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La presse écrite algérienne en Île de France: lectures et identité

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par Ahmed HANIFI
UNiversité Paris VIII - DEA de Sociologie 1996
  

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19 20 5.2 L'ENTRE DEUX

Ceux là ne lisent que comme ça ou n'achètent un journal que lorsqu'on ne comprend pas une information I au journal télévisé. I

Leur lecture est circonstancielle. Ils lisent au gré des événements ou des lieux, des rencontres. Certains éprouvent un malaise à évoquer le pays qu'ils ont récemment quitté. Ils se trouvent dans une situation intermédiaire. La presse les déçoit.

 A part El-Watan qui me séduit, parce que je juge qu'il est à la hauteur de...que ça soit sur le plan...linguistique ou sur le plan analyse, il y a quelque chose.(...) Sinon le reste...déjà la forme, la disposition des rubriques, non c'est vrai qu'ils ont plus de publicité parce que c'est de cela qu'ils vivent mais, qu'ils mettent un peu de contenu quoi. 

* En France depuis 7 ans.

Le locuteur suivant est âgé de 24 ans. Il est étudiant. Il a passé plusieurs années en hôpital. Ses parents sont en Algérie. Il vit en banlieue parisienne dans une famille d'accueil.

Il ne porte aucun jugement ni sur les contenus ni sur les journaux dont il ne cite d'ailleurs aucun nom. Seules l'intéressent les bonnes nouvelles en provenance du pays qu'il y lit.

Les lieux de lecture sont tout aussi importants que la lecture elle-même. Ils permettent l'accès à d'autres secteurs (Télévision, vidéo, conférences...), à des échanges de points de vue avec d'autres utilisateurs. Mais aussi se sentir chez soi. Etre entre soi.

Je viens ici I au centre culturel algérien I aussi. Pour m'informer sur mon pays. Je m'informe par les journaux par des articles, des fois je prends des articles de tourisme, des photocopies des articles de tourisme, même d'hôtellerie...Quand je vois de bonnes nouvelles, je sors très content.

Q : C'est à dire, une bonne nouvelle ?

Une bonne nouvelle pour moi c'est quand mon pays, quand il y a une bonne nouvelle par exemple là je viens, je viens de lire comme quoi il y a eu une miss-monde qui a été...il y a deux miss-monde...qui a ...bien sûr, unique au monde...deux miss-monde !...j'ai pas l'habitude de lire ça...mais...bon...j'ai un peu été étonné par ce journal I fou-rire étouffé I ...c'est magnifique...c'était vraiment super...(...) Uniques au monde, nous sommes uniques au monde ! C'est super !vraiment ! Haja kharja-el-ada I extra - ordinaire I... c'est quelque chose de vraiment magnifique (...). Je regarde dans le sommaire ce qui se passe exactement. S'il y a des trucs intéressants, je feuillette, n'importe quel journal, quand il y a un truc intéressant hop, je fais une photocopie. Mais je prends pas le titre du journal. 

Q : Ah ?

C'est une habitude, comme ça et ensuite je fais une petite analyse et ça me donne des petites idées. De tout je prends. De tout. Je n'ai pas de préférence. (...) Des articles de tout. Ca peut toucher à l'hôtellerie, ça peut toucher à la technologie,

ça peut toucher au médical, ça peut toucher...je sais pas...à la recherche, ça peut toucher à la science ; ça peut toucher à tout, tout, ça peut toucher à tout. Vous voyez quel que soit le journal il faut regarder à l'intérieur. Vous lisez puis tiens c'est intéressant...je vais faire une photocopie. Je voudrais savoir, savoir encore plus. 

Je viens (...) aussi voir la télé algérienne. Je la regarde ici...des fois, s'il y a un bon prix, je leur dis " écoutez si... ". Je fais soit ça pour m'enregistrer et j'achète l'émission ou bien je...je regarde carrément avec les autres, comme tout le monde...dans d'autres lieux, chez des amis...Dans ma chambre je n'ai pas le câble...Chez des amis qui captent l'Algérie...Des amis. Soit français soit américains ou soit même des turcs. 

Q : Des amis américains ?

 Oui des amis américains que je rencontre à l'institut à l'école et tout ça et...Puis voilà. (...). Ils me permettent de regarder...Mais tout ça donc je regarde les informations d'Algérie ce qui est vraiment...Je veux pas me couper de mon pays, franchement non. 

Auprès de ces lecteurs les média français n'ont pas bonne presse.

Les avis sont unanimes et partagés. Unanimes par rapport à la télévision qu'ils trouvent incorrecte, orientée... Tant par rapport au pays que par rapport à leur quotidien en France. Partagés par rapport à la presse écrite française. Le Monde, Libération sont fréquemment cités, d'autres le sont aussi : Le Parisien, La Croix, Le Figaro avec plus de nuances. La radio n'est que très peu évoquée.

 Je lis par contre Libé, je lis Le Monde, je lis le Figaro. Aussi bien de droite que de gauche. Maintenant on ne sait même pas s'ils sont de droite s'ils sont de gauche. Parce qu'ils manquent d'observateurs qu'on sait même plus où ils vont. C'est que...l'algérien du moins je parle de l'Algérie puisque je connais, qui est mon pays, qui est mon sang...c'est que...Quand ça va mal on en parle. On met des tartines nanananana. C'est à dire que c'est vrai que, moi personnellement quand j'ai lu...je lisais là les journaux l'Algérie !...J'ai dit qu'est-ce qui se passe dans mon pays ?... J'ai été. Là, je viens de rentrer là. Et c'est pas ce qui a été décrit dans les journaux ! C'est vrai que, faut pas le nier, y a la tuerie, y a ci y a là...Mais c'est pas le Liban !...Parce que non mais !...Le Liban c'était des immeubles qui tombaient !...c'était la Bazooka...alors la télé française elle en parle plus maintenant. D'un seul coup. Peut-être ils ont eu des ordres, ou une pression quelque part.

* Un "ancien". 52 ans.

Par son approche des événements relatifs aux pays d'émigration ou à ceux relatifs aux populations issues de ces pays, la télévision suscite chez les téléspectateurs des comportements d'hostilité sinon de xénophobie.

Un premier constat1 écrivent A. BATTEGAY et A. BOUBEKER suite au visionnage par une équipe d'observateurs durant 15 jours en novembre 1991, de tous les programmes de télévision soit 750 émissions télévisées. "Les immigrés n'ont qu'un accès très limité à la télévision. Les professionnels issus de l'immigration sont rares. (trois noms de journalistes d'origine maghrébine sont apparus en 555 heures de programmation) et les immigrés ne participent que très peu aux différents types d'émission. Malgré la polémique politique, l'immigration n'apparaît pas comme un enjeu majeur d'information. Les situations relatives à cette question ne sont guère médiatisées que dans le sens d'une dramatisation des hantises de la classe politique et de l'opinion publique. "

Il faut dire qu'en France aussi, il y eu tellement de...tellement de choses qui ont été dites à travers les médias, la télévision, les journaux et cetera que bon ben...quelques fois les français lorsqu'ils ont une réaction bon ben, même si elle est mauvaise pour moi...enfin...je la comprends...hein (...). On peut tout faire avec la télévision (...). En ce moment ici les algériens on en entend pas beaucoup parler, c'est surtout avec les maliens, avec les hommes de couleur, avec les gens de couleur, mais les algériens c'est vrai qu'on en entend pas beaucoup parler. En tout cas pas en ce moment. Mais c'est sous-jacent, ben c'est à dire...de toute façon...on s'habitue. Ben, bon moi en ce qui me concerne j'y suis tellement habitué que j'y fais plus tellement attention, mais c'est vrai que lorsque j'étais plus jeune, j'étais beaucoup plus sensible à ça. 

* 48 ans, niveau secondaire.

 Je lis Le Monde. Le Monde. En général j'achète pas d'autres. Enfin, bon sauf quand y a des sujets qui m'intéressent mais ils sont tellement orientés, tellement.

Q : Ah bon...

Ils sont en général orientés. En général. J'avais l'impression qu'on recherche plus le sensationnalisme que la diffusion de l'information et...Une lecture critique quoi. C'est pas ce qu'on attend du lecteur. On cherche à...on cherche à lui faire éprouver les grandes sensations. C'est souvent ça. 

* 28 ans "Franco-algéro-marocaine".

1-A.BATTEGAY, A. BOUBEKER. Les images publiques de l'immigration. Paris : CIEMI / l' Harmattan, 1993, p140.

Ce locuteur a 24 ans. Il réside dans une famille d'accueil à Malakoff. Depuis très jeune il est hospitalisé.   J'ai passé la moitié de ma vie dans les hôpitaux. (...) Je suis ici pour ma santé et mes études.

Il prépare un diplôme dans le management hôtelier. Toute sa famille est en Algérie. Lit tout ce qui peut le soulager. Il dit pratiquer du basket-ball et du football près de la tour EIFFEL à " BIR HAKIIM "...

Le nom est algérianisé.

La lecture de la presse (épisodique) tout comme les activités sportives ou culturelles (il s'étonne que nous ne l'interrogions pas sur les livres) procède de la même démarche : ne pas rompre.

UN BOUT DE VIE A BIR HAKIIM, IH BIR HAKIIM

 Vous voyez quel que soit le journal il faut regarder à l'intérieur. Vous lisez puis " tiens, c'est intéressant "...je vais faire une photocopie. Moi ça me touche. Je voudrai savoir. Savoir encore plus. Bon quand on dit « en Algérie il y a une avancée sur le plan technologique », c'est vraiment merveilleux. C'est super. C'est mon pays. C'est le mien et je suis content comme je vous l'ai dit tout à l'heure et puis voilà. Voyez, moi je trouve ça vraiment magnifique. Vous m'avez pas parlé des livres. KATEB Yacine, bon je vais pas vous parler de lui franchement...c'est un...c'est...c'est la première fois que je vois un écrivain. Il a été diffusé à la télé. Le jour même...le lendemain, je suis parti acheter son livre... et puis voilà...J'ai acheté le livre...NEDJMA...NEDJMA...voilà...magnifique. Moi je trouve ça magnifique...Sa vie et tout ça...C'est un personnage assez spécial...Il y a eu une émission récemment sur France 3...je me rappelle de sa mort...et ça m'a...moi j'étais...bon...ça m'a...il est mort de maladie...Allah-yarh'mou.

(...)

Q : Tu prépares un diplôme ?

 Ca s'appelle un master bachelor of science dans le domaine de...bachelor of science. Management international...management hôtelier international. Le management c'est vague. Moi je préfère dire technique commerciale...vous voyez, technique commerciale. Parce que, quand on dit management c'est un peu le frime des américains. C'est Ezzoukh, zoukha-taâ ; zoukha taâ el marikaniyyin' comme on dit I la « frime » des américains I. Donc moi je dis technique commerciale...Et mon savoir-faire je le donnerai à mon pays plus tard avec de profondes études que je ferai moi-même. Personnellement. Tranquille chez moi en Algérie comme je vais chaque vacance. Pour les vacances auprès de mes parents. Auprès de ma famille, que j'aime beaucoup. Que ça soit du côté de ma mère ou du côté de mon père. Voilà donc...que j'aime beaucoup. 

Q : Tu y es allé cette année ?

 Cette année je vais aller pour les vacances. Je vais aller pour les vacances. Parce que c'est le seul endroit. Ca fait trois ans que je n'ai pas été, étant donné que j'étais malade. Et on m'a pas donné...Les médecins ne m'ont pas donné la permission d'aller...et tout ça donc...Je suis quand même allé une année, je me suis fait engueuler par le professeur ici. Il m'a dit : " écoute, tu prends des risques, regarde les résultats ". Je lui ai dit : " je m'en fous, parce que les vacances moi, c'est mon pays et je veux revoir ma famille. (...) Moi mon savoir-faire comme je vous l'ai dit au début, je le transmettrai à mon pays. Voilà. Tout simplement. Je le transmettrai à mon pays. "

"V" quant à lui a récemment quitté l'Algérie. Il lit "tout ce que je trouve". Il n'a pas de préférence mais un grand regret: que son pays ne soit pas sur certains points précis (Lois, presse, droits de l'homme...) à l'image d' autres pays. La comparaison avec l'Allemagne n'est pas fortuite.

 J'ai demandé l'asile politique en 94.  Il attend une réponse définitive. Il a tenté une expérience (infructueuse) en Allemagne. Aujourd'hui à Paris il travaille trois jours par semaine sur les marchés. Il a 28 ans. Il n'a pu s'inscrire à l'Université malgré ses quatre années de faculté à Alger.

MOI JE VAIS FAIRE UNE COMPARAISON

 Je suis venu en France le 15 mai. C'était un vendredi comme aujourd'hui. Le 15 mai 92. (...) En gros...ben c'était un climat de terreur...même le goût de travailler, de faire des études...c'était l'impasse...Au niveau de tout.(...)

Q : Comment ça se passe pour toi ?

Moi je vais faire une comparaison là...Parce que j'ai été en Allemagne...je...je connais les deux. Je dirais qu'en Allemagne c'est vraiment...c'est n'importe quoi, c'est du n'importe quoi. Je peux pas vivre là-bas. L'administration là-bas elle est très très sévère...Direct comme ça ils emmènent les gens. A l'aéroport. Sans les prévenir hein...C'est pas normal ça. Mais vraiment c'est de l'anarchie... (...). Là quand même il y a les droits de l'homme, quand même. Malgré, malgré tout ce qui se passe...Je peux dire que c'est le meill... Bon j'ai pas vu l'Amérique et tout...mais je crois que la France c'est le meilleur pays du monde. Au niveau des lois. Je parle au niveau des lois. Au niveau des droits de l'homme y a pas mieux que la France. Même si, même si maintenant j'ai, je...je les ai pas les papiers. Mais il faut dire ce qui en est. Faut pas...Faut pas cacher la vérité. Même tout ce qui se passe au niveau des Algériens, ils essaient de les expulser. Ils leurs leurs donnent pas les papiers...bon...dans un sens c'est normal. C'est la crise mondiale...bon...la France elle peut pas accueillir tout le monde...C'est logique !

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius