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La communication du tourisme en zone de conflit. Le cas des communes de Ziguinchor et Djembering (basse Casamance).


par Diaw Pape Mactar
Université Assane Seck de Ziguinchor - Master 2 en management des activités du tourisme et culture 2020
  

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3.3 Les enjeux géopolitiques

Pour Ratzel (1988), la géopolitique est « la science qui établit que les caractéristiques et conditions géographiques, et plus spécialement les grands espaces, jouent un rôle décisif dans la vie des Etats, et que l'individu et la société humaine dépendent du sol sur lequel ils vivent ayant son destin déterminé par la loi de la géographie ». Lacoste (1986), quant à lui, se focalise sur « l'étude des différents types de rivalités de pouvoirs sur les territoires, [...] la puissance se mesurant en fonction de potentialité territoriale interne et de la capacité à se projeter à l'extérieur de ce territoire et à des distances de plus en plus grandes ». Ces deux définitions sont complémentaires en ce sens qu'elles traitent du rôle des acteurs étatiques dans la gestion de l'espace et la société et les conflits éventuellement existants. La géopolitique devient alors une analyse politique et géographique du monde ou d'un territoire par rapport à un autre, de ses individus dans un espace commun partagé. Il s'agit de comprendre l'origine des conflits actuels

54 Le Sénégal, dans l'initiative de libéraliser la parole, a permis la prolifération de radios privées, de télévisions privées et un taux de pénétration exceptionnel sur internet avec un boom en nombre exponentiel de la presse online et des internautes sur les réseaux sociaux. On assiste ainsi à une multitude d'acteurs et donc à une multitude d'intervenants libres sur des faits parfois qu'ils ne maîtrisent pas. L'Etat a alors mis sur pied une loi sur la gestion d'internet au Sénégal vu les débordements de tous genres qui s'y opèrent impunément au quotidien.

et les enjeux stratégiques qui pourraient à un moment donné conduire à des conflits, notamment futurs.

Le conflit en Casamance implique plusieurs acteurs. En tant que destination, elle entraîne la diplomatie des différents pays émetteurs du Sénégal et en interne les collectivités et l'Etat. Le tourisme est un secteur transversal qui affecte presque tous les secteurs de l'économie, il développe les territoires et comprend de nombreux intervenants au niveau national et international. Pour ce faire, nous allons nous concentrer sur les ambassades d'abord. En effet, dans le cas échéant, les ambassades en raison de leurs missions diplomatiques interviennent directement et géographiquement dans des affaires qui les concernent dans un espace bien déterminé. Ensuite, il s'agira d'examiner les politiques de l'Etat au niveau territorial dans le domaine du tourisme et les collectivités dans ce sens afin d'en faire une analyse globale géopolitique selon qu'il impacte ou non dans la gestion des conflits et le tourisme.

3.3.1 Les chancelleries

Appelée aussi Ambassade, le rôle d'une chancellerie ou d'un consulat est d'entretenir des rapports diplomatiques avec le pays d'accueil. Cela entre en phase avec les relations géopolitiques. Tous les pays pratiquement disposent d'une ambassade ou d'une représentation consulaire, etc., pour garantir un service maximum à leurs ressortissants, mais aussi mener des activités culturelles55 ou politiques avec le pays hôte. Au Sénégal, la représentation diplomatique française a une forte réputation, notamment dans le sud du pays, en Casamance. A ce propos, les dispositions prises dans le domaine du tourisme affecté par le conflit ne sont pas toujours justes et consensuelles si l'on se fie aux données du terrain. Le cas du Quai d'Orsay,56 qui colorie en rouge toutes les trois régions administratives de la Casamance à l'exception du Cap-Skirring où se trouve le club-Med, vient étayer cette hypothèse.

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55 Direction de la coopération (Alliance franco-sénégalaise, par exemple).

56 Ministère français des affaires étrangères.

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Figure 4 : carte illustrative de la « zone rouge »

Source : Au-Sénégal (2018).

Conformément à l'article 6 du code de l'éthique pour le tourisme, l'OMT met en garde les acteurs (les chancelleries) en leur accordant certes le droit d'informer leurs ressortissants sur la situation de crise qui sévit dans une destination, mais précise que ces informations ne doivent en aucun cas porter préjudice à la destination en question. Cet article souligne aussi que ces avis doivent faire l'objet de consensus entre les gouvernements récepteurs et émetteurs et doivent être strictement limités à l'étendue géographique concernée. Par ailleurs, on constate dans cette décision visible sur la carte ci-dessus que cette décision implique toute la Casamance, c'est-à-dire les trois régions : Ziguinchor, Sédhiou et Kolda. Or, si on prend l'exemple de la Tuerie de Bofa-Bayotte qui se trouve dans la forêt de Ziguinchor ou l'histoire de touristes violés à Kafountine, on en déduit que la chancellerie ne joue pas sérieusement son rôle. Evidemment, cette décision a un caractère purement unilatéral avec un impact géographique conséquent.

Toutefois, seul le club-Med se situant au Cap-Skirring dans le département d'Oussouye où le conflit est quand même assez pacifié échappe à cette règle : cette zone est colorée en vert. Ainsi, les questions qui taraudent notre esprit est : la France protège-t-elle ses intérêts au détriment de la destination tout entière de la Casamance ? Sur le plan géopolitique, est-ce que ce n'est pas la

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France qui crée des « conflits »57 impactant sur les relations humaines et le territoire de manière générale ? C'est ce que semble affirmer M. Tamba (guide touristique et responsable du bureau d'acceuil et d'information au Cap-Skirring, commune de Djembéring, 2019) lorsqu'il avance : « Le club-Med sert de locomotive, d'assurance. Même si tu as des gens qui te disent qu'il y'a le conflit et que le club est ouvert, les gens viennent, c'est un gage ici au Cap-Skirring ». Sur l'épineuse question de la zone rouge, nous avons interrogé un touriste français sur la question, en l'occurrence M. Faye Fall (touriste français, 2019), a donné cette réponse assez illustrative : « Quand on fait des recherches pour venir, on nous recommande des circuits dont la Casamance ne fait même pas partie. Mais après le parcours qu'on a fait je ne me suis pas senti en insécurité ». Notons que 57% de la population touristique (acteurs) interrogée de même que 10% dans la communication ont une connaissance de la « zone rouge » en tant que décision infligée à la destination Casamance toute entière. A cela s'ajoute une autre catégorie qui est consciente de la question, soit 21%(voir annexe). Dans cette carte, le constat n'échappe à personne. Déclarer la Casamance zone rouge impliquant de surcroît les régions de Sédhiou et Kolda ou le département d'Oussouye pour un événement survenu dans la région de Ziguinchor ou à Kafountine, par exemple, est une décision que les acteurs eux-mêmes ne comprennent pas. C'est d'ailleurs ce qu'affirme M. Ferancioli (promoteur italien, directeur des Alizés beach Resort, Cap-Skirring, 2019) : « Je pense que les ambassades ne jouent pas leur rôle. Je sais que pour la carte de l'ambassade de France la Casamance était en rouge et très franchement quand on vit ici on se rend compte que ce n'est pas la réalité ».

De tels manquements dans la compréhension géographique même du conflit ont toujours bouleversé le secteur du tourisme et ont suscité de nombreuses questions sur le plan politique. Des décisions malencontreuses sont prises alors que les faits se déroulent le plus souvent dans des zones pacifiées. Même si la responsabilité des chancelleries est de protéger leurs concitoyens, elle ne devrait pas pour autant nuire à l'activité touristique pour des raisons généralement injustifiées. Ainsi, le traitement de l'information et la communication sur la question sont aussi des éléments non moins réductibles compte tenu de leur forte implication dans le relai de ses informations sans traitement transparente et juste. C'est dans ce contexte que nous avons, sur la base d'une question sur la situation, recueilli des données ci-dessous.

57 Ici conflit veut dire une situation qui peut lésée quelque ou tout simplement la destination dans le cas échéant.

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Tableau 4 : Une décision à impact temporel

Source : Enquête de terrain, avril 2019.

Ce tableau donne des informations qui ont un rapport avec la décision d'inscrire la destination dans la zone rouge. A travers nos enquêtes de terrain, nous avons soumis aux enquêtés cette question : les décisions des chancelleries sur la base du conflit ont-elles un impact sur l'activité touristique à court et moyen terme ? Sous ce rapport, 97% ont répondu positivement. Autrement dit, ces individus sont catégoriques sur la question qui met en péril à chaque occasion le secteur pendant une durée qui évolue selon la situation. A ce titre 63% affirment que le secteur peut vivre des moments difficiles allant au-delà d'une année sur les territoires affectés. La communication à ce niveau peut aussi être analysée. Ainsi, M. Cissé déclare : « Les chancelleries ont la responsabilité de veiller sur leurs concitoyens. Maintenant est-ce que la réaction est à la mesure de la gravité de la situation ? C'est là où effectivement la presse peut jouer un rôle d'accentuation de la psychose sécuritaire ou d'atténuation de la psychose sécuritaire. Quand vous imaginez un peu qu'une presse par exemple dire qu'on a dynamité un pont [...] lorsqu'on lit cela, on est effrayé et on a la réaction de dire que c'est une zone à risque ». En effet, nous pouvons ajouter que cette situation est accentuée par la communication. Evidemment, d'une part la prise d'une telle décision va dans le sens de la responsabilité républicaine. Cependant, cette décision doit être étudiée avant de compromettre le développement du tourisme en Casamance. Au préalable, il est alors impératif de comprendre les spécificités géographiques et les enjeux socio-politiques de ce conflit. Ainsi, est-ce que la « zone rouge » est véritablement un obstacle au tourisme en Casamance ? Ce graphique en est une illustration.

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Figure 5 : La « zone rouge », un obstacle majeur à l'essor du tourisme

La zone rouge comme f acteur bloquant x La localité

100

47

5 3 4

Non réponse

oui

28

8

2 3

non

Ziguinchor Djembéring autre

47

Source Enquête de terrain, avril 2019.

0

Dans ce graphique, nous avons essayé d'en savoir un peu plus sur l'impact de la décision de considérer la Casamance comme une zone « d'insécurité ». En plus, nous avons cherché à savoir si les acteurs sont convaincus que c'est l'une des entraves au secteur touristique dans cette partie du pays. En ce sens, nous avons accordé un intérêt particulier à la question selon les zones étudiées qui peuvent être touchées par cette décision. Ainsi, au niveau de Ziguinchor, 47% des personnes auxquelles nous nous sommes adressés affirment que c'est un élément crucial du tourisme contre 28% dans la commune de Djembéring. Il faut également retenir que 53% de ces informations ressortent des acteurs touristiques et 10% (voir annexe) des professionnels de la communication qui abondent dans ce sens.

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"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"