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L'impact du partenariat Chine-Afrique sur la réalisation des droits économiques et sociaux au Tchad

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par Aime MBAINDIGUIM GUEMDJE
Université Catholique d'Afrique Centrale, institut catholique de Yaounde - Master 2 2008
  

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DEUXIEME PARTIE :

EVALUATION DU PARTENARIAT SINO-TCHADIEN : LIMITES ET PERSPECTIVES

L'offensive économique et stratégique lancée par la Chine en Afrique à travers les accords de partenariat multilatéral et bilatéral est sans doute une opportunité pour les pays africains de relancer leur croissance socio-économique dans la mesure où Pékin ne lésine pas sur les moyens financiers pour les investissements dans les projets sociaux. En effet, la République populaire de Chine, dans son partenariat bilatéral avec le Tchad, contribue à la réalisation des droits économiques et sociaux, notamment le droit à la santé au Tchad.

La contribution de la coopération sino-tchadienne à la réalisation du droit à la santé se mesure à travers l'édification des infrastructures sanitaires, la dotation de celles-ci des appareils médicaux pour une meilleure prestation au profit de la population tchadienne. Toujours à l'actif de ce partenariat entre la République populaire de Chine et le Tchad, il convient d'ajouter au déploiement de la Mission médicale chinoise au Tchad, le volet formationnel du personnel médical tchadien.

Ainsi, au regard des réalisations effectuées, on est en droit d'affirmer que le partenariat Chine-Tchad exerce un impact positif sur a réalisation des droits économiques et sociaux, notamment le droit à la santé au Tchad, toutefois, il n'en demeure pas moins qu'il a été plombé par quelques pesanteurs majeures (Chapitre troisième) tant au niveau bilatéral que national. C'est alors que l'essai de prospective pour le renforcement du partenariat sino-tchadien (Chapitre quatrième) se présente ici comme une phase non négligeable dans l'analyse de l'impact du partenariat Chine-Afrique sur la réalisation des droits économiques et sociaux au Tchad.

CHAPITRE III : LES PESANTEURS MAJEURES DU PARTENARIAT SINO-TCHADIEN SUR LA REALISATION DU DROIT A LA SANTE

Le partenariat Chine-Tchad dans le cadre d'un partenariat global Chine-Afrique a fait l'objet de beaucoup de critiques exacerbées aussi bien par les médias occidentaux que par ceux d'Afrique. Après avoir montré son impact positif ou mieux sa contribution à la réalisation des droits économiques et sociaux, particulièrement le droit à la santé au Tchad, nous nous attèlerons à souligner dans cette partie évaluative de notre travail ses limites ou faiblesses. Il s'agira pour nous de la présentation des pesanteurs majeures qui minent son évolution.

D'après notre analyse, les pesanteurs majeures du partenariat Chine-Afrique en général et Chine-Tchad en particulier sur la réalisation des droits économiques et sociaux, notamment le droit à la santé au Tchad se situent à un double niveau. Il y a, d'une part, les facteurs ayant exercé une action décisive sur le rétablissement de ce partenariat (Section I), et d'autre part, ce que nous appèlerons les pesanteurs internes au gouvernement tchadien lui-même de saisir cette opportunité du partenariat pour l'effectivité du droit à la santé en faveur des populations tchadiennes (Section II).

SECTION I : LES DETERMINANTS DU PARTENARIAT ATTRACTIF POUR LE TCHAD

Ce que nous appelons les déterminants du partenariat pour le Tchad peut être entendu ici comme les facteurs majeurs ayant exercé une action décisive sur le « Coeur de l'Afrique »57(*) à conclure ce partenariat avec l'Empire du Milieu. Ces déterminants sont entre autres l'absence des conditionnalités droits de l'homme (Paragraphe I) et les ambitions inavouées de la Chine comme fonction latente du partenariat stratégique chinois (Paragraphe II).

Paragraphe I : Absence des conditionnalités droits de l'homme

Le partenariat Chine-Tchad, à l'instar de celui établi avec beaucoup d'autres pays du continent africain, se passe dans une absence des conditionnalités des droits de l'homme. Cette nouvelle façon de faire de la Chine, contraire aux pays occidentaux et aux institutions internationales telles que la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI) qui soumettent leur aide au développement aux pays africains à des réformes politiques et économiques, serait perçue ici comme une caution aux violations des droits de l'homme perpétrées par les partenaires africains (A) et, surtout, la non-ingérence politique prônée par la Chine serait considérée comme une faible protection des droits de l'homme (B).

A- Absence des conditionnalités droits économiques et sociaux : caution de violation des droits de l'homme ?

La République populaire de Chine, contrairement aux bailleurs de fonds occidentaux qui n'hésitent pas à imposer le respect des critères de bonne gouvernance et des droits de l'homme, et notamment des droits économiques et sociaux au Tchad comme préalable à l'aide au développement, propose aux pays avec lesquels elle établit des relations de partenariat une assistance économique multiforme sans contrepartie et assortie d'aucune conditionnalité. Selon les propos de l'ambassadeur et plénipotentiaire de la République populaire de Chine accrédité auprès du Tchad, Son Excellence Wang YINGWU, lors de la commémoration du 58è anniversaire de la fondation de la RPC, « la Chine a accordé au Tchad plusieurs aides sans contrepartie, elle lui a annulé toutes ses dettes gouvernementales, elle a mis un tarif zéro pour l'importation de 442 produits tchadiens, elle a rétabli la mission médicale et la mission agricole, elle a octroyé des bourses d'études, des formations techniques à court et moyen terme, des dons de divers matériels et équipements et des aides humanitaires »58(*).

Auprès des pays africains, la RPC met en avant son propre modèle de développement fondé sur un découplage voulu entre développement économique et réformes politiques dans une stratégie de survie des régimes autoritaires. Il s'agit pour l'Empire du Milieu de développer les échanges, en multipliant les visites de haut niveau qui soulignent l'importance de l'Afrique, d'accroître l'aide sans conditionnalité politique, de pousser la communauté internationale à augmenter son soutien, et de défendre le rôle de l'Afrique sur la scène internationale.

Cette stratégie d'absence des conditionnalités droits de l'homme pratiquée par la RPC semble recevoir un écho favorable auprès des dictateurs africains, habitués au tripatouillage des urnes, et au non-respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, il faut dire que cette stratégie, très bénéfique aux yeux des chefs d'Etats et de gouvernements africains, pourrait constituer un réel danger pour les populations, en ce sens qu'elle se présente comme une caution tacite des violations massives desdits droits dont les peuples sont souvent victimes. Ceci est d'autant plus que le respect des droits économiques et sociaux, et surtout leur réalisation est une exigence fondamentale pour mener une existence décente, et de l'autre, elle se pose comme un principe fondamental dans les relations internationales et auquel aucun Etat ne saurait déroger59(*).

Au regard de l'importance considérable que présentent ces droits dans la réalisation d'une existence décente, l'absence de promotion ou de la mise en application de ces droits dans la coopération sino-tchadienne est une pesanteur majeure dans la mesure où la lutte contre la pauvreté et la réalisation des droits économiques et sociaux sont indissociables, justement en raison du principe de l'indivisibilité et de l'indissociabilité des droits de l'homme. Telle est aussi la position de Candice RAYMOND qui affirme que « Lutte pour les droits de l'homme et lutte contre la pauvreté sont donc indissociables »60(*). Les droits économiques et sociaux, poursuit cet auteur, constituent des créances de l'individu sur un ensemble de dispositifs sociaux que l'Etat, les instances internationales, les partenaires internationaux, ainsi que d'autres acteurs non gouvernementaux ont pour devoir d'instaurer61(*).

Pour le Premier Ministre chinois, Wen JIABAO, lors de sa visite à Brazzaville, la capitale congolaise, visite effectuée le 19 juin 2006 sur l'invitation du Président congolais Dénis SASSOU NGUESSO, l'objectif de ce nouveau partenariat stratégique sino-africain est clairement défini : « Notre objectif dans cette coopération avec l'Afrique est de renforcer la capacité de l'Afrique à asseoir son développement autonome. Dans la coopération avec l'Afrique, la Chine ne cherche pas des intérêts égoïstes. Nous sommes attachés aux deux principes : l'égalité ( les avantages réciproques) et la non-ingérence dans les affaires de l'Afrique »62(*).

Cependant, il y a de multiples problèmes dans le partenariat sino-africain, et particulièrement sino-tchadien. La Chine en tant que partenaire économique et commercial du Tchad évite les notions occidentales de libéralisation politique, de réforme économique. Cette approche professe une adhésion stricte à un système d'État westphalien traditionnel où les politiques internes d'un État n'ont pas de limites, ce que la Chine appellerait une politique de non-intervention. Ces éléments combinés créent un système qui renforcerait les faiblesses de l'Afrique, notamment du Tchad : corruption, violations des droits de la personne et dictature politique.

Bien que le consensus de Beijing soit célébré par plusieurs, cette absence des conditionnalités droits économiques et sociaux63(*) est à l'antithèse du développement des pays africains supporté par Pékin, car elle ignore certains des fondements de la croissance équitable et stable et ipso facto cautionne la corruption, le régime autoritaire64(*), les violations massives des droits de l'homme. « La Chine ignore les droits de la personne et des enjeux de bonne gouvernance pour acheter de l'influence ». Par conséquent, parmi ses clients, Beijing favorise et incite ces États africains qui préservent et perpétuent le déséquilibre évident de ce continent et sa croissance économique.

L'Afrique est décrite par Transparency International comme le continent le plus corrompu au monde. L'utilisation de la fonction officielle pour des bénéfices privés est banale dans les pays comme le Tchad où la Chine est liée par des accords de partenariat. Beaucoup de revenus gagnés de la vente du pétrole ou d'autres matières premières ne génèrent pas de bénéfices pour le développement escompté. Il est plus courant de constater des anecdotes qui prouvent que les finances nationales sont utilisées dans des projets somptueux des fonctionnaires d'État65(*).

La capacité de l'État tchadien et son efficacité demeurent faibles ou inexistantes. Par conséquent, la gestion financière est tellement déficiente malgré la volonté affichée de la Chine et les sommes d'argent faramineuses générées par le partenariat sino-tchadien. Plusieurs habitants du pays ne profitent pas toujours des retombées de ce partenariat dit mutuellement avantageux. Ce qui fait dire à un de nos enquêtés lors de nos recherches sur le terrain que « le partenariat sino-tchadien présente des potentialités énormes pour la réalisation des droits économiques et sociaux au Tchad, mais en attendant les réalisations concrètes de plusieurs projets sociaux pour les populations, il est encore dans les bonnes intentions »66(*). Ainsi, cette absence de conditionnalités droits économiques et sociaux, perçue ici comme une caution tacite des violations des droits de l'homme de la part de la Chine doublée d'une politique de non-ingérence, ne serait-elle pas perçue tout simplement comme une indifférence à l'égard des droits humains ou une faible protection des droits de l'homme?

* 57 Le Tchad de par sa situation géographique est présenté comme le « Coeur de l'Afrique ». Lire à cet effet, Béyem RONE, « Sans laïcité, le développement est-il possible au Tchad ?», in Tchad, quarante ans d'indépendance : bilan et perspectives de la gouvernance e du développement. Actes du colloque de Ndjaména 25 au 28 février 2002, Ndjaména, CEFOD, p. 58.

* 58 Cf. « Le 58è anniversaire de la République populaire de Chine au bord du fleuve Chari », in http://www.primature-tchad.org/?2007/10/02/598-le-58eme-anniversaire-de-la-republique-populaire-de-chine-au-bord-du-fleuve-chari, op. cit.

* 59 Cf. M.-N. CHOMTANG FONKOU, Les enjeux géopolitiques et géoéconomiques de la nouvelle politique africaine de la Chine : le cas du Golfe de Guinée, Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées (D.E.S.S.) en Relations Internationales, option Diplomatie, Yaoundé, IRIC, 2007, p. 78.

* 60 C. RAYMOND, « Droits pour donner aux individus les moyens de lutte contre la pauvreté », in http://www.hcci.gouv.fr/notes_lecture.html (consulté le 14.03.2008).

* 61 Idem.

* 62 Cf. « Le Premier Ministre Wen JIABAO arrive à Brazzaville et commence sa visite officielle en République du Congo », in http://www.fmprc.gov.cn/fra/zxxx/t259131.htm (consulté le 09.04.2008).

* 63 M.-N. CHOMTANG FONKOU, Les enjeux géopolitiques et géoéconomiques de la nouvelle politique africaine de la Chine : le cas du Golfe de Guinée, op. cit., p. 80.

* 64 A ce titre, on peut consulter avec grand intérêt l'ouvrage R. BUIJTENHUIJS, Transition et élections au Tchad, 1993-1997. Restauration autoritaire et recomposition politique, Paris, Karthala et ASC, 1998. Dans une perspective comparative des élections s'étant déroulées au Congo de Sassou et du Tchad, l'auteur observe que les résultats des élections organisées dans ce dernier pays entre 1993-1997 ne reflètent pas les intentions réelles des électeurs : « Au Congo, dit-il, les élections présidentielles se déroulées dans la transparence et l'on peut donc se servir sans restriction des résultats pour mettre en lumière. Au Tchad, ce n'était pas le cas, (...) car les résultats ne reflètent pas nécessairement les intentions réelles des électeurs ». Ainsi, en faisant le bilan de son analyse, l'auteur parvient à une conclusion selon laquelle le processus de démocratisation au Tchad est ce que J. F. BAYART, appelle la « restauration autoritaire », en ce sens que les dirigeants en place ont adopté les nouvelles règles en continuant selon les modalités du passé (du régime de Hissein HABRE) derrière la façade de démocratie multipartite. Cf pp. 309-349.

* 65 A.-C. POIRSON, « Une manne financière qui fait cruellement défaut. Où est passé l'argent du pétrole tchadien ? », op. cit.,

* 66 Entretien réalisé auprès d'une haute personnalité de l'Ambassade du Tchad en Chine lors de notre séjour à Ndjaména, notamment le 23.07.2007.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery