, c'est-à-dire à son indépendance, non pas par rapport au contrat principal mais par rapport à une loi étatique. En effet, cette conception est détectable lorsque nous lisons l'arrêt Dalico où la Cour de cassation considère qu' « en vertu d'une règle matérielle du droit international de

matière d'arbitrage international, la clause compromissoire par réfernce écrite à un document qui la contient, par exemple des conditions générales ou un contrat-type, est valable, à défaut de mention dans la convention principale, lorsque la partie à qui la clause est opposée, a eu connaissance de la teneur de ce document au moment de la conclusion du contrat, et qu'elle a, fut-ce par son silence, accepté l'incorporation du document au contrat. » Cass. 1ère civ, 9 nov 1993, JDI 1994, note E. LOQUIN, Rev. Arb. 1990.555 et s. Voir également, Civ. 1ère 3 juin 1997, Prodexport, R.C.D.I.P 1999, note P. MEYER. Pour une étude approfondie de la question, consulter, BOUCOBZA, « La clause d'arbitrage par référence en matière d'arbitrage international », Rev.arb.1998.495

200 Article 2 alinéa 2 de La loi ivoirienne sur l'arbitrage, supra

201 Voir, Fatou. CAMARA, L'autonomie de la clause compromissoire en matière d'arbitrage international, thèse de doctorat d'Etat en Droit, 28 février 1998, Faculté des Sciences Juridiques et Politiques, Université Cheikh Anta Diop de Dakar, p 8. Elle fait en effet remarquer que certains auteurs estiment qu'il faut plutôt parler d'indépendance et non d'autonomie puisqu'il s'agit d'indépendance ou de séparabilité de la clause compromissoire avec le contrat principal. Voir P. MEYER, « L'autonomie de l'arbitre international dans l'appréciation de sa propre compétence », R.C.A.D.I 1989 p 430, J. P. ANCEL, « L'actualité de l'autonomie de la clause compromissoire », Travaux du comité français de Droit international privé, Pédone, 1990, p 75

202 Cass. 1ère civ, 7 mai 1963, Rev. Crit. DIP 1963.615, note H. MOTULSKY

203 Voir, la sentence de la C.C.I 1526/1968 J.D.I, 1974 obs. Y.DERAINS

l'arbitrage, la clause compromissoire est indépendante juridiquement du contrat qui la contient directement ou par référence et son existence et son efficacité s'apprécient, sous réserve des règles impératives du droit français et de l'ordre public international, d'après la commune volonté des parties sans qu'il soit nécessaire de se référer à une loi étatique. »204 Cette solution manifeste un refus de fragiliser les clauses compromissoires dans les cas où elles sont particulièrement utiles et le souci de ne pas en faire un instrument d'encouragement des manoeuvres dilatoires entre les mains d'une partie désireuse de ralentir le processus arbitrale.205 Bons nombres de législations nationales relatives à l'arbitrage consacrent le principe d'autonomie de la clause compromissoire. IL en est ainsi, par exemple, de la loi égyptienne de l'arbitrage qui dispose dans son article 23 que : « la nullité du contrat principal, sa résiliation ou son extinction sont sans effet sur la clause d'arbitrage contenue dans le contrat lorsque celle-ci est en elle-même valide. »206 C'est également le cas de la loi guinéenne sur l'arbitrage qui prévoit en son article 1123 que la nullité de la convention n'a aucun effet sur la clause compromissoire.207

La portée de l'autonomie de la clause compromissoire est essentiellement de faire échapper la convention arbitrale aux manquements pouvant affecter le contrat qui la contient. Par extension, nous pourrions imaginer, sur la base de ce principe d'autonomie de la convention arbitrale, que l'invalidité du contrat principal n'influence en rien sur la compétence de l'arbitre. Ainsi, l'arbitre dispose une compétence de sa compétence, connue sous la terminologie de compétence-compétence ou kompetenz-kompetenz. Celle-ci permet de protéger l'autonomie de la clause contre les tentatives de déclinatoire de l'arbitre qu'abusent fréquemment les parties.208

Après avoir apporté quelques précisions sur l'autonomie de la clause compromissoire, il s'agira de voir sa validité.

B) La validité de la clause compromissoire

La validité de la clause compromissoire est à rechercher dans les réserves posées par l'arrêt Dalico. On pourrait dire que le principe de validité de l'accord compromissoire est en quelque sorte une continuation du principe d'autonomie affiché dans l'affaire sus rappelée. En effet, comme dit le professeur Meyer, le principe de validité de la clause compromissoire « n'est rien d'autre qu'une manière plus explicite de désigner le principe d'autonomie ou d'indépendance visé dans l'arrêt Dalico. »209 Toutefois, il n'est pas inopportun de rappeler que l'arrêt Dalico a emprunté les traces de l'arrêt Hecht de la Cour d'appel de Paris210où l'autonomie de la clause compromissoire allait dépasser la simple

204 Voir, Cass. 1ère civ, 20 décembre 1993, Dalico, R.C.D.I.P 1994, p 663, note de P. MEYER, voir, Cass. 5 janvier 1999 Zanzi, Rev. Arb. 1999, p 260, note de Ph. FOUCHARD

205 Cf. J. M. JACQUET et Ph. DELEBECQUE, op.cit. p 346, voir également, P. MEYER, op.cit. p 82-83

206 Article 23 de loi égyptienne du 21 avril 1994 sur l'arbitrage

207 Article 1123 de la nouvelle loi n° L/98/015/AN du 6 juin 1998 modifiant la loi n° L/92/043.CTRN du 8 décembre 1992 portant codes des activités économiques

208 Voir, CIRDI, n° ARB/08/20, sentence du 10 juillet 2010, Millicom & Sentel C/ République du Sénégal

209 Cf. P. MAYER, op. cit. p 89

210 CA Paris, 19 juin 1970, J.D.I 1971.836. note de B. OPPETIT, Cass. 4 juillet 1972, J.D.I, 1972, p 843, note B.OPPETIT

indépendance de la clause par rapport au contrat principal pour s'étendre à l'indépendance au fond de la clause par rapport à toute loi étatique.211 Ainsi, la clause compromissoire est valable dès lors qu'il y'a une volonté commune- l'échange de consentement affiché-des parties sans référence à une norme étatique, sous réserve des règles impératives du droit français et de l'ordre public international. Cette restriction de la validité de l'accord compromissoire pourrait se révéler incompréhensible, du moins paradoxale, qu'un tribunal arbitral puisse se déclarer incompétent dans les hypothèses où la seule contrariété à l'ordre public du contrat principal aura été soulevée.212 Dans le cadre du droit de l'OHADA, la validité de l'accord compromissoire « est appréciable d'après la commune volonté des parties sans référence à un droit étatique. »213 Nous remarquons bien que l'Acte uniforme ne précise aucune réserve ; ce qui laisserait supposer que la clause compromissoire est valable dès l'instant que le principe de consensualisme est affiché par les parties. Or, la validité d'un acte ne saurait se résumer à la seule volonté des parties, comme le constate déjà H. Gaudmet-Tallon en ces termes : « un acte ne peut être valable que s'il remplit les conditions de fond et de forme par une norme logiquement première par rapport à cet acte ; ces conditions peuvent être sévères, elles ne sauraient être inexistantes. »214 C'est dire que l'Acte uniforme aurait pu mettre des barrières, qu' elles soient d'ordre public ou non, afin de canaliser la volonté des parties. Cela va de la crédibilité de la clause.

L'arbitrage dans le commerce international est un mécanisme privilégié de résolution des conflits ; ce qui est sans doute compréhensible, vu les nombreux avantages qu'il accorde aux parties. C'est pourquoi, il est réputé efficace.

SECTION 2 : L'arbitrage, mécanisme efficace de règlement des différends commerciaux entre un Etat et un opérateur économique étranger

L'expansion internationale du commerce et des investissements a introduit une plus grande complexité dans les relations commerciales entre Etats et opérateurs économiques privés. Les litiges qui peuvent naitre de ces relations complexes sont des risques qu'ils doivent appréhender à l'avance afin de les surmonter. L'arbitrage demeure le mécanisme le plus utilisé dans la résolution de ces différends. Réputé efficace, l'arbitrage commercial international offre une grande liberté (Paragraphe 1) aux parties en conflit et des avantages certains, tant au niveau de la procédure qu'au niveau de la sentence (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : Une grande latitude accordée aux parties

Cette latitude se manifeste, d'une part sur le choix des arbitres(A) et d'autre part sur la détermination du droit applicable au fond(B).

211 Cf. J.M.JACQUET et Ph. DELEBECQUE, op.cit. p 350

212 F. CAMARA, op.cit. p 43

213 L'article 4 de l'Acte uniforme de l'OHADA sur l'arbitrage

214 H. Gaudmet-TALLON, note sous l'arrêt, CA. Paris, 26 mars 1991, Rev.Arb. 1991, p 469, citée par P.MEYER, op.cit. p 90

A) Sur le choix des arbitres

Les parties disposent une liberté sur le choix des arbitres. A la différence des procédures étatiques où les parties n'ont pas la possibilité de choisir le juge, les parties à une procédure d'arbitrage désignent les arbitres, que ce soit directement ou par l'intermédiaire d'un centre d'arbitrage. Cela leur permet de trouver plus facilement un terrain d'entente en choisissant des arbitres neutres et indépendants pour le traitement efficace de leur litige.

Les parties peuvent s'accorder à l'avance dans la convention d'arbitrage sur les critères auxquels devront répondre les arbitres. Ainsi, il est exigé que l'arbitre ait le « plein exercice de ses droits civils. »215 Mais aucune restriction n'est imposée en raison de sa profession ou de sa nationalité.

Le plus souvent, les parties décident de confier le règlement de leur conflit à un arbitre unique qu'elles désignent d'un commun accord ou à un tribunal composé de trois(3) arbitres. Dans ce cas, chacune désigne un arbitre et le troisième arbitre, par ailleurs le président, peut être désigné, soit par un choix commun des parties, soit par les arbitres ou à l'absence d'accord par le juge d'appui.216 Il convient de retenir qu'en cas d'arbitrage institutionnel les parties mettront en oeuvre le système de désignation des arbitres qu'organise le règlement d'arbitrage de l'institution sur laquelle elles ont porté leur choix.217

Outre la liberté de choisir les arbitres, les parties bénéficient une grande liberté relativement au droit qui sera appliqué au fond du litige.

B) Sur la détermination du droit applicable au fond du litige

La procédure arbitrale de résolution des différends commerciaux internationaux accorde une liberté réelle aux parties de déterminer les règles de droit applicables par les arbitres dans le fond du différend.218 Ainsi, celles-ci peuvent exprimer ce choix par une clause expresse dans leur contrat (dite clause de choix) qui précise le droit applicable. En l'absence de cette manifestation expresse, il peut s'agir d'une manifestation implicite à travers certaines clauses du contrat. Il en est ainsi par exemple qu'un contrat ait été rédigé en référence à un contrat-type en usage dans un pays déterminé peut être considéré comme l'expression implicite du choix en faveur de la loi de ce pays.219

Dans le domaine des contrats conclus entre un Etat et une personne privée étrangère-communément appelés contrats d'Etat- la convention de Washington du 18 mars 1965 pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre Etats et ressortissants étrangers,

215 Voir, l'article 1451 du NCPC

216 Article 5 de l'Acte Uniforme de l'OHADA sur l'arbitrage

217 Voir, l'article 7 du Règlement d'arbitrage du Centre d'arbitrage, de médiation et de conciliation de CCIAD

218 Voir, la Résolution de l'Institut du Droit International(IDI) adoptée à Saint-Jacques de Compostelle, le 12 septembre 1989. Elle prévoit que : « les parties ont plaine autonomie pour déterminer les règles et principes de droit matériel qui doivent être appliqués par les arbitres.» Cette formulation a été reprise par la Sentence arbitrale de la Chambre de commerce international(CCI) qui a rappelé l'affirmation selon laquelle cette autonomie des parties relative à la détermination de la règle applicable en tant que principe général du droit du commerce international. Voir, la Sentence CCI n°5865. 1989, J.D.I, 1989

219 P. MEYER, op.cit. p 194

instituant un centre spécifique de règlement des litiges, le CIRDI, donne aux parties la liberté de déterminer le droit applicable au fond du litige. Elle établit, en effet, en son article 42 que « le tribunal statue sur le différend conformément aux règles de droit adoptées par les arbitres. » La liberté des parties de choisir le droit applicable pour la solution de leur conflit est encore prévue par la loi-type de la CNUDCI sur l'arbitrage commercial international en son article 28, indiquant que le « tribunal arbitral tranche le différend conformément aux règles de droit choisies par les parties comme étant applicable au fond du différend. Toute désignation de la loi ou du système juridique d'un Etat donné est considérée, sauf indication contraire expresse, comme désignant directement les règles juridiques de fond de cet Etat et non ses règles de conflit de loi. » Egalement, l'Acte uniforme de l'OHADA sur l'arbitrage en prévoit expressément à travers la disposition ci-après : « Les arbitres tranchent le fond du litige conformément aux règles de droit désigné par les parties. »220 De même, le règlement arbitral de la CCJA de l'OHADA considère que les parties sont libres de déterminer la norme juridique que les arbitres doivent appliquer au fond du litige.221 Cette disposition est en ligne droite avec certaines législations nationales en matière d'arbitrage international, notamment celle de la France qui prévoit dans son NCPC que : « l'arbitre tranche le litige conformément aux règles de droit que les parties ont choisies. »222

Matériellement, cette liberté permet aux parties, soit de choisir une règle de droit sans lien avec le contrat principal, soit de se référer à plusieurs règles juridiques dont chacune ne s'appliquant qu'à une partie du contrat (connu en droit international privé des contrats sous l'expression de dépeçage du contrat),223 soit de faire porter leur choir sur un droit qui n'est pas l'expression d'aucune ordre juridique étatique( connu sous le titre de lex mercatoria).

La possibilité pour les parties de choisir le droit applicable leur permet de mieux s'imprégner de cette règle de droit qui, en raison de sa teneur, parait pour elles la mieux efficace et la plus adaptée à la résolution de leur problème. En outre, la désignation de cette norme applicable évite, tout au moins, toute ambiguïté quant au droit régissant le contrat ; ceci contribue fortement à la sécurité des contractants. Cependant, cette liberté des parties ne doit pas occulter le pouvoir de juger des arbitres.224

Il n'est point douteux que l'arbitrage commercial international en accordant aux parties une certaine liberté leur permet, non seulement de régler leur litige de la manière la plus efficace suivant une procédure confidentielle et rapide, mais aussi d'avoir une certitude sur l'exécution de la sentence arbitrale. C'est pourquoi, il apparait avantageux.

PARAGRAPHE 2 : Des avantages certains relativement à la procédure et à la sentence

Malgré l'importance du règlement judiciaire des conflits commerciaux internationaux, nous ne pouvons-nous empêcher de constater que ces conflits se détournent de façon

220 Article 15 de l'Acte Uniforme de l'OHADA

221 Article 17 alinéa 1 du Règlement arbitrale de la CCJA

222 Article 1496 du NCPC français, voir également l'article 39 de La loi égyptienne sur l'arbitrage du 21 avril 1994, l'article 834 du Code de Procédure civile libanais

223Voir, P. LAGARDE, « Le dépeçage dans le droit international privé des contrats », Rivista di diritto internatizionale e procéssuale, 1975, n° 1, p 649 et s

224 Cf. P. MEYER, op.cit. p 24

fréquente des juridictions nationales pour se diriger vers l'arbitrage.225 Ce qui est aisément compréhensible pour diverses raisons, notamment la souplesse de la procédure entrainant de facto sa rapidité et sa confidentialité(A) mais également la reconnaissance de la sentence permettant de rendre exécutoire la décision de l'arbitre(B).

A) La rapidité et la confidentialité de la procédure

Le désire de tous les opérateurs économiques privés est d'avoir un système juridictionnel fort et capable de leur garantir une rapidité et une confidentialité de la résolution de leur conflits. C'est la raison pour laquelle ils choisissent fréquemment l'arbitrage à la défaveur de la justice étatique qui, rappelons-le, est largement critiquée pour ses procès longs et ouverts au public.

L'arbitrage commercial international offre d'abord aux parties des avantages par rapport à la gestion du temps de leur procès. Il permet d'éviter une perte de temps. En effet, à la différence de la juridiction étatique où les différends peuvent restés pendant des années sans que la décision ne soit rendue et qui, pour autant, ne puissent être examinés au fond, le système d'arbitrage s'inscrit le plus souvent dans délais très courts. Le délai le plus long est de six(6) mois sauf cas exceptionnels. Dans certains cas, il possible même de réduire ce délai de moitié. Certains règlements d'arbitrage des chambres d'arbitrage, notamment ceux du Sénégal et de la Côte d'Ivoire, en prévoient. Ainsi, l'instance arbitrale, dès qu'elle est régulièrement formée, en plus sa compétence déterminée, procède immédiatement à l'examen du fond du différend. Ce qui permet, d'une part de surmonter à certaines questions relatives à l'irrecevabilité et d'autre part de gagner plus de temps.226

Egalement, l'arbitrage offre aux parties une confidentialité de leur audience. Contrairement aux cours et tribunaux étatiques devant lesquels les audiences sont en principe publiques, l'arbitrage se déroule suivant des audiences à huis clos.227 Cette confidentialité permettra aux parties d'avoir la garantie que les informations résultantes de leurs dossiers ne seront pas communiquées, ni par les arbitres ni par aucune personne impliquée dans la procédure, au public. Les arbitres « s'engagent à ne pas divulguer à des tiers des faits ou autres éléments ayant trait au litige et à la procédure arbitrale. [...] Les arbitres s'abstiennent de faire publier toute sentence sans l'accord des parties à l'arbitrage et du centre. »228 Ce qui permet d'inciter les investisseurs, d'autant plus que psychologiquement ils aiment émailler leurs investissements de mystère, à s'engager davantage d'investir dans des secteurs rentables et de participer à la bonne marche de la justice arbitrale. Celle-ci, compte tenu des intérêts en jeux, doit garantir la pérennité de l'institution.

Si le système d'arbitrage prend actuellement un poids important dans le règlement des différends commerciaux internationaux, ce n'est pas uniquement la conséquence de son

225 Cf. B. JADAUD et R. PLAISANT, op.cit., p 169

226 Voir, Ibrahima. Kh. DIALLO, L'arbitrage commercial interne et international. OHADA-Sénégal-Côte d'Ivoire-Guinée, Abrégé théorique et traité pratique, Institut Afrique-mer, Dakar, 1999, p 30

227 Voir, l'article 14 alinéa 1 de l'Acte Uniforme de l'OHADA sur l'arbitrage, article 6 du Règlement d'arbitrage de la CCI

228 L'article 9 du Règlement d'arbitrage du Centre d'arbitrage, de Médiation et de Conciliation de la CCIAD (Chambre de commerce, d'industrie et d'agriculture de Dakar)

caractère rapide et confidentiel, mais c'est aussi le fait que les sentences arbitrales sont de plus en plus reconnues et exécutées.

B) La possible reconnaissance et exécution de la sentence arbitrale

La sentence arbitrale est revêtue de la chose jugée dès qu'elle est rendue.229 C'est dire qu'elle devient obligatoire. Cependant, elle n'est point exécutoire. Pour cela, la sentence doit requérir la mise en oeuvre de la contrainte publique. Cette situation s'explique par le fait que l'arbitre, à la différence du juge étatique, ne bénéficie pas d'imperium. Il clair donc que la sentence ne peut donner lieu à des mesures qui mettent en mouvement la force publique que lorsqu'elle a été revêtue de la formule exécutoire.230

Pour que la sentence arbitrale devienne exécutoire, il faut que l'autorité de la chose jugée soit combinée avec la reconnaissance, c'est-à-dire que le juge devant lequel la sentence est invoquée reconnaisse cette autorité de la chose jugée: C'est l'exequatur qu'il entend donner à la sentence. Cet exequatur suppose un certain nombre de conditions de fond. D'abord, il s'impose à la partie qui en prévaut d'établir l'existence de la sentence.231 Cela s'entend, ensuite, que la sentence doit être écrite.232 Enfin, elle ne doit pas être contraire à l'ordre public international des Etats parties.233

Toutefois, il convient de retenir que la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères a fait l'objet d'une consécration conventionnelle. De nombreux pays ont adhéré aux conventions sur l'arbitrage commercial international qui font état de la reconnaissance et de l'exécution des sentences arbitrales. Ce qui a contribué, de façon spectaculaire, au développement de l'arbitrage commercial international.

Principalement, nous retenons la Convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales. En premier lieu, la convention prévoit une reconnaissance et une exécution des sentences arbitrales étrangères, c'est-à-dire celles rendues sur le territoire d'un autre Etat partie à la convention dont le champ d'application est défini à l'article I. Ainsi, elle fait l'obligation générale aux Etats contractants de reconnaître l'autorité de telles sentences et d'en accorder l'exécution conformément à leurs règles de procédure visées à l'article III. La partie qui cherche à obtenir l'exécution d'une sentence arbitrale étrangère doit présenter au tribunal étatique compétent l'original de la sentence arbitrale ou son copie et celle de la convention d'arbitrage.234 La partie contre laquelle l'exécution de la sentence est requise peut faire opposition en apportant la preuve que l'un des motifs de refus d'exécution dont la liste limitative est donnée au paragraphe 1 de l'article V

229 L'article 23 de l'Acte Uniforme de l'OHADA sur l'arbitrage précise que : « la sentence arbitrale a, dès qu'elle est rendue, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'elle tranche. » .Egalement, l'article 27 du Règlement arbitrage de la CCJA considère que la sentence arbitrale rendue en vertu du présent règlement a « l'autorité définitive de la chose jugée sur le territoire de chaque Etat partie, au même titre que les décisions rendues par les juridictions de cet Etat. »

230 Cf. P. MEYER, op.cit. p 237

231 Voir, article 31 alinéa 1 de l'Acte Uniforme de l'OHADA sur l'arbitrage

232 Article 32 alinéa 2 du Règlement d'arbitrage de la CNUDCI

233 Voir, l'article 31 alinéa 4 de l'Acte Uniforme de l'OHADA sur l'arbitrage

234 Voir, l'article IV § 1 de la Convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères

est satisfait. Le tribunal étatique peut d'office refuser l'exécution pour des raisons d'ordre public.235 Lorsque la sentence fait l'objet d'une demande en annulation ou en suspension dans le pays où elle a été rendue, le tribunal étatique étranger devant lequel son exécution est recherchée peut surseoir à statuer ou ordonner à la partie demanderesse de fournir des sûretés convenables.236 Et en second lieu, elle tient à faire reconnaitre la convention arbitrale. En effet, aux termes de l'article II paragraphe1 les Etats contractants reconnaissent la convention arbitrale écrite par laquelle les parties s'obligent à soumettre tous ou certains de leurs différends susceptibles d'être tranchés par la voie arbitrale. Ainsi, le tribunal d'un État contractant, saisi d'un litige sur une question au sujet de laquelle les parties ont conclu une convention d'arbitrage, doit renvoyer les parties à l'arbitrage, à la demande de l'une d'elles.237

Subsidiairement, citons d'abord la Convention européenne de Genève du 21 avril 1961 sur l'arbitrage international, modifiée par l'Arrangement de Paris du 17 décembre 1962. Cette convention s'applique, aux termes de son article 1 paragraphe 1, à toutes les divergences nées des opérations du commerce international conclues par des personnes physiques ou morales ayant pour résidences habituelles ou siège dans des Etats contractants. Elles sont libres de s'en remettre à un centre d'arbitrage permanent ou à un arbitrage ad hoc. Ensuite, le Traité de Port-Louis du 17 octobre 1993 relatif à l'OHADA. Ce traité a permis d'introduire, en Afrique, une sorte de « solidarité communautaire » pour le développement des législations en matière des affaires et en particulier le commerce international. En signant ce traité, les Etats africains francophones n'ont fait que s'aligner sur le mouvement mondial, avec l'introduction de l'Acte uniforme sur le droit de l'arbitrage, qui fait de l'arbitrage le mode usuel de règlement des différends du commerce international.238 En outre, le même acte uniforme prévoit une reconnaissance et exécution des sentences de la CCJA sur les territoires des Etats membres.239 Enfin, la Convention de Washington du 18 mai 1965 pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre Etats et ressortissants étrangers. En créant un centre d'arbitrage, CIRDI, la convention entendait répondre à une préoccupation réelle des investisseurs étrangers, celle concernant le règlement de leurs litiges avec les Etats contractants, notamment ceux du Tiers-Monde, dans lesquels la « bonne » justice peut faire défaut (par exemple la justice est taxée, à tort ou à raison, d'incompétence, de partialité et de dépendance au pouvoir politique).

Toutes ces conventions constituent un gage pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales. Les parties, en choisissant le mode arbitral de règlement de leur conflit, sont conscientes à l'avance que, même si l'arbitre est dépourvu de l'impérium, sa sentence va, de forte chance, requérir l'exéquatur et être applicable.

235 Voir, l'article V § 2 de la Convention de New York

236 Voir, l'article VI de la Convention de New York

237 Voir l'article II § 3 de la Convention de New York

238 Cf. Jaen.Yado.TOE, Droit du commerce international, Direction de la Presse universitaire, Ouagadougou, 1999, p 151

239 Voir, l'article 34 de l'Acte Uniforme de l'OHADA sur le droit de l'arbitrage

. Conclusion de la première partie

Le règlement juridictionnel des différends commerciaux internationaux est un mécanisme largement ambivalent. Comme nous l'avons montré, c'est mécanisme qui se fait en fonction des acteurs en conflit. Ainsi, il a été noté que les conflits qui mettent en jeu les intérêts des Etats, membres de l'OMC, sont tranchés principalement par le système de résolution des différends de ladite organisation, à travers l'ORD. Celui-ci, constituant une avancée du règlement des différends commerciaux multilatéraux, est, pour une majeure partie de la doctrine, original et efficace. Cependant, il demeure relativement défavorable aux particuliers, notamment les opérateurs économiques privés, qui ne peuvent le saisir directement. C'est la raison pour laquelle ceux-ci, dans les différends qui les opposent aux Etats, sont tentés de porter ces litiges devant un tiers, un arbitre, afin qu'ils soient tranchés efficacement. C'est la voie arbitrale qu'ils préfèrent au détriment de la justice étatique. Cette attitude est compréhensible dans la mesure où l'arbitrage commercial international leur assure certaines libertés et garanties procédurales que la justice étatique ne pourrait pas leur accorder convenablement.

Toutefois, ce caractère ambivalent aura certainement des influences positives ou négatives sur le mécanisme en tant que tel. Ce qui va nous permettre de voir les éléments qui font que le mécanisme, nonobstant quelques manquements, soit considéré comme efficient.

DEUXIEME PARTIE

LE REGLEMNET JURIDUCTIONNEL DES DIFFERENDS COMMERCIAUX INTERNATIONAUX : UN MECANISME EFFICIENT

Les relations commerciales internationales se sont extraordinairement développées depuis la fin de la Guerre froide. Cette croissance du volume commercial mondial a occasionné une forte formalisation de l'activité commerciale internationale. C'est ainsi que les opérations commerciales internationales ont été soumises, par voie conventionnelle, à des corps de règles plus solides afin de mieux les appréhender. Et, les conflits pouvant en survenir ont été soumis à des procédures juridictionnelles plus efficaces dans le but de les résoudre de la manière la plus convenable.

Dans le cadre du commerce multilatéral, encadré par les Accords de Marrakech, des avancements importants ont été notés grâce à son système de résolution des conflits sous les auspices de l'ORD. Egalement, concernant les opérations d'investissement relatives au commerce, on a relevé une contribution avérable des opérateurs économiques privés. Ces derniers ont apporté une part considérable dans le volume du commerce mondial. Cela est sans doute la conséquence d'une sécurité juridictionnelle dont ils ont eu à bénéficier au cours de la solution de leurs différends avec leurs partenaires contractuels (il s'agit ici des Etats) par la procédure arbitrale.

Le mécanisme du règlement juridictionnel des différends commerciaux internationaux est donc, aux jeux de nombreux observateurs, efficient. Cette efficience lui est due, d'une part par son souci de toucher l'ensemble des questions poignantes de la Société internationale en rapport avec le commerce international, d'autre part par son apport réel à l'émergence de nouvelles normes et usages applicables dans le cadre des échanges internationaux. Cependant, il est retenu que, nonobstant son efficience, des difficultés n'ont pas manqué d'être soulevées, ce qui fait que le mécanisme est loin d'être exempt de vices.

Il s'agira donc d'apprécier cette efficience-qui sera opérée à deux point de vue-(Chapitre I) avant d'analyser les difficultés auxquels le mécanisme est confronté (Chapitre II).

CHAPITRE I : UNE EFFICIANCE APPRECIABLE A DEUX NIVEAUX

L'efficience du mécanisme de résolution des conflits internationaux relatifs aux transactions internationales peut être est appréciée à deux niveaux. Premièrement, ce mécanisme a permis de constater une effectivité du droit international général (Section 1). Cette effectivité se réalise suivant une tendance graduelle (lentement mais sûrement). Deuxièmement, en suivant le mécanisme, il est permis de constater, à bien des égards, une réelle volonté de rationaliser les opérations commerciales internationales (Section 2).

SECTION 1 : Un moyen de promouvoir l'effectivité du droit international général

En effectuant un coup de routine aux différentes affaires relatives à l'activité commerciale internationale qui ont été résolues par la voie juridictionnelle, nous sommes arrivés à déceler une effectivité du droit international. En effet, le mécanisme de résolution des conflits commerciaux multilatéraux, sous l'égide de l'ORD, a permis de constater une réelle prise en considération des préoccupations nouvelles de la Société internationale (Paragraphe 1). Parallèlement, dans le cadre de l'arbitrage commercial international, sous l'action des « commerçants », ont été érigés en règles juridiques des usages et principes généraux de droit qui, par ailleurs, ne s'identifient à aucun ordre juridique étatique (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : La prise en compte des préoccupations nouvelles de la Société internationale

La résolution des contestations commerciales multilatérales a contribué à la réflexion sur les enjeux intéressant la communauté internationale dans son ensemble. Ceux-ci, à l'ère actuelle, s'inscrivent dans la dynamique de la préservation du bien-être social et économique de la famille humaine, et au-delà de celle-ci, la préservation de toute sorte de vie.

Nous pouvons, non sans prétention à l'étude exhaustive, synthétiser ces préoccupations en deux domaines. D'une part, elles sont d'ordre environnemental(A), car s'inscrivant dans le sillage de la préservation et la protection de l'environnement, et d'autre part, elles sont d'ordre social(B), par ce que mettant en relief la sécurité sociale des personnes.

A) Les préoccupations d'ordre environnemental

La protection de l'environnement est pendant longtemps reléguée au second plan dans les préoccupations commerciales internationales, par la simple raison qu'on avait considéré qu'il ne pouvait y avoir un lien de causalité direct entre le commerce et la dégradation de l'environnement.240 Cependant, l'évolution des mentalités et la lutte sans relâche des défenseurs de l'environnement ont fini par influencer les négociateurs des relations commerciales multilatérales à intégrer la dimension environnementale dans ces dites relations.241 En effet, à défaut d'un consensus à l'époque du GATT, les préoccupations environnementales ne seront introduites dans les accords commerciaux multilatéraux que fort récemment, c'est-à-dire sous l'évènement du système de l'OMC, notamment lors de la signature de l'Acte final créant un « comité du commerce et de l'environnement ».242

Compte tenu de la dimension attractive du mécanisme de règlement des différends internationaux, l'ORD se trouve amener à répondre sur des questions d'enjeux recouvrant des mesures extra-commerciales. Il tente ainsi, dans quelques affaires, de concilier principe de la

240 Voir, B. DIASSY, L'OMC et la protection de l'environnement, mémoire de master 2 en droit de l'environnement, Faculté des Sciences Juridiques et Politiques, Université Cheikh Anta Diop de Dakar, 2007, p 13 ; N. HAKAN et V. SCOOT, Commerce et environnement, Etude spéciale, OMC, 1999, p 20

241 Cf. Alex. KOUVEJE, « En attendant le cycle : Que faire après Seattle? », Politique étrangère, n°2, 2000, p 453-454 ; Voir également, le préambule de l'Accord de Marrakech instituant l'Organisation mondiale du commerce(OMC)

242 Voir, la Décision ministérielle du 15 avril 1994 adoptée à la fin de la Conférence de Marrakech

liberté commerciale et celui de la protection de l'environnement même si, faut-il le signaler, le premier principe semble prendre le dessus sur le second,243 si l'on sait que son but le plus solennel est de promouvoir une réduction importante des barrières tarifaires ou non tarifaires considérées comme des entraves au développement du commerce international.

Les mesures environnementales prises par un membre, partie aux accords de Marrakech, sont en principe licites sauf s'elles visent à restreindre arbitrairement le principe de nondiscrimination affiché par l'OMC. Elles doivent être clairement justifiées ; aussi elles doivent se détacher complétement de toute tentative de protectionnisme déguisé.

La protection de l'environnement doit être donc conciliée avec la libéralisation des échanges. Le mécanisme de règlement des différends de l'OMC n'ignore aucunement la possibilité pour les Membres de prendre en charge la protection de leur faune et de leur flore dans leurs rapports commerciaux. Ceux-ci ont, par exemple, le droit et l'obligation de protéger les espèces menacées tout en respectant le principe de libre-échange tant défendu par l'institution. En effet, l'ORD a estimé que : « Nous n'avons pas décidé que les nations souveraines qui sont membres de l'OMC ne peuvent pas adopter des mesures efficaces pour protéger les espèces menacées(...) Il est évident qu'elles le peuvent et qu'elles le doivent. »244 Toutefois, si l'on examine la jurisprudence de l'ORD on pourra arriver à se subodorer de la pertinence des décisions de celui-ci face aux questions épineuses relatives à la protection de l'environnement. Il reste dans les esprits sa réticence dans les affaires célèbres mettant en relief la préoccupation environnementale, notamment, Essence nouvelles et anciennes formules(1996) ; Hormones (1997) ; Crevettes(1998) ; Saumons(1998), alors qu'il devait se monter plus audacieux et plus pertinent afin de marquer sa position définitive sur ce « couple conflictuel »245: la liberté commerciale et la protection de l'environnement.

Il faut donc attendre quelque temps après pour voir l'ORD se montrer moins réticent envers les considérations environnementales. Bien sûr, dans l'affaire Amiante,246 l'Organe d'appel a eu à faire prévaloir la protection de l'environnement sur la liberté du commerce international. Cette décision reste la seule à travers laquelle les défenseurs de l'environnement ont pu trouver satisfaction.247 Quand même, il faut s'en glorifier, étant entendu que malgré la pression des membres, la protection de l'environnement commence à prendre une place non négligeable dans le système de résolution des conflits commerciaux au sein de l'OMC. L'ORD recourt ainsi de plus en plus à des normes extérieures aux dispositions de l'institution

243 Cf. D. CARREAU et P. JUILLARD, op.cit. p 383

244 Voir, affaire Crevettes, note supra

245 Il faut entendre par là de la difficile conciliation qui existe entre la protection de l'environnement et la promotion du libre-échange dans les relations commerciales mondiales. Il est évident que le commerce est fondamentalement lié à l'environnement à tel point que la défaillance de l'un peut impacter l'autre. Cependant, le souci de protéger leur environnement pourrait amener les Etats (membres de l'OMC) à, par des manoeuvres dilatoires et fallacieuses, réduire considérablement les importations d'un produit dans le but de favoriser sa production au niveau local : c'est le phénomène de protectionnisme déguisé. Voir affaire Etats-Unis-Normes concernant l'essence nouvelle et ancienne formule, 29 avril 1996. OMC.Doc WT/DS2/AB/R. Rapport de l'Organe d'appel [Essence]

246 Affaire Communautés Européennes-Mesures affectant l'amiante et les produits en contenant, 12 avril 2000. OMC.Doc WT/DS135/AB/R. Rapport de l'Organe d'appel [Amiante]

247 Cf. D. CARREAU et P. JUILLARD, op.cit. p 384

commerciale mondiale afin de statuer sur les disputes commerciales touchant à l'environnement.248

Les préoccupations environnementales font l'objet de considération dans le mécanisme de règlement des différends de l'OMC. Mais, le mécanisme doit et semble étendre cette prise de conscience aux questions d'ordre social.

B) Les préoccupations d'ordre social

Sous la plume des professeurs Flory et Ligneul, nous avons pu lire et retenir que le commerce international ne peut se séparer des considérations sociales. Il y'a un cordon ombilical qui lie l'activité commerciale et l'état social des personnes qui l'exercent. Ils précisent en effet que : « les droits de l'homme et le commerce international ont des relations particulières : lorsque les deux concepts ne sont pas en conflit, l'enrichissement économique, favorisé par le commerce, conduit au renforcement des droits de l'homme. Les droits sociaux se développent par ce que les Etats s'enrichissent, ainsi la prospérité conduit à l'amélioration des conditions de travail et du respect des droits de travailleurs. »249 Les préoccupations sociales sont donc au coeur du droit du commerce multilatéral. Etant l'ouvre des Etats, les normes de l'OMC ne peuvent ignorer les enjeux et défis auxquels font face les membres eux-mêmes. Parmi ceux-ci, la rationalisation des relations individuelles de travail et la promotion ainsi que la protection des droits fondamentaux des personnes constituent les points phares des négociations commerciales multilatérales. Parce que simplement « l'ouverture commerciale entraine la croissance, le développement et la réduction de la pauvreté, c'est pourquoi le commerce garantie la réalisation concrète des droits de l'homme »,250 l'OMC a introduit une dimension sociale dans son dispositif même s'il ne s'y réfère jamais de façon explicite, et l'ORD « a plutôt eu tendance à établir un cordon sanitaire au tour du sujet251

Les négociations du cycle d'Uruguay ont abouti, dans des domaines non économiques, à la conclusion de l'Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires(SPS) et l'Accord sur les obstacles techniques au commerce(OTC) qui complètent l'article XX du GATT.

L'Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires(SPS) vise à encadrer l'application des règlementations nationales relatives à la sécurité alimentaire, la protection de la santé et la vie des personnes, des animaux et des végétaux. Cet accord-ainsi que celui des obstacles techniques au commerce- doit être conforme avec les orientations de l'OMC, c'est-à-dire intégrer les objectifs de la libéralisation du commerce. Ainsi, l'ORD dispose ou joue un rôle important relativement à l'interprétation de ces réglementations nationales, de leur conformité au doit de l'institution. Dans certaines affaires, on a pu voir l'ORD aller dans l'optique, par

248 Voir, P. de SENARCLENS, op.cit. p 153

249 Voir, Th. FLORY et N. LIGNEUL, « Commerce international, droit de l'homme, mondialisation : les droits de l'homme et l'organisation mondiale du commerce », in Commerce Mondial et Protection des droits de l'Homme, Bruylant, Bruxelles, 2001, p. 179

250 Cf. Pascal. LAMY, Directeur général de GATT/OMC du 1993 au 1995. www.wto.org

251 Cf. Maupain. FRANCIS, « Libéralisation du commerce international et la protection universelle des normes du fondamentaux du travail », in Osman. FILALI (sous la direction de), L'organisation mondiale du commerce: vers un droit mondial du commerce ? Actes et Débats du Colloque IEP de Lyon2, mars 2001, Bruylant, 2001, p 87

des positions, modestes soient-elles, de concilier la libéralisation des échanges et la sécurité sanitaires ou alimentaire des populations tel que voulu l'Accord SPS. A ce titre, l'Organe d'appel a reconnu que : « le droit qu'a un Membre de déterminer le niveau de protection sanitaire qui est approprié pour lui est un droit important. Cela ressort clairement du sixième paragraphe du préambule de l'Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires. »252 Ce droit d'établir son propre niveau de protection « est un droit autonome et non une ·exception à une obligation générale· au titre de l'article 3 paragraphe 1. »253 De surcroît, l'Organe d'appel a pu retenir, concernant les risques sanitaires, que le risque qui doit être évalué « n'est pas uniquement vérifiable dans un laboratoire scientifique fonctionnant dans des conditions rigoureusement maitrisées, mais aussi le risque pour les sociétés humaines telles qu'elles existent en réalité, autrement dit, les effets négatifs qu'il pourrait effectivement y avoir sur la santé des personnes dans le monde réel où les gens travaillent et meurent. »254 Encore, ce risque peut « être évalué d'un point de vue quantitatif ou qualitatif. »255

Même s'il faut rester moins convaincu par rapport à la position latente de l'ORD sur les poignantes affaires portées à sa connaissance, soulevant des questions épineuses relatives à la régularité des restrictions commerciales faites par un Membre de l'OMC aux fins de barrer la route à tout phénomène pouvant compromettre gravement la sécurité sanitaire de sa population, ou encore de réduire les risques de dégradation de son environnement, nous estimons que l'analyse du mécanisme permet, tout au moins, de percevoir la volonté réelle du mécanisme à prendre en compte les questions préoccupantes de la Société internationale.

Par ailleurs, nous avons pu voir dans le cadre du droit des opérations commerciales internationales l'émergence des nouvelles normes découlant des usages et principes généraux du droit et qui, de surcroît, ont été érigées en ordre juridique grâce à leur reconnaissance et leur application par l'arbitre ou par le juge.

PARAGRAPHE 2 : La mise en oeuvre de nouvelles normes du commerce international

L'action des opérateurs économiques privés(les commerçants) a permis de forger des usages et principes généraux qui sont devenus des normes applicables, reconnues en droit du commerce international. La contribution du mécanisme juridictionnel de règlement des différends commerciaux internationaux est loin d'être négligée, étant entendu que c'est par le bais duquel, en particulier l'arbitrage, qu'on a pu admettre le caractère obligatoire de ces nouvelles normes du commerce international dès lors que les parties en conviennent ainsi, et à l'arbitre (ou le juge) de les faire appliquer en tant que ordres juridiques. A l'heure actuelle, on peut en retenir celles qui découlent des pratiques des acteurs commerciaux d'un secteur donné, les incoterms(A) et celles relevant des principes généraux du droit du commerce international, la lex mercatoria(B).

252 Voir, affaire Mesures communautaires concernant les viandes et les produits carnés, 1998. Doc. OMC.

WT/DS48/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 172, [Hormones]

253 Ibid.

254 Voir, affaire Hormones, paragraphe 187 supra

255 Voir, affaire Communauté Européennes-Mesures affectant l'amiante et les produits en contenant,

2001.Doc.OMC, WT/DS135/AB/R paragraphe 167, supra

A) Des usages du commerce international : les incoterms

L'expression usages du commerce international apparait dans divers textes relatifs à l'arbitrage commercial international.256 Dans leur conception restrictive, les usages du commerce international s'entendent des pratiques contractuelles habituellement suivies dans une branche déterminée du commerce.257 Elles pourraient s'entendre, dans une conception large, comme des pratiques contractuelles et des véritables règles de droit dégagées de l'observation du droit comparé ou d'autres sources internationales. Il apparait ainsi que les usages pourraient se confondre avec les principes généraux du droit du commerce international.258

Les usages en commerce international sont fréquents, et sont devenus au fil des temps de véritables sources du droit du commerce international. De plus, leur utilisation constante par les arbitres a permis de parvenir à l'achèvement en droit du commerce international ce qui reste à établir en droit international public, à savoir l'élaboration des règles admises sur la base d'un consensus.259

Aujourd'hui, dans les usages du commerce international-la vente internationale des marchandises en particulier -on a constaté l'influence notoire des incoterms. Ils déterminent les obligations réciproques du vendeur et de l'acheteur dans le cadre d'un contrat de vente international.

Abréviation anglo-saxonne de l'expression « international commercial terms » signifiant en langue française termes du commerce international (ou conditions internationales de vente « C.I.V »), les incoterms résultent d'une codification des modalités de transaction commerciale mise en place par la Chambre de Commerce international. Chaque modalité est codifiée par trois(3) lettres et est indissociable du lieu de livraison auquel elle s'applique. Le but des incoterms est de fournir une série de règles internationales pour l'interprétation des termes commerciaux les plus utilisés en commerce international. Ces termes définissent les obligations du vendeur et celles de l'acheteur lors d'une transaction commerciale internationale, en ce qui concerne la livraison de la marchandise vendue, la répartition des frais et les risques ainsi que la charge des formalités d'export et import.

Toutefois, il importe de retenir que les incoterms sont pratiques issues des échanges et transactions (vente et achat des marchandises) par la voie maritime.260 Mais, ils ont été élargis dans d'autres secteurs du commerce international, notamment le secteur bancaire ou celui du blé.

256 Voir, l'article 13§5 du Règlement de la Cour d'arbitrage de la Chambre de Commerce International(CCI),

l'article 28 alinéa 4 de la Loi-type de la CNUDCI

257 Cf. E. GAILLARD, « la distinction des principes généraux du droit et usages du commerce international », in étude offerte à Pierre. Ballet, Litec, 1991, p 207

258 Ibid.

259 Cf. Thomas .E. CARBONNEAU, « Etude historique et comparée de l'arbitrage. Vers un droit matériel de

l'arbitrage commercial international fondé sur la motivation des sentences », Rev.Int.Droit.Comp.Vol.36, n°4, octobre-décembre, 1984, p 729

260 Voir, J. BEGUIN et M. MENJUCQ, Traité de droit du commerce international, Litec, 2005

Elaborés par la Chambre de commerce international dans les années 1920(promulgués en 1950), les incoterms ont connu une nouvelle version en 2000 puis réformés en 2010. Ces nouveaux termes du commerce international sont entrés en vigueur le 1èr janvier 2011. Cette réforme a supprimé quatre(4) termes au profit de deux(2) nouveaux termes. Ainsi, les termes DAF « Delivered At Frontier » (Rendu frontière), DES « Delivered At Ship » (Rendu ex ship), DDU « Delivered Duty Unpaid » (Rendu droits non acquittés) ont été remplacés par les termes DAP « Delivered At Place » (Rendu en lieu), et le terme DEQ « Delivered Ex Quay » (Rendu à quai).Désormais, ces termes commerciaux sont au nombre de onze(11) répartis entre deux(2)familles : les termes utilisables pour le transport par mer et par voie navigable intérieures et les termes utilisables quel que soit le mode de transport.261

L'importance pratique des incoterms est réelle. Les arbitres les utilisent fréquemment. Par exemple, à propos de l'exécution d'une vente FOB « Franco à Bord » (port d'embarquement convenu) conclue entre un vendeur yougoslave et un acheteur français, un tribunal arbitral constitué sous l'égide de la CCI avait fondé sa décision sur les incoterms, alors que même les parties n'y s'étaient pas expressément référées, en estimant que les frais de surestaries causés par l'arrivée tardive du navire au port d'expédition devaient être supportés par l'acheteur qui devait designer le navire.262

Ces usages du commerce international, bien qu'étant en vogue, sont moins utilisés-dans leur conception restrictive-par les arbitres ; ces derniers font souvent ou principalement référence à la conception lato sensus des usages, en l'occurrence les principes généraux du droit du commerce international, sous la dénomination de la lex mercatoria.

B) Des principes généraux du droit du commerce international : la lex mercatoria

Par principes généraux du droit du commerce international, il faut entendre toutes les règles qui ne sont pas « tirées d'un seul ordre juridique national mais qui sont dégagées soit de la comparaison des droits nationaux, soit directement de source international, telles que les conventions internationales, en vigueur ou non, ou de la jurisprudence des tribunaux internationaux. »263 Ces principes généraux doivent « présenter un degré suffisant d'abstraction et de généralisation pour pouvoir être énoncés. »264 Leur utilisation nécessite attention particulière car ne s'identifiant à aucune règle ou norme nationale. Ils appellent donc à une interprétation ou à une certaine concrétisation.265

261 Pour une étude approfondie sur la question des incoterms, voir E. JOLIVET, Les incoterms, Etude d'une norme du commerce international, Litec, 2003

262 Voir la Sentence rendue en 1976 dans l'affaire CCI n°1788 discutée par Y. DERAINS, in « Statut des usages du commerce international devant les juridictions arbitrales », Rev. Arb.1973.122. spéc. p 142

263 Cf. E. GAILLARD, op.cit. p 205

264 Cf. Ph. KAHN, « Les principes généraux du droit devant les arbitres du commerce international », JDI, 1989, p 305 et s

265 P. WEIL, « Principes généraux du droit et contrats d'Etat » Etudes offertes à B. Goldman, 1982, p 387 et s

L'expression principes généraux du droit du commerce international est souvent renvoyée aux notions de règles transnationales, ou de tiers-droit266 ou encore de règles a-nationales.267 Ces règles formulées depuis de fort longtemps ont connu, à l'ère moderne, une renaissance dans le jus mercatum qui régissait, en dehors et par-delà les coutumes, le droit écrit ou les statuts, les échanges commerciaux internationaux dans l'Europe occidentale à l'aube des temps modernes.268 Les règles transnationales sont donc un ensemble de principes généraux de droit régissant la sociatas mercatorum dans laquelle l'homogénéité des acteurs et la rapidité des transactions ne sauraient être suffisamment appréhendées par le seul ordre juridique d'un Etat. Ces normes spécifiques qu'appelle le commerce international reprennent la dénomination de la lex mercatoria.

La lex mercatoria, issue des pratiques qui répondent à l'exigence des opérations économiques ou commerciales transcendant les frontières nationales, est « devenue une véritable ordre juridique autonome apte à régir tous les rapports transnationaux et en premier lieu les rapports contractuels entre Etats et personnes privées étrangères. »269 Dans ce cas, la lex mercatoria bénéficie une compétence équivalente à celle qui serait reconnue à la loi d'un Etat.270 Elle bénéficie ainsi du principe de la force obligatoire des engagements conclus(en l'occurrence du principe pacta sunt servanda) et celui de la bonne foi qui sont indissociable à la règle nationale ou internationale. Ainsi, la CIRDI, à l'occasion d'un litige opposant la République Arabe d'Egypte à la Société Southern Pacific Properties Ltd(SPP), avait estimé que si elle devait être retenue à titre de la loi choisie par les parties, comme le soutenait l'Egypte, l'application de la loi égyptienne ne serait en tout hypothèse pas exclusive de l'application des principes de droit international pour en combler les éventuelles lacunes.271 Dans l'affaire opposant la société Framatome et d'autres sociétés françaises à l'Atomic Energy organisation of Iran, le tribunal (siégeant à Genève ) composé de MM. P.Lalive, président, B.Goldman et J.Robert, arbitres, avait estimé qu'il se référait aussi bien au droit iranien auquel le contrat avait été soumis qu'au « principe de bonne foi » et celui de « la force obligatoire des engagements conclus » comme étant « des principes qui sont à la base de toute relation contractuelle, notamment dans les rapports internationaux et qui sont consacrés en particulier par des usages du commerce international et par le droit

266 Voir, Moustapha. SOURANG, « Droit international économique et pluralisme des ordres juridiques : Critique de la théorie du tiers droit à la lumière de la pratique africaine », in L'Afrique et le Droit international, Actes de colloque sur l'enseignement du droit international et la recherche en droit international en Afrique, Dakar, 11-13 décembre 1985, Annales Africaines, numéro spécial, 1986-1987-1988, p 92

267Les concepteurs (notamment Ph. FOUCHARD) de ces normes a-nationales considèrent que celles-ci « présentent un trait commun d'ordre négatif : elles n'émanent pas des Etats. Mais leur caractère a-étatique a une double signification. Non seulement, les règles a-nationales ne sont pas issues de l'activité normative des Etats, mais encore elles échappent à l'emprise de tout ordre juridique étatique. », Voir, E. LOQUIN, « L'appréciation des règles a-nationales dans l'arbitrage international » in L'arbitrage commercial international : l'apport de la jurisprudence arbitrale, publication CCI n°440/1 p 69, voir, également Osman. FILALI, Les principes généraux de la lex mercatoria. Contribution à l'étude d'un ordre juridique a-national, LGDJ, 1992

268Voir, B. GOLDMAN, « La lex mercatoria dans les contrats et l'arbitrage international : réalité et perspectives » JDI, 1976, p 475

269 Cf. Moustapha. SOURANG, op.cit, p 94

270 J.M.JACQUET et Ph. DELEBECQUE, op.cit. p 88

271 Voir, CIRDI, sentence du 20 mai 1992, République Arabe d'Egypte c/ SPP

international. »272 Egalement, dans une sentence partielle rendue le 3 mai 1988 dans l'affaire Primary Coal c/Compania Valenciana de Cementos Portland SA, l'arbitre, M de Mello, avait décidé, au cas où les parties n'avaient pas arrêté la loi applicable au fond de leur litige, que celui-ci serait « réglé selon les seules usages du commerce international, autrement dénommés lex mercatoria. »273 Ces deux sentences montrent, qu'au-delà des approches controversées de la lex mercatoria, la conception de la notion comme ordre juridique autonome n'est plus douteuse et, qui plus est, présente l'avantage de conduire à l'admission que celle-ci comporte un ordre public. Cet ordre public, dit « transnational »274, forme à l'intérieur de la lex mercatoria une sorte de jus cogens.275

Cependant, il faut retenir que la lex mercatoria est loin d'être sans reproches. Parmi lesquelles, les plus fréquentes, on peut relever : l'inexistence d'une véritable société des opérateurs du commerce international, celle-ci se ramenant à des îlots d'organisation et de solidarités, sans structure commune276 ; le recours injustifié aux principes généraux du droit visés à l'article 38 du statut de la Cour Internationale de Justice(CIJ), car ce recours nécessiterait la démonstration préalable que la lex mercatoria constitue un ordre juridique positif277 ; l'inaptitude des usages du commerce à constituer de véritables règles de droit car les seuls usages sont ceux dits conventionnels278 ; l'imprécision de son contenu ; enfin le fait qu'elle constituerait surtout l'usage de l'équité de l'arbitre du commerce international.279

Le mécanisme de résolution juridictionnelle des conflits commerciaux internationaux a permis de voir une effectivité du droit international général. En outre, il a permis de constater une rationalisation des rapports commerciaux internationaux.

SECTION 2 : Un moyen de rationaliser les rapports commerciaux internationaux

L'objective principal que pourrait-on concéder au mécanisme de règlement juridictionnel des différends commerciaux internationaux était celui de rationaliser les relations commerciales internationales. En effet, le mécanisme vise non seulement à instaurer un climat de confiance (Paragraphe 1) entre les acteurs du commerce international, mais également les inviter à saper certaines pratiques commerciales jugées déloyales (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : Par la recherche d'un climat de confiance entre les acteurs

Si les parties à une opération commerciale internationale décident de porter leur divergence devant un organe juridictionnel pour la solutionner efficacement, c'est par ce

272 Sentence CCI n°3896 du 30 avril 1982. Pour un commentaire, voir B. OPPETIT, « Arbitrage et contrats

d'Etat », JDI, 1984, p 40

273 Affaire CCI n°5953, Rev.arb, 1990.701

274 Cf. L. MATRAY, « Arbitrage et ordre public transnational », Etudes Sanders Klower, 1982, p 244 et s.

275 Voir, J. M. JACQUET et Ph. DELEBECQUE, op.cit. p 89

276 Voir P. LAGARDE, « Approche critique de la lex mercatoria », in Etudes offertes à B.Goldman, 1982, p 125 et s

277 Ibid.

278 Voir, A. KASSIS, Théorie générale des usages du commerce. Droit comparé, contrats et arbitrages

internationaux, lex mercatoria, LGDJ, 1984

279 Voir, J-M. MOUSSERON, « Lex mercatoria. Bonne mauvaise idée ou mauvaise bonne idée », Mélange

Boyet, p 464 et s

celui-ci leur assure une sécurité juridique et judiciaire(A) et une opportunité de prévisibilité(B) du système commercial international.

A) La sécurité juridique et judiciaire

La mise sur pied d'un système commercial international, fondé sur des règles prévisibles, constitue une condition sine qua non pour le développement des relations commerciales internationales et par conséquent celui des pays. Ces règles juridiques, établies par des textes claires, ne sauraient être effectives et applicables efficacement sans le rôle primordial d'une juridiction, arbitrale ou judiciaire. Celle-ci offre à la règle juridique toute sa matérialisation en tant que norme cohérente, applicable et obligatoire.

Il est clair que les Etats ont mis en oeuvre des normes juridiques pour l'encadrement des opérations commerciales internationales, mais sans la présence d'une juridiction, servant un « cheval de Troie », ces normes seraient sans cesse violées par les parties à une transaction commerciales, qu'ils soient les Etats eux-mêmes ou les particuliers.

Les relations commerciales internationales sont régies par des principes et règles conventionnels. Et les différends, ayant opposé les acteurs relativement au non-respect de ces principes et règles, se voient déférés devant un organe juridictionnel institué à la seule fin de les résoudre efficacement pour rétablir l'ordre. Il en est ainsi, dans le cadre du commerce multilatéral-encadré par les Accords de Marrakech et sous l'égide de l'OMC-la mise en place de l'ORD a permis de rendre le système commercial multilatéral plus sécurisé. Le mécanisme de résolution des conflits de l'OMC se veut être la pierre angulaire de l'Organisation car, pour assurer la sécurité et la prévisibilité du système commercial multilatéral, il est le seul cadre auquel les membres doivent recourir pour régler leur différend commercial ; et que les recommandations et suggestions des groupes spéciaux et de l'Organe d'appel permanent vont orienter la pratique des membres, favorisant ainsi l'émergence de coutumes générales en matière de commerce international.280 A cet effet, les membres se trouvent dans l'obligation de les reconnaitre et de les appliquer. Egalement, concernant les relations commerciales entre les Etats et les personnes privées étrangères, l'arbitrage a joué un rôle important. Il a non seulement instauré une sécurité juridique des opérations commerciales internationales-en favorisant l'effectivité du droit de l'arbitrage281-mais aussi une sécurité judiciaire-par la prolifération des tribunaux arbitraux. Les personnes privés trouvent à l'égard de l'arbitrage commercial international des avantages que les tribunaux étatiques ne peuvent pas leur

280 D. CARREAU et P. JUILLARD, op.cit. p 108

281 Cette situation peut s'expliquer par l'acceptation plus ou moins générale du système d'arbitrage commercial international. Le constat est que tous les pays, même méfiants alors, ont pu procéder à des aménagements de leurs législations nationales pour y introduire le mécanisme d'arbitrage des différends commerciaux internationaux. L'exemple que l'on pourrait donner est celui des pays africains, particulièrement ceux du Sahel, qui ont intégré l'arbitrage dans leur système juridique tel que voulu par l'Acte uniforme de l'OHADA sur l'arbitrage. Sur ce sujet, voir, Mayata. Ndiaye. MBAYE, L'arbitrage OHADA : Réflexions critiques, mémoire de DEA, Université Paris X(Nanterre), 2000-2001, p 3 et s ; Félix. Onana. ETOUNDI, « Les principes d'UNIDROIT et la sécurité juridique des transactions commerciales dans l'avant-projet d'Acte uniforme OHADA », Rev.dr.unif. 2005-4, p 683 ; P. MEYER, «La sécurité juridique et judiciaire dans l'espace OHADA », Communication du colloque de Niamey sur la sécurité juridique et judiciaire dans l'espace UEMOA, du 17 au 24 mars 2006, Penant, n° 855, p 151

assurer, du moins les rendent précaire,282 notamment la confidentialité et la rapidité des procédures.

Au-delà de la sécurité juridique et judiciaire que les acteurs du commerce international bénéficient du mécanisme de règlement juridictionnel des leurs différends, celui-ci reste un moyen efficace pour assurer la prévisibilité des opérations commerciales internationales.

B) La prévisibilité du système commercial international

Le développement des échanges internationaux repose essentiellement sur la sécurité et la prévisibilité constitue un élément important car permettant aux acteurs de mieux voir les possibilités qu'ils auront à l'avenir. Lorsqu'il y'a prévisibilité, les échanges sont encouragés ; les investissements se fortifient ; les emplois se créent ; la consommation s'accroit ; par conséquent le développement se ressent. Toutefois, la réalisation de cette prévisibilité fait appel à un environnement juridique des affaires propice mais aussi un système juridictionnel efficace.

A l'OMC, la prévisibilité du système commercial international constitue une tendance ou plutôt un objectif auquel l'ORD s'est fixé conformément aux dispositions de l'article 3 du Mémorandum d'accord. En effet, le mécanisme de règlement des différends exerce un contrôle plus systématique et régulier sur les membres en alliant souplesse et rigidité dans le but d'assurer la primauté de la règle de droit de manière impartiale et équilibré, quelles que soient les parties en conflit, puissances commerciales ou non.283 Ce règlement est indubitablement « indispensable au bon fonctionnement de l'OMC et à l'existence d'un juste équilibre entre les droits et les obligations des Membres. »284

Par ailleurs, avec la globalisation de l'économie mondiale, occasionnant un très fort développement du commerce international, la prévisibilité des opérations d'investissement est plus que jamais nécessaire pour un meilleur avenir des relations commerciales entre les Etats et les opérateurs économiques privés étrangers. Il en résulte ainsi qu'une bonne politique législative, ayant pour but de réglementer ces échanges internationaux, demeure impérative. Il est donc nécessaire de créer un ensemble de règles qui régit ces contrats commerciaux liés surtout à une pluralité de systèmes juridiques. Cet ensemble de règles permet de réduire les obstacles au commerce international qui tiennent leur origine de la multiplicité et de la divergence des ordres juridiques nationaux considérée comme le « pire ennemi » des opérations commerciales internationales. Parce que le droit du commerce international « est un gigantesque puzzle qui s'est construit pièce par pièce, type de contrats par type de contrats »,285 il convenait de procéder à une unification et une harmonisation de ses règles matérielles. C'est justement le but dont s'était fixé l'UNIDROIT en élaborant les Principes relatifs aux contrats de commerce international. Ces règles générales propres à régir les contrats du commerce international « peuvent servir de modèle aux législateurs nationaux et

282 Alain. PLANTEY, « L'arbitrage dans le commerce international », AFDI, Vol 6, 1990, p 308

283 Cf. J. BURDA, op.cit. p 32

284 Voir, l'article 3§3 du Mémorandum d'accord

285 Cf. E. LOQUIN, « Les règles matérielles du commerce international et droit économique », Revue internationale de droit économique, 2010/ 1 Tome XXIV, 1, p 82

internationaux286 Depuis leur parution, les principes d'UNIDROIT ont été vite apprivoisés par les arbitres du commerce international dans le but d'acquérir une légitimité du droit applicable à leurs sentences.287 Ils permettent, par-delà de cette légitimité, d'établir une sécurité et une prévisibilité des relations commerciales internationales. En effet, en donnant la liberté aux parties de soumettre leur contrat à ces principes, les commerçants seront rassurés que, indépendamment du forum (marché), les règles uniformes de droit international privé mènent toujours à l'application des règles matérielles par les tribunaux.288 Ce qui va certainement provoquer une confiance des parties, qui vont sûrement s'engager dans des relations privilégiées de commerce avec les partenaires étatiques, basées sur le respect des règles et principes dont toute violation entrainera une sanction et un rétablissement sur les droits et obligations des uns des autres.

La rationalisation des rapports commerciaux internationaux dépend donc de la situation de confiance dans laquelle se trouvent les acteurs du commerce international. Mais, cette confiance à elle seule ne suffit pas ; il faut qu'il y'ait une renonciation à certaines pratiques commerciales. C'est à cette exigence que veut, en outre, répondre le règlement juridictionnel des conflits commerciaux internationaux.

PARAGRAPHE 2 : Par la renonciation à certaines pratiques commerciales

La résolution des litiges commerciaux internationaux a permis de constater l'abandon progressif de certaines pratiques compromettantes notées dans les relations commerciales internationales. Ainsi, nous pouvons relever une renonciation à l'unilatéralisme(A) d'une part, et d'autre part un abandon des pratiques anticoncurrentielles (B).

A) La renonciation à l'unilatéralisme

Le développement du commerce international repose essentiellement sur le respect des règles et principes fondateurs du système commercial international. Ce respect permettra, à l'avance, de récuser les pratiques fallacieuses pouvant compromettre les rapports commerciaux justes entre les parties n'ayant pas les mêmes moyens et niveaux de politique commerciale. La pratique qui consiste à prendre unilatéralement des mesures coercitives contre le non-respect des engagements contractuels s'inscrit dans cette logique. C'est la théorie de l'unilatéralisme. Celle-ci concerne l'ensemble des instruments de politique commerciale restrictifs mis en place à la seule volonté de l'Etat qui les met en oeuvre, administrés au niveau national et sans référence aux règles internationales.289

Dans le cadre de l'OMC, nous avons noté que système commercial repose essentiellement sur les principes du multilatéralisme. Les membres s'efforcent de se conformer aux orientations de l'institution, lesquelles prévoient la résolution de tous les différends relatifs au

286 Voir, le Préambule des Principes relatifs aux contrats du commerce international, UNIDROIT, Rome, 1994

287 Cf. Emmanuel. S. DARANKOUM, « L'application des principes d'Unidroit par les arbitres et les juges étatiques », RJT.2002.36, p 432

288 Voir, Peter. WINSHIP, « Private international law and the UN. Sales conventions », Cormell International law journal, 1988-487 cité par F. FERRARI, in « Le Champ d'application des principes pour les contrats internationaux élaborés par l'UNIDROIT », RIDC, Vol 47, n°4, 1995, p 987

289 Cf. Jean-Marc. SIROËN « L'unilatéralisme des Etats-Unis », AFRI, vol 1, 2000, p 571

non-respect des engagements inclus dans les Accords de Marrakech de manière à ce que la prévisibilité du système commercial international soit garantie.290 Justement, l'objectif de l'ORD est de servir, d'une part un cadre de règlement des différends commerciaux multilatéraux, et d'autre part un moyen de lutter contre les sanctions unilatérales prises à l'encontre d'un membre récalcitrant. Ainsi, les membres en conflits ne peuvent prétendre adopter des mesures de représailles sans son autorisation. C'est dire que l'unilatéralisme est banni dans les rapports commerciaux multilatéraux. Cette conception a été rappelée par les panels dans l'affaire des navires de commerce.291 Egalement, dans l'affaire section 301, le groupe spécial a pu remettre en cause la mesure législative américaine de 1974 qui permettait au Gouvernement américain de procéder unilatéralement à des mesures de rétorsion dès qu'il estimait qu'un membre avait concrètement violé les engagements et les règles du commerce multilatéral. Or, cette législation était en contre sens avec les règles prescrites dans les Accords de Marrakech et particulièrement dans le MARD. A cet effet, les panels ont considéré que l'article 23 paragraphe 1 du Mémorandum d'accord « impose à tous les Membres le «recours» au processus multilatéral défini dans le Mémorandum d'accord lorsqu'ils cherchent à obtenir réparation d'une incompatibilité au regard de l'OMC. Dans ces circonstances, les Membres doivent avoir recours au système de règlement des différends prévu dans le Mémorandum d'accord à l'exclusion de tout autre système, en particulier un système d'exécution unilatérale des droits et obligations au regard de l'OMC. Cette disposition, que l'on pourrait qualifier de «clause d'exclusivité en matière de règlement des différends», est un nouvel élément important des droits et obligations des Membres au titre du Mémorandum d'accord. »292 Toutefois, retenons que les Etats-Unis n'ont pas, par exemple, l'obligation formelle de supprimer les fameuses clauses 301 et super 301,293 ils auront juste celle consistant à informer et requérir l'autorisation de l'ORD avant de les mettre en oeuvre.

Autant que le développement des relations commerciales internationales nécessite une réelle volonté pour les acteurs de récuser certaines pratiques unilatéralistes, autant qu'il exige l'abandon des pratiques anticoncurrentielles.

290 Voir, l'article 23 du Mémorandum d'accord aux termes duquel « Lorsque des Membres chercheront à obtenir réparation en cas de violation d'obligations ou d'annulation ou de réduction d'avantages résultant des accords visés, ou d'entrave à la réalisation d'un objectif desdits accords, ils auront recours et se conformeront aux règles et procédures du présent mémorandum d'accord. »

291Voir, Affaire, Communautés européennes-Mesures affectant le commerce des navires, 2005.OMC.Doc.WT/DS301/R, Rapport du groupe spécial [Navires de commerce]. Dans cette affaire, il a été retenu que : « le Groupe spécial considère [...J que l'obligation d'avoir recours au Mémorandum d'accord, lorsque les Membres cherchent à obtenir réparation en cas de violation, couvre tout acte d'un Membre en réponse à ce qu'il considère comme une violation par un autre Membre d'une obligation dans le cadre de l'OMC par lequel le premier Membre tente unilatéralement de rétablir l'équilibre des droits et obligations en cherchant à obtenir le retrait de la mesure incompatible avec les règles de l'OMC, en cherchant à obtenir une compensation de cet autre Membre ou en suspendant des concessions ou des obligations résultant de l'Accord sur l'OMC en ce qui concerne ce Membre. »

292 Voir, l'affaire Etats-Unis-Articles 301 à 310 de la loi de 1974 sur le commerce extérieur, 1999, OMC.Doc.WT/DS152/R, Rapport du groupe spécial [Section 301]

293 Cf. Géraud. GUIBERT, « L'Organisation mondiale du commerce (OMC) : continuité, changement et incertitude », Politique étrangère n°3, 5ème année, 1994, p 814

B) L'abandon des pratiques anticoncurrentielles

Le commerce et la concurrence entretiennent des relations étroites, aussi bien au plan interne qu'au plan international. Au plan international, les pratiques déloyales peuvent faucher complètement l'équilibre des échanges et entrainer la désorganisation du marché mondial. Afin de pallier ce phénomène d'échange inégalitaire, le besoin s'est vite fait ressentir de mettre en place un dispositif juridique servant un encadrement de la pratique concurrentielle, mais aussi arsenal juridictionnel permettant de trancher les litiges qui en surviennent. C'est une exigence pour le développement du commerce international.

Déjà, retenons que l'arbitrage commercial international n'a pas joué un rôle important dans le domaine de la concurrence. C'est parce que, sur ce sujet, il est interdit aux arbitres de prononcer des injonctions ou amendes, même s'ils peuvent tirer des « des conséquences civiles d'un comportement jugé illicite au regard des règles d'ordre public pouvant être directement appliquées aux relations des parties en cause », aux entreprises coupables de pratiques anticoncurrentielles.294 Cette question relève de la compétence du juge communautaire.

Dans le cadre du commerce multilatéral, l'OMC tente de lutter, tant soit peu, contre les pratiques anticoncurrentielles qui peuvent fausser directement les relations commerciales entre les membres. Il faut dire que l'organisation repose essentiellement sur deux principes fondamentaux permettant de faciliter la libéralisation et la loyauté des échanges internationaux. Ils s'agissent du principe de clause de la nation la plus favorisée(CNPF) et celui de la clause du traitement national(CTN). Ces deux principes imposent la nondiscrimination entre les membres tout en interdisant des pratiques de dumping, de subventions et de restrictions quantitatives. L'ORD s'inscrit dans cette dynamique et son rôle à ce niveau est important dans la mesure où l'essentiel des différends porté devant lui constitue de pratiques déloyales commerciales. Ainsi, dans l'affaire Préférences tarifaires,295 l'Organe d'appel a dit que l'obligation CNPF était une pierre angulaire du GATT et l'un des piliers du système commercial de l'OMC. Egalement, dans l'affaire Loi de 2000 sur la compensation,296 il est considéré que le régime international du dumping et des mesures pour y faire face tel qu'il est posé pour le nouveau droit de l'OMC est exclusif de tout autre et un Etat ne serait pas fondé à prendre une mesure particulière en la matière si celle-ci se relevait incompatible avec l'Accord antidumping.

Sous le bénéfice de ces considérations, nous pouvons dire que le mécanisme de résolution juridictionnelle des conflits commerciaux internationaux est efficient. Cependant, il faut dire que tout mécanisme juridictionnel souffre de lacunes et celui-ci n'en constitue pas une

294 CA Paris, 19 mai 1993, Labinal, Rev.arb. 1993, p 645, note C. JARROSSON ; CA Paris, 14 octobre 1993, Aplix, Rev.arb, 1994, p 164, note C. JARROSSON

295 Affaire CE- Préférences tarifaires, OMC. Doc. WT/DS246/ R, Rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 101[Préférences tarifaires]

296 Affaire Etats-Unis-Loi de 2000 sur la compensation pour la continuation du dumping et le maintien de la subvention. OMC. Doc. 2003, WT/DS217/AB/R, Rapport de l'Organe d'appel [Loi de 2000 sur la compensation]

exception. Afin de rendre le mécanisme plus perfectible, il s'agit d'exposer ces différents manquements, pour mieux les appréhender, avant de songer à les pallier.

CHAPITRE II : UNE EFFICIENCE ALTEREE PAR CERTAINES DIFFICULTES

Les difficultés altérant le mécanisme de règlement juridictionnel des conflits commerciaux internationaux sont nombreuses. Mais, elles sont quasi-surmontables (Section 1), ce qui fait le mécanisme demeure tout à fait perfectible (Section 2).

SECTION 1 : Mais des difficultés quasi-surmontables

Il s'agit de voir successivement les lacunes de l'Organe de règlement des différends de l'OMC (Paragraphe 1) et celles de l'arbitrage commercial international (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : Les lacunes de l'ORD

Comme tout système juridictionnel, le système de règlement des différends de l'OMC est loin d'être sans vices. A l'heure actuelle, les critiques les plus farouches adressées à l'ORD sont d'abord son manque d'ouverture aux autres acteurs du commerce international, et ensuite son caractère plus ou moins défavorable aux pays en développement. A cela s'ajoute la lourdeur de ses procédures et ses sanctions relativement timides. C'est pourquoi, il est traité non seulement de discriminatoire(A) mais également d'insatisfaisant(B).

A) Un mécanisme traité de discriminatoire

Le mécanisme de résolution des conflits de l'OMC est traité de discriminatoire car il est très restreint aux seuls Etats. Les particuliers ne peuvent pas le saisir; ils y sont largement exclus(1). En outre, on a considéré qu'il enregistre une modeste participation des PVD(2).

1- Une large exclusion des particuliers

Aujourd'hui, il est incontestablement admis que les particuliers, qu'ils soient individus, ou personnes morales de droit privé (entreprises multinationales) ou ONG, ne cessent de jouer des rôles importants dans les négociations commerciales mondiales. Ils sont au début et la fin de ces négociations. A cet effet, Slaughter a fait remarquer que ces acteurs des relations internationales économiques, en particulier les individus, ne peuvent ou ne doivent être ignorés dans un tel système international puisqu' étant « les muscles du droit international qui soutient le développement et le renforcement du système297 Les Accords de Marrakech ont donné naissance à une organisation intergouvernementale touchant de larges et nombreux domaines relatifs au commerce avec, notamment l'inclusion des services, des droits de propriété intellectuelle et des investissements liés au commerce. Son vaste champ d'application implique directement ou indirectement des effets sur le développement, les droits des travailleurs, la santé publique ou encore l'environnement.298 C'est dire que les particuliers seront profondément affectés, en tant que éléments centraux du système

297 Cf. A. M. SLAUGHTER, « A new world order », in Ethics and international affaire, Vol 20 n°4 p 529

298 Cf. Julien. Wallet-HOUGET, « La participation des ONG au mécanisme de règlement des différends de l'OMC : Une perspective environnementale », RQDI, 2008, 18.2, p 131

économique mondial, par des mesures multilatérales d'ordre commercial. Toutefois, malgré leur position indéniable dans le système commercial multilatéral, ils ne sont pour autant admis à saisir directement l'ORD lorsqu'une mesure illicite prise par un membre leur affecte sérieusement.299 Or, ceux-ci sont les plus touchés des mesures défectueuses ; c'est donc une exigence légitime pour leur part de vouloir participer au mécanisme de règlement des différends de l'OMC, non pas à titre amicus curiae, mais en tant que parties ayant le plein pouvoir à saisir directement l'ORD pour faire valoir leurs droits. Cela va permettre de rendre le mécanisme beaucoup plus transparent, puisque ce sont eux qui connaissent mieux les contours des opérations commerciales internationales, ce sont eux aussi qui maitrisent mieux le degré d'impact de la violation. De surcroît, l'on a constaté que les particuliers ou leurs intérêts sont souvent mis en jeu dans certains différends soumis à l'ORD. Par exemple, dans l'affaire pellicules photographiques,300 ce qui était en jeu, en réalité, était un litige entre deux multinationales : Fuji et Kodak. Egalement, dans les affaires amiante, hormone, essences, l'intérêt des défenseurs de l'environnement ou celui des droits de l'Homme était plus que jamais mis en évidence. Retenons alors que même si ce nouveau mécanisme de règlement des différends commerciaux constitue l'une des grandes innovations opérées dans le système commercial multilatéral, il n'en reste pas qu'il est entaché de cette limite relative au refus de participation des personnes privées.301

Sous le bénéfice de ces considérations, nous pourrions dire que pour les réformes ultérieures du mécanisme de règlement des différends de l'OMC, l'accent devra être mis sur la question du droit des particuliers à saisir directement l'ORD lorsqu' un membre aura pris des mesures illicites leur faisant grief. En sus, il sera important de se pencher sur le problème de la faible participation des PVD.

2- Une modeste participation des PVD

Le mécanisme de résolution des conflits de l'OMC n'est pas facilement accessible pour la majeure partie des pays économiquement faibles. Le constat indique que ces pays saisissent timidement l'ORD. Par exemple, au cours de l'année de 2013, sur les vingt(20) nouvelles demandes de consultation adressées à l'ORD, les pays en développement n'ont déposé que les nefs (9).302 Evidemment, cette situation est aisément compréhensible pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, l'arsenal procédural établi au sien du mécanisme est carrément insupportable ou difficilement supportable aux pays en développement. La complexité des procédures, au-delà de leur mixité (politique et juridictionnelle), et se déroulant suivant des étapes longues, resterait une des causes de la modeste participation des pays en développement. Egalement, ces procédures sont extrêmement couteuses. En effet, hormis les honoraires des juristes, le coût des procédures provient des voyages à Genève-une ville très éloignée de la plupart

299 Voir, Jamal. BARAFI, Les acteurs privés dans le système de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce(OMC), thèse de doctorat en droit, Université de Strasbourg, Ecole Doctorale, Droit, Science politique et Histoire, 28 septembre 2013. p 11

300 L'affaire Japon-Mesures affectant les pellicules et papiers photographiques destinées aux consommateurs. 1998.OMC. Doc. WT/DS44/R, Rapport du Groupe spécial [Pellicules photographiques]

301 Voir, Aliou. NIANG, op.cit. p 276

302 Consulter le Rapport annuel, OMC, 2014, p 88, disponible sur le site, www.wto.org /différends.

d'entre eux-pour les audiences devant l'ORD. Ces voyages peuvent s'élever à des sommes très importantes si bien que les pays pauvres se trouveront presque dans l'impossibilité de les supporter.

En outre, la modeste participation des pays moins avancés (PMA) au mécanisme de règlement des différends de l'OMC pourrait s'expliquer par leur nombre limité au sien de l'Organisation et leur volume faible dans le commerce mondial. En fait, ces pays contribuent environ 1% du volume du commerce mondial. Ce faible volume pourrait être un facteur d'un faible contentieux commercial, par conséquent peu de demandes devant l'ORD. M. Canal-Forgues est éloquent à ce point lorsqu'il soutient que : « c'est certainement le développement de l'activité commerciale internationale des pays qui déterminera en grande partie l'accroissement éventuelle de leur participation au mécanisme de règlement des différends. Celle-ci sera alors le reflet bienvenu de cette activité accrue, plutôt qu'un objectif à poursuivre en soi. »303 Pour s'en convaincre, il suffit de prendre l'exemple de leur participation au mécanisme au cours de l'année 2005. En effet, en 2005, seul un parmi eux (à savoir le Bengladesh) avait fait une demande devant l'ORD, à la différence des pays développés comme les Etats-Unis, la Communauté européenne, le Canada et le Japon qui sont les plus actifs au sein du mécanisme. Cependant, ils intervenaient comme tierces parties dans certaines affaires portant sur des matières commerciales qui leur concernaient, et qui touchaient généralement certains produits comme le sucre, ou la banane, ou les crevettes ou encore le coton.304

En fin, cette modeste participation pourrait provenir de leur carence en juristes spécialisés en matière de commerce international. Généralement, les PED ne disposent pratiquement pas de plateaux juridiques animés par des personnalités chevronnées en matière de politiques commerciales internationales ; ce qui fait qu'ils n'oseraient pas, même si appuyés par un expert juridique mis à leur disposition par le SG de l'OMC, se frotter avec les pays développés. Ces « barons » de l'OMC disposent de représentation de juristes plus actifs que ceux des pays en voie de développement. Par exemple, les Etats-Unis disposent d'une vingtaine d'avocats spécialisés dans les questions de commerce international tandis que l'Union européenne dispose un service juridique spécialisé pour les affaires de l'OMC.305

Nonobstant ses avancées importantes dans la prévisibilité du système commercial international, le mécanisme de règlement des conflits de l'OMC est taxé de discriminatoire. Egalement, d'aucuns le critiquent d'insatisfaisant.

303 Cf. E. Canal-FORGUES, L'institution de la conciliation dans le cadre du GATT. Contribution à l'étude de la structure d'un mécanisme de règlement des différends. Bruxelles, Bruylant, 1993, p 8

304 Par exemple, le Madagascar a été tierce partie dans quatre affaires(4), la Tanzanie, le République dominicaine et le Malawi dans trois(3) affaires, le Sénégal dans deux(2) affaires alors que le Tchad et le Bénin ont été tierces parties seulement dans une(1) affaire chacun d'eux.

305 Voir, Jamal. MACHROUH, Justice et développement selon l'Organisation mondiale du commerce, Harmattan, Paris, 2008, p 273

B) Un mécanisme traité d'insatisfaisant

L'ORD est certes un point focal du système de l'OMC. Cependant, pour des manquements inhérents à tout système juridictionnel, il est aperçu, par certains, comme un mécanisme de règlement des différends commerciaux internationaux qui est insatisfaisant. Parce que simplement ses procédures sont lourdes (1) et ses sanctions sont relativement timides (2).

1- Des procédures lourdes

Avec la rapidité des opérations commerciales internationales, il est indispensable que les conflits relatifs à ces dites opérations soient résolues de la manière la plus efficace et la plus rapide afin que l'ordre commercial international se rétablisse le plus rapidement possible. Le système de règlement des différends de l'OMC se veut être efficace et efficient, encore faudrait-il qu'il réponde à cette exigence de rapidité qui est intimement liée aux transactions internationales que connait le monde du 21èm Siècle. Ce monde, épousé fortement par le développement intenable des Nouvelles Techniques de l'Information et de la Communication(NTC), ne cesse d'infliger aux acteurs du commerce international, en particulier les Etats, de nouveaux défis et contraintes d'ordre économique, politique et surtout social.

L'organe de règlement des différends de l'OMC est réputé lourd en procédure. Il est vrai que le système vise à solutionner les conflits entre les membres de manière équitable et efficiente, mais les procédures sont inscrites dans des phases trop longues à tel point qu'il laisserait une marge de doute sur son efficacité surtout dans le contexte où le commerce multilatéral est investi de plusieurs paramètres exigeant sa rapidité. Les procédures de l'ORD peuvent s'étaler, de la demande des consultations jusqu'à la phase de mise en oeuvre définitive des recommandations, sur une durée minimale de 425 jours et une durée maximale de 670 jours. C'est qui fait que le mécanisme se révèle très compliqué et moins avantageux pour les pays en faible situation économique. Justement, si ceux-ci sont victimes des irrégularités commises par un autre membre, il leur serait très difficile d'attendre toute cette durée, au cours de laquelle, probablement, la mesure illicite continuerait de les affecter concrètement, pour qu'ils soient enfin autorisés à prendre des mesures de compensation et éventuellement recourir à des représailles (restrictions commerciales ou mesures de rétorsion au sens du droit de l'OMC) à l'égard du membre responsable. Il s'y ajoute également l'absence presque de procédures d'urgences.306 En effet, nous n'y retrouvons pas de procédure de référé et celle de sursis, que nous avons l'habitude de voir généralement dans les procédures judiciaires de règlement des différends à l'échelle nationale. Nous notons simplement une disposition laconique de Mémorandum d'accord qui prévoit qu'en cas « d'urgence, y compris dans les cas où il s'agit de biens périssables, les parties au différend, les groupes spéciaux, l'Organe d'appel ne ménageront aucun effort pour accélérer la procédure dans toute la mesure du possible307 Cette disposition ne détermine aucunement la

306 Voir, Jean-Yves DURANCE, « Réforme de l'Organe de règlement des différends (ORD) de l'OMC, Propositions de la CCIP », Rapport de la commission du commerce international de la Chambre de commerce et industrie de Paris, adopté le 10 avril 2003, p 19

307 Article 4§9 du Mémorandum d'accord

308 Voir, Frank. PETITEVILLE, « L'hégémonie est-elle soluble dans le multilatéralisme ? Le cas de l'OMC », Critique internationale n°22, janvier 2004 p 75

nature de la procédure d'urgence et laisse cette faculté à la volonté des parties, et le cas échéant à celle de groupes spéciaux et de l'Organe d'appel. Or, cette détermination aurait permis de rétablir au plus vite le membre victime dans ses droits d'une part, et d'autre part interrompre les effets de la mesure défectueuse, en attendant que le litige soit tranché définitivement.

Largement critiqué d'insatisfaisant pour la longueur de ses procédures, le mécanisme de règlement des différends de l'OMC est encore blâmé pour ses sanctions relativement timides.

2- Des sanctions relativement timides

Ce serait aussi une manière de se verser dans une naïveté évidente que de prétendre que le multilatéralisme de l'OMC ignore complétement les inégalités de puissances et d'influences entre ses membres.308 Et, l'ORD n'en constitue pas moins une exception. Il faut rappeler tout de même que le but initial du mécanisme de règlement des différends de l'OMC, tel que défini à l'article 3 paragraphe 7 du Mémorandum d'accord, est, tout d'abord, « d'arriver à une solution positive des différends », tout en préférant, en outre, « une solution mutuellement acceptable pour les parties et compatible avec les accords visés ». Ce souci fait que le mécanisme procède de façon tout fait timide par rapport à des sanctions qu'il aurait prises à l'égard d'un membre qui avait violé les règles de l'OMC.

Dans un premier temps, la solution envisageable lorsqu'un Etat viole un accord commercial, est de l'inviter à « l'octroi d'une compensation » à la faveur de l'Etat membre lésé ; laquelle solution, il faut le rappeler, n'est appliquée que si le retrait immédiat de la mesure incompatible est irréalisable. Toutefois, il importe de signaler que les mesures de compensation, dans l'état actuel du droit de l'ORD, ne sont pas à caractère financier direct. On pourrait dire qu'elles sont en nature car consistant plutôt, en pratique, à des baisses sur les droits de douane ou à des avantages frappant l'exportation d'un produit déterminé. Ce type de sanction peut s'avérer inefficace à l'endroit des pays en développement, qui exportent rarement, puisque leur part dans le volume du commerce mondial est extrêmement faible, par conséquent leur part dans les exportations est presque nulle. Ainsi, ils trouveraient moins avantageuses les mesures de compensations.

Dans un second temps, la sanction qui est prévue par le Mémorandum d'accord, lorsque les négociations pour arriver à des compensations mutuellement acceptables sont vaines, est de permettre à la partie plaignante de procéder à des contre-mesures ou mesures de rétorsion. Concrètement, le membre a la possibilité de suspendre ses concessions ou autres obligations, conformément aux orientations de l'ORD, au désavantage du membre incriminé. Cette sanction se manifeste, dans la pratique, inefficiente. Evidemment, dans le cas où le différend oppose un membre, partie du groupe des PED, et un autre membre appartenant à celui que l'on dénomme abusivement les « princes de l'OMC », l'impact des contre-mesures ne serait tout bonnement qu'illusoire ; c'est parce que le poids économique est largement différent. Par exemple, en quoi l'Etat du Sénégal gagnerait à suspendre ses concessions contre les Etats-

Unis d'Amérique ou contre le Japon, si ce n'était qu'une perte évidente. Par contre, on pourrait sentir l'impact de telles sanctions lorsqu'on était en présence des parties ayant approximativement le même pouvoir économique. Il apparait donc clairement que les mesures de rétorsion ne peuvent être efficientes que lorsque les Etats membres parties au différend sont sur un niveau de développement économique plus ou moins identique. Qui plus est, on ne doute point sur la dépendance chronique des marchés des PED à ceux des pays développés, si bien qu'il s'est avéré presque impossible pour les premiers d'appliquer des contre-mesures à la défaveur des seconds, qui par ailleurs demeure leurs partenaires privilégiés( souvent traditionnels à l'image des pays sud-américains avec les Etats-Unis ; les pays asiatiques avec le Japon ; les pays africains avec l'Union européenne) dans les relations commerciales internationales.

Au regard de tous ces éléments sus mentionnés faisant compromettre l'efficience du mécanisme de règlement des différends de l'OMC, il est indispensable et exigeant, pour un avenir radieux de l'ORD, de se pencher sur la question des sanctions en vue de leur amélioration. Ce qui permettrait de rendre le mécanisme beaucoup plus crédible.

Après avoir soulevé, de façon non exhaustive, les lacunes de l'ORD, il s'agit de voir celles du système d'arbitrage qui, elles aussi, n'ont pas manqué de trahir l'efficience du mécanisme de règlement juridictionnel des différends commerciaux internationaux.

PARAGRAPHE 2 Les faiblesses de l'arbitrage commercial international

Malgré ses éloges dans le règlement des différends commerciaux internationaux, l'arbitrage commercial international n'échappe pas, pour autant, à des reproches. Il est reproché notamment au fait que les PVD s'en méfient constamment(A) et que l'exécution de la sentence demeure parfois problématique(B).

A) La méfiance constante des PVD

L'arbitrage commercial international, même s'il est le mode privilégié de règlement des différends entre Etats et opérateurs privés, a suscité une méfiance de la part des pays du Tiers-Monde. Cette attitude date de très longtemps. En fait, ce sont les pays latino-américains qui sont les premiers à adopter des législations hostiles à l'arbitrage. D'autre pays du Moyen-Orient leur ont emboité le pas en interdisant le recours à l'arbitrage pour le règlement de certains litiges portant sur l'exploitation du pétrole. Les pays africains ne sont en reste. Pour eux, l'arbitrage constitue un moyen permettant aux entreprises étrangères d'échapper aux procédures administratives et aux juridictions nationales de l'Etat contractant. Ils considèrent, en outre, que l'arbitrage favorise plus la société étrangère que l'Etat. Il est vrai que, lorsque le différend est porté devant l'arbitre, les pays du Tiers-Monde y trouvent une sorte de limitation de leur souveraineté309 et suspectent davantage un « impérialisme économique déguisé». Bien sûr, nous pouvons leur concéder cette attitude, étant entendu que devant l'arbitre, ils ne

309 Sur ce point, le Doyen A. MAHIOU fait remarquer qu' « à force de déduction abusive, la stratégie de délocalisation (de la convention) a fini par susciter une réaction opposée, tout aussi abusive, voyant dans toute la clause compromissoire un piège pour éviter l'emprise du droit local et tenir en échec indirectement la souveraineté des Etats.», cité par F. CAMARA, op.cit. p 10

peuvent ni prévaloir leurs législations, ni récuser la possibilité pour celui-ci de se référer aux principes généraux de la lex mercatum. A priori extérieurs aux coutumes et principes généraux du commerce international, ces pays auront la « psychose indélébile » que la sentence arbitral sera forcément rendue à leur défaveur. De ce fait, ils pourraient montrer une certaine réticence quant à l'exécution de la sentence.

B) La problématique de l'exécution de la sentence arbitrale

Dès lors que les parties acceptent de trancher leur litige devant un tiers investi de pouvoir juridictionnel de régler ledit litige, il va s'en dire qu'elles acceptent sa décision et s'auto-forcent de l'exécuter de bonne foi. C'est dire simplement que la partie perdante doit accepter la décision de celui qu'elle a chargé de trancher le litige et l'exécuter spontanément. Cependant, il est fort évident qu'il n'en va pas forcement ainsi. Justement, dans les contrats d'Etats, l'exécution et la reconnaissance de la sentence arbitrale dans l'Etat contractant peuvent s'avérer délicate. En effet, il n'est automatiquement pas sûr que l'Etat perdant veille accepter, sans réticence, d'exécuter volontairement la sentence sans faire recours. Il n'est pas non plus facile de trouver un juge indépendant du pouvoir politique à tel point, lorsque cet Etat fait prévaloir son immunité, de réfuter certains moyens au nom de la force juridictionnelle de la sentence.310 L'exécution de la sentence arbitrale est donc heurtée par un certain nombre de manoeuvres dilatoires et non courtoises de la part du plaignant perdant dans le but de refuser l'exequatur. A titre d'exemple, dans une affaire qui l'opposait à la Société Ouest-Africaine de Bétons Industriels(SOABI) le gouvernement du Sénégal semblait adopter des démarches consistant à refuser l'exécution de la sentence arbitrale de CIRDI311 qui l'avait condamné à verser des sommes, non moins intéressantes, à ladite société pour des dommages et intérêts à la suite de résiliation unilatérale de leur contrat. En l'espèce, le Tribunal de Grande Instance de Paris avait accordé, par une ordonnance en date du 14 novembre 1988, l'exequatur de la sentence du tribunal arbitral de CIRDI du 25 février 1988. Réticent, le Sénégal eut saisi la Cour d'Appel de Paris pour voir cette ordonnance annulée, au motif que celle-ci avait violé le principe d'immunité dont il pouvait se faire valoir. En suivant son raisonnement en vertu de l'article 502 alinéa 5 du NCPC français, la CA de Paris infirma l'ordonnance attaquée en considérant que « l'exécution de la sentence en France heurte l'ordre public international en ce qu'il serait contraire à ce principe d'immunité. » 312 Cet arrêt avait été cependant cassé par la Cour de Cassation qui récusait ce moyen, soutenant que le Sénégal, en acceptant de soumettre son différend à la juridiction arbitrale, avait accepté que la sentence qui en serait issue puisse être revêtue de l'exequatur, lequel ne « constitue

310 Voir, la CCI de Paris, « le Droit et les relations commerciales entre la France et la Taïwan », Acte de Colloque franco-taiwanais sur le Droit et les relations commerciales entre la France et la Taïwan , RIDC. Vol 51 n°3, juillet-septembre 1996, pp 663-671, disponible sur le site www.persee.fr, vu le 7 juillet 2014 à 11h 40mn

311 Voir CIRDI, Sentence du 25 février 1988, Société Ouest Africaine des Bétons Industriels(SOABI) c/ la République du Sénégal, J.D.I. 1990

312 CA de Paris, 5 décembre 1989, Etat du Sénégal c/ SOABI

313 Cass. 1ème. civ. 11 juin 1991, SOABI c/ Etat du Sénégal. Dalloz. 1991. IR. 183. Pour un commentaire, voir, Ibrahima. K. DIALLO, op.cit. p 198 et s

pas, en lui-même, un acte d'exécution à provoquer l'immunité d'exécution de l'Etat considéré. »313

Cette attitude de l'Etat sénégalais montre combien l'exécution des sentences arbitrales peut être délicate dans les rapports entre un Etat et un opérateur privé étranger. Mais, il faut dire que cela ne retire en rien de ce que l'arbitrage a pu jouer dans le développement du commerce international.

Si ces difficultés sus mentionnées entachent l'efficience du mécanisme de règlement juridictionnel des litiges commerciaux internationaux, il faut reconnaitre qu'elles peuvent être surmontées par certaines améliorations. Ce qui fait que le mécanisme reste entièrement perfectible.

SECTION 2 : Un mécanisme de règlement des différends perfectible

Le mécanisme de résolution des conflits commerciaux internationaux est certes souffrant de quelques maladresses à travers lesquelles il a fait l'objet de moult critiques, trahissant en quelque sorte son efficience. Nonobstant ces critiques, le mécanisme ne saurait être retiré de toute perfectibilité. En effet, concernant l'ORD, malgré ses avancés notoires dans la sécurité et la prévisibilité des relations commerciales multilatérales, nous avons vu que son efficience a été maladroitement altérée par la pratique des Etats. Ce qui impose des changements indispensables à l'avenir du mécanisme (Paragraphe 1). Relativement à l'arbitrage commercial international, nous avons également constaté que, malgré son importance capitale dans le commerce international, le mécanisme traine quelques manquements par rapport à la procédure et à la sentence. Ces manquements doivent être remédiés afin de le rendre beaucoup plus opérant (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 Des changements indispensables à l'avenir de l'ORD

Nous savons que les principaux manquements de l'ORD, faisant par ailleurs le fondement de nombreuses critiques qui lui sont adressées, tournent essentiellement autour de ses procédures et ses sanctions. Également, il est reproché de son manque de transparence. Ce qui nous permet de proposer, pour un lendemain meilleur du mécanisme, en plus d'un renforcement de sa transparence(B), une amélioration des dites procédures et sanctions(A).

A) L'amélioration des procédures et des sanctions

Les plus vives critiques formulées à l'égard du mécanisme de règlement des litiges de l'OMC portent principalement sur les règles de procédure et sur les sanctions. Il demeure donc nécessaire d'apporter quelques esquisses de solutions qui nous paraitraient importantes pour un avenir plus prometteur du mécanisme.

Par rapport aux procédures, nous avons relevé tout d'abord une lourdeur dans leur mise en oeuvre qui fait que certains membres n'arrivent pas ou arrivent difficilement à saisir l'ORD. En effet, les membres faisant parties des PED éprouvent de grosses difficultés pour saisir

l'ORD lié principalement à des formalités procédurales tout à fait pénibles pour eux, si bien qu'il préfèrent, le plus souvent, procéder à des négociations politiques plutôt que d'utiliser le mécanisme. Ainsi, par exemple dans l'affaire sur les subventions américaine au coton,314 les pays africains, à l'image du Benin, du Burkina Faso, du Mali et du Tchad qui, malgré les conséquences désastreuses de la mesure américaine sur leurs économies, ont choisi la voie diplomatique pour régler ce problème, en inscrivant la question du coton à l'agenda du cycle de négociation de Hong Kong en décembre 2005, contrairement au Brésil qui préférait porter l'affaire devant l'ORD. Cette attitude des pays africains est aisément compréhensible parce qu'ils ne peuvent supporter les conséquences pécuniaires découlant des procédures devant l'ORD. Il faut donc faire en sorte que ces procédures soient allégées de façon drastique afin que les pays économiquement faibles puissent pleinement participer à son rayonnement. Il faut dire que l'étendue des procédures telle qu'elle se présente dans le mécanisme n'est plus concevable dans ce « nouvel ordre économique mondial » où les transactions internationales exigent la rapidité et l'efficacité dans la résolution des conflits. D'autant plus qu'avec le développement des NTIC, les pertes de temps relatives au délai de travail devant les groupes spéciaux et à l'Organe d'appel pourraient être surmontées. Il serait efficace d'utiliser par exemple des « vidéo-audiences » pour permettre aux PED de ne plus se déplacer à Genève pour les besoins de l'audience. Il incombe ainsi à l'OMC de voir, à l'avenir, comment utiliser ces moyens technologiques afin de remédier les lacunes procédurales du mécanisme. Ensuite, la composition des groupes spéciaux a été fortement critiquée par rapport à son caractère non permanent. Ainsi, certains membres de l'OMC, notamment les Communautés Européennes, ont proposé l'établissement d'un organe permanent des groupes spéciaux.315Alors que, d'autres proposent un groupe spécial combinant des membres ad hoc choisis pour leur expertise particulière et des membres professionnels à plein temps, comme dans le cas de certains tribunaux commerciaux nationaux.316 Même si cette proposition n'a pu être retenue, il importe de noter que le mécanisme serait beaucoup plus performent s'il disposait un groupe spécial permanent. Cela permettrait de trouver des experts qui auront, avec le temps, en plus de leurs connaissances avérées en droit du commerce international, des aptitudes supplémentaires leur assurant des techniques scientifiques nécessaires pour mesurer la pratique des Etats dans le cadre des relations commerciales. En outre, le système de rejet de l'adoption de rapports des panels ou de l'Organe d'appel tel qu'il se présente dans le mécanisme n'est plus adapté à cette nouvelle ère des organisations internationales. Aujourd'hui, le système de consensus, quelle que soit sa nature, est de plus en plus mise en seconde plan au profit du système majoritaire. Rares sont les organisations internationales qui continuent de miser sur le système de consensus. Nous considérons à cet effet que le consensus négatif, nonobstant ses avancées notoires, doit être remplacé par le système majoritaire. Ce qui conduira à des décisions beaucoup plus transparentes que l'on a avec le consensus négatif. En fin, nous avons relevé l'absence des procédures d'urgence, notamment la procédure de référé ou celle de sursis, qui sont inséparables des juridictions étatiques. Nous

314 Voir, affaire Etats-Unis-Subventions concernant le coton Upland, supra, note 129

315 Voir, la proposition de CE lors des négociations de Cancun, 5ème conférence de l'OMC, septembre 2003, Doc. TN/DS/W/17

316 Voir, CCI, Déclaration de politique général : Propositions d'ICC en vue d'améliorer le Mémorandum d'accord sur le règlement des différends de l'OMC. Doc.103/235 rev 2 final FR www.iccwbo.org

estimons, à cet effet, qu'ils ont leur place dans le mécanisme de règlement des différends de l'OMC. Il faut songer donc à les introduire dans le mécanisme, ce qui va permettre de réduire graduellement les effets compromettants relatifs aux longues procédures.

Concernant les sanctions, il a été retenu une timidité dans leur formulation. Ce qu'il faut remarquer c'est que, même si les décisions de l'ORD sont efficaces dans une certaine mesure, il demeure essentiel d'apporter quelques améliorations aux mesures « coercitives » découlant desdites décisions. D'abord, les mesures de compensation sont, dans la pratique, moins opportunes qu'elles devraient l'être dans le commerce multilatéral. En effet, celles-ci sont aperçues défavorables aux PED, lesquels préconisent légitimement l'établissement de compensation financière ou monétaire. Il faut rappeler que la compensation est jusqu'ici non financière. Or, nombreuses juridictions, notamment celles étatiques (surtout dans certains procès des juridictions ordinaires), prévoient des moyens de compensation monétaire que la partie incriminée doit verser à la partie victime. L'ORD serait beaucoup plus attractive aux PED si ce type de compensation était mise en oeuvre. Il serait donc important, pour une légitimité de ses décisions et recommandations, de revenir sur cette question au cours des prochaines négociations de l'OMC. Ensuite, il a été soulevé une certaine léthargie des mesures de rétorsion qui nécessitait des améliorations évidentes. Cette question a été soulevée lors des négociations de Cancun en septembre 2003. En effet certains pays, notamment ceux dits en voie de développement, ont proposé l'instauration de mesure de « rétorsion collective ». Cette proposition part d'un constat selon lequel le mécanisme d'exécution des mesures de rétorsion est inopportun dans une certaine mesure. Pour les PED, comme nous l'avons déjà rappelé, les mesures de rétorsion qu'ils pourraient prendre contre un pays développé ne pouvaient être efficientes dans la mesure où leur faible volume dans les échanges multilatéraux les limitent forcement dans une perspective d'adoption des contre-mesures efficaces à l'encontre les Etats puissants. C'est la raison pour laquelle ils estiment que le mécanisme doive introduire un principe de « responsabilité collective »317 en vertu duquel tous les membres de l'organisation auront le droit d'appliquer collectivement des mesures de rétorsion contre l'Etat sanctionné à retirer les mesures illicites. Cela allait permettre, d'une part de remédier les manquements dont souffre le traitement différencié accordé aux PED et, d'autre part de limiter les rapports de force dans l'application des recommandations de l'ORD.

Par ailleurs, ces éventuelles améliorations doivent être conjuguées avec le renforcement de la transparence que le mécanisme ne peut saper.

317 Ce principe aurait permis, à la lecture littérale des termes de l'article 49 de la Charte des Nations-Unies, de donner aux membres le droit d'appliquer les sanctions prévues par l'OMC de façon collective afin d'inciter le membre incriminé à se conformer aux décisions de l'ORD. Il sera ainsi contraint psychologiquement à retirer ses mesures compromettantes dans les délais impartis, bien sûr par peur d'être sanctionné collectivement. Voir, la proposition du Groupe africain, OMC.Doc TN/DS/W/92 du 5 mars 2008. Selon cette proposition « Lorsqu'il aura été démontré que la suspension de concessions ou d'autres obligations aurait des conséquences négatives pour l'économie d'un Membre qui est un pays en développement ou un pays moins avancé, l'ORD pourra, sur demande, autoriser un Membre ou un groupe de Membres à suspendre des concessions pour le compte du Membre affecté. »

B) Le renforcement de transparence

Comme le prétend Michael Laidhold, la transparence « est un aspect important de tout système international, car un ensemble de règles claires détermine la manière dont le système va fonctionner et crée la confiance de la part des utilisateurs du système. »318 Dans le cadre de l'OMC où les mesures prises par les membres ont forcément des effets sur leurs ressortissants, laisser les Etats membres à eux seuls régler leurs différends dans une instance récusant complètement les particuliers ne peut s'avérer que moins transparent. En effet, le système de règlement des différends de l'OMC ne peut être saisi directement ni par les ONG, ni par les multinationales, encore moins par les citoyens. Or, ce sont eux qui subissent généralement les effets désastreux des mesures incompatibles avec les accords de Marrakech. Egalement, ce sont eux qui maitrisent le plus l'impact des mesures illicites sur le marché mondial. Aujourd'hui, une grande partie des observateurs milite pour l'ouverture de l'ORD aux autres acteurs du commerce international. Nous estimons à cet effet que le mécanisme de règlement des différends de l'OMC ne peut être transparent que si l'on admet une participation plus importante des personnes privées. Si tant est que leur rôle dans le mécanisme soit accepté, le MARD doit être révisé dans le but d'y une introduire des dispositions habilitant les particuliers à saisir directement les organes de l'ORD. Constituant le « tendon d'Achille » du système économique international, il va s'en dire que les particuliers doivent être admis dans toutes les juridictions internationales en charge de trancher les différends en matière économique. Ce qui, à coup sûr, évitera la protection diplomatique derrière laquelle les grandes firmes multinationales pourraient se réfugier pour faire valoir leurs droits devant les juridictions internationales. Bien attendu, cette question ne peut être mise en considération que si les Etats développés en fassent preuve de volonté politique car, sans nous verser dans des considérations subjectivistes, ce sont eux qui ont le pouvoir de changer la destinée du système de règlement des différends de l'OMC.

Après avoir esquissé quelques solutions pouvant être apportées aux lacunes du mécanisme de règlement des différends de l'OMC, il s'agit de voir ce qu'il faut améliorer dans l'arbitrage commercial international.

PARAGRAPHE 2 : Des améliorations envisageables en matière d'arbitrage commercial international

En premier lieu, ce qui est constaté sur le système d'arbitrage commercial international, c'est son coût très élevé. En second lieu, l'arbitrage est limité de son efficience par la problématique de l'exéquatur. Il faut donc revenir sur la rationalisation du coût des procédures(A) d'une part et d'autre part sur l'enlèvement de l'exéquatur(B).

A) La rationalisation du coût de l'arbitrage

L'arbitrage commercial international a, sans aucun doute, eu des sucés réels dans le mécanisme de règlement des différends relatifs aux échanges internationaux. Nonobstant ce

318 Cf. M. LAIDHOLD, « Private Party Access to the WTO : Do Recent Developments in International Trade Dispute Resolution Really Give Private Organization a Voice in the WTO ? », cité par J. Wallet-HOUGET, op.cit. p 133

319 Article 37 du Règlement d'arbitrage de la CCI ; article 28 du Règlement d'arbitrage du CIRDI ; article 46 du Règlement d'arbitrage de la CCIAD

rayonnement, il est souvent critiqué par rapport à son coût jugé trop excessif. Evidemment, en plus des versements relatifs aux frais administratifs du tribunal arbitral, les parties doivent supporter les honoraires des arbitres et ceux des avocats.

Remarquons d'emblée que les honoraires d'avocats représentent généralement la plus grande partie des coûts de la procédure devant les tribunaux arbitraux. Il est vrai que trouver des avocats pourvus de connaissances avérées en matière de commerce international n'est pas une chose aisée en soi, et les rares qui en sont pourvues réclament davantage des honoraires très élevés. Aussi, il faut signaler que les coûts sont dépendants de la complexité du litige mais aussi de la manière dont la procédure est conduite et de la longueur de celle-ci. Généralement, dans le système d'arbitrage commercial international et particulièrement celui institué par un organisme particulier (arbitrage institutionnel), les parties éprouvent des difficultés certaines par rapport aux frais de la procédure. En plus du paiement des honoraires des arbitres, les parties doivent également supporter les frais administratifs du centre d'arbitrage et d'autres services fournis, notamment la location de la salle d'audience.319 Il s'y ajoute également que les parties doivent satisfaire certaines garanties procédurales avant que le centre arbitral ne tranche le différend au fond. Ce sont les mesures provisoires ou conservatoires. Moult tribunaux arbitraux sont presque toujours habilités, que ce soit dans la convention ou dans le règlement arbitral, à ordonner des mesures provisoires ou conservatoires avant tout examen au fond du litige.

Sous le bénéfice de ces considérations, il faut que l'on daigne procéder à la rationalisation de ce coût, en essayant de réduire certains frais relatifs aux services d'audience. Par exemple, nous songeons à ce que la location de la salle d'audience puisse être surmontée dans la procédure d'arbitrage, dans la mesure où il serait possible de tenir des audiences via l'Internet. De ce fait, les parties ne se seront plus « angoissées » par le paiement des frais de location de la salle d'audience et, peut-être même, autres frais découlant des déplacements des avocats. Pour cela, il va falloir contextualiser les législations relatives à l'arbitrage commercial international dans la perspective d'y introduire la possibilité de tenir les audiences à distance par le biais de ce que certains appellent le « cybertribunal ». Parce que le commerce électronique occupe une place non négligeable dans le système commercial international au cours notre Siècle, l'arbitrage commercial international ne saurait ignorer ces moyens technologiques qui peuvent apporter un surplus à l'efficacité et à l'efficience du règlement des différends internationaux.

Outre son coût jugé élevé, le mécanisme d'arbitrage commercial international pourrait être critiqué par rapport à l'exécution de la sentence arbitrale, de laquelle nous préconisons l'enlèvement.

B) L'enlèvement du bouclier de l'exequatur

A priori, on pourrait logiquement admettre que les sentences arbitrales étrangères eussent reçu une force exécutoire dès qu'elles avaient étés rendues. Cependant, une telle hypothèse

risque de ne trouver aucun écho favorable. En fait, bien que beaucoup de pays acceptent le système d'arbitrage commercial international et ratifient la Convention de New York du 10 décembre 1958 sur la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères, il n'en reste pas moins que ceux-ci refusent généralement d'avaliser les sentences arbitrales étrangères sans le moindre contrôle ; ceci est également vrai pour les jugements étrangers d'origine étatique.320 Cette situation est critiquable à deux points de vue.

D'abord, nous estimons qu'à l'aube de la « mondialisation du droit » où la coopération judiciaire internationale est plus que jamais évidente, l'exécution forcée des sentences arbitrales étrangères ne devrait plus être subordonnée à la vérification du juge étatique. S'il est incontestablement admis que l'arbitre est investi de pouvoir juridictionnel et que sa sentence n'est susceptible ni d'opposition, ni d'appel encore moins de pourvoir en cassation,321 alors serait-il beaucoup plus légitime qu'il donne lui-même la force exécutoire à sa sentence, et que les parties y soumettent automatiquement comme cela se fait devant la procédure judiciaire. Cela éviterait à la partie gagnante (c'est souvent l'opérateur économique étranger) de subir des pertes pécuniaires résultant d'un pourvoi au cas où il y'aurait refus d'exéquatur. En outre, si nous ne réfutons pas le principe selon lequel l'arbitre a la compétence de déterminer sa propre compétence,322 on aurait dû, par parallélisme, accepter la force exécutoire de ses décisions.

De plus, il est constaté que dans nombreux pays qui nécessitent plus le concours des investisseurs étrangers, le système juridique et judicaire est défaillant, sinon il garantit peu un environnement favorable des affaires. Il est vrai donc qu'investir dans ces pays relève d'un risque réel. C'est pourquoi, les investisseurs étrangers, en concluant avec l'Etat d'accueil une convention en vertu de laquelle ils soumettraient leurs litiges à l'arbitre, entendaient combler ce risque. Et comme dit A. Polo : « investir est déjà en soi un risque, même s'il est calculé ; s'il faut doubler ce risque premier inéluctable de celui d'un système juridique fluctuant, ondoyant et insaisissable, il n'y a pas beaucoup d'espoir de susciter l'attrait des investisseurs. »323 Partant de là, nous estimons qu'il faille donner à ce tiers, auquel les parties ont porté leur différend, un pouvoir juridictionnel lui permettant, non seulement de donner une force obligatoire à sa sentence mais également d'imposer l'exécution forcée de celle-ci sans recours au juge national.

Eu égard à ces précisions, même si toutefois nous sommes convaincus que l'arbitrage est de nature contractuelle et juridictionnelle,324 nous militons pour un enlèvement total ou partiel

320 Voir, Jean-Yado. POE, op.cit. p 166

321 Article 25 de l'Acte Uniforme de l'OHADA sur l'arbitrage

322 Article 41 alinéa 1 du Règlement d'arbitrage de CIRDI (nouveau), en vigueur 10 avril 2006 ; P. MAYER, « L'autonomie de l'arbitre international dans l'appréciation de sa propre compétence », R.C.A.D.I 1989, p 430

323 Aregba. POLO, « L'OHADA : historique, objectifs et structures » in Ph. FOUCHARD (sous la dir.), L'OHADA et les perspectives de l'arbitrage en Afrique, Travaux du Centre René-Jean. Dupuy pour le droit et le développement, Vol 1, Bruylant, Bruxelles, 2000, p 9

324 L'arbitrage, quel qu'en soit l'objet, repose essentiellement sur deux piliers. C'est une convention privée des parties, poursuivant un but juridictionnel dès lors qu'elles conviennent de faire trancher leur litige, non pas par des juges étatiques, mais par des juges privés qu'elles ont choisis et selon des modalités définies par elles. Voir, Angélos. C. FOUSTOUCOS, L'arbitrage interne et international en droit privé hellénique, thèse de doctorat d'Etat, Université de Droit, d'Economie et de Sciences sociales (Paris 2), 1973, p 3

de l'exequatur. Car, cela s'inscrira dans une perspective de donner une légitimité beaucoup plus accrue aux sentences arbitrales étrangères et d'autre part de mieux mesurer la portée du rôle de l'arbitrage dans le commerce international.

Conclusion de la deuxième partie

A travers un examen profond sur le fonctionnement du mécanisme de règlement juridictionnel des différends commerciaux internationaux, nous sommes arrivés à convenir que le mécanisme s'est révélé efficient. Tout d'abord, avec le règlement juridictionnel des conflits commerciaux internationaux, il a été possible de promouvoir l'effectivité du droit international général, en revenant sur les grandes questions touchant le commerce international, notamment la préservation et la protection de l'environnement et la promotion des droits fondamentaux, qui constituent le noeud même de la « Société internationale actuelle ». Egalement, le mécanisme a permis d'ériger certains usages et pratiques des commerçants en règles normatives autonomes, à l'image de la lex mercatoria et des incoterms, qui sont devenus des normes incontournable du droit des échanges internationaux. Ensuite, la résolution des différends commerciaux internationaux par la voie juridictionnelle nous a permis de voir une certaine envergure de rationalisation des rapports commerciaux en instaurant un climat de confiance entre les parties mais aussi en incitant à la renonciation de certaines pratiques commerciales déloyales.

Toutefois, malgré cette efficience, le mécanisme souffre de quelques manquements qu'il ne peut ignorer. En effet, aussi bien pour système de l'ORD que pour celui de l'arbitrage commercial international des difficultés n'ont pas manqué de survenir auxquelles nous sommes tentés d'apporter quelques esquisses de remèdes afin de rendre le mécanisme plus perfectible.

CONCLUSION GENERALE

L'objectif qui s'était fixé dans cette étude sur « le règlement juridictionnel des conflits internationaux en matière commerciale » était d'exposer et expliquer l'étendue du mécanisme de résolution juridictionnelle des différends commerciaux internationaux. A l'issu de ce travail, nous sommes arrivés à un double constat selon lequel le mécanisme, par la complexité des relations commerciales internationales, est largement ambivalent ; aussi il est dans une large mesure efficient.

En réalité, il tient son caractère ambivalent par le fait que les opérations du commerce international s'effectuent généralement entre Etats ou entre Etats et opérateurs économiques privés. Pour les différends entre Etats, remarquons-nous d'ores et déjà que, à l'ère d'un nouvel « ordre économique mondial », la majorité des Etats sont membres de l'OMC, qui sert un cadre commun pour la conduite des transactions commerciales multilatérales. Ce qui fait que les conflits qui naissent de ces relations commerciales sont tranchés au sein de l'institution par le biais de son système de règlement des différends, animé par l'ORD. Celui-ci, conscient de sa nature interétatique, s'efforce de faire le mariage entre le politique et le juridictionnel dans le but de résoudre efficacement les différends entre les Etats membres dont les poids économiques sont largement divergents. En alliant la diplomatie et le juridictionnel dans le règlement des différends, l'ORD fait preuve d'originalité et d'efficacité qui font de lui le « sage gardien » de l'OMC. Il faut tout de même soulever le débat doctrinal qui s'est posé par rapport à son caractère juridictionnel. Si le professeur C. Santulli lui retire toute nature juridictionnelle et parle plutôt d' « organes en juridictionnalisation », il en va autrement pour le professeur H. Ruiz-Fabri qui lui concède son caractère juridictionnel. Bien entendu, nous avons laissé cette question en suspens car estimons-nous qu'elle demeure marginale dans cette étude. En sus, en mettant l'accent sur l'ORD dans la présente étude montre implicitement que nous entendons emboiter le pas au professeur H. Ruiz-Fabri. Quoiqu'il en soit, le mécanisme de règlement des différends de l'OMC, compte tenu du caractère disparate des membres, a voulu procéder à l'équilibrage des moyens dans la résolution des conflits, en accordant aux PED un traitement spécial et différencié, aussi bien par rapport aux procédures que par rapport à la mise en application des décisions et recommandations. Cependant, nous avons montré que cette volonté s'est retrouvée, dans la pratique, trahie par la nature même des relations internationales. Concernant les conflits qui naissent dans les relations entre Etats et opérateurs économiques étrangers, nous avons montré qu'ils sont le plus souvent portés à la connaissance d'un tiers, qui n'est pas, à proprement parler, juge. Il s'agit de l'arbitre. Ce dernier, à la différence du juge étatique, est choisi par les parties en conflit à travers une convention qui, de manière fréquente, est conclue avant que le différend ne naisse. Il s'agit de la clause compromissoire. Par sa nature hybride, l'arbitrage commercial international demeure le mode privilégié de résolution des différends entre un Etat et un opérateur privé étranger parce qu'il leur accorde une certaine latitude par rapport au choix des arbitres mais également par rapport à la détermination du droit applicable au fond de leur litige. Mais aussi, il leur fait bénéficier des avantages certains, notamment la rapidité et la confidentialité de la procédure, que la justice étatique arriverait difficilement à leur procurer. Ce qui permet de le considérer

comme un mécanisme efficace de règlement des différends commerciaux entre Etats et opérateurs économiques étrangers.

D'autre part, le mécanisme de règlement juridictionnel des différends commerciaux internationaux nous est apparu efficient. Tout d'abord, il permet de promouvoir l'effectivité du droit international général, lorsqu'il prend en compte l'ensemble des questions qui interpellent la Société international, à l'image de la protection du cadre de vie des personnes et la promotion de leur bien-être physique et moral. Il s'y ajoute également l'émergence et la reconnaissance de nouvelles normes autonomes nées des usages entre commerçants, lesquelles constituent, dans une certaine mesure, un ordre juridique transnational. Ensuite, le mécanisme a permis de rationaliser les rapports commerciaux internationaux en facilitant l'instauration d'un climat de confiance entre les cocontractants qui, par la force des choses, peuvent arriver à récuser certaines pratiques commerciales illicites.

Toutefois, aussi efficient qu'il puisse l'être, le mécanisme traine quelques difficultés dont souffre aussi bien l'ORD que l'arbitrage commercial international. A cet effet, nous avons tenté de proposer un certain nombre de solutions pour pallier ces difficultés en vue de rendre le mécanisme beaucoup plus perfectible. Par rapport à l'ORD, avons-nous proposé une certaine amélioration de ses procédures et sanctions qui sont jusqu'ici très critiquées, mais également un renforcement de sa transparence que d'aucuns semblent subodorer. Relativement à l'arbitrage commercial international, nous estimons qu'il faut procéder à la rationalisation de son coût jugé élevé et à l'enlèvement, partiel ou total, de l'exéquatur qui demeure une problématique dans le système d'arbitrage.

En définitive, nous considérons que la question est loin d'être épuisée. Il s'agissait simplement d'une réflexion en balbutiement, pouvant ultérieurement faire l'objet d'un approfondissement. Au demeurant, pour un lendemain meilleur de relations commerciales internationales, une inquiétude persiste, celle de savoir si ces différentes propositions seront-elles prises en compte ou simplement répudiées en bloc dans le règlement juridictionnel des différends relatifs au commerce international. Pour ne pas « insulter » le futur, il s'agira de faire confiance au génie des acteurs du commerce international.

BIBLIOGRAPHIE

TEXTES OFFICIELS

Accord de Marrakech du 15 avril 1994 instituant l'Organisation mondiale du commerce

Annexe II de l'Accord de Marrakech du 15 avril 1994 portant Mémorandum d'Accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends

Convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales

Traité de Port-Louis du 17 octobre 1993 relatif à l'OHADA

Acte Uniforme de l'OHADA du 11 mars 1999 relatif au droit de l'arbitrage

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PARAGRAPHE 2: Les manquements au traitement spécial et différencié 28

TABLE DES MATIERES

DEDICACES i

REMERCIEMENTS ii

AVERTISSEMENT .iii

SOMMAIRE iv

SIGLES ET ABREVIATIONS v

INTRODUCTION GENERALE 1

PREMIERE PARTIE : LE REGLEMNT JURIDICTIONNEL DES DIFFERENDS

COMMERCIAUX INTERNATIONAUX : UN MECANISME AMBIVANLENT .6

CHAPITRE I : LES DIFFERENDS COMMERCIAUX OPPOSANT LES ETATS .6

SECTIION 1 : L'ORD, principal mécanisme de règlement des différends commerciaux

multilatéraux ..7

PARAGRAPHE 1 : un mécanisme original de règlement des litiges commerciaux

internationaux .8

A- Un mécanisme global et intégré ...8

B- Un mécanisme interétatique 10

PARAGRAPHE 2 : Un mécanisme efficace de règlement des litiges commerciaux

internationaux ..12

A- Une efficacité par rapport à la procédure .13

1) Une procédure politique ou non juridictionnelle .13

2) Une procédure juridictionnelle 17

B- Une efficacité par rapport aux décisions et recommandations .24

1) Les mesures de compensations 24

2) Les mesures de rétorsions ou suspension de concessions 25

SECTION 2 : L'ORD, un mécanisme de règlement incluant un traitement spécial et

différencié en faveur des PED . 26

PARAGRAPHE 1 : L'affirmation du traitement spécial et différencié 26

A- Au niveau des procédures 27

B- Au niveau de la mise en application des recommandations .28

A- Le caractère non contraignant du principe de traitement spécial et différencié ..29

B- Le risque prééminence des rapports de force dans la mise en oeuvre des

recommandations .30

CHAPITRE II : LES DIFFERENDS COMMERCIAUX OPPOSANT LES ETATS ET LES

OPERATEURS ECONOMIQUES ETRANGERS 31

SECTION 1 : L'arbitrage, mécanisme privilégié de règlement des différends commerciaux

entre un Etat et un opérateur économique étranger

..31

PARAGRAPH 1 : Les différents types d'arbitrage

.31

A- L'arbitrage ad hoc

32

B- L'arbitrage institutionnel

..32

PARAGRAPHE 2 : La convention arbitrale : la clause compromissoire

33

A- L'autonomie de la clause compromissoire

34

B- La validité de la clause compromissoire

..35

SECTION 2 : L'arbitrage, mécanisme efficace de règlement des différends commerciaux

entre un Etat et un opérateur économique étranger

.36

PARAGRAPHE 1 : Une grande latitude accordée aux parties

36

A- Sur le choix des arbitres

..37

B- Sur la détermination du droit applicable

37

 

PARAGRAPHE 2 : Des avantages certains relativement à la procédure et à la sentence 39

A- La rapidité et la confidentialité de procédure 39

B- La possible reconnaissance et exécution de la sentence ..40

DEUXIEME PARTIE: LE REGLEMENT JURIDICTIONNEL DES DIFFERENDS

COMMERCIAUX INTERNATIONAUX : UN MECANISME EFFICIENT .43

CHAPITRE I : UNE EFFICIENCE APPRECIABLE A DEUX NIVEAUX .43

SECTION 1 : Un moyen de promouvoir l'effectivité du droit international général .44

PARAGRAPHE 1 : La prise en compte de préoccupations nouvelles de la Société

internationales ..44

A- Les préoccupations d'ordre environnemental

..44

B- Les préoccupations d'ordre social

46

 

PARAGRAPHE 2 : La mise en oeuvre de nouvelles normes du commerce international

47

A- Des usages du commerce international : les incoterms

.48

B- Un ordre juridique transnational : la lex mercatoria

.49

SECTION 2 : Un moyen de rationaliser les rapports commerciaux internationaux

PARAGRAPHE 1 : Par la recherche d'un climat de confiance entre les acteurs

51

51

A- La sécurité juridique et judiciaire

.52

B- La prévisibilité du système commercial international

.53

PARAGRAPHE 2 : Par la renonciation à certaines pratiques commerciales

..54

A- La renonciation à l'unilatéralisme

54

B- L'abandon aux pratiques anticoncurrentielles

.56

 

CHAPIRE II : UNE EFFICIENCE ALTEREE PAR CERTAINES DIFFICULTES

.57

SECTION 1 : Mais des difficultés quasi surmontables

...57

PARAGRAPHE 1 : les lacunes de l'ORD

57

A- Un mécanisme traité de discriminatoire

57

1) La large exclusion des personnes privées

57

2) La modeste participation des PED

58

B- Un mécanisme traité d'insatisfaisant

60

1) Des procédures longues

60

2) Des sanctions relativement timides

..61

 

PARAGRAPHE 2: Les faiblesses de l'arbitrage commercial international

62

A- La méfiance constante des PVD

..62

B- La problématique de l'exécution de la sentence

.63

SECTION 2 : Un mécanisme de règlement des différends perfectible

64

PARAGRAPHE 1: Des changements indispensables à l'avenir de l'ORD

.64

A- L'amélioration des procédures et des sanctions

64

B- Le renforcement de la transparence

.66

 

PARAGRAPHE 2 : Des améliorations envisageables en matière d'arbitrage commercial

international .67

A- La rationalisation du coût de la procédure arbitrale

.67

B- L'enlèvement du bouclier de l'exequatur

68

CONCLUSION GENERALE

.70

BIBLIOGRAPHIE

72






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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry