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La Loi SRU : une loi en péril ? Controverses et difficultés d'application

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par Caroline Levron
Université Paris X-Nanterre - Science sociale, sociologie-économie 2007
  

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1.3.1.2. Un objectif inédit : la mixité sociale

« Après les efforts considérables accomplis pour augmenter la production massive de logements neufs, il est aujourd'hui indispensable de répondre plus efficacement aux aspirations à une meilleure qualité de l'habitat et de l'urbanisme, et de lutter contre le développement de la ségrégation sociale par l'habitat. »20(*)

En effet, la circulaire du 21 mars exige qu'une proportion de 20 % d'habitations sociales soit réservée à ce qui était nommé « des catégories sociales particulières. » Quant aux immeubles HLM des ZAC de plus de 1 000 habitations, ce sont maximum 50 % des logements sociaux qui doivent leur être attribués ; la même proportion est d'ailleurs envisagée dans les immeubles des ZAC de taille plus réduite. Concernant les agglomérations de plus de 50 000 habitants, la circulaire a prévu une répartition des logements sociaux entre les villes. Un programme de financement impose que les habitations sociales ne soient pas exclusivement réparties sur le même territoire d'une commune, alors d'autres villes n'entreprennent pas leur construction. Pour la première fois, les communes de plus de 10 000 habitants se sont vues dans l'obligation d'atteindre 20 % de logements sociaux auquel cas, les offices HLM bénéficiait d'une priorité par rapport aux constructions privées qui voyaient leur rythme de financement ralenti21(*).

Cependant, des exceptions sont faites dans les communes où une étude de marché du logement conclue à la nécessité de ne produire qu'une faible part de HLM. Le but de ce plan vise à compenser les premières tendances ségrégatives apparues dès la fin des années 1960.

Dans le texte, la directive Guichard prévoit 20 % de logements sociaux pour les « catégories sociales particulières » ; cependant la question de l'identité des personnes regroupées sous ce nom et ayant un accès privilégié aux grands ensembles se posent. Dans tous les programmes de construction de 300 logements, 20 % étaient prévus pour convenir, par leur taille et leurs caractéristiques, aux personnes âgées, aux « isolés » (comme le stipule la loi) et aux personnes handicapées physiquement. Parallèlement, les pouvoirs publics essaient d'empêcher la constitution des barres ethniques. Pour arriver à cette fin, le quota de 20 % semblait devenir un moyen, tout prônant une politique de dispersion des familles étrangères loin des ZUP22(*).

En même temps, des opérations isolées sont lancées dans différentes villes de France en réaction aux grands ensembles et encore imprégnée de l'utopie soixante-huitarde. Ainsi à dans le quartier de Villeneuve à Grenoble, la municipalité socialiste lance la ville de « l'imagination au pouvoir » ; présentée comme l'« anti-Sarcelles », elle doit accueillir « les Arabes, les aveugles, les tordus et les fous », comme le précise son maire dans une interview au Nouvel Observateur en 197223(*). Quant à la ville d'Evry, elle prône la diversification architecturale et des infrastructures. Finalement, ces programmes seront des échecs car marqués par la paupérisation, tendance qui s'accentue à partir des années 1970 avec le départ des classes moyennes pour la propriété privée.

Cependant la circulaire d'Olivier Guichard n'aura que très peu d'impact. Jusqu'aux années 1980, les politiques publiques s'intéressent encore peu à la question de la ville. Mais lorsque les premières émeutes de banlieues éclatent dès la fin des années 1970, des mesures sont prises en faveur du logement social mais ne touchaient qu'à la réhabilitation matérielle de l'habitat ou l'amélioration des conditions de vie des populations spécifiques ; la question de la mixité passe encore quasiment inaperçue. Seul un décret de 1986 fait de nouveau référence à « la nécessité de diversité de la composition sociale de chaque quartier »24(*) ; le préfet a obligation d'établir un règlement départemental précisant des critères de priorité pour l'attribution des logements sociaux. Mais quelques mois plus tard, les élections législatives voient la victoire de la droite et la nomination de Jacques Chirac au poste de Premier ministre. Le temps de cette première cohabitation, la politique de la ville est partiellement mise en sommeil ; quelques colloques, organisés par des élus de gauche, tentent de redonner un contenu politique à la gestion et à la transformation urbaine. Le retour de la gauche au gouvernement en 1988, marque le retour de la politique de la ville, sous l'impulsion de Michel Rocard, Premier ministre. Mais la question de la mixité sociale continue de rester en sommeil jusqu'en 1990 et la promulgation de la loi Besson.

* 20 Extrait de la Circulaire du 21 mars 1973 relative aux formes d'urbanisation dites « grands ensembles » et à la lutte contre la ségrégation sociale par l'habitat

* 21 Cet article de la circulaire concernait les promoteurs immobiliers privés et non les maisons individuelles des accédants à la propriété privée.

* 22 Dans son ouvrage sur la mixité sociale, Hacène Belmessous émet l'hypothèse que cette politique des 20 % est plus discriminatoire que destinée à favoriser la mixité dans les grands ensembles. Il explique : « Faut-il comprendre "les 20 % de populations particulières" comme le souhait à demi-mot, de plafonner l'accès aux grands ensembles à "20 % d'étrangers" ? (...) Dans une France encore fortement traumatisée par la Guerre d'Algérie, l'objectif politique de cette "mixité" était de rendre invisible les populations nord-africaines dans la ville française. » (Source : BELMESSOUS Hacène, Mixité sociale : une imposture. Retour sur un mythe français. Nantes : L'Atalante, collection « Comme un accordéon », 2006. p. 12)

* 23 ?, ?. Nouvel Observateur, semaine du 15 au 21 mai 1972.

* 24 Décret n°86-670 du 19 mars 1986 modifiant le Code de la construction et de l'habitation et relatif à l'attribution des logements gérés par les organismes d'habitation à loyer modéré. Paru au Journal Officiel, le 20 mars 1986.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry