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La responsabilisation du secteur privé dans le contrôle des exportations de défense en France. Quelles perspectives pour la commercialisation d'armements ?

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par Yann Wendel
Université Panthéon-Assas Paris II - Master 2 Défense et Dynamiques Industrielles 2016
  

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2. Des prérogatives de la puissance publique plus ciblées

En contrepartie de cette libéralisation des contrôles, la puissance publique applique plus systématiquement ses prérogatives concernant les entreprises privées. Le contrôle sur pièces d'une part est effectué par la DGA de manière systématique pour les licences individuelles, globales et générales. Il implique de vérifier qu'une Fiche Analytique accompagnée de la copie du contrat et de la licence a bien été transmise à la DGA préalablement à l'envoi de matériel. Le contrôle porte en particulier pour les licences individuelles sur les CNR (Certificat de Non-Réexportation), qui représentent l'engagement pris par un client de ne réexporter vers un tiers les matériels ou prestations achetés à la France que s'il y est préalablement autorisé par le gouvernement français. Le contrôle sur pièces porte également sur la transmission des comptes rendus semestriels101, qui sont communiqués par l'industriel à la DGA/DI (direction internationale de la DGA) dans la logique du contrôle a posteriori. En ce qui concerne les licences globales et générales, le contrôle porte sur la vérification des comptes rendus semestriels communiqués par l'industriel à la DGA/DI. Le contrôle sur place a lieu de manière ponctuelle pour les licences individuelles et de manière systématique en ce qui concerne les licences globales et générales. Il implique la vérification dans les locaux de l'industriel de la conformité des opérations (par rapport aux autorisations reçues et aux conditions associées), avec des factures, bordereaux de livraisons qui ont été déclarés dans les compte rendus semestriels.

Ces contrôles sur pièces et sur place ont lieu pour vérifier que les entreprises ont satisfait à leurs obligations de registre, qu'elles ont bien transmis à la DGA/DI un compte rendu semestriel reprenant leurs prises de commandes et exportations et que leurs opérations commerciales sont en conformité avec les autorisations délivrées (clause d'utilisateur final et d'utilisation finale)102. Le contrôle sur pièces insiste sur la cohérence entre les licences détenues, les comptes rendus effectués et les pièces transmises à l'administration pour les contrats supérieurs à 200 000€, alors que le contrôle sur place vérifie les opérations commerciales et le respect des conditions non suspensives. De toutes manières, les fournisseurs sont contraints de conserver les traces des transactions effectuées à travers la tenue d'un registre des transferts et des exportations ; il est d'ailleurs recommandé de s'en

101 Le compte rendu semestriel est prévu par l'arrêté du 30 novembre 2011 et répertorie les commandes et les livraisons des exportateurs de matériels de guerre ou assimilés ou qui transfère des produits liés à la défense, et ce qui s'applique également aux échanges immatériels.

102 Art R.2335-17 du Code de la Défense.

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servir de base pour extraire les comptes rendus semestriels. Tous les documents commerciaux doivent de plus être conservés pour une durée de 10 ans.

Suite à ces contrôles, l'administration rédige un procès-verbal transmis au comité ministériel de contrôle a posteriori des exportations (CMCAP), qui transmet lui-même un rapport annuel au ministre de la défense et au SGDSN sur son appréciation des procédures de contrôle des entreprises et des suites à leur donner. Il est composé de la DGRIS, de la DGA, de la DPSD, de l'EMA et il est présidé par le Contrôle Général des Armées. Le CMCAP prend en compte plusieurs facteurs dans le contrôle : il évalue la nature de l'exportation, la capacité militaire des produits, le destinataire final des matériels, et la zone d'exportation. Ces risques sont pour la plupart analysés par les membres de la CIEEMG dans le cadre du contrôle a priori. Un autre axe de contrôle est celui de la nature de l'autorisation, les risques de non-respect variant en fonction du type de licence utilisé et des conditions qui y sont associées. Ainsi, plus le périmètre de la licence est large, plus il y aura de recours au contrôle a posteriori, car les risques associés y sont perçus comme supérieurs. Enfin, le CMCAP prend également en compte la qualité du contrôle interne des sociétés et de leur passif à l'égard du respect de la réglementation.

Des sanctions pénales sont prévues en cas d'exportation sans autorisation, de non-respect des termes de la licence, de l'absence du registre (5 ans de prison et 75 000 € d'amende) ou d'entrave aux investigations, obtention de licence par déclaration mensongère (3 ans de prison et 45 000€ d'amende)103. La non-déclaration de la première utilisation d'une licence générale ainsi que la non-transmission des comptes rendus sont également passibles d'amendes. Toutefois, les infractions relevées par ce comité proviennent la plupart du temps d'erreurs du fait de la nouveauté du processus et n'ont jusqu'alors la plupart qu'été peu sanctionnées.

En définitive, la Directive européenne 43/2009 crée des outils pertinents, dont l'application reste perfectible afin d'obtenir une BITDE intégrée en complément de la Directive 81/2009 sur les marchés publics de défense104. La principale limite de cette évolution réside dans une certaine lourdeur administrative qui touche les entreprises, provenant d'une accumulation de charges plutôt que d'un allègement, la simplification

103 Art L.2339-11 du Code de la Défense.

104 TRYBUS M. (2013), The tailor-made EU Defence and Security Procurement Directive: limitation, flexibility, description, and substitution, European law review 38(1):3-29.

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concernant davantage l'administration que l'industrie105. Ainsi, le contrôle a posteriori s'est superposé au contrôle a priori plus qu'il ne l'a remplacé, dans la mesure où il est par exemple toujours nécessaire d'obtenir une licence avant l'acceptation d'une commande ou la signature d'un contrat. La simplification que devait engendrer la Directive TIC a eu lieu de manière très limitée en pratique, du fait du manque d'harmonisation des politiques de contrôle au sein de l'UE, empêchant par là même d'unifier la BITDE. Les licences générales, qui sont des initiatives allant dans le sens d'une intégration accrue, n'ont pour le moment qu'une utilité réduite du fait de la tenue de différentes listes de produits dans les pays européens, ainsi que de l'absence de ces listes de certains produits pour lesquels il faut obtenir, en plus, des licences individuelles. On ne peut donc pas parler pour le moment d'un mouvement global de simplification des flux entre industriels européens. Enfin, le fait que la responsabilité du contrôle incombe aujourd'hui de manière directe à l'entreprise implique de faire partager les risques au secteur commercial, ce qui a des conséquences en termes financiers et de garantie lors d'opérations d'exportation, notamment pour les PME, qui ne disposent pas forcément de la taille critique adaptée pour faire face.

Ces problématiques d'ordre réglementaire sont toutefois à mettre en perspective avec les initiatives en faveur de la diplomatie économique initialisées avec la mise en place du MAEDI notamment l'accès facilité des PME aux attachés de défense dans les ambassades de France à l'étranger, qui constitue une réelle amélioration en termes de soutien à l'exportation.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle