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L' apport de l'arbitrage à  la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA


par BIKOI Jacques delor
Université de Yaoundé 2 - Master professionnel en Droit privé/option Droit, pratiques juridiques et judiciaires  2016
  

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B. La prise en compte de la lex mercatoria dans l'arbitrage OHADA

Entendue comme étant la loi des commerçants ou de la societas mercatorum132, la lex mercatoria trouve sa source dans les usages du commerce international qui en constituent la pierre angulaire. M. ERDEN écrivait d'ailleurs à ce titre que « It can be said that the trade usages constitute the core and one of the main sources of lex mercatoria »133.Selon Berthold GOLDMAN, ces dernières s'entendent comme étant « les comportements des opérateurs dans les relations économiques internationales, qui ont acquis progressivement, par leur généralisation dans le temps et dans l'espace, que peut renforcer leur constatation dans la jurisprudence arbitrale, ou éventuellement étatique, la force de véritables prescriptions qui s'appliquent sans que les intéressés aient à s'y référer, dès lors qu'ils n'y ont pas expressément ou clairement dérogé ».134 Emmanuel JOLIVET est du même avis lorsqu'il affirme que « l'usage est une habitude professionnelle d'origine concertée »135. Il ressort donc que pour être qualifiés d'usages, les comportements ou habitudes professionnelles doivent être anciens, leur application par les acteurs du commerce constante dans le temps et enfin, ils doivent s'imposer comme la solution la mieux adaptée aux besoins du commerce international136.

Selon YOUGONE Nicéphore137, les usages du commerce international sont classés en deux grandes catégories. La première regroupant les usages établis par les parties entre elles,

131 J-M. TCHAKOUA, « L'arbitrage et les investissements internationaux en Afrique noire francophone : un mot sur la compétence de l'arbitre », Rev. Juridis périodique, n°31, p.67.

132 F. OSMAN, Les principes généraux de la lex mercatoria, Contribution à l'étude d'un ordre juridique anational, Paris, LGDJ, 1992, pp. 338 à 346.

133 H. E. ERDEM, « The role of trade usages in ICC arbitration », in Liber Amicorum en l'honneur de Serge LAZAREFF, Paris, A. Pedone, 2011, p. 247 à 265, spéc. p. 250.

134 Sur cette définition v. note sous la décision de la C. Cass. 1ère Ch. Civ., du 22 octobre 1991, Compania Valenciana de Cementos Portland SA c/ Sté Primary Coal, Inc., JDI, 1992, p. 184. Cette définition a été aussi citée par E. JOLIVET, Les Incoterms, Etudes d'une norme du commerce international, Paris, Litec, 2003, p. 363. V. F. Y. NICEPHORE., op.cit., p.324.

135Op.cit., p. 361.

136V. H. E. ERDEM, op.cit., p. 249. F.Y. NICEPHORE, Ibid.

137Op.cit., p.325.

Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 32

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c'est-à-dire les usages entre professionnels, et la seconde correspondant à celles qui excèdent le cercle des professionnelles du commerce pour s'appliquer de manière générale dans le monde entier et au transactions commerciales de toute nature. L'auteur démontre que la première catégorie d'usages peut être sectoriels ou corporatifs, c'est-à-dire limités à un type d'activité particulier et que Parmi ces usages, tandis que certains jouent un rôle précis dans la sécurisation des échanges commerciaux comme la présomption de compétence des opérateurs du commerce international, l'effectivité de la clause compromissoire et l'inopposabilité du défaut de pouvoir du négociateur du contrat. D'autres correspondent aux besoins de mutabilité dans les relations commerciales comme la présomption d'acquiescement à l'acte d'exécution différent de celui défini par le contrat et l'obligation de renégocier. La particularité de ces usages étant qu'ils constituent des normes impératives pour les opérateurs du commerce international.

Quant à la deuxième catégorie, on y retrouve le principe de bonne foi contractuelle ou l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui et les obligations naissant d'une relation contractuelle, comme l'exécution de bonne foi, l'obligation de coopération et de renseignement entre autres. Dans tous les cas, institués pour garantir la stabilité, la cohérence et à la permanence des règles qui gouvernent les rapports entre les acteurs du commerce international, la lex mercatoria ou au sens large les usages du commerce international constituent un véritable ordre juridique à part entière qui peut être qualifié « d'ordre juridique mercatique »138.

À ce titre, l'OHADA n'est pas en reste. L'article 15 alinéa 1er AUA dispose : « le tribunal arbitral tranche le fond du différend conformément aux règles de droit choisies par les parties. À défaut de ce choix par les parties, le tribunal applique les règles de droit qu'il estime les plus appropriées en tenant compte, le cas échéant, des usages du commerce international ». De même, l'article 17 alinéa 2 du règlement d'arbitrage CCJA qui traite de la loi applicable au fond du litige dispose que « dans tous les cas, le tribunal arbitral tient compte des stipulations du contrat et des usages du commerce international ». Ainsi, dans un arbitrage ad hoc, lorsque les parties n'auront pas opté pour un droit spécifique, le tribunal arbitral pourra, en cas de nécessité, trancher au fond en prenant en compte la lex mercatoria.

138 V. A. PELLET, « La lex mercatoria « tiers ordre juridique » ? Remarques ingénues d'un internationaliste de droit public », in Souveraineté étatique et marchés internationaux à la fin du 20ème siècle A propos de 30 ans de recherche du CREDIMI, Mélanges en l'honneur de Philippe Kahn, Paris, Litec, 2000, pp. 53- 74, spéc., p. 69.

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Cette prise en compte est obligatoire dans l'arbitrage se tenant sous l'égide de la Cour. D'ailleurs, dans l'affaire Société ivoirienne (SIR) c/ BONA SHIPHOLDING, la Cour estima qu'a statué en droit l'arbitre qui s'est référé aux usages du commerce international dès lors que ceux-ci sont connus par les parties et appliqués de manière constante. Aussi, elle décida qu'en se référant aux usages du commerce dont l'existence n'était pas contestée par la requérante, le tribunal arbitral avait statué en droit ainsi qu'il en avait l'obligation, conformément au procès-verbal du 13 septembre 2004139. En pratique, Il pourra s'agir par exemple des usages codifiés par la CCI que sont les incoterms, des usages contenus dans la réglementation de la fédération du commerce des cacaos (FCC)140 ou encore des principes UNIDROIT qui, selon plusieurs acteurs, ne sont rien d'autre qu'une transcription écrite de la lex mercatoria au sens large141. Une telle prise en compte de la lex mercatoria dans l'arbitrage de l'OHADA traduit la volonté du législateur africain de garantir aux acteurs économiques surtout internationaux stabilité, prévisibilité, lisibilité, cohérence et permanence de la règle de droit dans le commerce international. Dans tous les cas, le rôle de la lex mercatoria dans la sécurisation juridique des activités économiques est surtout perceptible dans le fait que les arbitres les utilisent soit pour combler les lacunes des lois nationales, soit pour interpréter le contrat des parties142.

139 CCJA, Arrêt n°029/2007 du 19 Juillet 2007, affaire Société ivoirienne de raffinage dite SIR SA contre 1°/ BONA SHIPHOLDING Ltd, 2°/ Monsieur ATLE LEXEROD, 3°/TEEKAY SHIPPING NORWAY AS, 4°/TEEKAY SHIPPIND CANADA Ltd, 5°/STANDARD STEAMSHIP OWNER'S PROTECTION AND INDEMNITY ASSOCIATION Ltd., RTDA, n°867, pp. 226 et s.

140 V. F.N. YOUGONE, op.cit., p. 331.

141 Ibid., p.362.

142Ibid., V. A. PRUJINER, « Comment utiliser les Principes d'Unidroit dans la pratique contractuelle ? », Revue Juridique Thémis, 2002, n°36-2, p. 567 ou l'auteur affirme que « (...) les Principes d'Unidroit se présentent comme une traduction de la lex mercatoria ». V. aussi A.-M. TRAHAN, op.cit., p. 631 où elle cite M. J. BONELL et L. DA GAMA E SOUZA Jr., comme étant des partisans de la consécration des Principes comme l'expression d'une nouvelle lex mercatoria. A contrario, L. MARQUIS, op.cit., p. 554 est plus prudent quant à la qualification des Principes, il préfère y voir une sorte de conscience du monde des affaires (un modus vivendi) plutôt que de la lex mercatoria.

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CONCLUSION DU CHAPITRE I

La sécurité juridique peut être présentée comme une condition essentielle du développement durable. Ainsi, si l'arbitrage occupe de plus en plus une place particulière dans le monde des affaires, c'est parce qu'il représente une des garanties les plus sures de sécurisation des activités économiques. Voilà pourquoi le législateur africain a tenu à en faire le mode par excellence de règlement des différends d'ordre contractuel dans l'espace OHADA. On peut donc observer à travers les textes communautaires143 une contribution de l'arbitrage à la sécurité juridique des activités économiques dans les États parties. Cette observation peut se faire à trois niveaux.

Tout d'abord, un regard jeté vers l'histoire politique et juridique des États qui forment aujourd'hui l'OHADA révèle que l'érection d'un droit supranational de l'arbitrage a permis de garantir non seulement l'existence d'un droit accessible au double plan substantiel et matériel, mais également prévisible et stable.

En outre, la contribution à la sécurité juridique s'entrevoit à travers l'originalité de l'arbitrage OHADA. Une originalité traduite par la consécration et l'encadrement du principe l'unité du régime juridique qui permet de faciliter la mise en oeuvre des procédures arbitrales dans l'espace communautaire.

Enfin, à travers l'extension de l'arbitrabilité subjective aux personnes morales de droit public et la prise en compte de la lex mercatoria, le système d'arbitrage OHADA fait preuve d'un modernisme remarquable. Un modernisme qui participe à la sécurité juridique dans la mesure où, tout en favorisant l'adaptation de l'arbitrage communautaire aux réalités du commerce international, il permet d'assurer la cohérence, la stabilité et la prévisibilité des règles applicables en matière d'arbitrage, le tout au bénéfice des acteurs du commerce interne et à ceux du commerce international. Cependant, si la sécrétion des règles de droit favorables à la sécurité juridique est d'une nécessité indéniable pour le développement économique, il reste encore à les mettre correctement en oeuvre lorsqu'un litige se présente. Ce qui pose le problème de la manière dont la justice est rendue et donc de la sécurité judiciaire.

143 Traité OHADA, AUA, RA/ CCJA.

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Quid de la contribution de l'arbitrage OHADA à la sécurité judiciaire des activités économiques dans l'espace juridique intégré ?

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UNE CONTRIBUTION PERCEPTIBLE DE L'ARBITRAGE OHADA A LA SÉCURITÉ JUDICIAIRE

CHAPITRE II

Selon le Docteur TAMKAM SILATCHOM Guy Armel, « Dans un espace de liberté, la disparité des juridictions ne peut qu'encourager la préférence des investisseurs pour le mode arbitral de règlement de différend. D'une manière générale, on observe que les procédures judiciaires nationales ne conviennent pas au règlement du contentieux de l'investissement international »144. Cette affirmation traduit la vérité de la Palice que les systèmes judiciaires des États de l'Afrique subsaharienne présentent de nombreuses défaillances. Dans la majeure partie des cas, on y constate le délabrement de l'appareil judiciaire, l'absence de célérité dans le rendu des décisions de justice, la dépendance et la partialité des magistrats, la corruption de ces derniers, voire l'insuffisance de leur formation, qui les rend incapables à s'acclimater aux questions parfois économiques ou financières qui caractérisent très souvent les litiges commerciaux145. De tels problèmes constituent inévitablement un facteur majeur de dégradation du climat des affaires en Afrique ; étant donné que l'attractivité d'un État procède en grande partie de la confiance que les opérateurs économiques ont à l'égard de la justice dudit État. C'est dire que l'amélioration du climat des affaires dépend largement de la bonne marche de la justice, de la manière dont elle est rendue et de sa capacité à garantir une sécurité maximale aux investisseurs. À ce titre d'ailleurs, le Professeur Roger MASSAMBA écrivait que « l'amélioration du climat des investissements est largement tributaire de la bonne marche de la justice, c'est-à-dire d'une justice crédible, équitable, capable de dire le droit avec compétence et de sécuriser les justiciables »146. Tel n'étant pas le cas dans les État africains, l'OHADA s'est fixé comme objectif l'encouragement au recours à l'arbitrage pour le règlement des litiges d'ordre contractuel. Aussi, s'est-il doté d'un système d'arbitrage communautaire, en vue de renforcer la confiance des investisseurs tant locaux qu'étrangers et d'améliorer significativement le climat des

144 G. A. TAMKAM SILATCHOM, La contribution de l'arbitrage à la promotion des investissements : étude comparée des systèmes d'arbitrage de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA) et du Centre International pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), Thèse, Université de Yaoundé II, 2015, p. 5.

145 R. MASSAMBA, op.cit., p.143. 146Ibid., p.140.

Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 37

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affaires dans l'espace juridique intégré. On peut donc observer la contribution de l'arbitrage OHADA à la sécurité judiciaire à travers la célébration de l'autonomie de la volonté (Section 1), l'exigence des principes directeurs d'une bonne justice (Section 2) et l'assistance du juge d'appui (Section 3) qui permettent de prévenir certaines incertitudes judicaires, de garantir des procès justes et équitables aux acteurs économiques, ainsi que l'efficacité de ce mécanisme de règlement des différends dans l'espace OHADA.

Section 1 : La célébration de l'autonomie de la volonté, une source de
prévention des incertitudes judiciaires nuisibles aux droits économiques des

parties

L'arbitrage est un mécanisme de règlement des différends fortement marqué par l'autonomie de la volonté. Cette prééminence se justifie par le fait que dans sa nature, avant d'être juridictionnel l'arbitrage est contractuel. Ainsi, dans cette matière, la volonté des parties représente la clé de voute. Elle constitue la seule base du processus arbitral, de telle sorte que le pouvoir d'un tribunal arbitral ne doit provenir que d'une référence consensuelle147. Il s'agit d'une justice privée dont l'existence est fondée sur l'expression du consentement (Paragraphe 1), qui permet aux parties de définir librement les modalités de leur arbitrage (Paragraphe 2).

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius