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Dynamique professionnelle et transformations de l'action publique. Réformer l'organisation des soins dans les prisons françaises. Les tentatives de spécialisation de la « médecine pénitentiaire » (1970-1994).

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par Eric FARGES
Université Lyon 2 - Sciences Po - THESE EN SCIENCES POLITIQUES 2013
  

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3. La contestation de la psychiatrie pénitentiaire et son intégration au dispositif de santé mentale : la réforme de 1977

Journaliste : « La réforme de la condition pénitentiaire est en bonne voie. C'est du moins ce que disait Hélène Dorlhac hier au conseil des ministres. C'est une action nécessaire mais mal comprise, lui répondait Valery Giscard d'Estaing. Elle va dans le sens de l'humanisation de notre société. Mais quelle sorte d'humanisation dans les prisons ? C'est un peu la question que l'on a envie de se poser en écoutant François Martzloff, jeune psychiatre qui fut deux ans interne à la maison d'arrêt de La Santé à Paris. Lors d'une thèse récemment présentée à la faculté de médecine de Créteil, il a dénoncé avec vigueur la psychiatrisation insidieuse des prisons. Les prévenus comme les détenus y feraient une consommation importante de produits hypnotiques et autres produits psychosomatiques »694(*).

« L'aspect le plus contesté de la présence médicale en milieu pénitentiaire est l'action psychiatrique », observe un psychiatre hospitalier dans le numéro d'une revue psychiatrique consacrée à la médecine en prison695(*). Cette forte remise en cause s'explique au moins par trois raisons. La psychiatrie pénitentiaire semble tout d'abord davantage exposée à la critique du fait de l'assimilation progressive qui est faite au sein des médias entre, d'une part, les services psychiatriques et, d'autre part, la prescription massive de psychotropes, désignée sous l'appellation de « camisole chimique »696(*). C'est dans le cadre de la condamnation du « scandale des prisons » que cette idée apparaît pour la première fois en 1971. Alors que se déroule la mobilisation en faveur des détenus gauchistes incarcérés, un journaliste remarque que « dans la population, apparemment normale, des 2000 détenus de la prison de Fresnes, les médecins font distribuer chaque soir 620 doses massives de calmants. Un prisonnier sur trois a droit à sa camisole chimique » (L'Express, 24-30/01/1971). Ces accusations s'adressent dans un premier temps à l'ensemble du corps médical travaillant en milieu carcéral, comme en atteste cette description qu'un journaliste médical donne du médecin pénitentiaire : « Sa présence est sécurisante pour la direction de l'établissement : si un détenu est très agité, les moyens de correction brutale étant de moins en moins utilisés, on fait appel au médecin et surtout à sa seringue, véritable camisole chimique plus efficace que toutes les sangles »697(*). A l'inverse, la critique, quelques années plus tard des « psychoflics » par un détenu de Fresnes, atteste du lien de plus en plus ténu établi entre la prescription de psychotropes et la figure du psychiatre :

« La plupart des "civils" qui travaillent dans les prisons sont sans doute des "braves-gens". Mais la réalité est qu'en majorité ceux-ci sont incapables d'entamer la moindre opposition, aussi dérisoire soit-elle, à l'arbitraire pénitentiaire. Parmi ces gens de "bonne volonté" les psychoflics ne sont pas les moins empressés à nous bassiner à force de répéter qu'ils "font ce qu'ils peuvent"... [...] Dehors ! Cessez de continuer à cautionner l'arbitraire pénitentiaire (et même d'y collaborer le plus souvent) [...] Vous n'avez aucune autorité médicale ici ! » (Journal des prisonniers, n°47, 06/1977).

Cette critique du rôle répressif de la psychiatrie est peut-être à mettre en lien avec la contestation dont est l'objet à cette époque le savoir psychiatrique en cours d'institutionnalisation698(*). Asiles et prisons ne feraient ainsi, du point de vue de leurs détracteurs, plus qu'un dans la tentative de normaliser et de psychiatriser les individus contestataires. Ce discours s'appuie notamment sur la critique des « asiles pénitentiaires » italiens699(*) ou encore sur l'usage politique de l'internement psychiatrique dans le régime soviétique : « Ainsi, comme en Russie, nous voici engagés en France sur la voie trop large et trop facile de la détention de type psychiatrique. La brutalité physique cède peu à peu le pas à la violence médicale et psychique »700(*). C'est dans ce contexte que les militants de la cause carcérale dénoncent la « superposition » des institutions psychiatriques et pénitentiaires. Le GMP regrette ainsi, à l'occasion du suicide d'un détenu dans une cellule d'un CMPR, que les deux institutions « jouent au ping-pong » avec un psychopathe délinquant (LM, 23/05/1974). Le C.A.P remarque quant à lui que les autorités choisissent suivant les cas « de diriger celui qui dévie vers la prison et le mitard ou bien la prison et l'hôpital psychiatrique et ses électrochocs [...] L'hôpital psychiatrique prend la relève de la taule quand on veut enfermer à perpétuité sans jugement public » (Journal des prisonniers, 10/1974). Au-delà de la seule psychiatrie pénitentiaire, c'est le système « juridico-hospitalo-carcéral » que condamne la presse militante, comme par exemple Libération à l'occasion de l'« "hospitalisation volontaire" contre son gré » d'un détenu gréviste de la faim (24/01/1978).

Se situant à l'intersection de deux ordres considérés comme répressif, la psychiatrie pénitentiaire est au coeur de la critique. C'est notamment le cas de la Centrale d'Haguenau qui dispose d'un « centre de réadaptation pour détenus psychopathes » dont le journal du C.A.P donne une description sordide : « Une prison, c'est inhumain de même qu'un hôpital psychiatrique alors imaginez ce que peut être une prison psychiatrique [...] Dès leur arrivée, ils sont automatiquement mis à l'isolement psychiatrique pour 15 jours, c'est-à-dire qu'on lui fait prendre divers médicaments par voie buccale ou par piqûre s'il refuse » (Le journal des prisonniers, 11/1978). Un article particulièrement virulent publié dans Libération et coécrit avec un ancien interne pénitentiaire dénonce également la psychiatrie pénitentiaire : « Annihiler toute manifestation qui pourrait être reprise de l'extérieur, telle est la finalité d'une expérience dite "humaniste" : les psychiatres en prison »701(*). L'objet de la « pratique psychiatrique » serait, selon le quotidien, d'isoler et d'opposer entre eux les détenus et participerait ainsi à un « morcellement de la révolte » : « Le psychiatre est là pour écouter individuellement chacun des détenus, pour personnaliser son angoisse, pour faire de sa souffrance un phénomène unique ». En médicalisant les troubles ressentis par les détenus, cette nouvelle discipline dépolitiserait et annihilerait ainsi toute contestation au sein de l'institution carcérale : « La psychiatrie est mise en place pour faire accepter l'inacceptable au prisonnier en rapportant son malaise à des angoisses de nature pathologiques, alors qu'il s'agit en fait d'une souffrance partagée par toute la population pénale ». Le psychiatre est alors décrit comme un « complice de l'administration pénitentiaire » ayant pour tâche de « faire supporter à un homme ce qui n'est pas supportable », et notamment en l'assommant « à coups de matraque chimique de façon à le laisser dans un état de larve semi-comateuse ». « Bonne conscience » du ministère de la Justice, la psychiatrie pénitentiaire est ainsi présentée comme un outil répressif dénué de toute perspective thérapeutique.

Sans qu'on puisse établir avec certitude les effets de cette critique des services psychiatriques pénitentiaires, on peut constater que celle-ci n'est pas seulement le fait de militants mais également, second facteur de remise en cause, de praticiens exerçant en prison et tout particulièrement des internes. En novembre 1972, les trois internes démissionnaires de La Santé déclarent à la presse par exemple refuser d'être les « porte seringues » chargés d'administrer une « camisole chimique » aux détenus trop agités702(*). Bien que cette prise de parole publique demeure limitée, beaucoup d'internes pénitentiaires s'interrogent, comme en témoignent leurs thèses de médecine, sur le rôle des psychotropes en prison et plus largement sur le sens de leur intervention703(*). L'idée d'une substitution de la « contention chimique » à la contention physique y est récurrente. Attestant cette évolution par la diminution du nombre de placements en contention à Fleury-Mérogis (301 en 1971, 137 en 1972, 55 en 1973), un interne souligne l'« ambiguïté notoire » devant laquelle se trouve le psychiatre : « Tout en accusant le système carcéral d'induire une régression telle qu'elle pousse le détenu au passage à l'acte, le médecin cautionne l'institution en "anesthésiant" le détenu pour qui il plaidait encore il y a un instant »704(*). D'une façon similaire, un ancien interne de La Santé remarque qu'« une part importante de la répression dans les prisons est assumée par le corps médical » : « Il ne faudrait pour le démontrer, que cesser la distribution des psychotropes pendant trois jours, pour qu'une mutinerie voit le jour »705(*). Un autre interne de Fleury-Mérogis regrette que le psychiatre soit « un auxiliaire chargé de faire accepter la détention » avant de se demander s'il n'est pas « contradictoire de placer des hommes dans des conditions qui favorisent le développement de troubles du comportement et des troubles mentaux et de faire ensuite appel au psychiatre »706(*). Cet autre interne de Fleury questionne le sens que revêt en prison la demande de soin quand est adressé à la consultation le détenu « qui n'accepte pas de se plier au règlement et aux diverses contraintes imposées, celui qui se plaint, qui proteste, qui refuse »707(*).

D'une manière générale, les internes sont pessimistes sur l'utilité de leur présence en détention, même ceux travaillant pourtant dans les meilleurs conditions708(*). Un interne de l'équipe lyonnaise regrette dans sa thèse qu'en dehors d'un « véritable "droit" au médicament » (« c'est la seule chose qui lui soit offerte gratuitement et à volonté »), la psychothérapie dispose d'effets très limitées en raison de l' « anti-thérapie institutionnelle » que représente « cet univers de frustration, d'anxiété et d'agressivité » :

« Si la prison ne peut s'adapter à la psychiatrie, la psychiatrie est priée de s'adapter à la prison ; son exercice exige de nombreuses concessions ; le psychiatre se trouve un peu comme le prêtre, il confesse, il réconforte [...] Certes un entretien rapporte un plaisir de l'instant, une impression d'évasion, une relation d'autre qualité ; mais ce soulagement est éphémère et ne survit guère, une fois la porte de bureau franchie, lorsque le détenu est à nouveau plongé dans la réalité agissante et nocive de la prison ; il retrouve vite son malaise. La répétition régulière des entretiens aide parfois à le supporter et à la réduire. Les détenus qui demandent une entrevue au psychiatre ont toujours une faim importante de ces rencontres ; ils "bouffent du médecin" [...] Le plaisir de l'entretien est semblable à celui du fumeur, du buveur ou du gourmand ; il doit être sans cesse recommencé. Comme on ne peut offrir un thérapeute permanent à chaque détenu, celui-ci a trouvé un substitut symbolique plus accessible, plus maitrisable : le médicament [...] Face à cette avidité désespérée et compulsive, le psychiatre se sent parfois impuissant, d'où l'établissement d'un contre-transfert très négatif. Il lui arrive d'avoir l'impression de devoir réparer tous les effets néfastes de la prison avec des moyens trop limités. Il se sent plus objet que sujet et se vit parfois comme le "paratonnerre" de la prison, chargé de recueillir et de concentrer sur lui toute la tension des lieux »709(*).

Tandis que ces réflexions demeurent confinées au milieu universitaire ou psychiatrique, le travail universitaire d'un autre interne de La Santé connaît d'importantes retombées médiatiques710(*). Sa thèse, ayant explicitement pour objet la « psychiatrisation » de la vie en détention, fait en effet l'objet d'un reportage de France inter ainsi que d'un article détaillé dans Le Monde711(*). Rappelant l'augmentation de psychotropes entre 1969 et 1973 à La Santé712(*), la journaliste soulève le rôle du médicament et du praticien en prison :

« Le médecin est devenu en quelque sorte le "gentil incarcérateur" en délivrant abusivement tranquillisants et sédatifs à des personnes qui, sans cela, ne supporteraient pas l'univers carcéral [...] Par la dose massive de sédatifs qu'il ordonne, soit prescrite de son plein gré, soit fortement sollicitée par le gardien ou l'administration, le médecin, inconsciemment, fait accepter les barreaux dans l'euphorie, ou calme une période de violence ou de rébellion, dont rien ne permet d'affirmer qu'elle n'est pas motivée [...] Pour l'auteur c'est indiscutablement la prison qui est pathogène. Aussi se demande-t-il s'il est logique et normal d'adapter le détenu à la prison ; s'il n'est pas sain et normal de se révolter contre l'incarcération ».

De même que pour les militants de la cause carcérale, la critique du rôle du médicament en détention s'inscrit chez cet interne dans une critique plus générale de la psychiatrie. Pour ce médecin ayant refusé d'exercer à la fin de ses études en tant que psychiatre, le problème qui se pose est avant tout celui de la présence du psychiatre en milieu pénitentiaire, voire de l'existence de la discipline psychiatrique elle-même : « En entrant dans la prison, les psychiatres ont donné un statut au dément [...] Si bien que l'étiquette d'aliéné s'étend implicitement à l'ensemble des détenus. Ils sont abordés comme des aliénés et peu à peu répondent comme tels [...] Assimiler ces déviants à des malades est le seul biais qui lui [notre civilisation] permette de les rejeter sans se remettre elle-même en cause ; en effet, ce n'est plus en raison de leur déviance à un système, mais à cause d'un mal qui frappe aveuglément [...] Le fou est un problème social, relationnel, métaphysique... mais en aucun point médical »713(*). On comprend dans ces conditions le rapprochement opéré entre la critique de la psychiatrie pénitentiaire et celle exercée en institution asilaire. En témoigne, par exemple, la publication par deux revues professionnelles de numéros spéciaux consacrés à l'exercice psychiatrique en prison714(*).

Les psychiatres pénitentiaires disposent enfin, troisième facteur de remise en cause, d'une forte autonomie, au regard de leurs confrères généralistes, à l'égard de l'Administration pénitentiaire. Ils ont tout d'abord la particularité de tous disposer, contrairement aux médecins pénitentiaires, d'un parcours hospitalier. Leur pratique en prison demeure une part très congrue de leur activité professionnelle leur permettant ainsi de conserver le plus souvent un lien avec le milieu hospitalier. Ils ont d'autre part souvent accès à des revues professionnelles psychiatriques où ils peuvent élaborer une réflexion sur leur exercice professionnel. Bien que spécifique, la trajectoire du service des prisons de Lyon illustre les relations dont disposent alors certains psychiatres intervenant en institution pénitentiaire avec le secteur hospitalo-universitaire (Cf. Encadré).

Les critiques adressées à l'organisation des soins psychiatriques en milieu carcéral et l'inscription de ces praticiens dans le secteur hospitalier expliquent leur désir d'autonomie. Les limites imposées par la circulaire du 30/09/1967, réglementant le fonctionnement des Centres médico-psychologiques régionaux (CMPR), sont de plus en plus mal vécues par ces praticiens715(*). Ainsi, les demandes de soin émanent de l'Administration, observe une psychiatre de La Santé, alors même que les problèmes en question relèvent davantage du règlement pénitentiaire. Ce praticien présente plusieurs cas cliniques pour étayer ce qui soulève, d'après elle, « les limites du rôle de l'équipe médico-psychologique en milieu pénitentiaire » :

« W... Cet homme est détenu depuis le mois de décembre 1969 et inculpé pour des motifs graves. Il est âgé de trente-deux ans. Intelligent, immature, très isolé, inhibé, il supporte mal les frustrations affectives et quête en permanence aide, compréhension, contact. Pris en charge par un médecin du CMPR (La Santé). Ce dernier écrivait dans le dossier :

20 novembre 1970 - "Le problème est actuellement dominé par un passage vers une maturation qui le conduit à une prise de conscience lucide, tant des risques objectifs que des conclusions de son auto-introspection narcissique. Il est totalement isolé affectivement : cours et visiteur lui auraient été refusés pour des motifs administratifs et judiciaires. Je crains un suicide, et l'augmentation des doses de médicaments n'y changera rien".

Des démarches furent entreprises pour rompre l'isolement absolu avec l'extérieur : sans efficacité.

Le 12 décembre 1970 - Tentative de pendaison nécessitant une longue réanimation.

Le 15 décembre 1970 - Son avocat vient le voir. Un expert est commis pour une mission urgente.

Ainsi, l'isolement fut rompu trois jours après la tentative de suicide.

Le 9 janvier 1971 - En raison de la gravité de la tentative de pendaison, alors que l'impasse existentielle tragique signalée ne l'avait pu, l'administration et le service social de l'établissement relaient l'action psychothérapeutique en permettant un élargissement des centres d'intérêt (reprise des cours de langue étrangère interrompus, octroi d'une visiteuse).

Depuis cette date, la situation est acceptée par l'intéressé. Ce cas banal est exemplaire par la chronologie des événements »716(*).

Durant l'été 1974, douze psychiatres se réunissent à Paris, « au moment où de graves événements se produisaient dans les prisons », pour réfléchir à leurs conditions de travail et avoir une « réflexion sur le fonctionnement global de l'institution pénitentiaire »717(*). Leur rencontre débouche sur un ensemble de propositions remises aux ministères de la Justice et de la Santé comportant, outre la demande de davantage de moyens, une réflexion éthique quant à leur rôle de soignant en milieu carcéral : « Le médecin ne doit être, ni le complice du détenu, ni l'auxiliaire du système répressif. Or il apparaît qu'en prison les conditions d'exercice de la médecine et de la psychiatrie sont en général beaucoup trop précaires et souvent déplorables [...] Il arrive trop souvent, encore actuellement, que des pressions soient exercées sur les médecins pour que soient mises en oeuvre des thérapeutiques chimiques sédatives qui constituent une véritable condition médicamenteuse »718(*). C'est pour échapper à la tutelle carcérale que ces praticiens demandent « d'ouvrir la prison aux soignants qui dépendent du dispositif d'assistance et d'hygiène mentale maintenant mis en place dans toute la France »719(*).

L'INTÉGRATION DE LA PSYCHIATRIE PÉNITENTIAIRE DANS LE SECTEUR HOSPITALO-UNIVERSITAIRE : L'EXEMPLE LYONNAIS

C'est en 1949, dans le cadre du mouvement de la Défense sociale, qu'est créée l'Annexe psychiatrique des prisons de Lyon720(*). Elle ne comporte alors que deux médecins, une infirmière et quatre surveillants et ne procède à des consultations qu'à des fins de dépistage de détenus atteints de troubles mentaux. Après une interruption, l'Annexe reprend ses activités en 1954 sous la direction du Dr Broussole, médecin des hôpitaux psychiatriques, et ce à la demande du Pr Colin. Avec le Dr Dubor, ancienne interne des hôpitaux psychiatriques, du Dr Gonin et du Dr Hochmann, assistant à l'Institut de médecine légale, ils tentent de former un premier service en prison conçu comme un prolongement du service hospitalier de psychiatrie:

« Broussole a fait venir un interne et ça s'est petit à petit construit comme ça. Et l'Administration était bien sûr pas très contente mais ça ne lui coûtait rien... parce que c'étaient des services extérieurs. Tout était pris en charge par l'hôpital. Il y a eu un assistant, des internes qui venaient. Et puis petit à petit, l'Annexe a obtenu d'avoir quelques crédits de l'hôpital pour avoir un secrétariat, une assistante sociale »721(*).

En 1958, l'Annexe devient un centre de cure de désintoxication en faveur des alcooliques alors décrit par ceux qui en sont à l'origine comme « un cas particulier de la pénétration de l'hygiène mentale dans le monde des prisons »722(*). En 1962 est inauguré, pour la première fois en France, le travail de psychothérapie de groupe en prison. La création de trois groupes, animés par les docteurs Gonin et Hochmann et par une psychologue, Mme Buffard, est rendue possible par le rapport que le Pr Colin a remis au Comité consultatif des Nations Unies sur ce sujet. Ces thérapeutes communiquent les premiers résultats de cette expérience par le biais de nombreuses communications lors de congrès ou au sein de revues spécialisées.

Les motivations de ces soignants sont multiples. En investissant la prison comme un lieu de soin, ils visent aussi bien à développer une école lyonnaise de criminologie et de médecine légale qu'à répondre à un besoin sanitaire jusque-là non pourvu. Ils inscrivent ici leur action dans une conception militante de la médecine. En témoignent les propos du Dr Gonin :

« Ces gens étaient obstinés. Ils avaient une croyance. C'étaient des chrétiens de gauche. Ils avaient à la fois une croyance religieuse et puis une croyance dans la société [...] Je faisais ça dans un but humanitaire. Y avait pas les ONG mais on a quand même fait un peu un travail d'ONG, notamment par rapport au FLN. Ça a été un regard sur. On peut pas dire : "La prison, on les met là-dedans et on s'en occupe plus" [...] On était... militants... Je sais pas si on peut dire ça comme ça, pour être honnête avec vous. Mais y avait quand même une dimension militante dans ce qu'on faisait [...] Mme Buffard était socialiste et très laïque, je dirais. On était pas tous si vous voulez dans le même bain mais on était tous dans un humanisme, si ce mot veut dire quelque chose »723(*).

En 1966, des consultations sont mises en place dans les différents quartiers de la prison. Le Dr Gonin retrace a posteriori comment « l'acceptation des soignants par l'institution s'est traduite au long des années par l'accroissement de leur territoire » 724(*) :

« A Saint-Paul, le rez-de-chaussée du grand bâtiment H fut conquis cellule par cellule, pour établir, après la "salle de soins" et le "cabinet médical" initiaux, le vestiaire, la salle d'attente, la tisanerie, puis une salle radio, des cellules d'infirmerie, où furent installés l'eau courante et les W.C. Nous étions très satisfaits d'entrer au coeur de la détention, aux côtés des détenus et des surveillants. Enfin, un projet d'infirmerie vint symboliquement couronner l'importance des soins en prison [...] Pour nous rapprocher des détenus, nous avons pu établir des antennes, des petites salles de soins occupant une cellule, dans les bâtiments les plus éloignés des locaux d'infirmerie. La collaboration nécessaire du chef de détention pour l'attribution et l'aménagement de ces locaux a affirmé un peu plus l'acceptation d'un certain quadrillage des aires de détention par la médecine pénitentiaire »725(*).

Parallèlement à cette extension du territoire, les praticiens voient leur rôle s'accroitre dans la vie de l'établissement. Des réunions d'équipe hebdomadaires sont instaurées entre surveillants, éducateurs, assistantes sociales et psychiatres. L'Annexe s'implique également dans l'étude des projets de libération conditionnelle et de semi-liberté. Initialement réduits à un rôle de dépistage, les médecins lyonnais, le plus souvent des psychiatres, sont désormais investis de nombreuses missions. Ils s'interrogent alors sur la nécessité de travailler à temps plein en milieu carcéral, hypothèse qu'ils rejettent par souci de leur rattachement hospitalier :

« Le psychiatre risque rapidement de se sentir incarcéré à son tour. On risquerait aussi de voir l'annexe psychiatrique, rapidement coupée du monde extérieur, vivre en vase clos, et s'étouffer progressivement. Par ailleurs, ce psychiatre des prisons serait forcément sous l'entière dépendance de l'Administration pénitentiaire, qui le considérerait comme un fonctionnaire [...] Il semble donc, qu'il est préférable de conserver la pluralité des psychiatres, avec les inconvénients que cela représente (travail discontinu, manque parfois de corrélation dans certaines activités) mais aussi avec tous ses avantages : confrontation de différents points de vue, possibilité dans une certaine mesure pour le détenu de choisir son médecin, plus grande liberté d'action, plus grande variété d'activités thérapeutiques »726(*).

« Consciente du risque d'étouffement à travailler dans un milieu clos »727(*), l'équipe multiplie les relations avec l'extérieur espérant ainsi devenir « un des foyers de culture criminologique »728(*). Outre de nombreux contacts avec les autorités judiciaires, les praticiens lyonnais entretiennent une étroite collaboration avec l'hôpital du Vinatier, facilitée par le fait que le médecin-chef, le Dr Broussole, travaille également au CHS. Ce dernier fait ainsi venir à l'Annexe, par période de six mois, chacun des internes de son service hospitalier : « Ceci contribue à intégrer l'annexe psychiatrique dans le cadre général du secteur psychiatrique et par ailleurs à lui donner une valeur d'enseignement auprès des internes de l'Hôpital du Vinatier »729(*).

D'autre part, l'équipe de l'Annexe entretient des relations étroites avec le monde académique par le biais de l'Institut universitaire de médecine légale et de criminologie clinique dirigé par le Pr Roche et dans lequel interviennent le Pr Colin et le Dr Hochmann. Outre le diplôme de médecine légale, l'équipe dispense des cours de criminologie clinique à la faculté de droit, à l'Ecole nationale de police de Saint-Cyr au Mont d'Or ou encore auprès de surveillants, assurant ainsi la renommée de l'« école » de criminologie lyonnaise. Cette dernière se dote d'ailleurs en 1967 d'une revue, intitulée Instantanés criminologiques, qui rend fréquemment compte des questions pénitentiaires, notamment en matière médicale. Le service de soins psychiatriques, désormais nommé CMPR, se développe encore au début des années soixante-dix en bénéficiant en 1973 d'un stagiaire interné puis, en 1974, d'un interne, d'une infirmière et d'une secrétaire mi-temps. En 1975, enfin, le CMPR est doté d'une ligne téléphonique extérieure, vieille revendication perçue comme le « symbole d'une brèche dans ce monde clos »730(*).

D'une petite équipe restreinte à une fonction de dépistage, le dispositif de psychiatrie pénitentiaire de Lyon est ainsi devenu un service bien doté assurant de nombreuses consultations auprès des détenus et nourrissant, d'autre part, de nombreux liens avec le secteur hospitalo-universitaire.

La création du premier secteur psychiatrique en milieu pénitentiaire a lieu de façon expérimentale à Fleury-Mérogis. Jusqu'alors, le plus grand établissement pénitentiaire d'Europe, inauguré en 1968 est dépourvu de consultation psychiatrique. C'est suite aux révoltes de détenus que l'Administration ressent le besoin d'une telle intervention, comme le relate un interne dans sa thèse consacrée à cet établissement :

« C'est à la suite des différents incidents survenus alors dans le monde des prisons (l'émeute de Toul en particulier) que l'administration perçut l'absolue nécessité d'un service psychiatrique pour ce gigantesque édifice pénitentiaire. Durant ces premières années, les internes en médecine assuraient tant bien que mal la "psychiatrie" avec à leur disposition - en cas d'échec thérapeutique deux moyens : celui d'attacher les agités, les "suicidaires", c'est-à-dire de les placer sur un lit de contention ou celui d'hospitaliser les cas les plus graves au centre médico-psychiatrique déjà surchargé de la prison de la Santé »731(*).

L'équipe psychiatrique chargée de ce secteur géographique ne souhaitant pas prendre en charge ce surplus de travail, il est décidé en 1971 d'instaurer, avec le soutien de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) et la coopération du Centre hospitalier spécialisé (CHS) d'Etampes, une organisation administrative et budgétaire autonome732(*). Est ainsi créé le 11ème secteur de l'Essonne, chargée des soins à Fleury-Mérogis. Placé sous l'autorité fonctionnelle du Dr Jacques Mérot, le service est doté, outre un psychiatre-chef temps plein, d'un assistant, de trois internes, de deux psychiatres vacataires, de deux psychologues, d'un infirmier et de deux secrétaires, tous rémunérés par la DASS. Les conditions particulières de cette expérience, et notamment sa riche dotation, doivent être restituées dans le cadre de la sectorisation psychiatrique différemment mise en oeuvre selon les départements, comme le souligne celle qui fut chargée dans les années quatre-vingt d'une réforme de la psychiatrie en prison et qui travaillait alors dans l'Essonne :

«Il faut savoir que l'Essonne était le département le plus... riche c'est à dire avec les plus grands psychiatres comme Bonnaffé733(*). C'était le département le plus militant au niveau de la psychiatrie en France. Parce que c'était un département neuf qui avait été créé.... Ça a été un département pilote à tous les niveaux, sur le plan de l'aide sociale à l'enfance par exemple. Et c'était un département avec un conseil général communiste, ce qui à l'époque était rare, et avec des gens qui étaient vraiment très militants. Et à l'époque, il fallait savoir qu'en psychiatrie tout ce qu'on faisait intra-hospitalier, c'était la Sécu et tout ce qu'on faisait à l'extérieur de l'hôpital, c'était le Conseil général. Et donc là, le Conseil général était communiste et donc partisan de... Et Bonnaffé était un psychiatre militant, leader et communiste, et à l'époque le politique était très impliqué dans tout ça ! Et l'hôpital d'Etampes était à l'époque un hôpital extraordinaire avec des gens qui ont vraiment compté pour la psychiatrie. Et Mérot, si vous voulez, a baigné dans ce bain là, dans cette atmosphère. Et Fleury a ouvert en 68... Donc y avait vraiment quelque chose de très militant. Y avait des moyens ! Moi, je me rappelle, je suis arrivée dans l'Essonne en 75, et vous demandiez dix infirmières pour en avoir cinq et trois mois après vous les aviez forcement... C'était vraiment une époque extraordinaire ! »734(*).

L'extension de ce dispositif à tous les grands établissements pénitentiaires est favorisée par la volonté du ministère de la Justice de porter remède à l'aggravation des problèmes liés à la présence de détenus souffrant de troubles psychiques. Un magistrat alors chargé de la gestion médicale au Bureau de la détention en rappelle le contexte : « La médecine générale elle était traitée bon an mal an, mais c'était le côté psychiatrique qui posait de gros problèmes parce que c'était l'époque où les hôpitaux psychiatriques commençaient à s'ouvrir sur l'extérieur et où l'enfermement dans l'hôpital psychiatrique était de moins en moins pratique et ce qui posait un problème de sécurité majeure pour les délinquants qui arrivaient en prison. Les psychiatres étaient de plus en plus réticents à recevoir des délinquants »735(*). En effet, la « libéralisation » des structures psychiatriques initiée dans les années soixante se traduit, souligne le Conseiller technique de Jean Taittinger, par une disparition des quartiers de sécurité au sein des hôpitaux psychiatriques « qui répugnent de plus en plus à accueillir les délinquants présentant des troubles mentaux »736(*). Déjà en 1974, l'autorité préfectorale ne prend plus dans une vingtaine de départements d'arrêtés de placement d'office au sujet de détenus, faute d'hôpitaux pouvant les accueillir. En découle une difficile gestion de certains détenus en établissement pénitentiaire : « Nous sommes submergés de malades psychiatriques très agités qui n'ont plus rien à faire dans nos services et que l'on n'arrive pas à faire réintégrer au Centre psychiatrique [CMPR] de La Santé, faute de places », observe le médecin-chef de l'Hôpital de Fresnes en 1973737(*). A l'initiative de la Chancellerie, une commission Santé-Justice est instituée en 1974 afin de solliciter une augmentation des dotations attribuées par les DDASS738(*).

Si le ministère de la Santé se déclare favorable à une augmentation du nombre de consultations, il pose néanmoins comme condition qu'une nouvelle organisation des services soit adoptée. En atteste ce courrier de Simone Veil au garde des Sceaux : « Il me semble cependant nécessaire que ces consultations puissent être mises en place dans des conditions valables. Il m'est revenu en effet que les conditions peu satisfaisantes dans lesquelles elles étaient parfois dispensées ont entraîné une désaffection des psychiatres qui n'avaient pas l'impression d'y faire oeuvre utile »739(*). S'inspirant de Fleury-Mérogis, Marie-Rose Mamelet, sous-directrice de la Protection sanitaire à la Direction générale de la santé (DGS), et qui fut à l'origine de la circulaire du 15 mars 1960 créant la psychiatrie de secteur, propose alors d'équiper les CMPR sur le modèle du secteur psychiatrique740(*). La ministre de la Santé reprend cette idée en suggérant le « décloisonnement » des services de psychiatrie pénitentiaire. Elle refuse pour cela, comme le ministère de la Justice l'avait proposé, que l'Administration pénitentiaire continue « à recruter et à payer le personnel para-médical, dont le statut resterait "cloisonné" »741(*). L'intégration du service de psychiatrie pénitentiaire à la sectorisation a pour avantage, souligne Simone Veil, de « permettre le recrutement de médecins et de personnel para-médical relevant de l'hôpital psychiatrique du lieu. Ainsi, seraient réglés les problèmes de statut et de mobilité de ce personnel qui, en cas de besoin, pourrait réintégrer les services de l'hôpital dont il dépend. Le "décloisonnement" souhaité serait donc intégralement réalisé ». A partir de cette proposition, le « décloisonnement psychiatrique » est présenté par Solange Troisier, notamment à l'occasion du congrès de médecine pénitentiaire de 1975 auquel assistent Marie-Rose Mamelet et Simone Veil, comme le symbole de la réforme de la médecine pénitentiaire :

« Je voudrais vous parler d'une innovation française qui est extrêmement importante et qui est en train maintenant de se concrétiser : il est capital que je vous parle en effet des centre médico-psychologiques régionaux, qui sont le décloisonnement de la Médecine Pénitentiaire vers le Ministère de la Santé »742(*).

Le projet d'un rattachement fonctionnel de la psychiatrie pénitentiaire au système de protection de la santé mentale, qui recueille l'assentiment des ministères de la Santé et de la Justice, se heurte cependant à l'hostilité des psychiatres hospitaliers. En atteste la position du Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH) en septembre 1974 : « S'il existe un problème des délinquants anormaux mentaux, dont il est compréhensible qu'ils puissent avoir des difficultés à séjourner dans les services pénitentiaires courants, il appartient à l'Administration pénitentiaire d'adapter certains de ses services à cette partie de sa propre clientèle »743(*).

On peut distinguer au moins trois raisons à cette hostilité des psychiatres hospitaliers à une intégration des CMPR à la politique de secteur. La première est d'ordre budgétaire, les secteurs craignant de perdre une partie des crédits qui leur sont alloués. Le SPH déclare ainsi le 24 janvier 1977 son « hostilité générale [à ce projet] dans la mesure où il ampute les crédits de la santé déjà insuffisants au bénéfice du pénitentiaire »744(*). Il existait, d'autre part, selon un magistrat de l'Administration pénitentiaire, un consensus au sein de la psychiatrie hospitalière pour considérer que le milieu carcéral était incompatible avec l'intervention de la psychiatrie publique745(*). La plupart des psychiatres hospitaliers estimaient alors, comme le souligne le Dr Hivert, psychiatre à La Santé depuis 1961, « que le milieu carcéral était pathogène et qu'il lui appartenait de modifier les conditions de vie pour réduire sa pathologie. L'institution pénitentiaire devait assumer la charge de ses malades sans faire appel au secteur »746(*). Enfin, la faible légitimité dont disposent à cette époque les psychiatres hospitaliers au sein du système de santé explique que ces derniers craignent d'être amalgamés à l'institution pénitentiaire747(*). En attestent les propos de ce psychiatre hospitalier : « Cette psychiatrie spéciale à laquelle nous sommes conviés à coopérer, sous le regard d'une presse qui n'a tendance à ne voir en nous que des gardiens de l'ordre, des fliciatres, ne risque-t-elle pas de ternir notre image... Les psychiatres des hôpitaux ont mis plus de 120 ans à sortir de leur asile vont-ils maintenant aller en prison ? »748(*). La position de refus adoptée au sein du SPH par son président, Jean Ayme, mais surtout par Michel Audisio, se résume alors en deux mots : « Discrédit et crédits »749(*).

La résistance des psychiatres hospitaliers, pouvant potentiellement mettre un terme au projet, semble s'émousser progressivement pour deux raisons. Outre l'espoir de mieux faire entendre la voie des psychiatres dans la redéfinition du Code pénal750(*), le SPH est alors sensible à l'idée que le développement des services psychiatriques en milieu carcéral permettrait de libérer des hôpitaux les patients les plus agités, jugés indésirables à un moment où est engagée une politique de « libéralisation » de la psychiatrie hospitalière. Cet argument avait déjà dans une moindre mesure prévalu dans le soutien que le CHS du Vinatier avait apporté durant les années soixante au CMPR des prisons de Lyon. Dans un bilan du fonctionnement des services psychiatriques, le Dr Daniel Gonin remarque en effet que les chimiothérapies et le service d'hospitalisation interne à la prison avaient permis de faire chuter le nombre de détenus internés de vingt-deux en 1962 à huit en 1965, « déchargeant parfois les services de l'hôpital psychiatrique craignant souvent cette sorte de clientèle »751(*).

C'est le même argument que mit en avant Jacques Mérot dans la promotion du service dont il avait la charge à Fleury-Mérogis. D'abord limité à un médecin-chef, deux internes et une infirmière, il réussit à étoffer son équipe d'un médecin-adjoint, de deux internes et de trois infirmiers supplémentaires en faisant valoir l'allégement de la charge du CHS d'Etampes752(*). Il reçut pour cela le soutien de Jean-Yves Achalle, président de la Commission médicale du CHS. Deux psychiatres pénitentiaires observent dans leur historique de l'évolution des soins en prison que « ce dernier argument sera dans les années suivantes une motivation déterminante pour vaincre les résistances des directions hospitalières et surtout des Commissions Médicales Consultatives des Hôpitaux psychiatriques où seront créés les CMPR »753(*). Cette diminution des internements tant espérée par les CHS présupposait cependant une transformation radicale des règles régissant le fonctionnement des CMPR. En vertu de l'article 21 de la circulaire du 30/09/1967, c'est en effet au chef d'établissement que revient alors toute décision quant à l'admission ou la sortie d'un détenu de l'infirmerie.

L'assurance que l'Administration pénitentiaire soit dépossédée de toute autorité en matière médicale semble avoir été une des conditions d'acceptation de la réforme imposée par le ministère de la Santé. En atteste une lettre de Simone Veil au garde des Sceaux : « On ne peut, en effet, aller à l'encontre de l'évolution des hôpitaux et des services psychiatriques qui constituent maintenant des établissements très ouverts, se consacrant à leur mission de soins, au détriment d'une fonction de gardiennage qu'il leur est difficile d'assumer »754(*). La Commission des maladies mentales du ministère de la Santé donne finalement son accord le 24 novembre 1977 au projet de réforme prévoyant la création de dix-sept CMPR755(*). La circulaire interministérielle Santé-Justice du 28 mars 1977 établit que le coût du personnel est à la charge des DDASS tandis que les frais de fonctionnement (locaux, surveillance et pharmacie) incombent ministère de la Justice. Cette « circulaire Veil », comme elle fut parfois appelée, « insiste dans son préambule sur la nécessaire prise en charge du détenu souffrant de troubles mentaux "en évitant au maximum le transfert dans les hôpitaux spécialisés de malades atteints de troubles sans gravité »756(*).

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C'est dans le cadre de la politique d'ouverture de la prison à l'égard du reste de la société, parfois appelée « décloisonnement », qu'est posée au cours des années soixante-dix, et ce pour la première fois, la question du statut des soignants intervenant en milieu carcéral. Les difficultés éprouvées par l'Administration pénitentiaire dans la prise en charge des détenus, mises en évidence par les militants de la cause carcérale, rencontrent alors favorablement le désir d'autonomie exprimé par certains professionnels. La réforme de la psychiatrie pénitentiaire de 1977, qualifiée aussi bien par les acteurs de l'époque que ceux d'aujourd'hui de « décloisonnement », répond, d'une part, à la volonté de l'Administration de disposer de davantage de moyens en matière psychiatrique et, d'autre part, au besoin de mettre fin aux critiques dont les services psychiatriques en détention étaient l'objet, aussi bien de la part des médias et des associations que de certains praticiens pénitentiaires.

Ce second objectif ne semble cependant pas avoir été atteint. Libération voit même dans ce rattachement des psychiatres à leurs confrères hospitaliers une « clarification » de la fonction pénitentiaire des psychiatres : « Dire que les asiles sont devenus des prisons sera devenue chose faite, parler de carcération en évoquant l'internement, sera du domaine du commun et écrire que les psychiatres sont des flics, sera un pléonasme »757(*). Il semblerait que cette réforme ait même accru les inquiétudes des psychiatres exerçant en institution carcérale, comme le remarque un quotidien médical à l'occasion du congrès de médecine pénitentiaire de 1978 : « Certains s'interrogent sur la fonction de normalisation des médecins. Le développement des équipes psychiatriques dans les prisons peut apparaître comme la mise en place d'un réseau de contrôle social diffus, comme un moyen de déresponsabilisation de l'institution judiciaire aussi, dans la mesure où elle se porte garante de l'intégrité psychique des détenus » (QDM, 24/11/1978).

Cette contestation n'est probablement pas sans lien avec le nombre croissant de détenus souffrant de troubles mentaux. La possibilité d'hospitaliser ces derniers dans les CMPR, dotés de lits, est l'objet de conflit. A l'occasion d'un cours de médecine pénitentiaire, le Dr Hivert, médecin-chef du CMPR de La Santé, observe qu' « il restera toujours un type de grands malades mentaux qui n'auront jamais leur place tout au mois en période de décompensation, en prison et pour lesquels il y aura toujours une nécessité de passage à l'hôpital psychiatrique »758(*). Le Pr Troisier intervient alors, comme en atteste la retranscription du cours, pour souligner l'inadéquation croissante entre les détenus et les hôpitaux psychiatriques tels qu'ils sont désormais conçus :

« Quand je vais dans des hôpitaux psychiatriques, en particulier à Prémontré où je me suis rendue récemment, quand je vois mes malades mentaux, ils me disent qu'ils veulent retourner en prison, qu'ils y sont plus heureux. Je crois que l'atmosphère, en particulier la cohabitation, avec un certain nombre de graves malades mentaux est difficile, pour nos détenus qui sont certes dangereux mais ne sont pas très malades. D'ailleurs ils s'évadent souvent et je ne pense pas que l'hôpital ouvert est satisfaisant du tout pour l'esprit. C'est la raison pour laquelle je me bats tellement pour que nos CMPR soient de plus en plus grands. J'essaie d'augmenter le nombre de lits. A Metz il y avait énormément de bureaux pour les thérapeutes et je pense que plus nous aurons de lits, moins il y a aura d'hospitalisations et mieux notre prise en charge sera valable »759(*).

Le risque de « psychiatrisation des détenus », soulevée par certains praticiens, est repris à son compte lors du congrès de 1978 par le garde des Sceaux, Alain Peyrefitte : « Il faut se garder des dangereuses facilités intellectuelles qui font voir en chaque délinquant un malade mental. Cette position est rassurante pour l'esprit, elle permettrait, si on l'adoptait, de remplacer les grillages des prisons par les piqûres calmantes » (Libération, 25-26/11/1978). En dépit de ce rappel à l'ordre unanimement salué, l'image de la camisole chimique perdure au sein des médias : « En prison, on consomme aussi beaucoup de médicaments, surtout des euphorisants et des petites pilules pour dormir. C'est ce qu'on appelle la "camisole chimique" qui aide à supporter l'incarcération »760(*). Cette réforme permet néanmoins, à l'exception de quelques établissements où l'autonomie déjà acquise par le personnel évolue peu (par exemple à M.A de La Santé)761(*), la création d'équipes médicales relativement bien structurées. Cette nouvelle organisation des soins psychiatriques aux détenus, sur laquelle l'Administration pénitentiaire perdra tout contrôle de façon définitive en 1986, soulignera progressivement les carences de la médecine somatique rendant sa réforme d'autant plus nécessaire.

E

n proposant de limiter la peine à la seule privation de liberté, Valéry Giscard d'Estaing inaugura un nouvel idéal carcéral largement inspiré des revendications de professionnels et des réflexions des spécialistes des questions pénitentiaires. En présentant une alternative au modèle sécuritaire qui avait prévalu jusque-là, leur objectif était de mettre fin aux mouvements de critique qui avaient ébranlé l'institution carcérale, de l'intérieur comme de l'extérieur. L'abolition des prisons, alors évoquée par certains grands criminologues, céda progressivement la place à la définition d'un lieu « privatif de liberté » dont l'effet de désocialisant serait le plus réduit possible. S'il contribua in fine à légitimer le recours à l'incarcération, ce nouvel idéal carcéral fut également à l'origine de nombreuses transformations de l'institution pénitentiaire.

La notion de « décloisonnement » peut ainsi être analysée comme la « traduction », du point de vue des sciences pénitentiaires et de ceux qui intervenaient en détention, de la principale revendication défendue au début des années soixante-dix par les militants de la cause carcérale : mettre fin à la coupure entre le dedans et le dehors qui condamnait à l'échec, selon eux, cette institution initialement destinée à « ré-insérer ». Décloisonner la prison signifiait dès lors faire tomber les murs invisibles qui empêchaient jusque-là que les détenus puissent jouir de leurs droits, à l'exception de celui d'aller et venir. Présenté comme un outil de domination en faveur d'une minorité, le droit fut désormais pensé comme un instrument au service des détenus. Certes le droit à la santé ou le droit au travail tant réclamés demeurent privés de toute consécration législative. Ils n'en constituent pas moins des ressources symboliques fortes dans la tentative de réformer la prison. C'est ainsi qu'est justifié l'octroi de certains droits sociaux (assurances vieillesse, maternité et maladie). Le bénéfice de la Sécurité sociale se heurte cependant à la volonté de l'Administration pénitentiaire de maintenir le contrôle de l'organisation des soins ainsi qu'au désintérêt des caisses chargées de son application.

La crainte du ministère de la Justice de voir s'autonomiser certains professionnels intervenant en détention coïncide avec le manque d'intérêt des acteurs non pénitentiaires. C'est sur la base d'un accord tacite établi entre les ministères de la Justice et de la Santé que demeure inchangé le statut de l'organisation des soins somatiques en prison. Le décloisonnement fut ainsi inégalement mis à profit par les professionnels travaillant en détention afin de s'autonomiser de la tutelle pénitentiaire. La psychiatrie, soumise à de nombreuses critiques et dotée d'une d'autonomie déjà importante, bénéficia de l'appui du ministère de la Santé pour s'affranchir du cadre carcéral. Plus dispersés, bénéficiant de ressources moindres, les généralistes étaient moins en mesure de défendre leur autonomie. Ils représentaient également un enjeu plus important pour l'Administration, réticente à s'en dessaisir. La rédaction des certificats médicaux en cas de coups et blessures, le placement à l'isolement, le traitement des grévistes de la faim sont autant de circonstances où l'Administration souhaite pouvoir disposer du soutien du praticien. La médecine somatique représente, d'autre part, un enjeu numérique important puisqu'on compte en 1978 cent quatre-vingt-deux généralistes et cinquante-quatre spécialistes contre seulement vingt-cinq psychiatres762(*). Le nouveau dispositif psychiatrique apparaît peu menaçant à l'égard de l'Administration pénitentiaire, comme le souligne ce magistrat ayant participé à la mise en oeuvre des réformes adoptées sous Giscard :

« Les CMPR c'était quand même des petites structures. Et ils n'étaient pas bien intégrés dans la prison. C'était un personnage étranger. Ils étaient très faibles. Et il y avait très peu de psy. C'étaient surtout des infirmiers [...] Il y en avait très peu de psychiatres. D'autant plus qu'ils avaient comme discours qu'ils voulaient rester très loin de la prison. Ils n'effrayaient pas »763(*).

Tout en permettant pour la première fois à des praticiens d'être autonomes de la DAP, la réforme des soins psychiatriques de 1977 contribua à diviser davantage le corps médical travaillant en milieu carcéral. Désormais, remarque le Dr Daniel Gonin, deux médecines cohabitent : « L'individualisation des deux médecines est accentuée par le fait que les praticiens de chacune de ces deux disciplines ont leur patron propre et non des moindres : ministère de la Justice pour la médecine pénitentiaire, ministère de la Santé pour la médecine psychiatrique »764(*). Cette cohabitation n'est pas sans problèmes. La venue de praticiens hospitaliers provoque la jalousie de certains médecins pénitentiaires, soucieux de conserver le contrôle qu'ils exerçaient parfois, en tant que médecin-chef de l'établissement, sur l'organisation des soins. Un généraliste, disposant d'une forte ancienneté, s'étonne ainsi dans un courrier adressé au Directeur de l'administration pénitentiaire que le contrôle des prescriptions médicales du CMPR lui échappe765(*). Les différences de moyens dont disposent désormais les psychiatres et généralistes766(*) rend alors de plus en plus criante la « misère » de l'organisation des soins somatiques, comme le souligne un magistrat de la DAP :

- « Et par contre cette réforme de la psychiatrie, est-ce que ça n'a pas entraîné de grandes différences entre d'un côté les généralistes et de l'autre les psychiatres ?

- Mais bien sûr ! Vous avez absolument raison ! C'était flagrant. Vous aviez, au moins dans ces quelques grandes Maisons d'arrêt, des équipes de psychiatrie qui étaient fortes, qui étaient structurées. Et pour cause, c'étaient des structures de droit commun. Et à côté, il y avait la misère ! Il y avait la misère... Je n'ose même pas dire l'équipe somatique »767(*).

La notion de décloisonnement et le nouvel idéal carcéral affectent ainsi peu dans l'immédiat l'organisation des soins somatiques. Ils transforment cependant la représentation que de nombreux magistrats ont de l'institution pénitentiaire et ne produiront leurs effets que plus tard. Les réticences du ministère de la Justice à se dessaisir de l'ensemble de l'organisation des soins aux détenus rencontrent à ce moment la volonté du Médecin-inspecteur, désireux de faire de la médecine pénitentiaire une nouvelle spécialité médicale. Très politisée, Solange Troisier a pour tâche, lorsqu'elle est nommée, de mettre fin aux critiques adressées à la prise en charge médicale des détenus depuis quelques années. Elle ambitionne pour cela de faire de la médecine pénitentiaire une spécialité médicale reconnue dont elle serait la « patronne ». Les particularités de cet exercice médical viendraient justifier son organisation spécifique, et notamment la tutelle de la Chancellerie, faisant du praticien un « auxiliaire de Justice ». Il s'agit ainsi, comme l'a souvent répété Solange Troisier, de lier de façon inextricable Thémis et Asclépios.

* 694 « La médecine dans les prisons », France Inter, 13H, 13/11/1975, 10 minutes, Archives INA.

* 695 BEAUCHESNE Hervé, « Médecine pénitentiaire », Perspectives psychiatriques, n°42, 1973, pp.7-8.

* 696 Rappelons une nouvelle fois que la mise en avant des critiques adressées à la prise en charge sanitaire des détenus, ici en matière psychiatrique, ne vise pas à scandaliser le lecteur mais à souligner la pression médiatique s'exerçant sur ce secteur d'action publique indissociable, d'après nous, de sa réforme, ici en 1977.

* 697 MOREAU, « Médecin de prison : un "civil" à tout faire au royaume de l'absurde », Tonus, 14/08/1972.

* 698 Cf. Annexe 10 : « Les mouvement de remise en cause de la psychiatrie institutionnelle depuis la Libération ».

* 699 Esprit et Le Monde font ainsi état du mouvement d'opinion italien à l'encontre des « manicomi giudiziari » où seraient incarcérés, dans des conditions déplorables, « des "criminels" atteints de troubles mentaux et aussi des détenus ordinaires "rebelles" au régime des prisons » (« Les asiles pénitentiaires », Esprit, 04/1975, pp.562-563).

* 700 LIVROZET Serge, Aujourd'hui, la prison, op.cit., p.168.

* 701 « Prisons. Une répression nouvelle : la camisole chimique », Libération, 6/02/1974.

* 702 « Démissionnaires, trois médecins de la prison de La Santé s'expliquent », Le Figaro, 30/11/1972.

* 703 Si la plupart des thèses critiques citées ici proviennent d'internes ayant exercé à Fleury-Mérogis, c'est en raison de la forte synergie qui a eu lieu entre l'équipe psychiatrique chargée de cet établissement et l'hôpital psychiatrique de l'Essonne, comme cela sera détaillé plus loin.

* 704 DESLAURIERS Michel, Aspects actuels de la médecine dans une prison modèle : Fleury-Mérogis, thèse de médecine, faculté de Paris Saint-Antoine, sous la direction du Pr Ceccaldi, 1974, p.66.

* 705 DEJOURS Christophe, « Réflexions sur les rôles respectifs... », art.cit., pp.17-19.

* 706 LEDERMANN Rosette, Le service médico-psychologique à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis, diplôme de psychiatrie, Faculté de Paris, 1972.

* 707 KLEISS Jean, Expérience psychiatrique en milieu carcéral, thèse de médecine, Faculté de médecine de Paris VI Pitié-Salpêtrière, 1976, pp.10-11.

* 708 Cf. Annexe 18 : « Le regard désenchanté d'un interne en psychiatrie sur l'utilité de sa présence en milieu carcéral ».

* 709 ROULLEAU Claude-Alain, La psychiatrie en prison, mémoire de CES en psychiatrie, faculté de médecine, université Lyon 1, 1976, pp.15-22.

* 710 MARTZLOFF François, Détention provisoire, médicaments psychotropes et psychiatrisation, thèse de médecine, Faculté de Paris-Créteil, 1975.

* 711 « "Camisole chimique" à La Santé ? Une thèse sur l'abus des tranquillisants en milieu carcéral », Le Monde, 13/11/1975 ; « La médecine dans les prisons », France Inter, 13H, 13/11/1975, 10 minutes, Archives INA.

* 712 Les traitements quotidiens, rapportés à mille détenus, d'hypnotiques sont passés de 47 en 1969 à 416 en 1973, les traitements sédatifs de 90 en 1969 à 266 en 1973 et les traitements par anti-dépresseurs de 784 à 1.436.

* 713 MARTZLOFF François, Détention provisoire..., op.cit., pp.35-92.

* 714 Psychiatrie aujourd'hui, 01-02/1972, n°7 ; Perspectives psychiatriques, n°42, 1973.

* 715 Cf. Annexe 7 : « La création des CMPR en 1967 : un début de reconnaissance de la psychiatrie pénitentiaire ».

* 716 SCHAUB-LANDAU Sylvie, « Réflexions sur les limites du rôle de l'équipe médico-psychologique en milieu pénitentiaire. A propos de candidats suicidaires ou de refus d'aliments », RPDP, 01-03/1972, pp.41-48. p.41.

* 717 Sont présents Paul Hivert, Albert Grasset, médecin-chef de l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police, François Benrais, psychiatre à La Santé, Jacques Breton, psychiatre à la préfecture de police, Henri Grivois, psychiatre à la salle Cusco de l'Hôtel-Dieu, Jean-Louis Haas, interne à Fleury-Mérogis, Anne Leduc, neuropsychiatre à la Santé, André Mathé, psychiatre à la Centrale de Melun, Jacques Mérot, psychiatre à Fleury-Mérogis, Jean-Claude Ollivier, psychiatre à La Santé, Guy Pariente, interne à La Santé, Jean-Claude Richiéro, psychiatre à La Santé, (GRASSET Albert, MATHE André, « Le psychiatre et le fonctionnement du système pénitentiaire », RPDP, 07-09/1975, pp.383-402. p.383).

* 718 Ibidem, p.391.

* 719 Ibidem, p.390.

* 720 Cette présentation s'appuie notamment sur les travaux suivants : BEDAT, L'annexe psychiatrique de la M.A de Lyon, thèse de médecine, Faculté de Lyon, 1964 ; GEOFFRAY Denise, Psychiatrie-prison. Passé, présent, perspectives, thèse de médecine, Faculté de Lyon, 1986.

* 721 Daniel Gonin, psychiatre puis généraliste à la M.A de Lyon de 1967 à 1989. Entretiens réalisés les 25/02/2008, 10/03/2008, 26/03/2008. Durées : 2H ; 2H ; 2H.

* 722 BROUSSOLE, THIEBAULT, BOUVART, ROQUES, « Quatre années de cure de répulsion alcoolique à l'annexe psychiatrique des prisons de Lyon », Revue de l'alcoolisme, n°1, 1961.

* 723 Daniel Gonin, psychiatre puis généraliste à la M.A de Lyon de 1967 à 1989. Entretiens réalisés les 25/02/2008, 10/03/2008, 26/03/2008. Durées : 2H ; 2H ; 2H.

* 724 GONIN Daniel, La santé incarcérée, op.cit., pp.78.

* 725 Ibidem, pp.79-80.

* 726 BEDAT, L'annexe psychiatrique de la M.A de Lyon, op.cit. p.119.

* 727 GEOFFRAY Denise, Psychiatrie-prison. Passé, présent, perspectives, op.cit., p.40.

* 728 GONIN Daniel, « Une expérience de douze années à l'annexe psychiatrique de la maison d'arrêt de Lyon », L'information psychiatrique, 1966, n°9, p.890.

* 729 BEDAT, L'annexe psychiatrique de la M.A de Lyon, op.cit. p.123.

* 730 GEOFFRAY Denise, Psychiatrie-prison. Passé, présent, perspectives, op.cit., p.42.

* 731 DESLAURIERS Michel, Aspects actuels de la médecine dans une prison modèle..., op.cit, p.45.

* 732 MEROT Jacques, DUBEC Michel, « Réalité psychiatrique à Fleury-Mérogis », L'information psychiatrique, vol. 54, 2, février 1978, p.138.

* 733 Lucien Bonnafé (1912-2003) est un psychiatre « désaliéniste » ayant participé à la mise en place de la politique de secteur. Son appartenance au Parti communiste français ne l'a pas empêché de dénoncé l'instrumentalisation de la psychiatrie par l'URSS. Il est aussi connu pour sa mise en valeur du rôle des infirmiers psychiatriques. Cf. FOURQUET François, MURARD Lion, Histoire de la psychiatrie de secteur, Paris, Encres, « Editions de recherche » (1ère éd.1975), 1980, p.86.

* 734 Lucie, psychiatre, membre de la DGS de 1985 à 1988, médecin-chef du SMPR de Rouen de 1989 à 1996 et membre de la DGS de 1994 à 1996. Entretiens réalisés les 2/02/2006 et 5/05/2006, 4H et 2H45.

* 735 Yvan Zakine, magistrat affecté à la DAP de 1962 à 1970 puis directeur de la DAP de 1981 à 1983. Entretien réalisé le 20/03/2008. Durée : 3H00.

* 736 DARMON Marco, « L'exclusion pénitentiaire », art.cit, p.141.

* 737 Lettre de Jacques Petit à Solange Troisier datée du 7/12/1973 (CAC. 19830701. Art.482).

* 738 HIVERT Paul, « Les C.M.P.R. Aspects historiques », L'information psychiatrique, vol. 59, 2, 1983, p.157.

* 739 Lettre du ministre de la Santé au garde des Sceaux du 29/04/1975, 4 pages. Archives internes DAP.

* 740 HIVERT Paul, « Les C.M.P.R. Aspects historiques », art.cit.

* 741 Lettre du ministre de la Santé au garde des Sceaux du 29/04/1975, 4 pages. Archives internes DAP.

* 742 TROISIER Solange, « Séance inaugurale de Madame le Professeur S. Troisier », Attestation d'études relatives à la médecine pénitentiaire. Année universitaire 1979-1980, Université Paris VII, Faculté de médecine de Lariboisière- Saint Louis, p.5.

* 743 AYME Jean, Chroniques de la psychiatrie publique, Ramonville-Sainte-Agne, Eres, 1995, p.280.

* 744 SENON Jean-Louis, RICHARD Denis, « Punir ou soigner : histoire des rapports entre psychiatrie et prison jusqu'à la loi de 1994 », RPDP, 1999, n°1, p.106.

* 745 DARBEDA Paul, « L'administration pénitentiaire. Prise en charge des détenus atteints de troubles mentaux », Soins Psychiatrie, n° 116-117, juin-juillet 1990, p.19.

* 746 HIVERT Paul, « Les C.M.P.R. Aspects historiques », art.cit., p.156.

* 747 L'ancien président du SPH rappelle ce contexte : « Au milieu des années 70, la politique de secteur est en pleine extension [...] Il n'en reste pas moins que, dans l'opinion publique, l'hôpital psychiatrique conserve la même image de lieu d'enfermement [...] La presse n'est pas en reste dans ce dénigrement [...] La colère des psychiatres est à son comble » (AYME Jean, « Les rapports historiques de la psychiatrie et de la médecine légale, de l'hôpital psychiatrique et de la prison » dans DORMOY Odile, Soigner et/ou punir, Editions l'Harmattan, Paris 1995, p.33).

* 748 FORTINEAU Jacques, « Les psychiatres des hôpitaux en prison ? », Bulletin des psychiatres des hôpitaux, 1977, n°3, pp.18-19.

* 749 AYME Jean, « Les rapports historiques de la psychiatrie et de la médecine légale... », art.cit., p.34.

* 750 La commission Santé-Justice de 1974 ayant notamment pour fonction de réformer l'article 64 permettant les internements psychiatriques forcés, auxquels étaient défavorables les psychiatres hospitaliers, le président du SPH espérait « en contrepartie, être mieux entendus à la commission de refonte du Code pénal » (AYME Jean, Chroniques de la psychiatrie publique, op.cit., p.331).

* 751 GONIN Daniel, « Une expérience de douze années à l'annexe psychiatrique... », art.cit., p.888.

* 752 HIVERT Paul, « Les C.M.P.R. Aspects historiques », art.cit., p.157.

* 753 SENON Jean-Louis, RICHARD Denis, « Punir ou soigner... », art.cit., p.106.

* 754 Lettre du ministre de la Santé au garde des Sceaux du 29/04/1975, 4 pages. Archives internes DAP.

* 755 La circulaire du 30/09/1967 créant les CMPR était restée lettre morte dans de nombreux établissements. C'est le cas à Rennes où un CMPR voit le jour en novembre 1977 malgré les réticences du Conseil général et du Centre hospitalier spécialisé en psychiatrie de Rennes dont la Commission médico-consultative adopte le voeu qu'« il ne faudrait pas que ce centre ait comme conséquence de réaliser au C.H.S.P une concentration de repris de justice difficiles ou dangereux. On ne pourrait en effet pas avec les structures actuelles du C.H.S.P réaliser ici un PSEUDO-SARREGUEMINES ou un PSEUDO-CADILLAC » (BERTHET Jean-Paul, Contribution à l'étude de la psychiatrie en prison : à propos d'un an de pratique au Centre Médico-psychologique pénitentiaire régional de Rennes, thèse de médecine, université de Rennes, thèse sous la direction du Pr Michaux, 1983, p.43).

* 756 Ibidem, p.38.

* 757 « Les prisons-Asiles », Libération, 4/10/1977.

* 758 HIVERT Paul, « Les hospitalisations de malades mentaux », Attestation d'études relatives à la médecine pénitentiaire. Année universitaire 1979-1980, Université Paris VII, Faculté de Lariboisière-Saint Louis, p.2.

* 759 Ibidem, p.3.

* 760 « Dijon, capitale de la médecine pénitentiaire », JT 20H, Antenne 2, 24/11/1978, Archives INA.

* 761 JACQUETTE Philippe, « À propos de la psychiatrie en prison : du mythe à la réalité », Actes, 13-14, 1977, pp.17-25.

* 762 « La médecine en milieu pénitentiaire », cours de l'ENAP, 22/11/1978. Archives internes DAP.

* 763 Favard Jean, magistrat à la DAP de 1970 à 1975 puis Conseiller technique du ministre de la Justice de 1981 à 1986. Entretien réalisé le 10/012008, 3H00.

* 764 DAP, Premier congrès mondial de médecine pénitentiaire, op.cit., p.123.

* 765 Lettre de Dablanc, DAP, au médecin-chef de la M.A de Poitiers du 8/05/1980 (CAC. 19940511. Art. 96).

* 766 C'est par exemple le cas à la M.A de Fleury-Mérogis dont le CMPR comprend un médecin-chef temps plein, un médecin assistant temps-plein, 4 postes d'internes, 3 psychologues, 4 infirmières et une secrétaire médicale alors que le service de médecine générale ne dispose que d'un médecin-chef vacataire, de 4 internes et de 4 infirmières pour une charge de travail bien plus conséquente (WIRTH Jean-François, « Organisation de la psychiatrie à Fleury-Mérogis », Attestation d'études relatives à la médecine pénitentiaire. Année universitaire 1979-1980, Université Paris VII, Faculté de Lariboisière-Saint Louis, p.1).

* 767 Jacques, magistrat chargé à la DAP de la réglementation sanitaire de 1982 à 1989. Entretien réalisé le 11/01/2008, 3H30.

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