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les problèmes fonciers en zone de front pionnier agricole: cas de Dèrègouè dans la province de la Comoé

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par Sihé NEYA
Université de Ouagadougou - URF/SH - département de géographie - Maîtrise 2006
  

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2.3. L'ORGANISATION SOCIALE

Les populations de Dèrègouè forment dans leur ensemble deux grands groupes sociaux: les autochtones et les allochtones. Ces deux groupes ont des organisations qui leur sont propres. Néanmoins, ils cohabitent à travers des rapports d'interdépendance.

2.3.1. L'organisation sociale chez les autochtones

Les Tiéfo de Dèrègouè ont une société de type segmentaire. L'organisation sociale est basée sur la juxtaposition et l'équilibre des rapports entre les lignages. Le système de filiation est de type bilinéaire et se caractérise par l'appartenance de chaque individu à la filiation matrilinéaire et la filiation patrilinéaire. L'héritage est aussi bilinéaire ; le neveu maternel peut hériter des biens de son oncle par voie matrilinéaire tout comme le fils de ce dernier. Jadis le système d'héritage était de type matriarcat. Mais, avec à l'islamisation des populations il est devenu mixte (patriarcat et matriarcat).

2.3.1.1. Les autorités traditionnelles

Les autorités impliquées dans la gestion traditionnelle de la zone d'étude sont : le chef de village, les chefs de terre et le chef des eaux.

· Le « Dougoutigui » ou le chef de village

Il est investi des pouvoirs politiques et coutumiers. Le chef de village est chargé du contrôle social et politique de la communauté villageoise. Il régule les litiges et conflits sociaux. Son rôle est surtout perceptible à travers les sujets qui interpellent toutes la communauté villageoise. Aussi, est-il le dépositaire des rites relatifs au « Dougou » (qui signifie en français village ; mais ici il correspond plutôt au fétiche protecteur du village) ;

· Le « Batigui » ou le chef des cours d'eau

Il assure la gestion des cours d'eau à l'échelle du village. Il officie les rituels et les sacrifices en rapports avec les cours d'eau. Le chef des eaux règle tous les litiges et malheurs en rapport avec l'eau. Chaque année, il immole une chèvre ou un mouton pour remercier les ancêtres des eaux dans la rivière Koba.

· Les « Dougoukolotigew » ou les chefs de terre ;

Ils assurent la gestion des terres qui leur sont dévolues traditionnellement. Au nombre de six, ceux-ci installent les migrants et attribuent les terres aux populations qui en font les demandes. Par ailleurs, Ils officient les rites en rapport avec la terre et sont impliqués dans la régulation des litiges fonciers localisés sur leurs territoires respectifs.

2.3.1.2 Les unités socio-spatiales

Les autochtones s'identifient à trois unités socio-spatiales que sont :

· le « Fêsso»

Il signifie « chez soi » et représente le territoire dont se réclame un groupe de lignage ayant en commun le même ancêtre. Par exemple, les descendants de Ouattara Amora antérieurement cités sont assimilés au « Dougoutiguifêsso » ; par contre, ceux de Sawari sont assimilés à « balankanfêsso » et « Missifêsso ». La gestion du fêsso est assurée par l'aîné. Il oeuvre pour

la cohésion des segments de lignage regroupés respectivement à travers des grandes concessions familiales communément appelées « Lou »

· Le « Lou » ou la concession familiale

Il est le reflet des segments de lignage maternel ou paternel. Les activités au sein de ces concessions sont coordonnées par l'aîné à qui sont subordonnés les cadets. L'aîné défend les intérêts de son groupe auprès des autres familles. Les « Lou » sont un regroupement de plusieurs familles nucléaires communément désignées par le terme « Gbâ ».

· Le « Gbâ » ou foyer

Il symbolise le ménage et regroupe en général le chef de ménage, son épouse ou ses épouses et ses enfants. Dans cette unité, c'est le chef de ménage, assisté de son épouse et de ses enfants qui coordonne les activités. Il arrive parfois que ces ménages regroupent les neveux, nièces, frères, cousins, etc. du chef de ménage.

De ces unités sociales se dégagent les unités de production suivantes:

- le champ collectif ou « foroba » ; c'est une unité de production agricole dont la main d'oeuvre est composée d'individus se réclamant d'un même ménage. Les activités y sont coordonnées par le chef de ménage et la production sert à faire face aux besoins de subsistance du groupe. On en fait usage dans les situations d'urgence, pour la

simple raison que nombre de membres du ménage ont des champs individuels ;

- le champ individuel ou « djonganiforo » ; c'est unité de production appartenant à un individu. Ces champs individuels sont en général détenus par les femmes et les jeunes célibataires.

L'ordre social au sein des groupes est régi par le principe d'aînesse, qui se traduit par des rapports d'autorité des aînés sur les cadets et des hommes sur les femmes au sein des segments de lignage. Toutefois, les prises de décision se font par concertation où chacun (vieux, jeune, homme, femme, etc.) donne son point de vue sur les questions ou les problèmes évoqués.

La société autochtone de Dèrègouè n'est pas figée, elle connaît des mutations dues à plusieurs facteurs : migrations, introduction de l'économie de marché, la modernité, etc. Ces mutations se traduisent par le morcellement des grandes familles, libérant ainsi les jeunes ménages en quête d'autonomie. Ces jeunes créent leurs propres habitations en dehors des grandes concessions familiales et organisent leurs propres productions. Néanmoins, ils restent

sous l'autorité des aînés pour ce qui concerne le mariage, les sacrifices et rituels. L'organisation sociale des autochtones côtoie celle des migrants.

2.3.2. L'organisation sociale chez les migrants

C'est une organisation sociale qui a été crée sur la base de l'ethnie, de l'origine villageoise ou de la zone de provenance de la migration. Elle fonctionne dans l'optique de maintenir la cohésion au sein du groupe dont un tiers migrant s'identifie et de faire face aux problèmes socio-fonciers et économiques de la zone.

L'organisation des migrants est centralisée autour d'un individu qui, en général, est le premier migrant du groupe avec lequel il partage la même ethnie ou la même origine villageoise (province, département, village). Ceux-ci sont regroupés dans des villages satellites dont les noms renvoient souvent à l'ethnie pour certains :

- Kounbrangan, quartier regroupant les Mossi originaires du yatenga ;

- Hobaga, village regroupant en majorité les Mossi originaires du Zandoma ; - Karaborosso (Faraba, Sounsoun), quartier regroupant les Karaboro ;

- Flatchin, quartier peul, etc.

Le chef de chaque groupe de migrants oeuvre pour la préservation de la cohésion sociale au sein du groupe qui s'identifie à lui. Il facilite l'insertion de tous les nouveaux migrants qui s'assimilent à son groupe et participe à la défense des intérêts de ces derniers auprès des autorités coutumières. Les chefs de migrants sont considérés comme des hôtes par ceux qu'ils accueillent. L'existence de ces deux groupes d'organisation sociale n'exclue pas des inter-relations entre eux.

2.3.3. Les relations entre autochtones et migrants

Á Dèrègouè, les autochtones, et plus précisément les Tiéfo, sont les « djatigui » (les hôtes) des migrants. Car ce sont les Tiéfo, propriétaires terriens coutumiers qui autorisent à priori l'installation, l'habitation, l'exploitation agricole, etc. aux migrants. Sans leur accord, aucun migrant ne peut à priori s'installer dans le village et exploiter un espace cultivable.

Chaque migrant a son hôte représenté par la famille du chef de terre qui l'a installé. Tout se passe comme si le chef de terre était le tuteur du migrant. Lorsqu'il attribue une portion de terre à ce dernier, celui-ci lui devient redevable chaque fin de saison. En plus, il existe des entraides mutuelles et des relations amicales entre autochtones et migrants. Les

migrants participent, contribuent financièrement et matériellement aux cérémonies des autochtones et vis versa (baptême, mariage, etc.).

L'ordre social à l'échelle villageoise est assuré de concert par le chef du village, les chefs de terre et les chefs de migrants avec l'assistance des RAV. Ces derniers sont interpellés dans la régulation des litiges sociaux et fonciers. Lorsque les protagonistes sont insatisfaits, les problèmes sont soumis aux forces de l'ordre (police ou gendarmerie) ou à la préfecture en vue d'une résolution.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus