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L'applicabilté des conventions internationales relatives au droit de l'enfant au Tchad

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par Eugène Le-yotha Ngartebaye
Université Catholique de Lyon - Master 2 Recherche Fondements des droits de l'homme 2007
  

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C- Le droit au travail

La problématique du travail des enfants reste un sujet de préoccupation étant donné la situation de pauvreté et l'instabilité politique du Tchad. En effet, la législation tchadienne sur cette question date de 1969. C'est la loi n°55/PR/MTJS/DTMOPS du 8 février 1969. Jamais cette loi n'a connu de modification pour tenir compte des ratifications des nombreux traités sur la protection de l'enfance par le Tchad.

Le caractère vieillissant de la loi permet l'utilisation de plus en plus des enfants sur le marché de l'emploi sans crainte de quelconques représailles. D'où le développement des enfants bouviers et des mouhadjirines.

L'inquiétude demeure grande lorsque le travail de l'enfant ne s'analyse pas en tant que processus de socialisation mais plutôt comme une richesse économique des adultes, comme nous avons tenté de décrire plus en amont. Ces jeunes travaillent dans des conditions épouvantables.

Les bouviers par exemple se lèvent très tôt et ne rentrent qu'à la nuit tombante. Ils ne bénéficient d'aucune couverture sanitaire et lorsqu'ils sont malades, leurs employeurs les menacent allant parfois jusqu'aux châtiments corporels. Le bouvier ne connaît pas de repos. Une fois arrivée à la maison, après avoir pris son unique repas quotidien (en général les restes de nourriture consommée par son employeur), il doit faire la lessive de la famille.

« Le monde civilisé, disait Maria Montessori, devient un immense camp de concentration dans lequel tous les jeunes êtres humains qui arrivent sur terre sont relégués et mis en servitude, niés dans leur valeur, anéantis dans leurs pulsions créatives, soustraits aux stimulations vivifiantes auxquelles tout homme à droit aux milieux de ceux qui l'aiment »74(*). L'enfant est perçu comme une valeur marchande. C'est pourquoi les enfants deviennent des commerçants ambulants : vente de journaux, de cigarettes, de produits alimentaires... ils évoluent dans le secteur marchand, même si à l'heure actuelle on ne peut dire avec précisions quel est leur apport dans l'économie.

Pour les mahadjirines, le maître, également appelé marabout, est libre de disposer de ces enfants comme il l'entend. Le plus souvent, il loue leur force de travail aux entreprises de transport ou pour réaliser des travaux domestiques. Mais le marabout peut aller jusqu'à « vendre » les enfants dont il la charge. Il peut les livrer à des groupes militaires pour leur enrôlement, ou à des particuliers. L'affaire de l'arche de zoé en est la patente illustration.

Si aujourd'hui il est fait de plus en plus état des trafics d'enfants entre l'Afrique de l'Ouest et du Centre75(*), au Tchad cette pratique ne s'est pas encore développée. Par contre, il se développe un trafic à l'intérieur du pays, assimilable à la traite.

La traite consiste au recrutement des enfants par des moyens répréhensibles comme des tromperies, des abus d'autorité ou en profitant de situation de vulnérabilité. En effet, s'il n'existe pas d'étude spécifique qui pose de façon claire et précise la question de la traite des enfants aux Tchad, bon nombre de pratiques qui ont cours dans le pays s'en rapprochent. C'est le cas des enfants bouviers et de la mendicité des mahadjirins.

Aussi faut-il souligner que l'article 18 de la loi n°038/PR/96 portant Code du Travail au Tchad fixe l'âge de seize ans pour l'établissement d'un contrat d'apprentissage. Or les enfants bouviers ou les moudjirines ne peuvent en aucune manière être considérés comme des apprentis. En outre le code du travail n'aborde pas la question du travail dans le secteur informel, lequel secteur emploi, en nombre, de la main d'oeuvre infantile.

La législation reste par contre muette sur l'emploi des enfants dans l'armée. Or le travail des enfants dans l'armée prend des proportions très inquiétantes. « Un peuple en guerre n'a plus d'enfants, il n'a que de soldat »76(*). Cette citation illustre une situation que connaissent bien les pays qui, même s'ils ne sont pas en guerre au sens strict du terme, font face à des problèmes de troubles intérieurs et utilisent des enfants.

Le 10 novembre 1998, l'Assemblée Générale des Nations Unies a adopté une résolution désignant la période 2001-2010 « décennie internationale de promotion d'une culture de la non- violence et de la paix, au profit des enfants du monde. » Mais force est de reconnaître qu'aujourd'hui plus qu'hier, des centaines de millions d'enfants ne sont pas à l'abri des guerres.

L'expression « enfant soldats » désigne toute personne âgée de moins de 18 ans qui fait partie de tout groupe armé, régulier ou irrégulier. Peu importe que cet enfant manipule des armes, soit cuisinier, messager, porteur de bagages ou qu'il accompagne un de ces groupes77(*). En général, l'âge des enfants varie entre 7 et 17 ans.

La participation des enfants et des adolescents aux combats et leur socialisation par des institutions militaires ne datent pas d'aujourd'hui. Déjà au VIIIéme siècle avant Jésus Christ, l'éducation militaire des enfants palliait au manque de soldats. En 1945 au Japon par exemple, de nombreux enfants se sont battus à Okinawa contre les américains, et environ 5 000 membres de la jeunesse hitlérienne ont participé à la bataille contre l'armée rouge. Si l'histoire montre qu'il s'agit d'un phénomène ancien, il n'est reste pas moins que l'inquiétude est grande lorsqu'on observe aujourd'hui encore le nombre croissant d'enfants dans les champs de combats.

Selon l'Organisation des Nations Unies, plus de 300 000 enfants dans le monde participent aux combats, dont 120 000 uniquement en Afrique78(*). On les situe dans les zones de conflits armés en Afghanistan, en Tchétchénie, en Irak, au Cambodge, au Vietnam, en Bosnie, en Somalie, au Rwanda, en République Démocratique du Congo, au Tchad, etc. L'ampleur considérable du phénomène79(*) « enfant soldat » pose bien des questions au début de ce XXIéme siècle où on assiste au développement de techniques de guerres utilisant des armes très nocives.

Au Tchad, il est difficile voire impossible de donner avec exactitude le nombre d'enfants impliqués dans les conflits armés. Cependant, il faut noter que le gouvernement a reconnu, pour la première fois en 2006 lors de la bataille d'avril, l'existence d'enfants soldats au sein de son armée80(*).

Cette reconnaissance a permis la conclusion d'un accord entre le gouvernement et l'Unicef Tchad, le 9 mai 2006, pour la réinsertion sociale de ces enfants soldats. L'accord avançait le nombre de 400 enfants.

La comptabilisation est difficile pour plusieurs raisons :

- D'abord, le recrutement de ces enfants n'obéit à un aucun processus formel puisqu'il est illégal. La logique des mouvements de rebellions tchadiens relève souvent de considérations tribales, régionales, ou religieuses. Les membres de la famille sont prêts à envoyer les enfants combattre afin de soutenir la cause qu'ils entendent défendre .Il est, en outre, difficile d'accéder aux entités armées qui les utilisent en période de conflit et a fortiori d'enquêter sur eux. Dans beaucoup de régions du pays, le service d'état civil ne fonctionne pas normalement ou n'existe pas. Il est donc très difficile de connaître l'âge de ces enfants.

- Enfin, il s'agit d'un enjeu politique pour les groupes armés : un groupe aurait toujours tendance à annoncer un effectif inférieur à la réalité pour ne pas être mis au ban par les Institutions Internationales, ou supérieur pour être en position de force au moment des négociations.

La défense de la patrie et de l'intégrité du territoire national face à une agression extérieure est un devoir pour tout citoyen aux termes de l'alinéa 1er de l'article 51 de la Constitution tchadienne. C'est ce qui justifie l'enrôlement des enfants dans l'armée. Or, cette hypothèse est à exclure car les conflits sont tchado-tchadien et opposent le plus souvent un groupe de dissidents au pouvoir central. Dès lors, c'est ailleurs qu'il convient de déceler les raisons de la présence des enfants au combat.

En effet, la présence des enfants soldats au Tchad trouverait sa justification dans l'existence endémique de la rébellion, porte ouverte à l'intensification du phénomène.

Ce phénomène des « enfants soldats » a de beaux jours devant lui tant que persisteront les conflits. Les enfants sont devenus des chaires à canon, dépouillés de toutes vie car privés pour la plupart de leur droit à l'éducation, à la santé et menant une vie misérable. Cette situation subsistera tant que les valeurs coutumières continueront à soutenir de telles pratiques.

* 74 MONTESSORI, M. : La formation de l'homme cité par BRISSET op. cit. p.10

* 75 Lire NDEMBI, L D. : Le travail des enfants en Afrique subsaharienne, Paris, L'Harmattan, 2006.

* 76 FALISE, T, cité par CHAPLEAU, P., Enfants-soldats. Victimes ou criminels de guerre ? Monaco, Rocher, 2007, p.7

* 77 PRINCIPES DU CAP DE 1997.

* 78 Rapport de l'ONU sur les enfants soldats 2007. Consultable sur le site :www.un.org/french/ecosocdev/geninfo/afric/vol21

* 79 Pour un aperçu de la gravité de la question lire HONWANA, A « Innocents et coupable. Les enfants soldats comme acteurs tactique »in Politique Africaine N°80pp58-78 ou le roman fiction KOUROUMA, A., Allah n'est pas obligé, Paris, Seuil, 2000 ; ou visionner « Blood diamant » ou « Ezra » de Newton Aduaka.

* 80 cf. BEGUY R, « les enfants soldats. Le phénomène persiste » in Tchad et Culture, N°258/2007.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon