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L'enfant apprenti au Bénin

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par Camille Raoul FASSINOU
Université d'Abomey Calavi (UAC Bénin) - DEA en droit de l'homme 2006
  

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DE L'ENFANT APPRENTI

Le Bénin, de par sa volonté de protéger l'enfance, a ratifié plusieurs conventions sur les droits de l'enfant, et a adopté plusieurs instruments internationaux et nationaux relatifs aux droits de l'enfant. En ce qui concerne l'apprentissage, plusieurs textes et arrêtés ont été pris. On peut citer entre autres : le code du travail en ses articles 64 à 70 et le code de l'artisanat en ses articles 5 et 7. Malheureusement, ces textes de protection de l'enfant et en particulier de l'enfant apprenti ne reçoivent qu'une application limitée au sein d'une population souvent ignorante de ses droits, sans ressources pour les faire valoir et méfiante à l'égard des tribunaux.

Ces violations dont sont victimes les enfants apprentis, portent aussi bien d'une part sur leurs droits fondamentaux que sur leurs libertés, d'autre part. Ce que nous évoquerons respectivement dans le paragraphe 1 puis dans le paragraphe 2.

PARAGRAPHE 1 : LA VIOLATION DES DROITS FONDAMENTAUX

DE L'ENFANT APPRENTI

Le processus qui conduit les enfants à l'apprentissage au Bénin et le laisser faire caractérisé de ce système de formation violent plusieurs droits fondamentaux de l'enfant apprenti. « L'enfant n'est pas un petit homme, mais qu'il est le petit de l'homme13(*) » à ce titre l'on doit respecter les règles édictées par la société pour sa protection.

L'entrée précoce de l'enfant en apprentissage et les conditions difficiles de vie en apprentissage ont des influences certaines sur sa santé et ses besoins fondamentaux. Ces violations commencent avant même l'entrée à l'apprentissage et s'accentuent au cours de la formation. Au nombre de ces droits fondamentaux violés et qui sont essentiels pour le développement normal et un avenir meilleur pour l'enfant, nous pouvons retenir le droit à l'éducation (A) et le droit au repos, jeux et loisirs (B).

A°) Le droit à l'éducation

« L'éducation, bien qu'étant une condition préalable au développement de la société, est aussi un Droit de l'Homme14(*) ». D'après Monsieur GEORGE WEAH, ambassadeur itinérant de l'UNICEF, « l'éducation est indispensable à chaque être humain. Tout le monde devrait avoir l'occasion d'avoir une éducation pour pouvoir se bâtir un avenir meilleur. L'éducation est le pivot des droits de l'enfant. Une personne instruite connaîtra mieux ses droits et saura faire en sorte qu'ils soient respectés. Elle serait mieux armée pour avoir un impact sur ce qui lui arrive et cela dès son plus jeune âge. L'instruction ouvre des portes et donne la confiance nécessaire pour tirer partie des choix qui s'offrent15(*) ».

De plus « L'homme raisonnable et instruit évite la souffrance et recherche le plaisir, il sait ce qu'il fait, où se trouve son intérêt et la poursuite de son propre intérêt le conduit inévitablement à un sommet d'accomplissement personnel dans l'économie comme dans sa famille16(*) ». « Le malheur d'être condamné à un analphabétisme, mène à une vie qui se résume en une condamnation à la pauvreté 17(*)». « Ne pas aller à l'école signifie ne pas avoir des perspectives. Sans l'éducation, l'égalité des citoyens ne serait qu'un vain mot, de plus en son absence les talents de la majorité des hommes ne pourront s'exprimer 18(*)». C'est justement pour cela que Angélique KIDJO dans son message de sensibilisation dit : « Chaque fille et chaque garçon d'Afrique doit aller à l'école, ils doivent être traités équitablement, ils doivent apprendre ce qui leur est nécessaire pour être fort, être en bonne santé et en sécurité. Chaque adulte africain, parents, enseignants, ministres, sages doivent faire de ce rêve, une réalité. Dès aujourd'hui, chaque fille et chaque garçon d'Afrique doit aller à l'école, c'est notre responsabilité 19(*)».

Malgré son importance, ce droit est constamment violé par les parents lorsqu'ils prennent la décision d'envoyer leurs enfants en âge de scolarisation en apprentissage. Ils ignorent que le législateur, en fixant à 14 ans l'âge minimum d'accès au travail ou à l'atelier des enfants, a voulu permettre à tous les enfants en âge scolaire de bénéficier au moins de l'instruction primaire obligatoire avant d'entrer dans la vie active.

En effet, sur les 152 enfants apprentis enquêtés sur le terrain, 97 ne sont pas scolarisés soit un pourcentage de 63,81, 24 déscolarisés avant l'âge de 14 ans donc avant la fin de la scolarité obligatoire soit 15, 78 %. Seulement 19,73 % de ces enfants ont eu la chance de ne quitter l'école qu'après l'âge de 14 ans. Ce droit est plus violé dans les villages que dans les villes car on assiste à un placement de jeunes enfants apprentis qui généralement se situent dans la tranche d'âge de 5 à 9 ans, chez un patron qui est dans les villes environnantes.

Ces enfants de moins de 14 ans envoyés à l'apprentissage sont le plus souvent des analphabètes ; ils ne comprennent même pas la langue officielle de travail de leur pays parce que n'ayant pas bénéficié de l'éducation scolaire obligatoire, toute possibilité de formation professionnelle continue est donc difficile voire impossible pour eux. La chance d'apprendre à écrire et à lire est refusée à ces enfants apprentis béninois. Ces enfants sont privés de l'éducation pourtant rendue obligatoire par l'article 28 de la Convention Internationale relative aux Droits de l'Enfant, et de la Charte Africaine des Droit et le Bien être de l'Enfant sans aucune réaction venant de la part des autorités. Ce tort causé à l'enfant de ce fait, se prolonge bien au delà des années de l'enfance et augmente la probabilité de voir la génération suivante visée par les mêmes menaces.

Certains accidents de travail auraient pu être évités si les victimes, souvent des enfants avaient reçu une éducation scolaire élémentaire. Il est évident que, instruits, ces enfants apprentis connaîtraient mieux leurs droits. Les dangers liés aux métiers seront plus évités et ils seront plus armés pour se défendre et exiger de meilleures conditions de travail, comme le droit à la santé, les instruments de protection indispensables pour certains métiers, et pourquoi pas décider librement de la direction à donner pour leur formation. Si la communauté internationale oeuvre pour la gratuité de l'éducation, c'est pour permettre à l'enfant où qu'il se trouve de bénéficier d'une éducation qui contribue à sa culture générale et lui permette de développer ses facultés, son jugement personnel et son sens de responsabilité morale et sociale et devenir un membre utile pour la société. La belle preuve est que les enfants qui ont reçu une éducation assimilent mieux et plus vite leur formation.

Pour l'Organisation International du Travail (OIT), le moyen le plus efficace pour réguler l'exploitation du travail des enfants est d'élargir et d'améliorer l'enseignement scolaire de manière qu'il attire et retienne les jeunes. Le nouveau programme scolaire semble alors être un moyen efficace.

Outre le droit à l'éducation, plusieurs autres droits élémentaires de l'enfant tels que le droit au repos, aux loisirs et aux jeux indispensables pour la santé et le développement de l'enfant sont privés à l'enfant apprenti.

B°) Le droit aux repos, jeux et loisirs

L'enfant, être inachevé et en développement a besoin comme tous les autres êtres et plus encore, du repos, de loisir et de jeux pour son développement. Il doit avoir toutes possibilités de se livrer à des jeux, à des activités récréatives, qui doivent être orientées vers les fins visées par une bonne éducation. Les enfants doivent avoir assez de temps pour le repos. La privation de ce droit influence le développement physique et intellectuel des enfants.

En envoyant leurs enfants en apprentissage, les adultes pensent qu'il n'a que le devoir de travailler. Les parents et les patrons ignorent parfois que les enfants ont le droit de jouer, de rire, de rêver et de se reposer parce que ces conditions sont indispensables à leur croissance et feront plus tard de l'enfant, un adulte épanoui et créatif.

La plupart des enfants apprentis auprès de qui nous avons enquêté n'ont pas de repos et ne peuvent se livrer aux jeux car la masse de travail qui leur est confié pour la journée ne leur laisse pas un seul instant libre pour s'offrir ces plaisirs. « Ils travaillent dix (10) à douze (12) voire quatorze 14 heures par jour. Le manque de repos dans ces travaux souvent pénibles et déformants est préjudiciable à leur santé physique20(*) ». Les enfants apprentis sont condamnés à des travaux qui les mutilent affectivement, physiquement et mentalement sans que les patrons ne soient disposés à leur octroyer des repos compensateurs. Les jours fériés et parfois les repos hebdomadaires ne leur sont pas accordés. Dans le désir des patrons de satisfaire leur besoin et leur clientèle, les apprentis sont victimes de la violation de leurs droits aux repos, jeux et aux loisirs. Ils ne reçoivent même pas de congé annuel pourtant reconnu de tous les employeurs.

Ils n'entendent pas donner le repos pour permettre aux enfants de s'amuser car, pour eux, c'est une main d'oeuvre dont le repos agirait sur le rendement journalier et risque de leur faire perdre de la clientèle. L'heure ou les minutes que certains patrons accordent à leurs apprentis dans la journée suffisent à peine pour le déjeuner. Ils n'ont même pas le droit de faire la sieste pour récupérer d'énergie.

Or, ce droit de repos est d'une importance si capitale que l'article 12 de la Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l'Enfant et l'article 31 de la Convention Internationale relative aux Droits de l'Enfant s'y sont consacrés.

Des décrets pris après avis du Conseil National du Travail fixent les modalités de la répartition de la durée du travail sur les différents jours de la semaine ainsi que l'amplitude maximale journalière du travail. Les patrons ignorent que la limitation de la durée du travail par jour est une préoccupation sociale, en vue de protéger la santé physique du travailleur et aussi de lui accorder la jouissance d'un temps de liberté qui lui permettra de disposer de sa propre personne. Cela est nécessaire car le rythme de travail imposé aux enfants apprentis est souvent ardu. Certains patrons n'observent même pas le temps de repos journalier pour permettre aux enfants de se reposer.

Au-delà de la violation des droits fondamentaux de l'enfant apprenti, ses différentes libertés sont aussi constamment compromises.

* 13 BARRE (Raymond), dans la préface de « la protection juridique et social de l'enfant », IDEF, édition Bruyant, Bruxelles, 1993, page 14.

* 14 UNESCO « Education droit au privilège », les lauréats du concours international de journalisme 1998 sur le droit à l'éducation, Avril 1999, page 8.

* 15 UNICEF, « La voix des jeunes », www.unicef.org/voy/frenc/explore/education.

* 16 JOHN VAYZE, « L'économie de l'éducation », traduit de l'anglais par BECQUE (François), page 31.

* 17 Docteur TOMASEVSKI (K) in UNESCO « Education droit au privilège » op. cit., page 3.

* 18 Dimension 3, Octobre - Novembre 1990, N°5, page 6.

* 19 KIDJO (Angélique), Message de sensibilisation pour la scolarisation des enfants en Afrique, Unicef 2004.

* 20 République du Bénin, Ministère du Plan, de la restructuration économique et de la promotion de l'emploi : `' « Rapport social du Bénin », édition 1996, page 125.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard