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Le délai raisonnable dans le procès pénal

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par Naty Sarr
Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maîtrise sciences juridiques 2007
  

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C.A.D.H. Charte Africaine des Droits de l'Homme

C.E.D.H. Convention Européenne des Droits de l'Homme

C.O.A. Code des Obligations de l'Administration

C.P. Code Pénal

C.P.C. Code de Procédure Civile

C.P.P. Code de Procédure Pénale

Cass. Crim. Cassation criminelle

Cour E.D.H. Cour Européenne des Droits de l'Homme

O.N.U. Organisation des Nations Unies

O.U.A. Organisation de l'Unité Africaine

R.F.D.A. Revue française de droit administratif


INTRODUCTION........................................................................................6

PREMIERE PARTIE : LE DELAI RAISONNABLE UN PILIER D'UNE BONNE JUSTICE..................................................................................................................................12

CHAPITRE I : LA NECESSITE DU RESPECT DU DELAI RAISONNABLE..............13

SECTION I : LA VALEUR NORMATIVE DE L'EMERGENCE DU CONCEPT DE DELAI RAISONNABBLE.............................................................................14

Paragraphe 1 : La reconnaissance conventionnelle du droit au délai raisonnable du procès pénal.......................................................................................................14

Paragraphe 2 : La garantie constitutionnelle du droit au délai raisonnable du procès pénal.17

SECTION II : LA PROTECTION PENALE DU DROIT AU DELAI RAISONNABLE DU PROCES PENAL........................................................................................20

Paragraphe 1 : Les conditions relatives aux motifs de la détention provisoire.................20

Paragraphe 2 : Les exigences relatives aux autorités compétentes..............................22

CHAPITRE II : LES OBJECTIFS DU DELAI RAISONNABLE DU PROCES

PENAL....................................................................................................24

SECTION I : LE SOUCI D'UN PROCES JUSTE ET EQUITABLE..........................24

Paragraphe 1 : La protection des intérêts en présence au procès pénal.........................25

Paragraphe 2 : Le souci du respect de la présomption d'innocence.............................27

SECTION II : LES GARANTIES POUR UN RESPECT EFFECTIF DU DELAI RAISONNABLE DU PROCES PENAL.............................................................30

Paragraphe 1 : Les actions en délai excessif du procès pénal....................................30

Paragraphe 2 : Les sanctions du délai excessif du procès pénal..................................32

DEUXIEME PARTIE : L'OPPORTUNITE D'UNE REFORME DU SYSTEME JUDICIAIRE SENEGALAIS........................................................................36

CHAPITRE I : LES MANQUEMENTS CONSTATES DANS LE SYSTEME REPRESSIF SENEGALAIS............................................................................................37

SECTION I : UNE EFICACITE CRITIQUEE DU SYSTEME REPRESSIF..................37

Paragraphe 1 : Une efficacité critiquée au plan organique........................................38

Paragraphe 2 : Une efficacité critiquée au plan matériel..........................................40

SECTION II : L'AMBIGUÏTE DE LA NOTION DE DELAI RAISONNABLE.............43

Paragraphe 1 : La détermination de la période à prendre en compte............................43

Paragraphe 2 : Le caractère relatif de l'appréciation du délai raisonnable.....................45

CHAPITRE II : LES SOLUTIONS PRECONNISEES FACE A LA DIFFICULTE D'APPLICATION DU DELAI RAISONNABLE DU PROCES PENAL.......................48

SECTION I : LA RELECTURE DES REGLES DE PROCEDURE PENALE................49

Paragraphe 1 : L'aménagement de nouveaux délais pour le traitement des dossiers..........49

Paragraphe 2: L'approfondissement du contrôle de l'instruction préparatoire.................51

SECTION II : LA CELERITE PAR VOIE D'AMENAGEMENTS PROCEDURAUX......54

Paragraphe 1 : La célérité par la contractualisation de la justice pénale........................54

Paragraphe 2 : La célérité par la restriction des voies de recours................................58

CONCLUSION..........................................................................................61

Sous le vocable "Droit pénal", on comprend généralement l'ensemble des règles visant d'une part l'application des peines déterminées à certains actes que la loi défend, soit parce qu'ils menacent l'existence de la société soit parce qu'ils nuisent à ses institutions, d'autre part, la procédure par laquelle sont constatés poursuivis et punis ces faits délictueux.

Le procès pénal constitue la mise en oeuvre du droit pénal. Si le droit pénal dit ce qu'il ne faut pas faire et également ce que l'on encourt si on le fait quand même, le procès pénal vise à préciser dans quelles conditions une personne pourra se voir reprocher ce que le droit pénal interdit.

Le procès pénal peut être défini comme un litige soumis à un tribunal, une contestation pendante devant une juridiction, un contentieux, une espèce. Il est parfois synonyme de procédure, d'instance. En outre le procès pénal apparaît comme l'intervention du juge, pour trancher, par application à la loi pénale, un différend opposant un individu auteur d'une infraction à la société aux intérêts de laquelle il est porté atteinte. En effet la procédure pénale, encore appelée instruction criminelle constitue donc un ensemble de règles qui permettent de déterminer la manière dont sera conduit le procès pénal, depuis la constatation de l'infraction jusqu'au jugement.

Ainsi, une fois les éléments du procès réunis, celui-ci va pouvoir se dérouler. Ce déroulement va se matérialiser par une longue suite d'actes de procédure accomplis tant par les autorités étatiques que par les parties privées. En effet la procédure pénale obéit à un certain nombre de principes protecteurs aussi bien de la société que de l'accusé. Ces principes peuvent être classés dans deux grandes catégories: la première étant les garanties générales notamment le droit au procès équitable et la seconde catégorie s'articule autour des garanties appartenant à tout accusé. Ce volet concerne entre autre la présomption d'innocence, le principe de la légalité des délits et des peines et enfin le droit au délai raisonnable de la procédure.

Afin de ne léser personne au procès, celui-ci doit se dérouler dans le plus bref délai. Le droit au délai raisonnable constitue un élément très important du procès pénal car il serait vain qu'une justice soit rendue au terme d'une procédure respectant le droit d'être entendu équitablement et publique, si la décision n'intervient que bien des années après l'introduction de l'instance. La solution du litige pourrait perdre tout son intérêt pour le justiciable et la justice ne serait pas équitable.

Cependant le procès étant l'affaire des hommes s'accompagne souvent de lenteurs: on connaît aussi le mot de LA BRUYERE "le devoir des juges est de rendre la justice leur métier est de la différer. Certains connaissent leur devoir. Beaucoup font leur métier."1(*)

L'impératif de célérité a fait fleurir les adages louangeurs "Le temps qui passe, c'est la vérité qui s'enfuit"; "Justice tardive équivaut à injustice"; Justice delayed is justice denied.

Il ne fait plus aucun doute que de nos jours les droits de l'homme notamment celui d'être jugé dans un délai raisonnable occupe une place centrale aussi bien sur la scène internationale que dans l'ordre juridique interne. En effet, au niveau international, la nécessité d'une célérité trouve sa justification dans la convention européenne des droits de l'homme, dans les dispositions du pacte international relatifs aux droits civils et politiques, la charte africaine des droits de l'homme, etc.... Au niveau interne, la célérité trouve sa justification dans la Constitution à travers le titre II relatif aux libertés publiques. De son côté le code de procédure pénale a entendu mettre un terme aux pertes de temps. On peut citer l'institution de délai de rigueur en matière détention provisoire à travers l'article 127 C.P.P. En plus il faut noter qu'aux termes de l'article 385 C.P.P., une affaire en état d'être jugée ne peut faire l'objet de trois renvois successifs pour quelque cause que ce soit. On peut enfin citer l'extension de la notion de flagrance2(*).

Cependant le souci du législateur, en matière de célérité du procès pénal, apparaît plus dans sa réglementation de la détention provisoire. Ainsi il ne la prévoie que pour les infractions d'une certaine gravité et en limite la durée. En effet il pèse une certaine obligation sur je juge concernant sa liberté d'intervention en matière de détention. Il est tenu de prendre en compte d'une part la gravité de l'infraction et d'autre la nature des investigations à entreprendre pour la manifestation de la vérité

La préoccupation du législateur va dans le sens de l'incompatibilité entre la détention provisoire qui est une mesure avec laquelle le détenu voit sa liberté confisquée et ses intérêts moraux et matériels remis en cause et la présomption d'innocence. En jetant le suspicion sur son honnêteté, sa réputation se trouve compromise par cette grave mesure qui perturbe dangereusement sa vie familiale professionnelle et sociale. Et indirectement, l'encellulement en isolant de l'inculpé rend sa défense difficile. Ainsi présomption d'innocence ne rimant pas avec détention provisoire, le code de procédure pénale pose un délai limité qui n'est susceptible de prolongation qu'a condition de remplir certaines exigences. La détention est un paradoxe.

La notion de délai raisonnable est une notion floue qui est difficile à définir. Le terme délai qui se rapporte à la durée peut s'entendre comme le temps accordé pour faire une chose. L'ambiguïté et la difficulté proviennent de l'adjectif raisonnable qui est accolé au "délai". Qu'est ce qui est raisonnable et qu'est ce qui ne l'est pas?

De prime abord, nous pouvons dire qu'est raisonnable ce qui est conforme à la raison, au bon sens. Il s'agit d'une notion qui fait appel à des appréciations du milieu social. C'est ce qui est admissible dans une communauté à un moment donné. Le raisonnable varie alors avec le temps et l'espace comme l'ordre public3(*). Les juristes préfèrent parler de célérité de la procédure pénale lorsqu'il s'agit d'aborder les questions relatives à la durée de l'instance judiciaire.

La célérité de la procédure peut être justifiée dans certaines circonstances. A en juger les dispositions du C.P.P.S., il semble que la célérité peut être justifiée par l'urgence soit dans la phase préparatoire du procès, soit dans la phase de jugement.

Au niveau de la phase préparatoire, la justification première est le cas où l'on est en présence d'une procédure de flagrant délit4(*). Il en est de même de la célérité dans l'instruction en cas de danger de mort d'un témoin ou d'un inculpé ou en cas d'indices sur le point de disparaître. En principe, lors de l'interrogatoire de l'inculpé, il existe un certain nombre d'obligations qui pèsent sur le juge d'instruction5(*). Mais, en cas d'urgence, ces formalités de comparution sont écartées : il y'a une mise à l'écart des formalités de premières comparutions6(*) et une mise à l'écart des formalités relatives aux interrogatoires ultérieures7(*).

L'urgence justifiée dans la phase de jugement se traduit principalement par la répression immédiate des délits d'audience. Les juges peuvent se saisir d'office en cas d'infraction commise à l'audience d'une juridiction de jugement. Il y'a, là, en l'absence de problème de preuve, une application de la règle « tout juge est procureur général ».

Certes ces situations pourraient donner lieu à des développements très intéressants mais dans le cadre de cette étude, nous mettrons l'accent sur le cas particulier où l'infraction commise est portée devant la justice pour un examen et un jugement. En d'autres termes, lorsqu'un fait susceptible de faire l'objet d'une infraction est commise, à moins qu'il s'agisse d'une contravention légère pouvant faire l'objet d'un règlement immédiat, au moyen de la procédure d'amende forfaitaire, il sera question ici de voir si le temps écoulé entre la commission de cette infraction et le jugement de celle-ci est raisonnable.

La célérité n'est pas la précipitation, mais elle vise a donner au processus pénal un rythme aussi rapide que possible, sans porter atteinte aux principes fondamentaux de l'ordre juridique comme la présomption d'innocence et les droits de la défense. Elle se fonde d'abord sur l'intérêt de l'opinion publique qui réclame un châtiment rapide; ensuite elle est également indispensable pour une bonne obtention des preuves et enfin la célérité va dans le sens des justiciables:de la victime dont il faut hâter l'indemnisation et de la personne poursuivie car au bout d'un certain temps la défense devient malaisée8(*).

En effet l'heure est à l'accélération du procès pénal, dans une société, dès l'instant où le retard à rendre la justice est ressenti comme une frustration, tant par l'opinion publique, qui mesure les interdits à la vigueur de la réaction des organes essentiels de régulation sociale que sont les juges répressifs, que par le délinquant qui souhaite être fixé sur son sort le plus tôt possible, mais aussi par la victime qui attend qu'on lui rende justice et que son préjudice soit réparé.

L'intérêt de l'étude de ce sujet réside dans le fait que la célérité est exigée devant toutes les juridictions c'est-à-dire même en matière civile et administrative. Pour ne citer que la matière administrative, on peut dire que le sursis à exécution a constitué le principal instrument de l'urgence. Il a néanmoins connu des évolutions.

En 1976, le législateur français a crée plusieurs régimes spéciaux de sursis à exécution. Depuis une loi du 30 juin 2000, en vigueur depuis le premier (1er) janvier 2001, on ne parle plus de sursis à exécution mais plutôt de « référé suspension »9(*).

A la vérité, l'efficacité d'une procédure d'urgence étant directement dépendante de la simplicité de sa mise en oeuvre, le législateur l'a bien compris et a procédé à la mise en place de référé de droit commun sous un double signe de la célérité et de la souplesse.

Le juge des référés doit statuer vite. Pour cela, il peut décider seul, sans conclusions du commissaire du gouvernement et dans le cadre d'une procédure orale. Incontestablement, la loi du 30 juin 2000 a atténué l'encombrement des juridictions administratives et par voie de conséquence les lenteurs procédurales.

De leur côté, les pénalistes ont généralement en vue d'accélérer le cours de la justice, trois moyens à leur disposition:augmenter la capacité du système en augmentant le nombre de magistrats; réduire les charges des tribunaux par le biais de la décriminalisation et enfin imaginer des règles de procédure qui permettent de juger plus rapidement.

Instruction, enquête et jugement constituent les différentes phases du procès pénal. Cependant le procès ne commence officiellement qu'à partir moment où la partie demanderesse déclenche la poursuite. Mais une décision en ce sens ne peut souvent être prise par le ministère public qu'après avoir recueilli certains renseignements sur l'infraction portée à sa connaissance. Aussi la première phase officielle est précédée par une phase préliminaire, celle de la recherche et de la constatation des infractions. Ainsi l'obtention d'un procès pénal rapide passe nécessairement par une célérité de la phase précédant la poursuite. En effet, il est fait obligation à l'officier de police judiciaire avisé de la commission d'un crime ou d'un délit flagrant de se transporter sans délai sur les lieux aussitôt qu'il aura informé le procureur de la république et éventuellement reçu les instructions de ce magistrat. En somme l'officier de police judiciaire doit accomplir tous les actes requerrant célérité afin de faire à l'urgence.

Pour rendre efficace l'exigence de célérité, il est reconnu des actions en délai excessif aux individus qui auraient souffert d'un délai déraisonnable de la procédure. Ces actions doivent permettre à la défense de faire juger le caractère déraisonnable de la durée de la procédure, de manière effective et à toute phase de la procédure. Relativement aux observations précédentes, on constate que dans un souci de sauvegarde de la liberté individuelle, la célérité du procès constitue une garantie considérable des droits de la défense dont le non respect est sanctionné.

Cependant, force est de noter que si l'idée de célérité constitue bien dans notre législation un principe directeur, l'examen de la pratique révèle que notre justice pénale est lente et même de plus en plus lente. Contrairement à ce que l'on pourrait croire ,eu égard a la richesse en matière de droits de l'homme et a la diversité des droits protégés, le système sénégalais met l'accent plus sur la proclamation et la reconnaissance, que sur la garantie et la protection stricto sensu. De sorte que la proclamation du droit au délai raisonnable contraste avec sa protection.

Cette lenteur de la justice en général et du procès pénal en particulier ont des causes liées aux facteurs administratifs, politiques et socio-culturels et enfin des causes relatives à la procédure quant à la saisine de la juridiction pénale,au règlement des dossiers et au temps des actes. Peut-on citer l'alourdissement de la procédure, l'accroissement de la criminalité sans que les moyens de la justice aient été adaptés en conséquence. En outre, la surcharge des parquets provoque un encombrement des juridictions, ainsi qu'un retard général dans le traitement des affaires a l'audience.

La justice pénale devient lente, ce qui n'est point une qualité. Veut-on des exemples? Au Sénégal, il y'a 400 magistrats dont une quarantaine en détachement dans les départements ministériels. Ce qui fait qu'il y'a 360 magistrats pour une population de plus de 12 millions d'habitants. Dans pareilles conditions, pas de justice équitable et respectueux des droits de l'homme. Par ailleurs, la lenteur du procès pénal aboutirait à n'en pas en douter à ce que la preuve des faits ne puisse plus être rapportée.

En tout état de cause, face à ce fléau, il s'impose au Sénégal de trouver des voies et moyens pour l'accélération des procédures.

A la lumière de tout ce qui précède, un constat se fait : le délai raisonnable est un droit fondamental, un fondement d'une bonne justice. Toutefois, il connaît dans la pratique des violations. C'est le cas dans notre pays, le Sénégal où la justice pénal est lente et où il s'avère nécessaire de revoir le système répressif.

Pour ce faire, dans une structure bipartite, nos propos seront axés sur : le délai raisonnable un pilier d'une bonne justice (première partie) et, l'opportunité d'une reforme du système répressif sénégalais (deuxième partie).

La qualité et l'efficacité de la justice préoccupent les professionnels du droit. Ils se planchent aujourd'hui plus que jamais sur le thème "délai raisonnable de la justice". A travers ce thème, plus que d'actualité, avocats, magistrats et greffiers réfléchissent sur les délais raisonnables dans les jugements des affaires. A côté de la question récurrente d'indépendance et d'impartialité, l'accent est en même temps mis sur la garantie au justiciable à ce que son procès se termine sans retard excessif. La violation de ce droit porte atteinte tant à la crédibilité de la justice qu'à son efficacité pour la protection des droits. Combien de fois n'a-t-on pas entendu les justiciables ou simplement les professionnels du droit se plaindre des lenteurs de la justice. En tout état de cause, une bonne justice est une justice accessible, crédible qui rend des décisions dans un délai raisonnable.

En effet le déni de justice10(*) s'entend aussi de tout manquement de l'Etat à son devoir de protection juridictionnelle de l'individu qui comprend le droit pour le justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable. Il s'avère insupportable pour l'individu de devoir attendre de nombreux mois voire de longues années pour voir son litige tranché. En raison de toutes ces considérations, il existe un nécessaire respect du délai raisonnable (chapitre I). Les objectifs visés (chapitre II), à travers son respect sont en vue d'améliorer l'équité, la qualité et l'efficacité de la justice, surtout quand celle-ci est devenue une justice au quotidien, un bien à consommation naturelle.

CHAPITRE I/ UN NECESSAIRE RESPECT DU DELAI RAISONNABLE

L'étude du procès pénal dans un délai raisonnable pose le problème des garanties d'un tel procès. Il s'agit de voir quelle en est la valeur protectrice. Dans un premier temps ce droit connaît une valeur normative (section I) car défini par les traités et chartes internationaux ratifiés par le Sénégal. Le justiciable qu'il soit demandeur ou défenseur dans un litige civil ou accusé en matière pénale, doit avoir la possibilité de faire valoir ses droits sans retard excessif11(*).Donc dans l'intérêt du bonne administration de la justice pénale, le Sénégal à travers le C.P.P. relève le pari en posant des règles de délais stricts pour l'accomplissement des actes de procédure (section II).

SECTION I/ LA VALEUR NORMATIVE DE L'EMERGENCE DU CONCEPT DE DELAI RAISONNABLE

S'il est admis que l'auteur d'une infraction ne peut être condamné qu'après avoir été jugé il n'en demeure pas moins que le respect des libertés individuelles d'une part et la réaction hostile à la délinquance de la société d'autre part font de la célérité du procès pénal une nécessité .Il s'agit d'une exigence qui doit être observée à toutes les phases de la procédure c'est-à-dire aussi bien dans son déroulement qu'au niveau du jugement. A cet effet on constate qu'il s'agit d'un droit conventionnellement reconnu (paragraphe I) et constitutionnellement garanti (paragraphe II).

PARAGRAPHE I/ LA RECONNAISSANCE CONVENTIONNELLE DU DROIT AU DELAI RAISONNABLE DE LA PROCEDURE

La reconnaissance du droit au délai raisonnable se traduit plusieurs niveaux. En ce qui nous concerne nous verrons les traités internationaux à (A) et la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (B).

A/ La reconnaissance du droit au délai raisonnable par les traités internationaux

L'actualité des droits de l'homme n'épargne pas la procédure et plus particulièrement le caractère raisonnable de son délai qui se trouve aujourd'hui dans la sphère des droits fondamentaux. Il n'est, en effet, pas à démontrer que le délai raisonnable participe du caractère juste et équitable du procès pénal .Etre jugé sans retard est un droit de la personne car un délai trop long constituerait un dénis de justice .Ce droit a été défini par plusieurs traités et instruments internationaux.

L'article 6 paragraphe 1 de le C.E.D.H. dispose notamment « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue ...dans un délai raisonnable ». L'article 9 paragraphe 3 du pacte international relatif aux droits civils et politiques ne dit rien d'autre en énonçant : tout individu arrêté ou détenu du chef d'une infraction pénale sera traduit dans le plus court délai devant le juge ou une autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires et devra être jugé dans un délai raisonnable ou libéré.

La détention des personnes qui attendent de passer en jugement ne doit pas être la règle...Dans ce même ordre d'idées l'article 5 paragraphe 3 de la C.E.D.H. édicte notamment « toute personne arrêtée ou détenue a le droit d'être jugé dans un délai raisonnable ou libérée pendant la procédure » .

Les délais raisonnables prévus par les dispositions conventionnelles ne paraissent pas pouvoir être définis pour l'ensemble des procédures. L'aspect raisonnable s'attachant aux délais doit être apprécié in concreto pour chaque phase de la procédure. C'est d'ailleurs ce qui ressorti de la C.E.D.H. qui fait la distinction entre délai raisonnable de la détention provisoire (art5.3)12(*) ; bref délai pour statuer en matière de détention (art5.4)13(*) et enfin délai raisonnable de la procédure (art6 .1)14(*).

Relativement au délai raisonnable de la détention, jusqu'à présent nul n'a prétendu que la personne détenue dans le cadre d'une procédure de comparution immédiate était détenue au delà d'un délai raisonnable .Dans cette procédure spécifique les délais de jugement prévus par la loi sont courts et peut être s'est on rendu compte qu'il ne serait pas raisonnable de prétendre le contraire.

Le problème se pose alors pour les cas de détention qui requièrent une information .Il appartient aux chambres d'accusation de statuer sur ce problème ,lorsque saisies d'appels formés contre les ordonnances refusant les demandes de mise en liberté elles doivent, en vue de l'ensemble de la procédure,des présomptions pesant à l'encontre de la personne mise en examen, des investigations restant à effectuer, de la complexité de l'affaire, pour chaque espèce, juger si la durée de la détention provisoire excède ou non le délai raisonnable . L'arrêt de la chambre d'accusation 15(*) qui ordonne la prolongation de la détention sans répondre au mémoire de la personne mise en examen, qui invoque la violation de l'art 5.3 de la convention encourt cassation.

En définitive, pour une application de cet article conduisant à une mise en liberté fondée sur le dépassement du délai raisonnable, il convient de se référer à l'arrêt de la chambre d'accusation du 22octobre 199616(*).

En ce qui concerne le bref délai conformément a l'article5.4 toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il soit statué à bref délai sur la légalité de sa détention, et ordonné sa libération si la détention est illégale.

S'agissant enfin du délai raisonnable de la procédure proprement dite, c'est l'article 6.1 qui en apporte une précision. Nous nous situons dans l'hypothèse d'une personne mise en examen ou d'un prévenu libre qui estime que la durée de sa procédure a été excessive. La Cour E.D.H. a lors de son arrêt du 25 février 1993 rendu dans l'affaire Dobbertin ,condamné la France pour violation de l'article 6 aux motifs qu'une procédure pénale d'une durée supérieure à 12 ans ne respecte pas le droit reconnu par l'article précité. En soulignant en l'espèce la lenteur de la procédure, la Cour affirme que l'article 6 fait peser sur les Etats parties à la convention, l'obligation d'organiser un système judiciaire apte à faire respecter la notion de délai raisonnable.

B/ La reconnaissance du droit au délai raisonnable par la charte africaine des droits de l'homme et des peuples

L'intérêt que l'Afrique attache au progrès des droits de l'homme et des libertés fondamentales , notamment celui d'être jugé dans un délai raisonnable se manifeste à travers la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples.

Dès 1961, les juristes africains lancèrent l'idée d'une convention africaine des droits de l'homme. De congrès en conférences, de conférences en séminaires, le projet a mûri et les juristes, d'abord exclusivement préoccupés de la protection des droits civils et politiques, élargirent leurs travaux à d'autres domaines17(*).

A l'occasion de la conférence des chefs d'Etats et de Gouvernement des pays membres de l'O.U.A.18(*), tenue à Monrovia, au Liberia, en juillet 1979, il fut décidé d'élaborer une véritable C.A.D.H., proclamant des droits et organisant leur protection effective en Afrique. A l'issue de ces réunions d'experts sur le projet de charte, tenu à Dakar et Banjul en 1981, il fut décidé de soumettre le texte aux Etats membres de l'O.U.A.

La charte fut adoptée lors de la dix huitième conférence des chefs d'Etat et de Gouvernement. Son article 7 dispose que : «Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend :...le droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale. »

En effet les garanties essentielles d'une justice équitable figure dans la Charte, en tant que partie intégrante du droit de chacun à ce que sa cause soit entendue dans le plus bref délai.

A l'instar des autres traités internationaux, les droits que garantie la C.A.D.H. implique entre autres celui d'être jugé sans retard excessif, ce qui interdit que l'on soit détenu, indéfiniment sur inculpation pénale.

En fait, le droit du justiciable au délai raisonnable de la procédure peut être considéré comme étant le troisième élément du droit au procès équitable. Il serait vain qu'une justice soit rendue au terme d'une procédure respectant le droit d'être entendue publiquement et équitablement, si la décision n'intervenait que bien de années après l'introduction d'instance.

La solution du litige pourrait perdre tout intérêt pour le justiciable et la justice ne serait pas équitable. Ce droit est révélateur d'une bonne administration de la justice et oblige les juges à statuer sans retard excessif.

La charte africaine est donc un ensemble de dispositions ou articles garantissant certains droits des peuples. Les Etats africains doivent appliquer ces dispositions. Il s'agit d'un traité, or quand un Etat ratifie un traité, il est juridiquement tenu de protéger les droits énoncés dans ce traité.

PARAGRAPHE II : LA GARANTIE CONSTITUTIONNELLE DU DROIT AU DELAI RAISONNABLE

La célérité de la procédure pénale est un des droits fondamentaux affirmé et accepté par la législation de tout Etat de droit. C'est dans ce contexte que le Sénégal a ratifié les traités et conventions ayant pour objet la protection des droits de l'homme notamment celui d'être jugé sans retard excessif (A). Notons juste que le respect des dispositions constitutionnelles s'impose du fait que ce texte se trouve au sommet de la hiérarchie des normes (B).

A/ La ratification des conventions internationales par le Sénégal

Les droits fondamentaux de la personne notamment celui d'être jugé sans retard excessif sont fixés par la Constitution, norme fondamentale, qui a consacré son titre II aux libertés publiques et à la personne humaine. Il s'y ajoute que le Sénégal proclame dans le préambule de sa constitution son attachement aux droits fondamentaux ainsi qu'ils ont été définis dans la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et dans la déclaration universelle du 10 décembre 1948.

Par ailleurs la notion de délai raisonnable figure à l'article 7 de la charte africaine des droits de l'homme qui elle-même a valeur constitutionnelle. Cette charte fait partie du droit positif sénégalais, puisqu'elle figure au préambule de la constitution de 200219(*).

C'est dire que le Sénégal dispose d'un environnement adéquat à l'épanouissement des droits de l'homme et qui est par conséquent conforme aux exigences du délai raisonnable de la procédure. Le droit sénégalais, en conformité avec les engagements internationaux garantie donc à chaque citoyen la faculté de saisir un tribunal et de faire trancher son litige dans un délai raisonnable.

Ces dispositions de la loi fondamentale confèrent à l'Etat des obligations de respecter et de protéger la personne quelque soit par ailleurs sa situation. Ainsi, toute personne arrêtée ou placée sous détention doit être jugée le plus vite possible pour qu'elle soit fixée sur son sort. Selon Walter Savage Landor « une justice tardive est une injustice 20(*)». La lenteur du procès déstabilise l'individu et l'installe dans une situation psychologique pénible. Il a hâte de savoir quelle sera la sentence de la justice. S'il est coupable il veut savoir s'il va bénéficier de circonstances atténuantes et s'il est innocent il veut être libéré immédiatement.

Dans cette perspective, il faut souligner que dès son accession à la souveraineté internationale, le Sénégal a voulu mettre en place un Etat démocratique fondé sur la primauté du droit et des droits de l'homme tels qu'ils ont été définis par les déclarations et traités internationaux. Le législateur sénégalais est donc fortement influencé par l'esprit dégagé sur la primauté des droits de l'homme.

L'intérêt que le Sénégal porte à la promotion et à la protection des droits de l'homme et des libertés individuelles tel que le droit d'être jugé dans le délai raisonnable vient directement du fait qu'il s'est rendu compte à l'instar de la communauté internationale que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté de la justice et de la paix dans le monde.

Relativement à la dignité, on peut dire sans conteste qu'il est contraire à la dignité humaine de garder infiniment prison selon le bon vouloir des "bourreaux". Cependant, si tous les nouveaux Etats ont reconnu les droits fondamentaux de l'homme, il reste qu'en pratique la réalité est toute autre. En effet dans certains Etats, le principe de la primauté des droits et surtout celui d'être jugé dans un délai raisonnable est très ou dirons nous, trop souvent battu en brèche au nom du maintien de l'ordre public, de l'existence de circonstances exceptionnelles. Pour Julius Nyerere « il est préférable que quelques innocents souffrent d'une détention temporaire plutôt qu'un seul traître puisse détruire la nation»21(*). Plus précisément encore M. Houphouët-Boigny déclarait en 1963 "Je préfère l'injustice au désordre : on peut mourir de désordre, on ne peut mourir d'injustice. Une injustice peut être réparée"22(*).

B / La force juridique des dispositions constitutionnelles

Du point de vue de la logique juridique, plus la source d'une disposition est élevée dans l'échelle des normes juridiques, plus son respect s'impose aux gouvernants. La Constitution est la règle de droit qui domine et hiérarchise toutes les autres règles de droit. Le principe paraît aller de soi. Il est universellement admis et constamment réaffirmé .A travers les querelles d'école, il prédomine une idée commune : la constitution est la règle suprême de l'Etat.

Par ailleurs les dispositions qu'elle contient font l'objet d'une protection absolue. S'il existe un droit qui s'impose à l'action de tous les pouvoirs publics, aux autorités judiciaires notamment, c'est la constitution. Le principe se donne une justification de fond car l'objet et l'utilité des dispositions constitutionnelles commandent de les mettre hors d'atteinte de ceux à qui elles s'imposent23(*).

La suprématie constitutionnelle se justifie, en outre, par le fait que la constitution fonde le pouvoir de l'Etat en même temps qu'elle l'institue. Les principes de subordination et de cohérence se conjuguent pour imposer la primauté absolue sur toutes les autres règles juridiques de droit interne, du pacte qui établit le statut du pouvoir d'Etat. Cette valeur juridique supérieure à toute autre règle de droit suppose donc que toutes les autres normes lui sont subordonnées. La hiérarchie coïncide d'abord avec la hiérarchie des organes dont elles émanent. Par suite, la loi ordinaire émanant du parlement et du gouvernement agissant toujours en accord, est soumise à la loi constitutionnelle. La force juridique de la constitution se traduit dans le langage juridique par diverses expressions telle celle de légalité24(*), de juridicité25(*)...

En d'autres termes, affirmer la suprématie de la constitution sur les autres règles juridiques implique que certains mécanismes de contrôle soient mis en oeuvre pour que soit assurée la conformité de celles-ci à celles-là et qu'ainsi le principe de la suprématie des dispositions constitutionnelles ne demeure pas lettre morte.

Le code de procédure pénale émanant du législateur au même titre que la constitution reconnaît implicitement le droit au délai rapide de la procédure à travers ses dispositions.

SECTION II : LA PROTECTION PENALE DU DROIT AU DELAI RAISONNABLE

En précisant les conditions relatives aux motifs (Paragraphe I) et aux autorités compétentes (Paragraphe II) la législation pénale nationale a voulu limiter les détentions abusives en ne laissant aux magistrats une liberté totale d'appréciation.

PARAGRAPHE I : LES CONDITIONS RELATIVES AUX MOTIFS DE LA DETENTION PROVISOIRE

Pour les motifs, il est a préciser que la détention ne doit être ordonnée par le juge d'instruction que lorsqu'elle est justifiée soit par la gravité des faits (A) soit par la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité (B)

A/ Une durée raisonnable de la détention au regard de la gravité des faits

On peut affirmer sans conteste qu'il existe un lien étroit entre procès pénal et détention provisoire, le second étant une mesure préventive à l'égard de la personne faisant l'objet des poursuites c'est-à-dire du procès.

Pour faire de la détention une mesure exceptionnelle, le législateur sénégalais ne l'a prévu que pour les infractions d'une certaine gravité et en plus il doit en limiter la durée. L'article 127 C.P.P. dispose « En matière correctionnelle, lorsque le maximum de la peine prévue par la loi est inférieure ou égale a 3ans, l'inculpé régulièrement domicilié au Sénégal ne peut être détenu plus de 5 jours après sa première comparution devant le juge d'instruction. En outre aux termes de l'article 127 bis du même code, en matière correctionnelle, à l'exception des cas ou elle est obligatoire aussi que toutes les infractions prévues aux articles 56 a 100 du C.P., si la détention est ordonnée, le mandat de dépôt délivré n'est valable que pour une durée de 6mois non renouvelable ». Ainsi le législateur sénégalais a posé des délais particuliers et chiffrés en matière de détention provisoire qui ne doit pas dépasser la limite du raisonnable .En définitive l'article 127 bis crée un délai de 6mois pour garder une personne en matière correctionnelle.

Seulement, la lecture de ces articles laisse poser un certain nombre de question. Veulent ils dire que le législateur sénégalais n'a prévu que la réglementation de la seule détention provisoire des délits punis de peine inférieure ou égale à 3ans ? A-t-il voulu supprimer la détention provisoire lorsque la peine prévue est supérieure à 3ans ?

B/ Une durée raisonnable de la détention au regard de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité

Le juge doit veiller au respect du droit au délai raisonnable de la procédure en fonction de la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen et de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité. Les juges du fond devront déterminer cette durée en fonction des éléments connexes de chaque affaire26(*), notamment l'attitude du détenu lui-même (la fuite de l'inculpé ou la commission de nouvelles infractions, de même ses propres recours contribuent à l'allongement de la procédure 27(*) et celle des organes d'instruction, lenteur injustifiée.

Dans cette perspective le législateur sénégalais a intégré dans le code de procédure bon nombre d'articles attestant de sa préoccupation du droit d'être jugé dans un délai raisonnable. En effet l'article 63 alinéa 3 généralise l'usage de la procédure de flagrant délit dés lors que le prévenu ne conteste pas les faits existants qui lui sont reprochés .Cette procédure permet de juger le prévenu dés la première audience. De plus les articles 381 a 385 du même code qui régissent la procédure de flagrant délit attestent de la volonté du législateur de faire juger les prévenus dans le plus bref délai possible. A travers l'article 389 il est fait injonction au juge de ne pas renvoyer plus de trois28(*) fois, une affaire qui est en état d'être jugée. Dans ces différents articles le constat demeure qu'il s'agit de procédure d'urgence ne nécessitant pas en principe des investigations très poussées. De ce fait susceptible d'être jugée à court terme .A côté de ces exigences, il existe des conditions relatives aux autorités compétentes.

PARAGRAPHE II/ LES EXIGENCES RELATIVES AUX AUTORITES COMPETENTES.

Il s'agit de deux principales obligations pesant sur les autorités compétentes en matière de détention et qu'elles doivent respecter: la surmotivation des décisions du juge d'instruction intervenant après un certain délai de détention provisoire (A) et la cessation d'office de la détention si les conditions de l'article 127 du code de procédure pénale ne sont pas réunies (B).

A/ La surmotivation des décisions du juge d'instruction intervenant après un certain délai de détention provisoire

A l'expiration du délai de la détention provisoire, si son maintien apparaît nécessaire, ce que le juge apprécie souverainement, elle peut être prolongée par ordonnance motivée du juge d'instruction rendue sur réquisition également motivée du procureur de la république, pendant une nouvelle période, ainsi de suite, s'il est besoin jusqu'au jugement de l'affaire au fond.

Ainsi ne serait ce que par respect du parallélisme des formes, toute décision du juge d'instruction tendant à la prolongation de la détention doit être motivée. En France, c'est les articles 145-1 et suivants qui sont le fondement de cette surmotivation. En effet aux termes de l'article précité « en matière correctionnelle la détention ne peut excéder 4 mois. Toutefois à l'expiration de ce délai, le juge d'instruction peut la prolonger par une ordonnance motivée... » . Et l'article145-2 d'énoncer qu'en matière criminelle la personne mise en examen ne peut être maintenue en détention au delà d'un an ; mais que sous réserve des dispositions de l'article 145-5 le juge peut à l'expiration de ce délai prolonger la détention pour une durée qui ne peut être supérieure à 6 mois...

En définitive lorsque la durée de la détention excède un an en matière criminelle et quatre mois en matière correctionnelle, les décisions ordonnant sa prolongation ou rejetant les demandes de mise en liberté doivent comporter des indications particulières qui justifient en l'espèce la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure. Une exception à cette obligation existe puisque le juge d'instruction n'est pas tenu d'indiquer la nature des investigations auxquelles il a l'intention de procéder lorsque cette indication risquerait d'entraver l'accomplissement de ces investigations.

Faute d'un renouvellement, l'inculpé doit être placé en liberté provisoire .Dans la pratique les mandats du juge d'instruction sont automatiquement renouvelés .Les cas d'omissions sont rapidement régularisés sur appel des régisseurs de prison qui suivent de près l'évolution carcérale de l'inculpé. La détention peut aussi prendre fin par la cessation d'office.

B/ La cessation d'office de la détention provisoire en l'absence des conditions posées par l'article 127

Il s'agit ici de la mise en liberté de droit. Elle a lieu dans les
cinq jours qui suivent l'interrogatoire de première comparution. Elle est tout d'abord réservée selon l'article 127 du C.P.P. aux prévenus qui peuvent justifier de ces trois conditions : être régulièrement domicilié au Sénégal, n'encourir qu'une peine dont le maximum est inférieur ou égal à trois ans (alinéa 1er) et n'avoir pas encore été condamné pour crime ou à un emprisonnement de plus de trois mois sans sursis pour délit de droit commun (alinéa 3).

Le régisseur de l'établissement où est détenu l'inculpé peut de plein droit procéder à sa libération immédiate, si au bout de 6 mois le juge chargé de l'instruction ne renouvelle pas le mandat de dépôt par une ordonnance motivée. Cette possibilité de la mesure ne concerne que les délits correctionnels. Le juge d'instruction doit cependant prendre l'avis du procureur général avant de prolonger la détention provisoire de l'inculpé. Il peut après avis du procureur de la république prendre spontanément de lui-même la décision de mettre l'inculpé en liberté provisoire comme ce dernier peut en formuler la demande.

Conformément donc aux solutions dégagées par la Cour Européenne, le législateur sénégalais précise que la mise en liberté du détenu doit être ordonnée dès que les conditions présidant à un placement en détention disparaissent. Il en est ainsi en cas de disparition du motif ayant justifié le placement29(*) à fortiori la détention doit-elle cesser lorsqu'il n'existe plus de raisons plausibles de croire à la participation de l'intéressé à l'infraction. Il reste cependant que l'appréciation de la durée raisonnable est une question de fait échappant au contrôle du juge de cassation ce qui implique par conséquent que sa censure n'intervient que rarement, malgré les objectifs que son respect tend à satisfaire.

CHAPITRE II : LES OBJECTIFS DU DELAI RAISONNABLE DU PROCES PENAL

Ils se manifestent par une protection de différents intérêts souvent antagonistes lors du procès pénal à savoir les intérêts de la société, ceux de la victime et enfin ceux de la personne faisant l'objet des poursuites. Ainsi, dans le souci d'aboutir à un procès juste et équitable (section I), un certain nombre de garanties est reconnu aux justiciables (section II).

SECTION 1 : UN SOUCI D'UN PROCES JUSTE ET EQUITABLE

Le droit à un procès équitable inclut à notre sens le droit d'être jugé dans un délai raisonnable qui est désormais solidement ancré dans la sphère des droits fondamentaux. Ce droit appartient à la catégorie des droits à protection « quasi absolue » et occupe une place non négligeable dans la hiérarchie des valeurs protégées par les droits de l'homme. Il s'agit selon Serge Guinchard de l'idée d'un équilibre loyal des parties30(*) et pour le doyen Carbonnier le procès équitable forme le droit naturel de la procédure31(*). Ainsi tenterons-nous de voir les différents intérêts en cause (paragraphe I). En outre, la lenteur procédurale est contraire au principe de la présomption d'innocence (paragraphe II).

PARAGRAPHE I/ LA PROTECTION DES INTERETS EN PRESENCE

Même si c'est pour des raisons differentes, chacune des parties à la procédure tient à ce que la justice soit vite rendue (A) ; Il en est de même pour la société à la tranquillité de laquelle il a été porté atteinte (B).

A/ Un procès juste pour une protection de l'intérêt des justiciables

La célérité de la procédure va dans le sens de l'intérêt de la victime dont il faut hâter l'indemnisation. En effet on peut noter conformément à l'article deux (2) du code sénégalais de procédure pénale que « l'action civile en réparation du dommage causé par toute infraction appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage causé par l'infraction ». Il va de soi alors qu'il s'agit ici d'un droit reconnu à toute personne victime d'une infraction. En effet on ne saurait logiquement admettre qu'une telle personne puisse accepter éternellement ou à long terme que le coupable de son mal reste impuni.

Même si la détention provisoire est considérée comme un outil au bénéfice de la victime, elle demeure insuffisante à justifier le retard que pourrait connaître le procès dans son dénouement. La détention provisoire est insuffisante d'abord parce qu'il s'agit d'une simple mesure préventive laissant à l'inculpé un certain nombre de ses droits. Il faut en second lieu prendre en compte le fait que la détention obéit à certaines conditions et de ce fait n'intervient pas toujours. En effet elle n'est obligatoire que pour les crimes contre la sûreté de l'Etat (article 56 à 100 C.P.)32(*) et pour le détournement de deniers publics (article 252 du C.P.) .Elle devient interdite en matière contraventionnelle et correctionnelle, lorsque le maximum de la peine prévue est inférieure ou égale a 3ans et que le domicile régulier du prévenu est situé dans le ressort du tribunal compétent. Il en est de même lorsque le domicile n'est pas situé dans le ressort du tribunal national, cas ou le prévenu ne peut être détenu plus de cinq jours.

Relativement à la personne faisant l'objet des poursuites, la lenteur du procès déstabilise l'individu et le met dans une situation psychologique pénible. La situation des prisonniers doit avoir un issu rapide. « C'est dur, très dur de passer 13 ans de sa vie en prison surtout quand on a 20 ans en y entrant. De l'enfance je suis passé au stade adulte sans rien savoir des joies de la vie d'un adolescent » , disait Ibrahima Diallo33(*). En effet Ibrahima Diallo est une des nombreuses victimes de la lenteur de la justice pénale sénégalaise. En fait il a gardé prison pendant 13 ans, pour des faits non prouvés dont l'examen au niveau de l'instance judiciaire a fait éclater son innocence. Le principe du droit à être jugé dans un délai raisonnable vise précisément à éviter l'existence ou la répétition des cas de Ibrahima Diallo.

En outre, il faut éviter que les inculpés subissent une longue détention qui excède la peine. Ce fut le cas de Mamour Sarr lors des assises de juillet 1997à Dakar. Poursuivi pour homicide volontaire sur la personne de sa victime Amadou Diouma Diallo, il a été arrêté le 30avril 1989. L'instruction terminée, son dossier n'a été inscrit au rôle de la cour d'assise que le 15 juillet 1997 soit 8ans 2 mois 18 jours après les faits. Reconnu coupable il a été condamné à 5ans de travaux forcés et 7.000.OOO de dommages et intérêts aux ayant droits du de cujus. Les portes de la prison lui furent ouvertes le jour même du verdict de la cour d'assise puisqu'il avait déjà largement purgé sa peine pendant longue détention provisoire.

La question est alors de savoir si on peut réellement réparer ce préjudice ? Peut on attaquer l'Etat pour demander réparation du préjudice subi ? Aux termes de l'article 141 C.O.A34(*). « Le dommage causé par le fonctionnement défectueux d'un service public...n'est réparé que sous la forme de dommages et intérêts ». De plus l'article 142 du même code édicte que les tiers et usagers ont droit à la réparation du dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public. Toutefois il faut signaler que contrairement à la France, il n'existe pas au Sénégal un texte spécial pour réparer les graves injustices. En France c'est la loi du 17 juillet 1970 et on peut dire qu'un texte similaire s'impose pour le Sénégal.

Au cas contraire, on pourrait assister avec amertume et regret au strict spectacle de la libération tardive d'un accusé ou d'un coupable à chaque session de cours d'assises. Une telle situation provoque des sentiments de révolte et de frustration à l'égard de l'institution chargée de rendre la justice. De plus avec le temps, l'obtention des preuves se fait plus difficilement et c'est d'ailleurs cette idée qui est l'un des fondements de la prescription de l'action publique.

Une autre explication peut être donnée de l'exigence du délai raisonnable mais relative cette fois à la société.

B/ Un procès juste dans l'intérêt de la société

En ce qui concerne la société, il n'est pas de doute que l'opinion publique réclame un châtiment rapide et surtout pour les infractions les plus graves. En effet ici l'intérêt réside dans le fait que la procédure pénale constitue la mise en oeuvre du droit pénal et révèle les idées que l'on se fait à propos de la protection des libertés individuelles et surtout de celle des intérêts sociaux. Cela implique de ce fait que le procès pénal organisera une répression plus ou moins sévère qui n'est cependant efficace que si son issu intervient dans la célérité. La violation de cette exigence porte atteinte tant à la crédibilité de la justice qu'à son efficacité pour assurer la protection sociale.

Admettons par exemple le principe aujourd'hui admis dans la quasi-totalité des Etats, celui de la rétroactivité de la loi pénale plus douce. Il n'est pas de doute que ce principe ne joue pas en faveur de la société qui veut généralement que la sanction soit la plus lourde possible. Il s'avère alors opportun de statuer sur l'affaire avant que de nouvelles lois entrent en vigueur.

C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles le bref délai de la procédure ou à tout le moins un délai raisonnable constitue un pilier d'une bonne justice. Sans doute un problème surgit lorsqu'il s'agit de déterminer avec précision l'effet immédiat d'une nouvelle loi sur un procès en cours. Le déroulement partiel de l'instance empêchera-t-il l'application du nouveau texte ? La jurisprudence française décide de façon constante que la nouvelle loi plus douce doit être appliquée tant que le procès n'est pas irrévocablement clos, et notamment lorsque les faits, après avoir été jugés au premier degré sont soumis à la cour d'appel 35(*) ou à la cour d'assises36(*). En définitive, pour une meilleure prévention des réactions de la société et un meilleur respect de ses exigences, la célérité procédurale demeure une nécessité.

PARAGRAPHE II/ UN SOUCI DU RESPECT DE LA PRESOMPTION D'INNOCENCE

La présomption d'innocence dont bénéficie toute personne accusée dans un procès est incompatible avec la lenteur du procès pénal (A). Et pourtant malgré la proclamation du principe de l'innocence présumée, la détention des inculpés reste maintenue. Ce qui est un paradoxe (B).

A/ L'incompatibilité entre la présomption d'innocence et la lenteur du procès pénal

Le principe de la présomption d'innocence est un principe sacré en droit criminel. D'un point de vue textuel il a été affirmé avec éclat dans une déclaration de Louis XIX en date du 1 mai 1788 selon laquelle « le premier de tous les principes en matière criminelle ... veut qu'un accusé fut il condamné en première instance soit toujours réputé innocent aux yeux de la loi jusqu'à ce que la sentence soit confirmée en dernier ressort ».

Elle est reprise par l'article 3 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et l'article 141 de la déclaration universelle des droits de l'homme élaborée par l'ONU en 1948. L'article 6 sous section 2 de la convention européenne des droits de l'homme et l'article 14 du pacte relatif aux droits civils et politiques ne disent pas autre chose.

Ce principe est aujourd'hui consacré par notre législation pénale. En effet toute personne soupçonnée ou suspectée est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie. Les atteintes à ce principe sont prévenues, réparées et réprimées. Il paraîtrait arbitraire de limiter la présomption d'innocence uniquement aux règles de preuves, puisqu'elle doit régir toute l'instance répressive.

Ce serait illogique de faire durer la procédure pénale ce qui serait en contradiction avec l'innocence présumée. C'est pour cela que le doyen Carbonnier écrivait « Scientifiquement, il ne devait pas y avoir, tant que le procès pénal est en cours, de préjuger sur la culpabilité ou la non culpabilité de l'inculpé : ni de présomption d'innocence comme celle que proclame un peu imprudemment la déclaration des droits, ni a rebours, de présomption de délinquance ... Ni l'une ni l'autre présomption mais une condition juridique neutre d'inculpé... »37(*) Indépendamment de cette approche, ce principe est aujourd'hui critiqué voire décrié.

Certains auteurs considèrent qu'il est malade et qu'il constitue une grande hypocrisie du droit pénal car proclamé puis contourné et méconnu. Même s'il est vrai que la garantie et la sanction des droits proclamés ne sont pas toujours pleinement assurées cela ne doit pas être une raison de la remise en cause ou de la suppression de la présomption d'innocence.

Seulement on ne doit pas oublier que la situation de présumé innocent avec tous les avantages qu'elle comporte ne saurait être conçue de sorte à sacrifier la protection de la société notamment par une accélération de la procédure pour une affaire nécessitant des investigations poussées pour la manifestation da la vérité. Parler d'investigations poussées renvoie nécessairement au mécanisme de la détention provisoire.

B/ Le caractère paradoxal de la détention provisoire

D'aucuns se demandent comment peut on être présumé innocent et voir sa liberté restreinte dans le cadre de la garde à vue ou de la détention provisoire, pouvant dans certains cas avoir une très longue durée ? En effet, la détention provisoire est très grave car fait subir à la personne soupçonner ou à l'inculpé l'équivalent d'une peine avant même l'intervention d'une décision définitive et semble contraire à la présomption d'innocence. Ne doit t-on pas, pour assurer le respect du principe tutélaire, denier aux organes répressifs le droit de porter atteinte a la liberté d'aller et de venir ? En effet le respect de la présomption d'innocence d'un inculpé apparaît difficilement inconciliable avec la détention provisoire. Entre celle-ci et celle la il existe une certaine antinomie.

Priver une personne de sa liberté, une personne simplement soupçonnée d'avoir commis un crime ou un délit équivaut à une présomption de culpabilité, à une infliction de sanction avant une reconnaissance de culpabilité et une condamnation par une juridiction. En violation de ce principe, le constat a été fait du nombre considérable des détenus en attente de procès. Peut on alors conclure à l'abus fait par les juges de la faculté qui leur est offerte par l'article 113 C.P.P. de placer les suspects en détention ou sous contrôle judiciaire. En outre s'il consacre le concept de la présomption d'innocence, le droit sénégalais n'en contient pas moins des lois qui la violent. Il en est ainsi de la loi n° 81-53 du 10juillet 1981 qui pose une présomption de culpabilité38(*).

Seulement force est de reconnaître que les individus ne sont pas mis en détention provisoire n'importe comment, puisque les magistrats doivent procéder antérieurement à cette grave mesure à une appréciation des charges. Il ne faut pas oublier aussi que des considérations essentiellement d'ordre pratique justifient ce mal nécessaire et utile. En effet la détention provisoire est aujourd'hui appliquée par la totalité des pays dans l'intérêt de l'inculpé lui-même comme dans l'intérêt de la défense sociale et de la répression. On sait que la détention de l'individu constitue le meilleur moyen de le mettre à l'abri des réactions de vengeance de la victime ou de la foule, témoin de la commission de l'infraction, et d'éviter que l'inculpé commette de nouveaux forfaits.

En définitive, la détention provisoire est un paradoxe puisqu'elle va a l'encontre de la présomption d'innocence de tel sorte qu'il faut chercher un juste milieu c'est-à-dire l'équilibre entre les impératifs d'une défense sociale et le principe résultant de la présomption d'innocence et des droits dus à la défense par l'instauration d'un procès dans un délai bref. Ace niveau, des garanties sont posées.

SECTION II/ LES GARANTIES POUR UN RESPECT EFFECTIF DU DELAI RAISONNABLE DE LA PROCEDURE

Le droit au délai raisonnable de la procédure ou d'être jugé dans la célérité a fait l'objet d'une jurisprudence importante. La violation de ce droit soulève la question des actions en délai excessif (Paragraphe I) et fait l'objet de sanctions (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I/ LES ACTIONS EN DELAI EXCESSIF DU PROCES PENAL

Elles sont relatives d'une part aux actions tendant à faire juger du caractère déraisonnable de la procédure avant jugement (A) et d'autre part à l'action en délai excessif de jugement (B).

A/ Les actions en délai excessif de la procédure

Ici il faudra entendre par procédure tous les actes effectués tant qu'on n'est pas dans la phase de jugement. A ce niveau, deux axes se dégagent: l'action en délai excessif d'instruction et l'action en délai excessif de détention provisoire, ces actions étant consacrées par le droit français.

Au premier regard, s'il l'estime nécessaire, la partie mise en examen, la partie civile ou le témoin assisté peut demander la clôture de la procédure d'instruction passé un certain délai39(*). Il s'agit d'un délai d'achèvement de l'instruction fixé par le juge d'instruction lors de la première comparution ou de la première audition40(*). Les parties peuvent également demander la clôture de la procédure lorsque aucun acte d'instruction n'a été accompli durant un délai de quatre mois.

Le juge d'instruction dispose d'un délai d'un mois pour rendre une ordonnance motivée. Il peut faire droit à la demande et procéder au règlement de la procédure, en notifiant aux parties l'avis de fin d'instruction. Il peut rejeter la demande s'il décide de poursuivre l'instruction. Les parties peuvent saisir le président de la chambre de l'instruction dans les cinq (5) jours suivants le délai d'un mois. Il s'agit d'une saisine directe et non d'un appel.

Cette réglementation découle d'une évolution car le code de procédure pénale de 1958 n'avait doté la défense d'aucune action lui permettant de réagir contre la durée excessive de la procédure et d'en demander la clôture41(*).

Parallèlement, en droit sénégalais, le président de la chambre d'accusation s'assure du bon fonctionnement des cabinets d'instructions du ressort de la chambre d'accusation. Il s'emploie à ce que les procédures ne subissent aucun retard injustifié. A cette fin l établit chaque trimestre, dans chaque cabinet d'instruction un état de toutes les affaires en cours portant mention, pour chacune, la date du dernier acte d'information exécuté.

Il sera aussi particulièrement intéressant d'étudier l'action en délai excessif de la détention provisoire. Cette action permet à la défense d'obtenir d'une juridiction une décision constatant le caractère excessif de la détention provisoire avant le jugement de la personne poursuivie42(*). Lors des procédures de demande de mise en liberté, la défense a la possibilité de faire juger le délai excessif de la détention du prévenu au regard de l'article 5.3 de la convention européenne des droits de l'homme. Cet article prévoit que toute personne a le droit d'être libérée durant la procédure avent son procès, passé un délai raisonnable de la détention43(*).

Et les articles 127 et 127 bis du code sénégalais de procédure pénale fixent quant à eux des durées précises de détention provisoire avant procès. En effet, pendant la phase d'instruction en matière correctionnelle, la détention d'une personne avant jugement est limitée à cinq (5) jours lorsque le maximum de la peine est inférieure ou égal à trois (3) ans. Cela est valable pour l'inculpé régulièrement domicilié au Sénégal et qui n'a pas déjà été condamné pour crime ou à une peine d'emprisonnement de plus de trois (3) mois sans sursis pour délit de droit commun.

Toutefois, si l'audience sur le fond ne peut se tenir avant l'expiration du délai prévu de détention provisoire, le tribunal peut, à titre exceptionnel, par une décision mentionnant les raisons de fait et de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle durée.

B- Les actions en délai excessif de jugement

Il faut d'emblée signaler que le code sénégalais de procédure pénale ne prévoit aucune action spécifique permettant de faire juger la durée excessive d'une instance de jugement, au regard de l'article 6.1 de la convention européenne des droits de l'homme. Le code français de procédure pénale reste aussi muet sur la question44(*).

C'est la cour de cassation française qui donne quelques éclaircissements. Elle juge qu'une durée excessive n'entache pas de nullité la procédure et n'ouvre qu'un droit à réparation du préjudice subi qui a pu en résulter45(*). En l'état du droit positif alors, l'action en délai excessif de jugement est donc une action indemnitaire qui doit être portée devant le tribunal de grande instance46(*) et devant la cour européenne des droits de l'homme.

PARAGRAPHE II/ LES SANCTIONS DU DELAI EXCESSIF DU PROCES PENAL

Conformément aux principes généraux du droit et au souci de préserver la dignité humaine, on considère que les autorités judiciaires et non l'accusé doivent accélérer la procédure. L'inexécution de cette exigence n'entraînant pas la nullité de la procédure (B), il convient d'abord de voir la réparation du préjudice découlant de son non respect (A).

A- La réparation du préjudice dû au délai déraisonnable

Seul le préjudice causé par la détention provisoire est pris en compte. Ainsi, n'entrent pas dans les prévisions ni les dommages résultants d'une mesure de contrôle judiciaire ni celui provoqué par la diffusion d'articles de presse relatif au demandeur ni encore l'atteinte à la présomption d'innocence résultant de l'engagement des seules poursuites pénales47(*).

L'évaluation du préjudice tient compte de la perte de revenus subi pendant la détention ou après l'élargissement si un licenciement est intervenu du fait de l'incarcération. Elle comprend les salaires et les congés payés ainsi que la perte de chance de retrouver un emploi à condition qu'elle soit directement liée à la détention. Moralement, le préjudice peut être apprécié en tenant compte de l'âge, des éléments de la personnalité, de l'environnement familial et social...

En l'absence de droit européen du droit à réparation des conséquences dommageables d'une détention provisoire injustement subi par un innocent, il appartient aux Etats de légiférer comme ils l'entendent en la matière48(*).

Dans cette perspective donc, l'action en réparation suppose qu'un préjudice ait été causé. S'agissant du dépassement du délai raisonnable, le dommage paraît réalisé dès que la durée de la procédure excède la mesure du raisonnable: il en découle que le dommage peut être considéré comme établi alors même que le processus judiciaire se poursuit49(*).

Cependant il faut signaler qu'il n'y a pas de texte spécial dans notre législation pénale pour réparer les grandes injustices qu'inflige le fonctionnement défectueux de notre système judiciaire50(*). Les seuls textes dont peuvent se prévaloir les justiciables, pour obtenir réparation, sont les articles 141 et 142 C.O.A. précités.

En droit comparé, certains pays sont allés plus loin s'agissant du droit à réparation. C'est le cas de la France. En effet, modifié par la loi du 15 juin 2000 et celle du 30 septembre 2000, l'article 149 du code de procédure pénale a introduit un principe de réparation intégrale du préjudice subi par la personne qui a été détenue au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive51(*).

En dehors du code de procédure pénale, le législateur français a adopté une loi du 30 juin 2000 insérant un article 21 ter dans le titre préliminaire du code d'instruction criminelle: "si la durée des poursuites pénales dépasse le délai raisonnable, le juge peut prononcer la condamnation par simple déclaration de culpabilité ou prononcer une peine inférieure à la peine minimale prévue par la loi".

Au surplus la position de la cour européenne est la suivante: les juridictions nationales doivent appliquer une sanction conformément à leur système juridique: les sanctions suivantes ont été admises: acquittement, réduction de peine, irrecevabilité des poursuites et abandon des poursuites par le parquet52(*).

La sanction doit respecter certaines conditions : être adéquate, convenable et constituer une juste réparation53(*). Ainsi une réduction de la peine doit être réelle, mesurable, suffisante eu égard à l'étendue de la violation alléguée et constituer clairement la sanction apportée au dépassement du délai raisonnable. D'une manière générale la cour se montre très sévère, compte tenu de l'importance, pour l'Etat de droit, de l'efficacité et de la crédibilité de la justice que sape l'excessive lenteur des procès54(*).

En découle l'obligation pour l'Etat d'organiser son système juridictionnel de manière à pouvoir satisfaire les exigences de l'article 6.1 de la convention européenne des droits de l'homme.

Toutefois une personne mise en examen saurait elle se fonder sur une prétendue durée excessive pour arguer de la nullité de celle-ci? La cour de cassation estime que non.

B/ L'absence de nullité de la procédure pour cause de durée excessive.

Ne pourrait on pas soutenir que les articles 6.1 de la convention européenne des droits de l'homme et 7 de la charte africaine des droits de l'homme étant d'ordre public, la sanction de la violation d'une règle d'ordre public est la nullité55(*).

En effet, dans l'hypothèse où la personne est détenue, la sanction du non respect du délai raisonnable ou de bref délai est immédiate. Il s'agit en d'autres termes de la mise en liberté d'office.

Certains auraient souhaité aller plus loin et attacher une nullité de procédure à la méconnaissance du délai raisonnable.

Une telle position paraît cependant difficile à soutenir, et l'on ne voit pas en quoi les actes de procédure seraient entachés de nullité.

La chambre criminelle a statué sur ce problème et posé le principe suivant, applicable à tous les justiciables, libres ou détenus. "Si, en application de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable, la durée excessive d'une procédure pénale n'entraîne pas la nullité. Elle permet seulement à celui qui en aurait souffert de saisir éventuellement la juridiction nationale compétente d'une demande en réparation ou, s'il y'a lieu, de saisir la commission européenne des droits de l'Homme"56(*).

La cour de cassation a rajouté que si un arrêt de la cour européenne des droits de l'Homme, constatant dans une affaire le non respect du délai raisonnable au sens de l'article 6.1, permet à celui qui s'en prévaut de demander réparation, il est sans incidence sur la validité des procédures relevant du droit interne57(*). La solution de cet arrêt est réaffirmée par une décision du 4 mai 199458(*).

Souhaiter que la justice soit bien rendue implique non seulement que la décision du juge soit juridiquement correcte mais aussi qu'elle intervienne dans un délai utile. Il suffit pourtant de lire certains arrêts des juridictions pour constater que la revendication d'une accélération du service public de la justice est devenue générale et la règle vaut aussi au Sénégal. Toutefois en ce qui le concerne nous verrons d'abord les manquements constatés dans le système judiciaire (chapitre I) puis les solutions préconisées (chapitre II).

CHAPITRE I /LES MANQUEMENTS CONSTATES DANS LE SYSTEME JUDICIAIRE SENEGALAIS

Nous pensons que la justice ne doit pas être administrée avec des retards à en compromettre la crédibilité. La procédure devrait être synonyme de respect des droits de la défense et donc des libertés individuelles.

Toutefois en ce qui concerne notre pays, le constat est que généralement les procès connaissent un issu trop lent. Eu égard à cet état de fait, certains en concluent au mal du système sénégalais dans la recherche de l'efficacité ou tout simplement critiquent le système répressif sénégalais (section I).

Par ailleurs, en l'absence de définition exacte de la notion de délai raisonnable et à en juger le caractère ambigu de la notion (section II), on se rend compte la lenteur n'a pas comme seule cause la défaillance du système.

SECTION I/ UNE EFFICACITE CRITIQUEE DU SYSTEME REPRESSIF SENEGALAIS

L'exigence d'une justice rendue avec célérité n'est pas respectée au Sénégal. Plusieurs facteurs entraînent un encombrement des rôles dans les tribunaux, de sorte que les dossiers restent des années sans être traités. Il est par ailleurs fréquent de voir des accusés faire plusieurs années de détention dans l'attente d'un jugement. Parmi ces facteurs, nous retiendrons, principalement, les facteurs d'ordre administratif (Paragraphe I) et les facteurs d'ordre juridique (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I/ UNE EFFICACITE CRTIQUEE AU PLAN ORGANIQUE

Pour un bon fonctionnement du système répressif, une bonne administration de la justice s'avère importante. Au Sénégal les insuffisances ressortent aussi bien au niveau des institutions judiciaires (A) qu'au niveau du personnel judiciaire (B).

A/ Au niveau des institutions judiciaires

Il s'agit des organes chargés de dire le droit à savoir les juridictions. Notre étude portera sur leurs moyens matériels, leur répartition, leurs structures.

Les problèmes d'équipement sont primordiaux pour un bon fonctionnement de la justice, or l'on constate que la justice sénégalaise fonctionne dans un état de pénurie.

Les moyens matériels font justement défaut, en raison de l'augmentation du contentieux en général et de la multiplication des conflits et affaires judiciaires en particulier. Il faut mieux organiser, pour éviter les pertes de temps et encombrements. L'insuffisance des cabinets d'instructions, chargés de réunir les preuves entrave par voie de conséquence à la célérité.

La décentralisation au niveau judiciaire devrait être poursuivie. Il faut mettre en place par exemple, de nouvelles cours d'appels. En effet on sait qu'il y'a quatre cours d'appels au Sénégal. La cour d'appel de Dakar reçoit en appel les jugements rendus en premier ressort par les tribunaux de Dakar, Thiès et Diourbel. La cour d'appel de Kaolack a comme ressort les tribunaux régionaux de Kaolack, Fatick et Tamba. La cour d'appel de Saint Louis connaît en deuxième degré les litiges jugés en première instance par tribunaux de Saint Louis et Louga. Enfin, la cour d'appel de Ziguinchor est compétente pour les tribunaux de Ziguinchor et Kolda. La concentration judiciaire demeure un inconvénient majeur entraînant très souvent des lenteurs excessives.

En tout état de cause, les lenteurs dues par ces facteurs sont imputables à l'Etat, sans que ce dernier puisse se retrancher derrière les lacunes essentielles de sa loi nationale ou de la complexité de son organisation judiciaire59(*).

Dans cette même perspective, l'extension du nombre des cours d'assises est à envisager pour éviter d'acquitter des détenus après jugement ou encore de libérer aux assises des personnes ayant purgé la totalité de leur peine avant jugement60(*).

En outre, il est difficile de concevoir que l'institution judiciaire puisse fonctionner en l'absence d'une informatisation. A ce niveau une attention particulière est à observer, au sujet notamment de la cyber criminalité. Là encore, les magistrats sénégalais en particulier sont en retard et des efforts seraient entrain d'être faits pour remédier à un tel obstacle.

On ne saurait, enfin s'abstenir de dire que parmi les causes de la lenteur de la justice sénégalaise figure aussi, le principe de l'unification. Il s'agit d'un principe qui veut que tous les litiges soient portés dans le même ordre de juridiction. Plusieurs raisons ont été avancées pour expliquer l'option du législateur sénégalais61(*). A l'instar de la France, le Sénégal devrait aller dans le sens de la séparation62(*). Ainsi les tribunaux seraient partagés entre un ordre judiciaire et un ordre administratif qui représentent deux pyramides hiérarchisées de tribunaux, relevant, chacun, d'une juridiction suprême qui lui est propre et qui peut annuler ses décisions.

Bien organisées, les juridictions peuvent dès lors fonctionner grâce à un personnel judiciaire qu'il convient d'étudier.

B/ Au niveau du personnel judiciaire

Deux conditions sont particulièrement nécessaires pour qu'une justice soit rendue dans un délai raisonnable : il s'agit d'une part d'augmenter les ressources humaines et d'assurer aux agents chargés de rendre la justice une indépendance par rapport à toute influence externe. L'exigence d'une justice rendue avec célérité n'est pas respectée au Sénégal. Le déficit de personnel entraîne comme conséquences des lenteurs et des dénis de justice. Il est de ce fait plus qu'important de renforcer les moyens humains. Parler de respect du délai raisonnable implique l'impérieuse nécessité de revoir les moyens humains au premier rang desquels figurent les magistrats chargés de rendre la justice.

Pour que les tribunaux puissent siéger avec la célérité qui sied, il ne suffit pas seulement d'augmenter le nombre de magistrats recrutés. Encore faudrait il que ceux-ci bénéficient d'un statut leur permettant de préserver leur indépendance ou de résister aux pressions qui s'exercent sur eux.

En vérité, chaque jugement, parce qu'il prétend à l'instauration d'une justice sert au-delà du bien commun qu'il vise, un intérêt particulier : celui pour la personne poursuivie de connaître son sort à l'issu d'un procès équitable tenu dans un délai raisonnable.

Mais ne nous y trompons pas, telle mission ne pourra être accomplie avec succès que si les magistrats disposent d'un environnement convenable, des moyens de travaux suffisants voir performants et surtout d'une rémunération raisonnable. Balzac ne disait il pas déjà au dix neuvième (19ème) siècle la même chose lorsqu'il écrivait : «Aujourd'hui, le magistrat, payé comme un fonctionnaire, pauvre pour la plupart du temps a troqué sa dignité d'autrefois contre une morgue qui semble intolérable à tous les égards qu'on lui fait ; car la morgue est une dignité qui n'a pas de point d'appui. La gît le vice de l'institution actuelle »63(*) .

C'est donc dire que les lenteurs de la justice pénale en général et du procès pénal en particulier ont, au Sénégal, des causes liées aux facteurs économiques, politiques, et socioculturels ; des causes liées aux effectifs judiciaires ; et enfin des causes relatives à la procédure quant à la saisine des juridictions pénales et quant au règlement des dossiers et le temps des actes.

Au même titre que ces facteurs administratifs, il existe des facteurs qui sont inhérents à la rédaction même de notre code de procédure pénale et qui sont considérés comme étant d'ordre juridique.

PARAGRAPHE II/ UNE EFFICACITE CRITIQUEE AU PLAN MATERIEL

Les éléments constitutifs de la lenteur, au plan matériel, sont de deux ordres. Ils tiennent à la fois de l'absence de garantie temporaire en matière criminelle dans le C.P.P. (A), et à l'existence de differentes phases de la procédure et qui sont incontournables à certains égards (B).

A/ L'absence de garantie temporaire de détention provisoire en matière criminelle dans le C.P.P.

La détention provisoire rappelons-le est d'une durée de six (6) mois renouvelable en matière de délit mais en matière criminelle il n'y a pas de limite de temps.

D'un côté, même si elle est critiquable, l'absence de limite de temps de détention en matière ce crime, peut être considérée comme une nécessité impérieuse. On peut redouter, en effet que le délinquant ne prenne la fuite, continue son activité criminelle, fasse pression sur des témoins, détruise les indices de son acte, les obligations du contrôle judiciaire s'avérant à exclure de tels risques. En outre la détention peut utilement protéger le délinquant contre certaines réactions de vengeance et même faciliter, dans une politique de défense sociale, son observation, voire l'application d'un traitement médical ou médico-psychologique.

Mais d'un autre côté, il s'agit d'une lacune très grave de la part du législateur. Elle est d'abord, de toute façon, pleine d'inconvénients pour l'inculpé, à la fois sur le plan psychologique et social et sur le plan juridique. A cet égard il fait peser sur l'individu une véritable présomption de culpabilité entraînant une augmentation des risques de condamnation et déterminant parfois un durcissement de la répression en incitant le juge à prononcer une peine d'emprisonnement au moins égale à la durée de la détention.

En droit comparé, plus particulièrement en France, l'article 145-1 du code de procédure pénale décide que dans le principe, la détention en matière criminelle ne saurait dépasser un (1) an. Toutefois un dépassement est possible pour une durée de six (6) mois, laquelle durée est renouvelable selon des ordonnances rendues après débat contradictoire et indiquant le délai prévisible d'achèvement de la procédure64(*).

Mais, règle importante, les prolongations sont plafonnées en ce sens que la détention ne saurait dépasser deux (2) ans lorsque la peine encourue est inférieure à vingt (20) ans de réclusion ou de détention criminelle et trois (3) ans dans les autres cas, voire quatre (4), lorsque les faits ont été commis hors du territoire national et aussi lorsque la personne est poursuivie pour plusieurs crimes65(*). En résumé la détention en matière criminelle en France peut être d'un (1) an, de deux (2) ans, de trois (3) ans et ne peut dépasser quatre (4) ans.

C'est dire alors que le justiciable sénégalais ne devrait pas être tenu de répondre du silence de la loi et subir arbitrairement une détention dont la cessation ne dépend que de l'action des autorités judiciaires. Cette situation conduit souvent le jugement à accuser un retard ce qui a pour conséquence le dépassement du délai raisonnable de la procédure.

B/ L'existence de quatre phases difficilement contournables

Hormis le cas de flagrant délit, qui est une procédure rapide car l'auteur de l'infraction est traduit sur le champ devant la justice par le procureur de la République après une instruction sommaire du dossier66(*), ce qui évite toute perte de temps, tout procès pénal connaît généralement, quatre phases que sont : l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement. Ces étapes du procès pénal peuvent être divisées en deux ordres à savoir une phase préparatoire du procès et une phase décisoire qui est le point d'aboutissement du processus pénal.

On constate donc que par la simple application de la loi, on peut être confronté à des situations où le procès peut avoir, à la limite, un dénouement lent.

Dans le procès pénal, la phase préparatoire est le stade de la recherche de la preuve et est caractérise par l'intervention respective de la police judicaire et du juge d'instruction. Elle coïncide avec l'enquête, effectuée pour l'essentiel par les officiers de police judiciaire, la poursuite diligentée par les parties poursuivantes et l'instruction menée par le juge d'instruction et la chambre d'accusation.

L'enquête est la phase du procès pénal qui se déroule avant le déclenchement des poursuites. Il existe deux (2) grandes formes d'enquête : celle qui est menée aux fins de l'identification de l'identité de la personne et celle, plus importante, qui est conduite aux fins d'élucidation des faits. Selon le C.P.P., l'enquête concerne deux (2) modalités67(*).La poursuite est normalement déclenchée par le ministère public ou la partie lésée

Au cours de la phase de l'instruction, un magistrat spécialisé, le juge d'instruction, recherche, sous le contrôle de la chambre d'accusation, s'il existe contre un individu des charges sérieuses justifiant le renvoi de celui-ci devant la juridiction de jugement. L'instruction est donc la phase du procès où s'effectue « la mise en état de l'affaire ». Elle est aussi appelée information. Comme l'enquête donc, l'instruction par le juge tend à la recherche des éléments qui, ultérieurement permettront à la juridiction de jugement, si elle est saisie, de porter une appréciation sur l'infraction et son auteur.

Il existe une théorie commune à ces trois stades. C'est la recherche de la preuve qui apparaît comme l'objet essentiel de la phase préparatoire.

La phase décisoire marque l'aboutissement du processus pénal. Elle a, en effet, pour objet deux questions : celle de la culpabilité et celle de l'application de la peine.

Son importance est parfois négligée par certains esprits qui sont impressionnés par le fond de l'enquête et de l'instruction préparatoire - parfois des années d'instruction et une demi heure d'audience- et aussi par le fait que la décision de renvoi apparaît comme une pre-condamnation.

Les variations les plus importantes de cette phase concernent le jugement des crimes par la Cour d'Assises, le jugement des délits et enfin quelques procédures exceptionnelles.

Par le jugement une première décision est prise par une juridiction dite de premier degré. Par la suite, des recours pourront être intentés par les parties contre cette décision, par l'effet desquelles l'affaire est rejugé en fait et en droit par les juridictions de fond.

SECTION II/ L'AMBIGUITE DE LA NOTION DE DELAI RAISONNABLE

Les arrêts sur l'exigence d'une procédure opérant dans un délai raisonnable sont nombreux. Les textes de base sont évidemment les articles 6.1 de la C.E.D.H. et 7 de la C.A.D.H. Il s'agit à la lecture de ces textes d'éviter la lenteur excessive de la justice tout en évitant à la personne en cause de subir longtemps une très grande incertitude sur son sort.

Cependant, vu qu'aucune législation ne définit la notion de délai raisonnable, les juridictions ont comblé ce vide, en déterminant cas par cas s'il y'a ou non dépassement du délai raisonnable. Dans tous les cas son application suppose la réponse à deux questions : il convient d'abord de déterminer le délai de la procédure. C'est ce que la cour européenne appelle la période à prendre en considération (Paragraphe I). Il faut ensuite qualifier le délai, ce qui donne lieu à son appréciation (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I/ LA DETERMINATION DE LA PERIODE PRISE EN COMPTE

Afin d'être en mesure de se prononcer sur le caractère raisonnable ou non de la durée de la procédure, il est logique de s'intéresser à la procédure dans son intégralité. A cet effet la période de référence s'étend du premier jour de la procédure (A) à son dernier jour (B).

A/ La fixation du point de départ de la procédure

Le point de départ de la procédure en matière de procédure pénale est aussi appelé le « dies a quo ». Contrairement à ce qui se passe en matière civile où le délai raisonnable commence, en principe, à courir à partir de la saisine du tribunal68(*), en matière pénale, la question fait l'objet de controverses.

Au sens de l'article 6.1, le délai court à partir du moment où la personne se trouve accusée. La notion d'accusation s'entend de façon autonome et non par référence au droit national. Il peut s'agir de la date d'arrestation antérieure à la saisine de la juridiction de jugement.

Dans un premier temps la cour prend en compte le critère de mise en accusation formelle, c'est-à-dire soit les premières accusations69(*), soit de l'arrestation70(*)

Dans un second temps, la cour entend par accusation soit la notification officielle de reproche d'avoir commis une infraction pénale par arrestation, placement en détention provisoire, audition71(*) , soit le moment où la personne a le sentiment d'être soupçonnée d'une infraction pénale72(*).

La position de la cour de cassation française est similaire, sauf que cette cour précise que ce délai ne court qu'au moment où l'intéressé est accusé de faits punissables auxquels se rapporte l'action publique, c'est-à-dire lorsqu'il vit sous menace de poursuites judiciaires en raison de tout autre acte d'enquête ou d'information. Il faut qu'il en résulte des conséquences directes sur sa situation personnelle, notamment parce qu'il s'est vu obliger de prendre certaines mesures afin de se défendre des accusations portées contre lui73(*).

Notera t-on que dans l'arrêt Eckle du 15 juillet 1982, la cour a pris en considération la date à laquelle le requérant avait reçu notification d'un mandat de saisie et de perquisition alors que dans l'arrêt Corigliano du 10 décembre 1982, elle devait retenir la date à laquelle était parvenue au requérant la « communication judiciaire », délivrée par le parquet informant officiellement l'intéressé de l'ouverture d'une procédure pénale contre lui.

Lorsqu'il s'agit d'infraction collective, la cour européenne détermine le point de départ du délai par rapport à n'importe quel fait qualifié infraction faisant l'objet des poursuites. En revanche, la cour de cassation estime qu'en matière d'infraction collective, l'ensemble des infractions doit être jugé dans un délai raisonnable, qui ne peut commencer à courir qu'a la date où la personne poursuivie s'est trouvée dans l'obligation de se défendre du chef du dernier fait manifestant l'intention frauduleuse74(*).Une fois le point de départ fixé, il faut voir la date à laquelle la procédure prend fin.

B/ La fixation du terme de la procédure

Le délai à apprécier couvre l'ensemble de la procédure en cause, y compris les instances de recours même en cassation éventuellement75(*).

Le principe applicable à la détermination du début de la période vaut également pour la fin de celle-ci, en ce sens que la période en question dure jusqu'à ce que la situation de l'intéressé cesse d'être affectée par le fait qu'il se trouve sous le coup d'une accusation pendante contre lui. En d'autres termes, la fin du délai coïncide avec le moment où une décision judiciaire met fin à l'incertitude du prévenu quant aux charges pesant sur lui76(*).

Généralement, la date à retenir est celle à laquelle a été statué sur le bien fondé de l'accusation. Mais d'une manière plus générale, le point final ou « dies ad quem » peut être toute décision mettant fin à la procédure d'une autre manière par exemple lorsque le parquet décide d'arrêter les poursuites pénales. Il n'existe plus, à partir de ce moment d'accusation pénale.

S'agissant plus précisément de la durée de la détention provisoire, seul le point final pose problème. C'est le cas par exemple lorsque l'accusé se trouve en détention provisoire pendant tout le procès. Tenant compte du principe de la présomption d'innocence, on pourrait arguer de ce qu'en de telles circonstances, la détention provisoire se prolonge jusqu'à la condamnation définitive, par le dernier degré de juridiction. Tel est le point de vu exprimé par la commission européenne. Mais la cour maintient que si un prévenu est condamné en première instance à une peine de prison, sa détention est, à partir de ce moment, justifiée au regard de l'article 5.3 C.E.D.H., comme une détention régulière après condamnation77(*) .

A coté de la période de référence existent aussi des éléments de référence pour l'appréciation de durée raisonnable ou non de la procédure.

PARAGRAPHE II/ LE CARACTERE RELATIF DE L'APPRECIATION DU DELAI RAISONNABLE

La notion de délai raisonnable est une notion complexe, relative (A).La jurisprudence de la cour européenne est désormais bien établie, en ce qui concerne les principes directeurs. Chaque affaire, du reste, présente des particularités qui relèvent d'une appréciation in concreto (B), par les organes de contrôle.

A/ La difficulté d'appréciation du caractère raisonnable ou non du délai

Le délai raisonnable est une formule ambiguë pour plusieurs raisons, notamment parce que cette formule ne peut avoir le même sens pour le juge et pour le justiciable.

Les justiciables estiment que l'administration n'a pas travaillé avec la célérité voulue ; les autorités tenteront de démontrer que des motifs légitimes justifient la durée de la procédure. Par exemple, un service de contrôle médical essayera de prouver que l'enquête est le résultat d'une étude longue et détaillée des prestations et prescriptions des dispensateurs de soins.

De plus le délai ne peut être quantifié. Il s'agit d'un concept à contenu variable, réfractaire à toute approche dogmatique et repose sur des critères d'appréciation incertains qui risquent de soulever des problèmes d'interprétation. Si la complexité de l'affaire est un critère objectif, il n'en est pas de même pour l'appréciation des comportements des autorités et des personnes impliquées.

Par conséquent, son appréciation conduit forcement à prendre en compte toutes les données. En effet, un délai trop long est générateur d'un déni de justice et un délai trop bref peut conduire à une justice arbitraire et expéditive78(*) .

L'ambiguïté et la difficulté d'appréciation viennent plus particulièrement de l' « adjectif raisonnable » ajouté au délai. Par le concept raisonnable, on peut entendre ce qui est modéré, mesuré, qui se tient dans une juste moyenne79(*).

Le caractère relatif de l'appréciation du délai peut aussi avoir comme cause les limitations apportées à l'article 6.1 de la convention européenne des droits de l'homme.

Il s'agit de limitations générales explicites, conformément à l'article 15 du même texte de la convention européenne des droits de l'homme: guerre, danger public menaçant la vie de la nation, ou implicites80(*).

En résumé, si être jugé sans retard excessif est un droit de la personne qui participe au droit à un procès équitable, force est de retenir que l'appréciation du temps est une donnée relative. Aussi l'équilibre entre « une justice pénale rapide qui participe à l'efficacité de la répression et le respect des droits de la défense qui constitue l'un des fondements d'un Etat de droit » est difficile à établir.

Parce que le concept est à contenu variable, comme nous l'avons précisé, pour apprécier si le requérant a été jugé dans un délai raisonnable, il convint dès lors de ne pas procéder in abstracto, mais plutôt en tenant compte de plusieurs critères d'appréciation.

B/ Les critères d'appréciation du délai raisonnable

Ces critères sont permanents et assurent la prévisibilité et la sécurité juridique propres à toute interprétation d'une règle de droit81(*). Traditionnellement trois critères sont utilisés.

D'abord la complexité de l'affaire, ce qui inclut toutes les données de fait et de droit. Divers éléments peuvent attester de la complexité de l'affaire en fait, pour établir les faits pertinents et en droit, complexité de l'administration de la preuve : nombre de prévenus, volume et difficulté de l'affaire, nombre de personnes auditionnées, nombre des charges dirigés contre le requérant et ses coaccusés, enquête à l'étranger...L'incertitude de la règle de droit peut être également un élément important expliquant certaines lenteurs procédurales82(*).

Il y'a ensuite le critère tenant au comportement du requérant, qui ne peut par son attitude dilatoire, retarder le cours de la justice. En principe, en matière pénale les prévenus ne sont pas obligés de collaborer de manière effective avec la justice. Ils ont toujours droit au silence83(*).Cependant certains justiciables n'hésitent pas à user de moyens qui peuvent s'avérer contraires à l'exigence de célérité. Ils devront en subir les conséquences .Il en est ainsi lorsqu'il change sans cesse d'avocats ou tarde, volontairement, à communiquer à la justice les pièces qu'elle lui réclame ou encore quand il prend la fuite. Ainsi même si l'accusé n'est pas tenu à une coopération active avec les autorités judiciaires pour accélérer la justice, l'absence d'un minimum de coopération n'entre point en considération dans l'appréciation du délai raisonnable84(*).

Par ailleurs, certains retards ne sont imputables ni à l'Etat, ni au justiciable. Par exemple, l'absence du coprévenu ou de l'avocat d'un coprévenu.

Enfin l'attitude des autorités judiciaires qui doivent tout faire pour que les affaires ne s'enlisent pas et qui sont tenues à une véritable obligation de résultat. Les Etats doivent organiser leur service de la justice, afin que les affaires soient traitées sans retard. Cette exigence se rattache au principe de bonne administration. Certaines autorités pourraient invoquer une surcharge structurelle. A titre d'illustration : manque de magistrats, sous équipement, organisation générale déficiente, encombrement des rôles, manques de moyens budgétaires, difficultés de recrutement, surcharge de travail. Cet argument ne peut être soutenu puisque, par leur adhésion à la convention européenne et pour les Etats africains, à la charte africaine des droits de l'homme, les Etats membres se sont engagés à établir une organisation judiciaire qui réponde aux exigences de célérité.

En dehors de ces trois critères et depuis quelques années, la commission européenne des droits de l'homme a tendance à prendre en compte l'enjeu du litige pour la vie du requérant. Ce critère vise particulièrement la dignité du requérant, car il est touché par un allongement du délai de jugement85(*). La cour a plusieurs fois affirmé que l'appréciation de la durée du procès devait être plus strict lorsqu'il s'agit d'un conflit de travail dont dépendent les conditions de vie du travailleur.

En somme, ces critères sont raisonnables. Mais il faut bien convenir que leur mise en oeuvre est mal malaisée, tant ils sont enrobés dans le flou et l'imprécision.

Les lenteurs judiciaires constituent une tare principale du système répressif sénégalais. Il nous a paru alors intéressant de tenter de cerner les limites de ce fléau. Faudrait-il, pour ce faire, oeuvrer pour l'adoption de solutions, sous forme notamment de réformes.

CHAPITRE II/ LES SOLUTIONS PRECONNISEES FACE A LA DIFFICILE APPLICATION DU RESPECT DU DELAI RAISONNABLE

La célérité ou rapidité n'est pas la précipitation mais elle vise à donner au processus pénal un rythme aussi rapide que possible, sans porter atteinte aux principes fondamentaux de l'ordre juridique. Par conséquent, en cas de dépassement du délai raisonnable de la procédure, il peut être invoqué l'article 6.1 C.E.D.H. Toutefois notre législation ne prévoyant pas de sanction spécifique86(*), alors qu'il est nécessaire d'éviter de laisser l'inculpé dans l'incertitude et de ne pas prolonger indûment ses souffrances, deux principales solutions se présentent: il s'agit d'une part de procéder à une relecture des règles (section I) et d'autre part de favoriser la célérité par la voie d'aménagements procéduraux (section II).

SECTION I/ LA RELECTURE DES REGLES DE PROCEDURE PENALE

La rapidité de tout service public dépend en principe des moyens qui sont mis à sa disposition en personnel et en équipement. Toutefois en attendant que le problème des moyens de la justice soit complètement résolu, differentes mesures contribuent à apporter des palliatifs à la lenteur. Il en est ainsi, notamment, de l'aménagement de nouveaux délais pour le traitement des dossiers (Paragraphe I) et de l'approfondissement du contrôle de l'instruction préparatoire (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I/ L'AMENAGEMENT DE NOUVEAUX DELAIS POUR LE TRAITEMENT DES DOSSIERS

Sans que l'on prétende à une liste exhaustive, on peut signaler, au passage, en raison de leur intérêt pratique, de nouvelles méthodes de traitement et de suivie des dossiers. Ces méthodes visent à réguler le calendrier du procès en éliminant au maximum les causes de lenteur. L'institution de nouveaux délais de procédure (A), ainsi que l'avancement du débat contradictoire dans la procédure (B) provoqueront, sans doute, des bouleversements inimaginables dans la recherche de la célérité.

A/ L'institution de nouveaux délais de procédure

S'il est vrai que le code sénégalais de procédure pénale a connu des évolutions notables il n'en demeure pas moins que les reformes sont restés insuffisantes.

En effet, des avancées spectaculaires sont notées depuis le code de l'instruction criminelle jusqu'à nos jours, en matière de droits humains et de libertés fondamentales. A ce titre, on sait que le code de l'instruction criminelle a connu une évolution sous la IIIème République. Jusqu'en 1935, les garanties de la liberté individuelle furent augmentées. Ce fut le cas de la garantie loi du 8 décembre 1897 relative aux droits de l'inculpé au cours de l'instruction. Le prévenu a désormais le droit de se faire assister d'un conseil dès sa première comparution. La présence, son accès au dossier et les suggestions qu'il peut faire au magistrat instructeur, constituent une introduction d'un élément de contradiction à la procédure qui continue de rester de type inquisitoire87(*).

D'un autre côté le code de procédure pénale a, lui-même, évolué depuis sa promulgation avec la loi n° 65-61 du 21 juillet 196588(*).

A ce sujet, le législateur sénégalais dans le but de mettre fin aux pertes de temps a pris un certain nombre de mesures notamment la détermination des délais de rigueur89(*), la limitation du nombre de renvoi90(*), l'extension de la notion de flagrance aux mineurs91(*). Dans le même sens, le législateur a renforcé les mesures de contrôle de la garde à vue et a aussi limité le temps de la détention provisoire.

Toutefois malgré tous ces efforts, une analyse poussée laisse entrevoir des lacunes et qu'il est encore nécessaire de revoir, certains points de la procédure.

Notre législateur devrait, surtout, penser à une reforme allant dans le sens de l'institution d'un délai de détention en matière criminelle. Au surplus, il faut penser à réduire, la latitude dont dispose le juge d'instruction en matière de prolongation de la détention provisoire en matière correctionnelle, le délai de six (6) mois étant considéré comme trop long.

Enfin le législateur, à l'instar de son homologue français, pourrait introduire dans le C.P.P., un article incitant clairement au respect du délai raisonnable. L'article préliminaire du C.P.P. français dispose qu'il doit être,E statué, définitivement sur l'accusation dont la personne fait l'objet dans un délai raisonnable92(*).

B/ L'avancement du moment du débat contradictoire

La notion de procès équitable implique, en principe, le droit pour les parties à un procès à prendre connaissance de toute pièce ou observation présentée au juge et de la discuter. Il y va notamment de la confiance des justiciables dans le fonctionnement de la justice : elle se fonde, entre autres, sur l'assurance d'avoir pu s'exprimer sur toute pièce au dossier. Mais encore faudrait-il que ce droit soit exercé dans une limite raisonnable de temps. Il serait, en effet, contradictoire, du fait que ce principe est étroitement lié au respect du délai raisonnable de permettre au justiciable d'exciper de sa violation, lorsqu'une pièce ne lui est pas communiquée, pour retarder le processus pénal.

Le principe du contradictoire est donc le principe qui veut que chaque partie soit en mesure de discuter les prétentions, les arguments et les preuves de son adversaire. Il est indispensable que tout plaideur puisse avoir, de manière permanente, connaissance des prétentions de son adversaire, des moyens qu'il excipe, des preuves qu'il apporte.

En matière pénale, le respect de la contradiction, autrement dit le respect des droits de la défense prend une importance toute particulière en raison des intérêts en jeu.

En effet, e principe permet d'assurer le caractère juste et équitable du procès et est souvent rendu par l'expression  « droits de la défense ». Ce qui laisse supposer qu'il n'assure que la sauvegarde des intérêts du défendeur, alors qu'il s'applique aussi au profit du demandeur.

Le principe du contradictoire ne concerne pas seulement les rapports entre les parties, mais aussi les relations de celles-ci avec le juge. Il implique deux choses : que les parties aient la possibilité de choisir un défenseur et qu'elles puissent apporter la preuve de leurs prétentions. C'est un élément fondamental de la loyauté de l'instance qui s'impose, en plus des parties, au juge et en toutes matières93(*). Le juge a non seulement l'obligation de faire observer ce principe, mais il doit aussi l'observer lui-même. Ces deux obligations du juge quant au respect du principe du contradictoire ne sont pas expressément et clairement posées par le législateur sénégalais. Mais on peut les retrouver à travers une certaine analyse des dispositions du C.P.P. et du C.P.C.

D'abord, le juge doit veiller à ce que les parties respectent le principe du contradictoire. C'est ainsi que le juge peut, avant de statuer, prendre toutes mesures qu'il estime utiles pour l'éclairer94(*).

PARAGRAPHE II/ L'APPROFONDISSEMENT DU CONTROLE DE L'INSTRUCTION PREPARATOIRE

Quant les actes d'instruction ont été accomplis par le juge d'instruction lui-même ou par d'autres personnes à la suite de commission rogatoire, un contrôle est exercé sur les conditions de régularité et d'efficacité dans lesquelles les opérations d'instruction ont été conduites. Ce contrôle émane en premier lieu de la chambre d'accusation (A). Il peut aussi émaner des parties (B).

A/ Le contrôle de l'instruction par la chambre d'accusation

Dans le déroulement du procès, l'instruction préparatoire occupe une très grande place. Le juge qui en a la charge exerce des pouvoirs considérables sur les personnes. C'est pourquoi son activité est contrôlée. Le C.P.P., prévoit que ce contrôle est exercé par la chambre d'accusation, mais s'agissant précisément du contrôle du respect du délai raisonnable, il est du ressort de son président à qui le législateur dote de pouvoirs considérables.

En effet, le président de la chambre d'accusation est chargé de veiller au bon fonctionnement des cabinets d'instruction de son ressort. Dans l'exercice de cette mission générale, il vérifie si les procédures ne subissent aucun retard injustifié. A cette fin, il établit chaque trimestre dans chaque cabinet d'instruction un état de toutes les affaires en cours portant mention, pour chacune des affaires, de la date du dernier acte d'information exécuté95(*).Un état spécial doit être dressé pour les affaires dans lesquelles sont impliqués des inculpés en détention provisoire.

Lorsqu'il l'estime nécessaire et au moins deux (2) fois par an, le président de la chambre d'accusation ou le magistrat délégué par ses soins, visite les maisons d'arrêt du ressort de la Cour d'Appel et vérifie la situation des inculpés en détention provisoire. Il peut alors saisir la chambre d'accusation, pour qu'elle statue sur le maintien d'une détention ou une mise en liberté. Toute affaire qui entre au cabinet du juge d'instruction depuis plus de six (6) mois,doit obligatoirement faire l'objet d'un rapport circonstancié, si, au bout de cette période elle n'est pas réglée.

En outre, le président est chargé d'éviter que la chambre d'accusation ne soit saisie de façon injustifiée, par des demandes dilatoires. En premier lieu, il exerce un contrôle lorsque la chambre d'accusation est directement saisie. En matière de détention ou de contrôle judiciaire, il peut décider que la demande de mise en liberté ou de main levée est manifestement irrecevable et rendre une ordonnance motivée disant qu'il n'y a pas lieu de statuer. En second lieu, lorsque la chambre d'accusation est saisie d'un appel, le président rend une ordonnance de non admission de l'appel, lorsque la décision attaquée n'ouvre pas ce recours. Il filtre les demandes en décidant, par ordonnance, s'il y'a lieu ou non de saisir la chambre d'accusation.

De ces situations où le président joue un rôle de filtre afin d'éviter une réunion inutile de la chambre d'accusation, il faut rapprocher le cas, s'inspirant d'un souci comparable, où le législateur désigne directement ce magistrat pour confirmer ou infirmer la décision du juge d'instruction en réponse à avocat qui a demandé à remettre à son client la reproduction de la copie d'un acte ou d'une pièce de procédure. La décision du juge peut en effet, être déférée par l'avocat au président de la chambre d'accusation qui statue, par décision écrite et motivée, non susceptible de recours.

B/ Le contrôle de l'instruction par les parties au procès

Au bénéfice des parties poursuivantes, il devrait être prévu en plus du contrôle de l'instruction par la chambre d'accusation et, comme en droit français, un droit général de surveillance, exercé par le ministère public, et d'autre part des garanties et des droits dont jouit la partie civile.

En droit français, procureur de la République peut requérir du magistrat instructeur des actes d'instruction précis. (perquisition, audition des témoins, délivrance d'un mandat...). Si le juge d'instruction estime qu'il n'y a pas lieu de procéder à ces actes, il doit s'y refuser par une ordonnance motivée. Le ministère public c'est-à-dire le procureur de la République et même le procureur général peut interjeter appel de cette ordonnance comme de toutes les ordonnances du juge d'instruction. Pour faciliter au procureur de la République l'exercice de ce contrôle et lui permettre de requérir sans perdre de temps toute mesure que le dossier révèle opportun, l'article 82 alinéa 2 du code français de procédure pénale l'autorise à exiger, à tout moment, la communication de la procédure, à charge pour lui de la restituer dans les vingt quatre (24) heures (aucune sanction n'étant cependant prévue si ce délai n'est pas respecté).

Nulle part dans le C.P.P.S., on ne trouve la reconnaissance d'un contrôle de l'instruction préparatoire à l'inculpé et à la partie civile. Il s'agit encore, à ce niveau, d'un retard du législateur sénégalais. Dans un pays comme la France, la situation est toute autre.

Aussi bien, l'inculpé peut réclamer, en provoquant une ordonnance dont il peut faire appel, si elle ne lui donne pas satisfaction et une expertise96(*), ou un complément d'expertise97(*), et particulièrement une expertise motivée ou médico-psychologique98(*).

Encore la cour de cassation a-t-elle estimé que l'ordonnance de refus de l'examen médical ou médico-psychologique n'était pas susceptible d'appel99(*), et la loi du 29 décembre 1972 a-t-elle confié au président de la chambre d'accusation le soin de décider s'il y'avait lieu de porter l'appel de l'ordonnance rendue en matière d'expertise devant cette juridiction.

Il convient, cependant, de signaler qu'en sollicitant à tout moment sa mise en liberté et en faisant appel du refus qui lui est opposé, l'inculpé peut indirectement critiquer l'opportunité de l'ordonnance de mise en détention provisoire, du mandat de dépôt ou d'arrêt dont il avait fait l'objet.

Quant à la partie civile, elle peut critiquer le refus opposé à la demande d'expertise ou de supplément d'expertise qu'elle a pu formuler100(*), même si ce droit se trouve, désormais, soumis à certaines restrictions.

SECTION II / LA CELERITE PAR VOIE D'AMENAGEMENTS PROCEDURAUX

La célérité par voie d'aménagement procédural pourrait, dans notre droit, avoir le mérite de limiter la lenteur de la justice. Il est sans aucun doute admis que l'encombrement des cabinets est l'une des causes majeures du non respect du délai raisonnable. Pour remédier à cela, il s'avère nécessaire de promouvoir le règlement amiable des litiges pénaux (paragraphe I). On peut aussi envisager une autre technique : la restriction des voies de recours (paragraphe II).

PARAGRAPHE I/ LA CELERITE PAR LA CONTRACTUALISATION DE LA JUSTICE PENALE.

Il s'agirait d'un phénomène de "dejudiciarisation"consistant à retirer aux juridictions étatiques certains litiges pour leur trouver d'autres modes de règlements certainement plus adaptés(A). Une autre technique devrait être empruntée au droit compare, le plaider coupable (B).

A/ La promotion du règlement amiable des litiges pénaux

Il faut développer le règlement non juridictionnel des litiges. En effet, la justice à elle seule ne peut tout résoudre. La complexité et la lenteur des procédures contentieuses ne sont pas toujours souhaitables pour certaines infractions n'exigeant pas un certain formalisme. Ainsi plusieurs solutions sont possibles.

Cependant dans le cadre de ce sujet nous nous limiterons à l'étude de la médiation pénale et de la conciliation.

La médiation pénale intervient dès que l'infraction est portée à la connaissance du parquet. Il s'agit d'un mode de solution des conflits, consistant pour la personne choisie par les antagonistes, à proposer à ceux-ci un projet de solutions, sans se borner, d'efforcer de les rapprocher101(*). C'est donc une technique qui concourt à la célérité et dont l'initiative appartient au procureur de la république.

L'article 32 du code sénégalais de procédure pénale ne dispose t-il pas que " le procureur de la république peut procéder lui-même à la médiation pénale, ou déléguer tout ou partie de la tache à un médiateur pénal tenu à une obligation de neutralité et de secret. Le médiateur vérifie l'accord des partis en litige sur le principe du recours à la médiation pénale, les aidera à trouver une solution acceptée par elle. Cette solution ne doit être contraire ni à l'ordre public ni aux bonnes moeurs. Le médiateur pénal contrôlera si nécessaire la bonne exécution des engagements".

En d'autres termes, le tiers désigné appelé médiateur tente ici de résoudre un litige en formulant une recommandation qui lie les parties qui y ont adhéré. La médiation pénale offre la célérité aux parties alors qu'il faut attendre plusieurs mois voire des années pour obtenir une décision de justice.

Dans cette perspective, le tribunal lorsqu'il estime que les faits constituent un délit, pour la réparation du préjudice né de l'infraction, peut recourir avec le consentement des parties à la médiation pénale. En réalité, de nombreux petits délits qui ne trouvent pas de satisfaction satisfaisante dans les lourdeurs des procédures judiciaires, pourraient être concernés par la médiation pénale.

Toutefois, la lecture de l'article 570 du code de procédure pénale limite la portée de la médiation pénale aux mineurs. Ainsi pourrait-on envisager une extension de la notion102(*).

Il existe à côté de la médiation pénale une autre procédure appelée conciliation qui permet d'éviter la surcharge des tribunaux par une multitude de petites infractions. La conciliation est un mode de règlement fondé sur le renoncement volontaire et réciproque des parties à certains de leurs droits et débouche sur un compromis. Il s'agit en d'autres termes d'un mode de solution consensuelle. Elle privilégie la libre discussion entre les parties. C'est enfin un mode de règlement définitif. L'accord des parties, une fois constatée par un procès verbal signé par elles, met fin au litige. Par ailleurs, elle est efficace dans la recherche de la célérité. C'est une technique que l'on retrouve dans le droit belge et le droit hollandais. Contrairement à la médiation pénale, la conciliation pénale n'existe pas dans le droit positif sénégalais103(*).

M. Abdou Diouf, ancien président de la République du Sénégal, lors de la rentrée des cours et tribunaux de 1997 disait: " la conciliation est un mode traditionnel de règlement des litiges dans nos sociétés. L'art de la concertation fait le génie africain. Pourquoi ne pas cultiver nos traditions, lorsqu'il se trouve, qu'elles répondent précisément à un besoin des sociétés...il faut favoriser chaque fois que c'est possible le règlement non juridictionnel des litiges"104(*).

Il se peut, en effet, que la recherche d'une solution juridique paraisse inopportune car tout jugement fait apparaître un vainqueur et un vaincu et cette situation laisse, généralement, des traces dans les relations ultérieures entre les parties en procès105(*).

Au surplus, il s'agit d'une procédure simple et peu coûteuse.

B / L'institution du "plaider coupable" en droit sénégalais

Le Sénégal, à l'instar d'autres pays étrangers, devrait instituer le "plaider coupable" encore appelé comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. En effet, à l'étranger, pour accélérer le cours de la justice on a évoqué la possibilité de faire appel à cette technique106(*). L'objectif est simple: organiser un traitement plus rapide d'un nombre important de délits. En France, le "plaider coupable" est applicable aux délits punis à titre principal d'une peine d'amende ou d'emprisonnement d'une durée égale ou inférieure à 5 ans107(*).

A ce niveau, il y aurait une suppression du débat sur la preuve: l'auteur des faits choisirait de plaider coupable après avoir été informé dès son arrestation de son droit de se taire, son avocat présent108(*). A vrai dire, il s'agit d'une sorte de jugement immédiat, une procédure sommaire de nature particulière en ce sens qu'il permet au juge de statuer immédiatement si le prévenu reconnaît les faits, en prononçant un jugement de condamnation, séance tenante. C'est donc une procédure qui épargne du temps aux magistrats.

La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité autorise au juge à prononcer non seulement des peines d'amende mais aussi d'emprisonnement, ce qui permet de juger rapidement et efficacement le nombre de délits et crimes peu importants.

Le système est séduisant et très utilisé dans les pays anglo-saxons, environ 90 fois sur 100 aux Etats-Unis109(*).

Le droit portugais connaît un système de procédure abrégée qui s'intéresse à la seule question de la procédure et subordonne à l'existence de preuves "preuves simples et évidentes" de la culpabilité110(*).

En France, la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité a fait son entrée dans le palais de justice le 1er octobre 2004111(*) et déjà l"entreprise semble être un succès: selon les premières statistiques, deux tiers des juridictions pénales appliquent le "plaider coupable"112(*).

On sait donc aisément que le gain de temps escompté ne réside pas seulement dans la suppression du débat sur la culpabilité comme nous le montre le nom de cette procédure mais également et essentiellement dans la suppression du débat sur la peine. La question de la peine n'est pas débattue lors de l'audience, le juge n'ayant d'autre solution que d'homologuer ou non la proposition du parquet.

En considération des observations précédentes, on constate que le "plaider coupable" fait apparaître une procédure que nous pouvons qualifier de "diminutif au jugement". En effet le qualificatif diminutif tient à ce que l'audience se vide du débat sur la culpabilité et sur la peine, l'une et l'autre se déterminant en amont devant le procureur de la République. L'office du juge est cantonné à la vérification de l'existence d'une qualification, au constat d'un accord et d'un rapport de proportionnalité entre le comportement reproché et la peine acceptée113(*).

Déjà en 1990, la commission "justice pénale et droit de l'homme" en France proposait une simplification des procédures quand l'accusé plaide coupable, laquelle simplification aurait consisté à mettre l'accent sur le débat relatif à la peine et non à celui relatif à la culpabilité.

En effet, il n'est en rien nécessaire de débattre de la culpabilité lorsque celle-ci est reconnue et acquise avant l'audience. Toujours est-il que le fait de reconnaître sa culpabilité, à condition que cette même reconnaissance soit libre et volontaire n'est en rien préjudiciable à l'intéressé, dès lors, d'une part, que celui-ci conserve une faculté de rétractation devant le juge et d'autre part que sont prises les mesures nécessaires à la conservation des preuves en cas de rétractation.

En définitive, l'idée d'intégrer dans le système sénégalais, la possibilité pour la personne poursuivie de plaider coupable n'est pas rejetée. On peut même avancer qu'il s'agit d'une nécessité qui s'est faite jour.

PARAGRAPHE II/ LA CELERITE PAR LA RESTRICTION DES VOIES DE RECOURS

Le caractère raisonnable du délai de jugement d'une affaire doit s'apprécier, à la fois, de manière concrète, en tenant compte de sa complexité, des conditions de déroulement de la procédure mais aussi de manière globale -compte tenu notamment de l'exercice des voies de recours. A cet effet, il s'avère utile d'inventer ou de favoriser des techniques de renversement des voies de recours. La restriction des voies de recours peut être envisagée par, d'une part la limitation ou l'interdiction des voies de recours (A) et, d'autre part l'étranglement des recours en nullité (B).

A/ La limitation et l'interdiction des recours en réformation et en cassation

Les voies de recours sont des procédures qui permettent de soumettre une affaire déjà jugée, à un nouvel examen judiciaire. Elles sont l'appel, l'opposition, la purge de la contumace, le pourvoi en cassation et le pourvoi en révision. Si le principe est que toute décision doit être susceptible de voies de recours, car la justice est l'oeuvre des hommes et est nécessairement faillible, il n'en demeure pas moins que pour donner au processus pénal, dans sa totalité, un rythme rapide, deux limitations lui sont apportées: il n'est pas absolu et le bénéficiaire ne peut exercer son droit que dans un délai limité.

Tout d'abord l'appel est enfermé dans un délai dont le non respect conduit à une irrecevabilité d'ordre public114(*), sauf en cas de force majeure strictement entendu115(*) .

Le code sénégalais de procédure pénale fixe des délais brefs et impératifs ouverts aux parties pour leur permettre de faire appel ou de former un pourvoi en cassation. L'article 485 dispose "sauf dans les cas prévus à l'article 494116(*), et hors le cas de force majeure, l'appel est interjeté dans le délai de trente (30) jours à compter du prononcé du jugement du contradictoire117(*).

Par ailleurs, sous la responsabilité du greffier en chef, la requête contenant les moyens d'appel et les pièces de procédure sont envoyés par le procureur de la république au parquet de la cour dans le délai de trois (3) mois et ce dernier devra enrôler l'affaire dans deux (2) mois118(*).

Toujours soucieux d'une célérité le législateur, en matière d'opposition, indique dans l'article 478 du code de procédure pénale que si la signification du jugement a été faite à la personne du prévenu, l'opposition doit être formée dans les délais ci- après :

-trente jours si le prévenu réside sur le territoire de la république

-quarante cinq jours dans les autres cas.

La seconde technique réside dans l'interdiction des voies de recours, soit par la loi, soit par la jurisprudence. En effet, l'arrêt d'acquittement d'une cour d'assise n'est pas susceptible d'appel comme toutes les décisions de la cour d'assise. De plus, ne peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation de droit commun, les décisions des Hautes Cours de Justice; pour des raisons d'ordre pratique.

En France, au stade de l'instruction, pour éviter que la chambre d'accusation ne soit saisie d'appels en des matières exclues par la loi, le président de cette chambre rend d'office une ordonnance de non admission de l'appel qui n'est pas susceptible de voies de recours119(*) .

B/ L'étranglement des recours en nullité

La question de la régularité des procédures est l'objet d'une traditionnelle opposition entre deux considérations: celle du respect des formes, et par delà de la défense d'une part et celle de la célérité de l'action policière et judiciaire d'autre part.

De prime abord, du point de vue procédural, il importe que les nullités puissent être sanctionnées le plus rapidement possible après le moment où elles sont apparues. La nullité d'un acte devant souvent s'étendre au-delà de l'acte annulé lui-même, il ne peut qu'être préjudiciable au rapide déroulement des procédures, que de laisser continuer des investigations dores et déjà affectées, sans le constater rapidement.

Cette faveur pour la célérité apparaît à propos des juridictions aptes à prononcer la nullité d'un ou de plusieurs acte. C'est en principe la chambre d'accusation et exceptionnellement la juridiction de jugement lorsqu'il n'y a pas eu instruction préparatoire.

Une fois saisie d'un recours en nullité, la chambre d'accusation doit statuer dans les cinq (5) jours de la réception du dossier120(*).

La solution retenue en 1958 par le code de procédure pénale français et qui interdisait à une partie de soulever une nullité avant de comparaître devant la juridiction de jugement aboutissait à retarder le cours du procès. Cependant dans la crainte d'assister à l'invocation tardive des nullités, par des justiciables désireux de reculer l'issue du procès, cette pratique est aujourd'hui abandonnée.

Depuis les lois des quatre (4) janvier et vingt quatre (24) avril 1993, les parties, en France, se voient reconnaître le droit d'agir dès l'instruction préparatoire. Toutefois ce droit est sévèrement encadré par la loi et la jurisprudence, pour éviter des procédés dilatoires.

En définitive si les voies de recours constituent des garanties précieuses d'une bonne justice et qu'il s'avère nécessaire de donner aux justiciables des garanties contre les risques d'erreur, en leur permettant de provoquer un nouvel examen du procès lorsque l'issu de celui-ci ne leur est pas favorable, il reste que cette prérogative ne doit pas être utilisée de manière abusive. C'est le cas par exemple lorsque le demandeur agit dans le seul but d'entraver la célérité en portant ainsi atteinte aux droits de l'autre partie. A titre d'exemple, on peut citer la personne poursuivie, qui, étant sûre de sa culpabilité et de la sanction qui pourrait l'atteindre, utilise cette faculté.

Les garanties de l'homme en procès contribuent à donner à la justice l'apparence d'être bien rendue. Dès lors le procès pénal équitable ne se définit pas seulement par l'exigence de l'équité, de l'impartialité. Il implique aussi le respect du délai raisonnable.

La notion de délai raisonnable fait l'objet d'une importante jurisprudence en droit comparé. Les illustrations nous viennent de la Cour européenne des droits de l'homme, du Comité des droits de l'homme des Nations unies ou tout simplement de la Commission africaine des droits de l'homme.

La longueur des procédures peut être, sans difficulté, assimilée à un véritable déni de justice. Passé un certain délai la défense devient malaisée et on peut assister à une disparition totale ou partielle des preuves.

Le délai raisonnable de la procédure recherche l'équilibre entre des intérêts opposés : le justiciable estimera que l'administration n'a pas travaillé avec la célérité voulue et les autorités tenteront toujours de démontrer que des motifs légitimes justifient la durée de la procédure.

Le délai raisonnable revêt un pôle positif et un pôle négatif. D'une part, il présente l'avantage de suppléer les carences législatives. D'autre part, il repose sur des critères d'appréciation incertains qui risquent de soulever des problèmes d'interprétation.

Les instances qui décideront que le délai n'est pas raisonnable prononceront une sanction au cas d'espèce. Ainsi le délai raisonnable est apprécié rigoureusement.

Nous pensons que l'intérêt du justiciable, de la paix judiciaire et de l'harmonisation des règles juridiques constituent un argument en faveur de l'interprétation de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples et de la Convention Européenne des Droits de l'Homme par les juridictions nationales. La démarche des juridictions équivaudra alors à la détermination de l'existence d'un lien de causalité entre chacun des critères et le délai écoulé.

Si le délai trouve sa cause dans la complexité de l'affaire ou le comportement du requérant, il n'y a pas violation de l'article 7 de la C.A.D.H. Si le comportement des autorités est à l'origine du retard, il y'a violation de l'article 7, sauf si la cause du délai trouve son origine dans des motifs légitimes comme les nécessités de l'enquête, l'encombrement passager et imprévisible des rôles pour lequel auraient été prises immédiatement des mesures appropriées mais qui auraient causé entre-temps un allongement du délai.

L'article 7 de la C.A.D.H. prescrit la célérité des procédures judiciaires et consacre donc implicitement le principe d'une bonne administration de la justice.

A vrai dire la célérité de la procédure pénale sénégalaise est mise en cause. Il faut tout simplement souhaiter que dans l'avenir, les principes ayant trait à une bonne administration de la justice ainsi qu'au respect des droits humains connaissent une évolution.

En définitive, remarquons que les autres garanties accordées dans le procès sont sanctionnées par la nullité. Par conséquent nous nous demandons pourquoi réserver un sort différent au délai raisonnable.

I/ CONSTITUTION SENEGALAISE DU 22 JANVIER 2001 (préambule et titre II)

II/ CODES :

-Code pénal sénégalais

-Code de procédure pénal sénégalais

- Code des obligations de l'administration sénégalais

- Code de procédure civile sénégalais

III/ OUVRAGES

BERGER Vincent, jurisprudence de la C.E.D.H. 8éme édition

BRAHINSKY Corrine Renault, Procédure pénale, pages 1219 et suivants et 1259 et suivants

JEAN PAUL DOUCET, le droit criminel la protection de la personne humaine, 3ème édition, préface de André Vitou, Gazette du Palais

KABA Sidiki, Les droits de l'homme au Sénégal, collection Xam sa yoon, p.104 et suivants

LOUS FAVOREU, PATRICK GAIA, droits st libertés fondamentales, 1ère édition, Dalloz

MADIOT Yves, droits humains et libertés publiques, édition Masson, p.70 et suivants

PRADEL Jean, Procédure pénale, 10ème édition 2000-2001, édition Cujas

PRADEL Jean et VARINARD A., Les grands arrêts de la procédure pénale, 3éme édition

SAINT PIERRE François, Le guide de la défense sociale, 2éme édition, Dalloz

STEPHANI Gaston, LAVASSEUR Georges et BOULOC Bernard, Procédure pénale, 4éme édition, Dalloz, p.752 et suivants

WAHSMANN Patrick, Les droits de l'homme, 4éme édition, Dalloz

IV/ REVUES :

Bulletin d'information de la cour de cassation, octobre 1995, EISSEIN M. La durée des procédures civile et pénale dans la jurisprudence de la C.E.D.H.

J.C.P.1994-I-3802, AUVRET P. Le respect de la présomption d'innocence.

La semaine juridique, 5 février 2003, n °6, 1.108, DOMINIQUE Koronsky, Détention provisoire : la réparation des dommages.

La semaine juridique, édition générale 21 juillet 1999 n° 29, édition du jurisclasseur Procédure pénale : présentation de la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure.

R.F.D.A., 2000, bimestrielle 16ème année, septembre-octobre

R.S.C., n° 2, avril 2002, trimestrielle, Dalloz

Recueil Dalloz, hebdomadaire 179ème année 1er cahier (rouge) 29 mai 2003 n° 21/7118

Recueil Dalloz, hebdomadaire, 181ème année, 28 juillet 2005, n° 29/7214, p. 1953-2024

Recueil Dalloz, hebdomadaire, 21 octobre 2004 ? n° 37/7178

Revue de l'association sénégalaise de droit pénal, 1995

Revue de science criminelle 1982-291, BOLLE P.H. Les lenteurs de la procédure pénale.

Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, juillet-septembre 2005, n° 3

Revue internationale criminelle et politique, 1984-402, PRADEL Jean, La célérité du procès pénal.

Revue sénégalaise de droit pénal, juillet-décembre 1995, n° 56-7-8

V/ DOCTRINE

HOROMTALLAH Cheikh, docteur en droit et avocat a la cour, La présomption d'innocence, p.258 et suivants

La célérité de la procédure pénale, séminaire international organisé par l'institut international de science criminelle les 11 et 14 septembre, R.I.D.P. 1995,n°4-5 et n° 66

VI/ THESES

FALL Bounama, l'application judiciaire des conventions relatives aux droits de l'homme, 2006

GUEYE Fandiagua, la difficile application des conventions relatives aux droits de l'homme

NDIAYE Mamadou, la prison au Sénégal, 1992

TOHODJI Camara Abdoulaye, la protection pénale du suspect, 2000

VII/ DOCUMENTS SUR LES DROITS DE L'HOMME

C.E.D.H. et contentieux administratif français, coopération et développement ; collection dirigée par Jacques Bourrinet, in economica

Charte Africaine des Droits de l'Homme.

Convention Européenne des droits de l'homme

Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789

Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948

Directives et principes sur les droits a un procès équitable et a l'assistance judiciaire en Afrique, adoptés par la Commission Africaine des Droits de l'Homme en 2003.

Droits humains fondamentaux, recueil de documents internationaux, Bruxelles 1993, p.227 et suivants

Les droits de l'homme questions réponses, par Leah Levin ulster par Plantu, 2éme édition, 50éme anniv D.U.D.H. 1948-1998. p.15 et suivants

NDIAYE Youssoupha, Les droits de l'homme en Afrique, Institut des droits et de la paix, U.C.A.D., législation sénégalaise en matière de droits de l'homme

Pacte international relatifs aux droits civil et politique

VIII/ WEBOGRAPHIE :

www. coe-int / t/ dg1/ leg alcooperaton : les travaux préparatoires du CCJE, procès équitable dans un délai raisonnable

www. fbls. net/6-1 délai. html, le délai raisonnable : article 6-1 C.E.D.H., models de recours et jurisprudence de la C.E.D.H.

www. oboulo. com/ délai raisonnable procédure

www. xibar. net, le temps du procès : les acteurs veulent un délai raisonnable pour dire le droit (chercher dans google.com

REMERCIEMENTS....................................................................................1

DEDICACES..............................................................................................2

LISTE DES ABREVIATIONS........................................................................3

SOMMAIRE..............................................................................................4

INTRODUCTION.......................................................................................6

PREMIERE PARTIE : LE DELAI RAISONNABLE UN PILIER D'UNE BONNE JUSTICE..................................................................................................................................12

CHAPITRE I : LA NECESSITE DU RESPECT DU DELAI RAISONNABLE..............13

SECTION I : LA VALEUR NORMATIVE DE L'EMERGENCE DU CONCEPT DE DELAI RAISONNABBLE.............................................................................14

Paragraphe 1 : La reconnaissance conventionnelle du droit au délai raisonnable du procès pénal.......................................................................................................14

A- La reconnaissance du droit au délai raisonnable par les traités internationaux..............14

B- La reconnaissance du droit au délai raisonnable par la Charte Africaine des droits de l'Homme et des peuples...........................................................................................................16

Paragraphe 2 : La garantie constitutionnelle du droit au délai raisonnable du procès pénal..17

A- La ratification des conventions internationales par le Sénégal.................................18

B- La force juridique des dispositions constitutionnelles...........................................19

SECTION II : LA PROTECTION PENALE DU DROIT AU DELAI RAISONNABLE DU PROCES PENAL........................................................................................20

Paragraphe 1 : Les conditions relatives aux motifs de la détention provisoire.................20

A- Une durée raisonnable de la détention au regard de la gravité des faits.......................21

B- Une durée raisonnable de la détention au regard de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité............................................................21

Paragraphe 2 : Les exigences relatives aux autorités compétentes..............................22

A- La surmotivation des décisions du juge d'instruction intervenant après un certain délai de détention...................................................................................................22

B- La cessation d'office de la détention provisoire en l'absence des conditions posées par l'article 127................................................................................................23

CHAPITRE II : LES OBJECTIFS DU DELAI RAISONNABLE DU PROCES

PENAL....................................................................................................24

SECTION I : LE SOUCI D'UN PROCES JUSTE ET EQUITABLE..........................24

Paragraphe 1 : La protection des intérêts en présence au procès pénal.........................25

A- Un procès juste pour une protection de l'intérêt des justiciables..............................25

B- Un procès juste dans l'intérêt de la société........................................................27

Paragraphe 2 : Le souci du respect de la présomption d'innocence..............................27

A- L'incompatibilité entre la présomption d'innocence et la lenteur du procès pénal..........28

B- Le caractère paradoxale de la détention provisoire...............................................29

SECTION II : LES GARANTIES POUR UN RESPECT EFFECTIF DU DELAI RAISONNABLE DU PROCES PENAL.............................................................30

Paragraphe 1 : Les actions en délai excessif du procès pénal....................................30

A- Les actions en délai excessif de procédure........................................................30

B- Les actions en délai excessif de jugement.........................................................32

Paragraphe 2 : Les sanctions du délai excessif du procès pénal..................................32

A- La réparation du préjudice dû au délai déraisonnable...........................................32

B- L'absence de nullité de la procédure pour cause de durée excessive..........................34

DEUXIEME PARTIE : L'OPPORTUNITE D'UNE REFORME DU SYSTEME JUDICIAIRE SENEGALAIS........................................................................36

CHAPITRE I : LES MANQUEMENTS CONSTATES DANS LE SYSTEME REPRESSIF SENEGALAIS............................................................................................37

SECTION I : UNE EFICACITE CRITIQUEE DU SYSTEME REPRESSIF..................37

Paragraphe 1 : Une efficacité critiquée au plan organique........................................38

A- Au niveau des institutions judiciaires..............................................................38

B- Au niveau du personnel judiciaire..................................................................39

Paragraphe 2 : Une efficacité critiquée au plan matériel..........................................40

A- L'absence de garantie temporaire de détention provisoire en matière criminelle dans le CPP...........................................................................................................................................40

B- L'existence de quatre phases difficilement contournables......................................41

SECTION II : L'AMBIGUÏTE DE LA NOTION DE DELAI RAISONNABLE.............43

Paragraphe 1 : La détermination de la période à prendre en compte............................43

A- La fixation du point de départ de la procédure...................................................43

B- Le terme de la procédure pénale....................................................................45

Paragraphe 2 : Le caractère relatif de l'appréciation du délai raisonnable......................45

A- La difficulté d'appréciation du caractère raisonnable ou non du délai........................46

B- Les critères d'appréciation du délai raisonnable..................................................47

CHAPITRE II : LES SOLUTIONS PRECONNISEES FACE A LA DIFFICULTE D'APPLICATION DU DELAI RAISONNABLE DU PROCES PENAL.......................48

SECTION I : LA RELECTURE DES REGLES DE PROCEDURE PENALE................49

Paragraphe 1 : L'aménagement de nouveaux délais pour le traitement des dossiers..........49

A- L'institution de nouveaux délais de procédures..................................................49

B- L'avancement du moment du débat contradictoire..............................................50

Paragraphe 2: L'approfondissement du contrôle de l'instruction préparatoire.................51

A- Le contrôle de l'instruction par la chambre d'accusation.......................................52

B- Le contrôle de l'instruction par les parties au procès............................................53

SECTION II : LA CELERITE PAR VOIE D'AMENAGEMENTS PROCEDURAUX......54

Paragraphe 1 : La célérité par la contractualisation de la justice pénale........................54

A- La promotion du règlement amiable des litiges pénaux.........................................55

B- L'institution du « plaider coupable » en droit sénégalais.......................................56

Paragraphe 2 : La célérité par la restriction des voies de recours................................58

A- La limitation et l'interdiction des recours en réformation et en cassation....................58

B- L'étranglement des recours en nullité.............................................................60

CONCLUSION..........................................................................................61

BIBLIOGRAPHIE.....................................................................................63

TABLE DES MATIERES............................................................................65

* 1 Pradel J., Procédure pénale, 10ème édition 2000-2001, éd. CUJAS, p. 303

* 2 Voir articles 381 a 385 C.P.P. et 45 et suivants C.P.P.;

* 3 Solange Ngono, le procès pénal camerounais au regard des exigences de la Charte Africaine des Droits de l'Homme, l'Harmattan 2002.

* 4 Article 45 et suivants C.P.P.S.

* 5 Articles 101 à 105 C.P.P.S.

* 6 Article 102 C.P.P.S.

* 7 Article 106 C.P.P. et 117 C.P.P. français.

* 8 Chambre d'accusation, Liége, 20 mars 1986:"une personne ne peut rester trop longtemps sous le coup d'une accusation a raison du préjudice moral et physique qui peut lui être causé par l'accusation", cité par H.Bosly et C. de Valkeneer, R.I.D.P., pp 433 et suivants.

* 9 R.F.D.A. 2000, bimestrielle, 16eme année, septembre-octobre, page 921-1174, Dalloz, Bernard Pecteau.

* 10V. Vocabulaire juridique Cornu G. association Henry Capitant 4è édition, puf

* 11 D. Allix, le droit au procès pénal équitable, justice n° 10, 1998, p.19

* 12 "Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c) du présent article, doit aussitôt être traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable, ou liberty pendant la procédure..."

* 13 "Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si sa détention est illégale."

* 14 "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable,..."

* 15 Cassation criminelle, 14 mai 1996, Bulletin criminel numéro 203.

* 16 Bulletin information, c.cass, 15 décembre 1996, n° 1333.

* 17 Droits humains fondamentaux, Recueil de documents internationaux, Bruxelles 1993.

* 18 Organisation de l'Unité Africaine.

* 19 V. Constitution de la République du Sénégal 2002

* 20 Kaba Sidiki, Les droits de l'homme au Sénégal, collection xaam sa yoon, pp 104 et suivants

* 21 Revue de droit contemporaine, n° 2, 1964, p.9

* 22 Madiot Yves, Droits de l'homme et libertés publiques, Edition Masson; cité par Gonidec, tome II, p 60.

* 23 Delperée Francis, les données constitutionnelles, 2ème édition, Maison F. Larcier, s.a, 1987, page 102.

* 24 Principe exprimé par l'adage latin « nullum crimen, nulla poena sine lege » selon lequel tout acte constituant un crime ou un délit doit être défini avec précision par la loi ainsi que les peines qui lui sont applicables

* 25 Caractère de ce qui est placé sous l'empire du droit par opposition aux normes de la vie sociale : moeurs convenances, morale, religion

* 26 Cass. Criminelle, 16 janvier 1990, Droit pénal, 138.

* 27 Cass. Crim 2 septembre 1997; cf C.E.D.H. 10 novembre 1996, Stägmüller

* 28 "...Lorsque le dossier est en état d'être jugé, l'affaire ne peut faire l'objet de plus de trois renvois pour quelque cause que ce soit. Après trois renvois successifs l'affaire est obligatoirement jugée.

* 29 Art 5 ss. 3; C.E.D.H.10 novembre 1996 Stägmüller et C.E.D.H. 26 juin 1991 Letellier.

* 30 S.Guinchard "vers une démocratie procédurale", Justices 1999 N°1 p.103

* 31 J.Carbonnier, Droit civil introduction, Paris, 21ème éd. PUF 1992 coll. Thémis p.361.

* 32 Art 56 "sera coupable de trahison et puni de mort tout sénégalais...ou à provoquer un accident"...art 100 "les personnes reconnues coupables de délits définis au présent chapitre...en réparation ouverte à la victime."

* 33 Journal "le cafard libéré " n° 251 du mercredi 25 novembre 1992.

* 34 Code des obligations de l'administration.

* 35 Cass.crim. 11 janvier 1995; bulletin criminelle n° 17, 1 fevrier1995.

* 36 Cass.crim. 10 décembre 1985; bulletin criminel 399.

* 37 J.Pradel, Procédure pénale, 10eme édition, 2000, Cujas.

* 38 JORS n°4846, 1981, page 714.

* 39 Article 175-1et suivants du code français de procédure pénale.

* 40 En France ce délai est d'un maximum d'un an en matière correctionnelle et 18mois en matière criminelle (cf. 116 C.P.P.)

* 41 Loi du 4 janvier 1993 et du 15 mai 2000

* 42 Saint-Pierre François, Le guide de la défense sociale, 2ème éd. Dalloz

* 43

* 44Saint-Pierre François, Le guide de la défense sociale, 2ème éd. Dalloz

* 45 Cass. Crim. 7 mars 1989, Bull. crim. N°109

* 46 Article L781 du code de l'organisation judiciaire

* 47 La semaine juridique du 5 février 2003 n°6: Détention provisoire, la réparation des détentions par Dominique Karsonty, 1,108

* 48 Koering Joulin R., L'indemnisation des victimes d'erreurs judiciaires, Mélanges offerts à P. Drai, Le juge entre deux millénaires, Dalloz p. 70

* 49 Docquir St-François: Délai raisonnable: l'exigence d'un recours effectif en droit interne, année 2001, p.274

* 50 Kaba Sidiki, Les droits de l'homme au Sénégal, collection Xaam sa yoon, p.104 et s.

* 51 La semaine juridique du 5 février 2003, La réparation des détentions par Dominique Karonsky, 1,108

* 52 C.E.D.H., arrêt Eckle c/ Allemagne, 15 juillet 1982

* 53 C.E.D.H., arrêt H c/ Allemagne 13 décembre 1984

* 54 C.E.D.H., arrêt Espagne Union Elementaria Sanders du 7 juillet 1989.

* 55 Dans les conclusions de l'affaire Van Hout, R.F.D.A., 1989, page 57 et suivants, le commissaire du gouvernement avait envisagé le dépassement du délai raisonnable comme motif d'annulation d'une décision administrative.

* 56 Cass. Crim., 7mars 1989: Bulletin criminel n° 291

* 57 Cass.Crim. 3 février 1993, Bulletin crim. n° 57, Dalloz 1993, p. 515

* 58 Bulletin crim. n° 166, Dalloz 1994

* 59 G.C. Jonathan, la C.E.D.H., Collection droit public positif, dirigé par Louis Favoreu, in Economica, page 419.

* 60Assises de juillet 1997, cas de Mansour Sarr, dans les droits de l'homme au Sénégal, page 105 de Sidiki Kaba

* 61 Raisons d'ordre économique, financier et technique.

* 62 Un ordre administratif et un ordre judiciaire.

* 63 C.Cass. Audience solennelle de Rentrée des Cours et Tribunaux, année 1992-1993, droits et responsabilité des ²juges.

* 64Cass. Crim., 12 septembre 1999, bulletin criminel n°192, cassation de l'arrêt d'une chambre d'accusation qui rejette la demande de mise en liberté d'individu détenu depuis plus d'un an, sans indiquer le délai prévisible d'achèvement de la procédure.

* 65 Il s'agit des crimes mentionnés aux livres II du code pénal (crimes contre les personnes) et IV du même code (trafic de stupéfiants, terrorisme, proxenitisme, extorsion de fonds, crimes commis en bande organisée)

* 66 Voir article 63 C.P.P.

* 67 Articles 49 à 69 du C.P.P. : enquête de flagrance et enquête préliminaire.

* 68Toutefois, la date où la partie opposition, la tentative de conciliation et la procédure préliminaire constituent, notamment, des exceptions à ce principe

* 69 Ouvertures des enquêtes préliminaires, dates de perquisition ou de saisie, inculpation

* 70 C.E.D.H., arrêt WEMHOFF, 27 juin 1968, série A, page 27

* 71 F.Kuty, le droit au procès équitable au sens de la jurisprudence strasbourgeoise en 2001 page 591.

* 72C.E.D.H., arrêt Metzger, 31 mars 2001, série A, vol 56, page 18.

* 73 Cass. Crim. 20 mars 2000, revue de droit pénal et criminel, 2000, page 577.

* 74 Cass. Crim., 17 mai 2000, revue de droit pénal et criminel, 2002, page 577.

* 75 Dans l'arrêt Maini, le délai s'achève avec l'arrêt de la C.C., qui a clôturé la procédure.

* 76 L.Declercq, le délai raisonnable ou le retard excessif dans les affaires pénales : article 6.1 C.E.D.H., revue de droit pénal, 1989, page 599.

* 77Arrêt C.E.D.H., 28 mars 1990, série A, n° 175 ; W.Peukert, la célérité de la procédure pénale, page 679.

* 78 Madiot Yves, les droits de l'homme, Paris, 2ème édition, p. 132.

* 79 G. Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, P.U.F., 2000.

* 80 C.E.D.H., arrêt Klass, 6, septembre 1978, série A, n° 28, page 32.

* 81 M.Picard et P.Tituin, commentaire de l'article 5.3 C.E.D.H.

* 82 Arrêt Preto et autres contre Italie, 8 decembre1983, série A n° 7

* 83 Article 14.3, g, du pacte international du 19 décembre 1966, relatifs aux droits civils et politiques.

* 84 Solange Ngono, le procès pénal camerounais au regard des exigences de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples, l'Harmatan, 2002.

* 85 O.Corten, l'utilisation du raisonnable par le juge international, Bruxelles, Bruylant, 1997, page 576.

* 86 Sauf les articles 141et 142 C.O.A. précités.

* 87 Notions de procédure pénale, Lamine Thior, contrôleur principal, Chevalier de l'Ordre National du Mérite, 1993.

* 88 En vigueur le 1 février 1966, dans le but de dégager les bases d'une reforme judiciaire profonde permettant l'adaptation effective de la justice sénégalaise aux grands principes qui doivent la régir, une Conférence nationale judiciaire s'est tenue à Dakar du 15 au 19 mai 1984

* 89 C'est la raison pour laquelle les expressions telles que « doit immédiatement, doit transmettre sans délai... » ont été supprimées et l'article 129 dispose par exemple que la demande de mise en liberté provisoire est transmise au parquet dans les 48 heures.

* 90Voir article 389 C.P.P.

* 91 Voir article 85 C.P.P.

* 92 Depuis la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000.

* 93 Reims, 13juillet 1983, Gazette du palais 1983. 691, note Nagel

* 94 Voir aussi les articles 384 et 403 C.P.P. et 60 infiné C.P.C.

* 95 Article 211 C.P.P.

* 96 Article 156 alinéa 2

* 97 Article 167 alinéa  2

* 98 Article 81 alinéa 7

* 99 Cass. Crim29 avril 1960, R.S.C., 1960, page 661

* 100 Articles 156 et167et 4

* 101 Cornu G. vocabulaire juridique, association Henri Capitant, P.U.F.

* 102 V. article 570 du code de procédure pénale du Sénégal

* 103 En matière civile, l'article 7 du code de procédure civile permet au juge, dans tout litige, et en tout état de la procédure, de tenter une conciliation des parties même d'office.

* 104 Cour de Cassation, audience solennelle de rentrée des cours et tribunaux, vol.3 année 97-98;

* 105 Le colloque de Pau de 1981 de l'Association internationale des sciences juridiques, compte rendu de J. Verin : le règlement extrajudiciaire des litiges, R.S.C., n° 1, page 171.

* 106 Jean Pradel, Procédure pénale, p. 297.

* 107 Article 455 CPP France.

* 108 F. Casorla, RIDP 1995, p. 524, Sur le consensualisme en général

* 109 Jean Pradel, Procédure pénale, p. 297.

* 110 Article 391.A à 391.E code de procédure pénale portugais.

* 111 Delage Pierre Jérôme, La CRPC: quand la pratique ramène à la théorie, Dalloz 28 juillet 2005.

* 112 W. Roumier, Mise en oeuvre de la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, Droit pénal, avril 2005.

* 113 André Giudicelli, Repenser le plaider coupable, RSC juillet septembre 2005

* 114 Cass. Crim. 12 mai 1955, Michelle Laure Rassat, Procédure Pénale, page 763.

* 115 Cass. Crim. 24 juillet 1967, J.C.P., page 67. II. 15266.

* 116 Où le procureur général forme son appel par déclaration au greffe de la cour, dans le délai de 3 mois à compter du jour du prononcé du jugement...

* 117 Il y'a toutefois quelques exceptions aux articles 485.1; 485.2; 485.3 et 396 C.P.P.

* 118 Article 482 alinéas 1 et 2.

* 119 Voir article 186 infiné code de procédure pénale France

* 120 Article 165 C.P.P.






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