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Ordre public et Arbitrage International en Droit du commerce international

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par Rathvisal THARA
Université Lumière Lyon 2 - Master 1 Droit des entreprises en difficulté 2005
  

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§ I. Notion de l'ordre public dans le contrôle étatique

On a déjà signalé que l'efficacité de la sentence dépend principalement de l'ordre public puisque l'arbitre international n'est rattaché à aucun for étatique. Cette liberté de l'arbitre est particulièrement limitée car les juges, appelés à se prononcer sur l'efficacité de la sentence vérifieront l'usage que l'arbitre aura fait da sa liberté, compte tenu de leur ordre public international en matière d'arbitrage189(*).

Dans cette optique, il faut préciser que différentes sortes de l'ordre public doivent être respectées (A). De surplus, l'ordre public peut intervenir dans l'appréciation des critères du contrôle ainsi que de l'étendue du pouvoir de contrôle exercé par le juge étatique qui constituent les deux parties des modalités du contrôle (B).

A Respect de différentes sortes de l'ordre public

1. Le respect de l'ordre public étatique étranger

Il ne s'agit pas d'une obligation pour lui de respecter l'ordre public d'un Etat étranger. En effet, l'arbitre n'est rattaché à aucun for et, partant, n'est pas le gardien d'un ordre public en particulier. Mais, il subit nécessairement le joug des ordres publics des pays où la sentence est appelée à être exécutée190(*). En tout cas, est-ce que le juge de l'annulation doit prendre en compte, comme le fait l'arbitre, des principes fondamentaux constitutif de l'ordre public d'un Etat étranger ? Ainsi, on doit s'interroger sur la prise en compte de l'ordre public interne étranger.

De prime abord, la situation est que la sentence est rendue à l'étranger en matière interne et porte atteinte à l'ordre public interne du droit étranger. Dans cette hypothèse, lorsque l'exequatur est demandé en France, il faut procéder au contrôle au regard de l'ordre public international. La solution en est que « si la sentence introduite en France ne touche qu'aux intérêts d'un seul pays étranger, on admettra que l'ordre public interne français n'a pas non plus à intervenir. Le juge français ne considérera que l'ordre public international191(*) ».

Dans une seconde hypothèse, si une sentence rendue en matière - cette fois - internationale porte atteinte à un ordre public étranger. Dans ce cas, il faut retenir la violation de l'ordre public international du for. Un arrêt de la Cour d'appel de Paris192(*) a été rendu à ce propos. La solution était claire ; la violation de l'ordre public étatique n'entraîne pas automatiquement une contrariété à l'ordre public international du for. Il faut constater donc que l'ordre public international du for est lui-même atteint.

De même, les conventions internationales consacrent, d'ailleurs, cette réserve de l'ordre public193(*). On peut citer, à titre d'exemple, l'article 1er de la Convention de Genève de 1927, l'article V de la Convention de New York de 1958, ou l'article 36-b de la loi-type de la C.N.U.D.C.I sur l'arbitrage commercial international du 21 juin 1985...

2. Le respect des lois de police étrangères

Il faut rappeler que l'arbitre du commerce international doit appliquer également les lois de police étrangères à la loi choisie (déjà expliquée en ce sens dans l'étude sur ordre public et détermination du droit applicable au fond). Ici, la présence des lois de police est encore une fois prise en compte pour caractériser l'importance et l'utilité du contrôle sur les sentences.

Cependant, on doit s'interroger, au moins pour être fidèle à notre sujet portant sur ordre public et arbitrage international, sur les critères de prise en compte des lois de police. Alors, la question peut se formuler de manière suivante : quels sont les critères des lois de police devant être respectées par l'arbitre ? Il en existe deux.

Le premier critère commande que le juge du contrôle peut constater que la violation de la loi de police étrangère constitue, dans le même temps, une atteinte à l'ordre public du for. Alors, il est logique de prendre en compte des intérêts protégés par cette loi de police étrangère car sa violation porte atteinte également à l'ordre public du for qui doit être lui-même pris en compte comme on a précédemment expliqué194(*). De surplus, précisons-le, la contrariété à des conceptions fondamentales de l'ordre public du for prime sur la violation d'une loi de police étrangère. On peut citer à titre d'exemple la jurisprudence suisse dont le tribunal fédéral a jugé en ce sens195(*).

Le deuxième critère consiste à l'égard du juge du contrôle d'étudier la légitimité de l'intérêt protégé par la loi de police étrangère pour décider de lui donner effet, sans pour autant exiger une violation à part entière de l'ordre public du for. Par exemple, la Convention de Rome de 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles contient les critères de mise en oeuvre de l'application des lois de police. Certes, cette convention n'est pas directement applicable au contrôle des sentences arbitrales, mais il serait souhaitable de l'appliquer à l'examen des sentences196(*).

Ainsi, il ne faut pas rapidement conclure que toute sorte de lois de police doit être prise en compte en cas de contrôle exercé par le juge du for. Il faut qu'elle remplisse les deux critères invoqués dans ce cas précis.

3. Le respect de l'ordre public transnational ou réellement international

La controverse de l'existence de l'ordre public transnational a été déjà expliquée. On a même abouti à conclure qu'il existe des règles d'ordre public transnational ou réellement international. Il s'agit donc d'une réalité devant l'arbitre international et le juge du contrôle. L'important à ce stade est donc de savoir et déterminer l'utilité pour le juge de se référer à un ordre public transnational dans son contrôle, question qui est encore une fois très abordée en la doctrine.

Selon certains auteurs, il serait suffisant de se référer aux règles d'ordre public international du for qui protègent, normalement, les valeurs universelles et, partant, le rejet de l'ordre public réellement international dans le contrôle s'impose au juge197(*).

En revanche, on doit raisonner plutôt à partir de ce qu'il est souvent que l'arbitre se réfère à un ordre public réellement international. En effet, les besoins et les caractères spécifiques de l'arbitrage international peuvent justifier de donner un contenu particulier à l'ordre public applicable lors du contrôle des sentences. Pourtant, la référence qu'un juge peut faire à l'ordre public véritablement international ne peut concerner que le contenu de la notion198(*).

B. Composantes de l'ordre public

  • 1. La distinction entre ordre public interne et ordre public international
  • Avant d'examiner les principes fondamentaux et les lois de police (qui sont les deux composantes de l'ordre public), il convient tout d'abord de savoir déjà distinguer l'ordre public interne de l'ordre public international, qui sont les deux notions non négligeables dès le commencement de notre sujet.
  • En droit français, l'ordre public interne peut se définir selon l'article 6 du code civil français. Cet article prévoit que l' « On ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs »199(*).
  • En ce qui concerne l'ordre public international, la Convention de New York ne donne aucune définition de la réserve de conformité à l'ordre public. Elle laisse ainsi à chaque Etat signataire le soin de déterminer le contenu et les conditions d'application de cette notion200(*).
  • En droit français, l'ordre public international est constitué par « l'ensemble des valeurs dont l'ordre juridique français ne peut souffrir la méconnaissance même dans des situations à caractère internationale201(*). » On ajoutera également les lois de police françaises, qui protègent concrètement les intérêts fondamentaux de l'ordre juridique français, tant sur le plan social qu'économique ou politique202(*). Quant à la jurisprudence, la cour d'appel y a ajouté que « l'ordre public international, au sens de l'article 1502, °5, s'entend de la conception française de l'ordre public, c'est-à-dire de l'ensemble des règles et des valeurs dont l'ordre juridique français ne peut souffrir la méconnaissance, même dans des matières internationales ; son appréciation doit être concrète, le contrôle de la cour d'appel ne devant pas porter sur l'appréciation que les arbitres ont faite sur la solution donnée au litige203(*). »
  • Cette distinction nous paraît donc très délicate à mettre en oeuvre dont les règles doivent être utilisées avec précaution. Ainsi, on peut en tirer comme conséquences que les règles d'ordre public interne ne sont pas forcément d'ordre public international, mais les règles d'ordre public international sont forcément d'ordre public interne et que les règles qui ne sont pas d'ordre public interne ne peuvent pas être d'ordre public international. De cette manière, l'ordre public concerné dans le cadre du contrôle est considéré comme un concept plus restreint que l'ordre public interne, et d'un contenu plus libéral204(*).
  • 2. Les principes fondamentaux
  • En droit international privé, comme en droit du commerce international, l'ordre public d'éviction contient des principes fondamentaux du for étant alors sa première composante.
  • L'ordre public doit être constitué par les principes fondamentaux du for. Au sens du droit international privé, l'ordre public est en effet l'expression des valeurs intangibles du for205(*). Ces valeurs trouvent leur traduction dans des principes jugés essentiels par l'ordre juridique du for. Mais, il est souvent malaisé pour le juge du for d'identifier précisément lesdites valeurs.
  • Quant à son contenu, M. Mayer pense que « du moment qu'un juge français refuserait d'appliquer une loi étrangère si elle méconnaissait un certain principe du droit français, il devrait également refuser de donner effet à une sentence qui méconnaîtrait le même principe206(*). » Ainsi, selon lui le contenu de l'ordre public international visé par l'article 1502 °5 ne devrait pas être différent de celui employé dans les conflits de lois en droit international privé.
  • De surplus, quant aux valeurs protégées, selon M. Racine, l'ordre public protège schématiquement des valeurs universellement partagées - c'est-à-dire des intérêts communs à l'ensemble des nations, comme par exemple la protection du droit de la propriété, la prohibition de la corruption et le principe fraus omnia corrumpit - et des intérêts propres au for (en cas de procédures collectives)207(*).
  • Bref, les principes fondamentaux ou les valeurs intangibles du for constituent la première composante de l'ordre public. Il n'en reste pas moins quant aux lois de police.
  • 3. Les lois de police
  • Les lois de police constituent la deuxième composante de l'ordre public international. En effet, cela peut se justifier par la disposition de l'article 1502 °5 NCPC qui prévoit l'ordre public international comme une notion originale regroupant à la fois les principes fondamentaux (signalé précédemment) protégés par l'ordre public d'éviction et les lois de police. Mais l'assimilation des lois de police n'est toutefois pas évidente car l'ordre public se distingue en principe des lois de police. Mais, la coordination des deux notions peut aisément s'expliquer dans le contexte du contrôle des sentences208(*).
  • On doit donc expliquer pourquoi est-il nécessaire d'inclure les lois de police dans l'ordre public. Selon M. Mayer, « ... en matière de reconnaissance des sentences arbitrales, la violation d'une loi de police intervient comme une cause d'éviction de la sentence en fonction de son contenu ; c'est ce qui permet d'intégrer ce mécanisme dans le contrôle de la conformité à l'ordre public de la sentence » ; aussi il a ajouté que « dans le domaine de la reconnaissance des sentences arbitrales, on peut et on doit admettre que la non-application d'une loi de police compétente par une sentence rend cette dernière contraire à l'ordre public209(*) » C'est en ce sens que l'on peut justifier l'intervention légitime des lois de police au nom de l'ordre public. Pour cela, une sentence doit être contrôlée au regard de l'ensemble des lois de police quelle que soit leur nature.
  • Finalement, on arrive à conclure que l'ordre public présente un contenu suffisant pour permettre au juge de procéder à un contrôle effectif des sentences, sans pour autant remettre en cause l'indépendance de l'arbitrage international.

* 189 Marie-Noëlle JOBARD-BACHELLIER, « Ordre public international », Fasc. 534-2, J-CL éditions techniques 1992. p. 10.

* 190 Marie-Noëlle JOBARD-BACHELLIER, « Ordre public international », Fasc. 534-2, J-CL éditions techniques 1992. p. 10.

* 191 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. p. 447.

* 192 C.A Paris, 20 juin 1996 : Rev. Arb. 1996.657, note D. Bureau.

* 193 Marie-Noëlle JOBARD-BACHELLIER, « Ordre public international », Fasc. 534-2, J-CL éditions techniques 1992. p. 10.

* 194 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. p. 451.

* 195 Tribunal fédéral, 17 avril 1990, Sté OTV C. Sté Hilmarton : Rev. Arb. 1993. 315.

* 196 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. p. 453.

* 197 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. p. 473.

* 198 Christophe Seraglini, Lois de police et justice arbitrale internationale, Dalloz, 2001. pp. 154 et 156.

* 199 Article 6 du Code Civil.

* 200 Christophe Seraglini, Lois de police et justice arbitrale internationale, Dalloz, 2001. p. 151.

* 201Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996. p. 969.

* 202 Jean-Claude DUBARRY, Eric LOQUIN, « Arbitrage international », RTD. Com. 2004. p. 259.

* 203 C.A Paris, 14 juin 2001 : Rev. Arb. 2001, 773, note Seraglini.

* 204 Christophe Seraglini, Lois de police et justice arbitrale internationale, Dalloz, 2001. p. 152.

* 205 Marie-Noëlle JOBARD-BACHELLIER, « Ordre public international », Fasc. 534-2, J-CL éditions techniques 1992. pp. 1- 9.

* 206 Pierre Mayer, « La sentence contraire à l'ordre public au fond », Rev. Arb. 1994. 615. p. 634.

* 207 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. pp. 489 - 504.

* 208 Christophe Seraglini, Lois de police et justice arbitrale internationale, Dalloz, 2001. p. 157.

* 209 Pierre Mayer, « La sentence contraire à l'ordre public au fond », Rev. Arb. 1994. 615. p. 643.

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