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Stratégies d'adaptation des paysans au changement climatique dans la sous-préfecture de Prikro en Côte d'Ivoire

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par Kouadio Jean Emmanuel YAO
Université de Bouaké en Côte d'Ivoire - Maà®trise 2009
  

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CHAPITRE II : Description des pratiques agricoles.

I. Les étapes du système de production.

On entend par système de production agricole, appelé aussi système d'exploitation agricole, l'ensemble des moyens interdépendants mis en oeuvre par l'agriculteur pour produire. Il semble constituer le centre d'une série de notions regroupées sur le terme générique système agricole.

Les moyens habituellement mobilisés sont : la terre, les instruments aratoires1(*), les machines, la force de travail et les végétaux et /ou animaux. Ramené au niveau de la parcelle, l'ensemble susdit forme le système de culture. Celui-ci est un sous-ensemble du système de production, défini pour une surface de terrain traitée de manière homogène par les cultures et leur ordre de succession et itinéraires techniques.

1.1. La préparation du sol.

La préparation du sol est la première étape du système de production. Elle commence juste après la récolte des ignames tardives. Elle renferme plusieurs composantes à commencer par le défrisage.

1.1.1. Le défrichage.

Il est la première étape dans la préparation du sol. Tout part du défrichement d'une parcelle de forêt pour le champ. Lorsque la végétation est arborée ou arbustive, son élimination est quasi toujours partielle, laissant en place des éléments susceptibles de servir de tuteurs. Ce type d'élimination concerne principalement les champs d'igname. Ce temps où les paysans se débarrassent de la forêt est appelé bo sôlê nu. Le premier jour, on défriche deux ou trois mètre carré de forêt. On y place un signe pour indiquer son intention de créer à cet endroit un champ. Autrefois, l'on parlait aux génies qui habitent les lieux pour demander leur amitié et obtenir leurs faveurs. L'on prenait aussi l'engagement de partager avec eux ce qui va sortir de ce champ. Les différents champs dans la Sous-préfecture se font pratiquement de la même manière.

Pour le défrisage des champs d'igname, les arbres sont généralement tués en allumant un feu autour de leurs collets, restent sur pieds pour servir de tuteurs. Ils fournissent du bois de chauffe après la récolte.

Pour les champs de riz, la forêt utilisée est plus ou moins arborée. Tous les arbres sont éliminés permettant d'avoir une surface plane.

Pour les champs de maïs et les légumes, ils se font en association avec les champs d'igname et de riz.

1.1.2. Le brûlis.

Caractéristique de l'agriculture itinérante, partout où elle est pratiquée dans le monde, le brûlis permet à l'agriculteur de se débarrasser d'une masse végétale le plus souvent très encombrante. Il est aussi perçu par les paysans comme pourvoyeur de cendres sans lesquelles leurs cultures ne peuvent produire convenablement. Le passage du feu sur la parcelle permet de débarrasser cette dernière des herbes qui se réinstallent au cours de la période séparant le début du défrisage de l'opération de semis. Ce moment est appelé ngbê dilê nu.

Du point de vue agronomique, l'effet du brûlis sur les rendements de différentes cultures ne semble pas avoir été systématiquement établi. Son influence semble dépendre du type écologie de la nature de la jachère défriché et de l'espèce végétale cultivée. Dans le cas des jachères forestières, la calcination sur place des abattus résulte en une formation de tâches de stérilité pour la plupart des cultures annuelles. Quant au simple brûlage de la biomasse herbacée, il semble résulter en une évolution apparemment favorable du statut chimique du sol. Cette pratique de l'usage du feu produit souvent les feux de brousse. Le brûlage des champs d'igname, de riz, de maïs se fait deux semaines à un mois après le défrisage Selon le degré de séchage des herbes. Pour brûler les champs, les paysans utilisent les palmes sèches des palmiers. Ils attisent le feu autour du champ afin de limiter la possibilité d'un feu de brousse. Le choix de la période de brûlis dépend de la position du soleil et le degré de chaleur de la journée. La période (noswa nu) est propice au brûlis d'un champ. Le brûlis se fait avant ou juste pendant les premières pluies.

1.2. Le buttage ou le semis.

En région Anoh, l'igname est la principale culture. Les variétés cultivées sont le kponan, le gnan, le sopère, le florido, le klêglè, le tabah, le koffikan. Depuis bien des années, la manière de faire les buttes se perpétue de génération en génération. Une parcelle bien brûlée permettra aux paysans de faire de bonnes buttes. Entre le brûlis et le buttage une période intermédiaire s'installe. C'est une période où les paysans achèvent le brûlis en regroupant les bouts de bois, les buissons non brûlés sur la parcelle. Ce moment est appelé kofié bolê nu. L'édification des buttes est toujours précédée du ratissage de végétaux grossiers. C'est un travail typiquement féminin. Car comme la femme balaie au village, elle est habileté à le faire aussi au champ. Même si celle-ci sera absente le jour du buttage, elle se doit au préalable de faire ce travail. Le houage du socle sur lequel doit être édifié la butte est une préoccupation indispensable lorsqu'elle est omise soit par négligence soit par expérience, les boutures ou semences ainsi que les jeunes tubercules sont souvent exposés aux risques de dégâts d'iules et termites.

La butte édifiée est le plus souvent coiffée d'un coussinet de paille destiné à maintenir la fraicheur et à canaliser les eaux de pluies à l'intérieur de la coupole.

Le volume des buttes est très variable. Il dépend de la densité de la plantation recherchée, qui elle-même dépend avant tout des objectifs du producteur. La grosseur de la butte favorise celles des tubercules ainsi que la précocité de la production. Selon les paysans, la production d'un champ dépend en général de la durée du buttage de ce champ. Car lorsque le buttage du champ s'est fait dans une période courte ou même en seul jour, il est susceptible d'avoir une bonne production. Les buttes peuvent avoir 20 à 45 centimètre de hauteur et 1,2 à 1,5 centimètre de diamètre. L'utilisation des buttes de grande taille (0,8-1 mètre de hauteur) favorise le développement des tubercules mais, les gros tubercules du fait de leur teneur en eau élevé se conservent difficilement. De même, la confection de ces grandes buttes requiert plus de travail et de moyens. Les semences ou les boutures sont des tubercules entier ou fragments de tubercules. Ils sont faits durant ou après le buttage. Autrefois réservé aux hommes, la confection des boutures se fait aussi aujourd'hui par les femmes. La raison est que le phénomène monoparental existe bien dans ce village. La femme se retrouve seule à élever ses enfants, soit par faute de décès de son mari, soit par faute de polygynie. Après la création des fragments, une ou deux boutures sont placées sur chaque butte. Cette partie du travail est faite par les enfants s'il y en a. Ainsi, la plantation se fait en enfonçant à la main la semence ou bouture à une vingtaine de centimètre à l'intérieur de la butte en veillant à ce que la zone munie de peau soit de préférence verticale ou légèrement penchée. Cette position facilite la germination. La surface de coupure du morceau de tubercule est d'abord exposée à l'air libre au sommet de la butte avant sa mise en terre.

Pour le riz, le maïs et l'arachide, la mise ne terre se fait juste après le brûlis. Les trous pour le riz et l'arachide ne doivent pas être trop espacés en raison de 10 à 15 centimètres. Le nombre de grains de riz varie d'une variété à l'autre. Par contre, l'arachide et le maïs nécessite un nombre de grain limité de trois à quatre par trou. Le maïs comme les autres cultures vivrières sont espacés par plant soit 1 à 1,5 mètres de rayons. Ces cultures sont semées à plat directement après le défrichage et le brûlis.

1.3. L'entretien des champs.

Les activités d'entretien comportent le sarclage, le tuteurage et la pulvérisation.

1.3.1. Le sarclage.

Le sarclage ou le désherbage est une période où les paysans se débarrassent des mauvaises herbes dans les champs. Il se fait en fonction du type de végétation du champ. En générale, il se fait deux ou trois fois selon le paysan et le type de sol utilisé. Pour les champs d'igname, les herbes coupées sont mises autour des plants afin de conserver l'humidité et de l'eau de pluie sur les buttes. Dans les champs de riz et autre, les herbes sont entassées par endroit sans être brûlées. Car le feu peut causer la mort des plants. Le premier sarclage nécessite d'énormes efforts et doit être fait avec plus de soins. Il permet au champ d'avoir la force à travers la bonne santé des plants. La liberté donnée à ceux-ci leur donne de la force pour mieux grandir et avoir de l'avantage sur les mauvaises herbes à l'avenir.

1.3.2. Le tuteurage.

En pays Akan et de surcroit baoulé, l'igname est la principale culture. Dans l'échelle des valeurs esthétiques gustative et culinaire, l'igname tient de très loin la première place. Autrefois et encore aujourd'hui, en période de soudure, même s'il y a du manioc, du riz ou du maïs, on dit c'est la famine (awê dâ). Cette expression sert même à désigner l'époque qui précède la nouvelle récolte d'ignames lorsque celle de la dernière récolte a été consommée. C'est ainsi, qu'on dira awê n a kpê. Mais aujourd'hui, en ces périodes, aucune alimentation n'est prisée au détriment de l'autre.

Le tuteurage concerne généralement la culture de l'igname. A part quelques légumes à tiges longue, le riz, le maïs n'ont besoin de tuteur. Selon les paysans, l'expérience a montré que les feuilles des variétés précoces meurent beaucoup plutôt si elles ne sont pas supportées par des tuteurs, ce qui entraine une baisse des rendements. Cette opération est laborieuse et onéreuse. La recherche de tuteurs étant une opération très contraignante. Il s'est généralisé une pratique consistant à effectuer un seul support à un nombre de buttes variant de quatre à huit. La recherche de bois dans les jachères constitue un cycle qui ne peut se refermer. Chaque année, les paysans répètent les mêmes habitudes. Les bois utilisés sont coupés à une hauteur de trois à quatre mètres avec des fourches. Les bois fourchés sont accrochés les uns aux autres en formant une sorte de pyramide entre les buttes. Les plants d'igname sont accrochés sur cette sorte de pyramide. Aussi, souvent les paysans creusent le sol et plantent des bois pour des plants d'igname ayant poussé de longue tige. Les plants d'igname sont attachés avec des cordes naturelles tissées à partir d'écorces de quelque arbre.

1.3.3. La pulvérisation et /ou la fertilisation.

L'igname est cultivée pour ses tubercules riches en énergie. Elle est adaptée aux sols assez fertiles et est compatible, avec l'inter-culture des légumineuses. Un sol bien drainé et riche est le plus souvent favorable. L'igname a besoin d'un climat chaud et humide. Cependant, la plante peut résister à des sécheresses très importantes. Lorsque le sol s'appauvrit, il faut un apport de matières minérales et organiques sous forme d'engrais chimiques ou organiques. Mais les paysans n'utilisent aucun engrais. Seule la fertilité naturelle du sol permet à l'igname et autres cultures de donner des fruits. Aujourd'hui, les paysans utilisent des produits phytosanitaires servant prioritairement à brûler les adventices. Pour l'igname, ces produits ne sont pas beaucoup utilisés.

Ils utilisent plus les intrants dans la riziculture. Elle est celle qui renforce plus d'adventices. Les adventices ou mauvaises herbes sont des plantes qui poussent dans un milieu où l'homme et plus particulièrement l'agriculteur ne l'a pas souhaité. La connaissance des adventices peut être basée sur leur distribution écologique sur le type de cultures auxquelles elles sont le plus inféodées.

Ainsi, pour lutter contre celles-ci, les paysans utilisent des phytosanitaires ayant pour fonction de neutraliser leurs croissance. Cette stratégie provoque des souvenirs amers du fait de la faible formation des paysans au niveau du dosage des produits.

1.4. La récolte.

La récolte des différentes cultures se fait en fonction du calendrier cultural cité plus haut. Ce moment est appelé duo tulê nu.

Pour l'igname, elle a lieu huit à dix mois après la semis. Elle intervient lorsque la partie aérienne jaunit et se dessèche. Les petits tubercules sont remis dans le sol et constitueront des semences pour la prochaine campagne. La récolte se fait généralement au moyen de bâtons, de plantoirs, de machettes, de dabas ou de houes avec lesquelles on ouvre les buttes en prenant soin de ne pas blesser les tubercules pour des raisons sanitaires et commerciales. Le déterrement est beaucoup délicat avec la première récolte des ignames précoces. Les premiers fruits des ignames précoces sont données aux ancêtres et constitue une fête. C'est la fête des ignames chez les Akan. Après ce sacrifice, tout le monde a droit d'en consommer. A la veille de la fête, le tam-tam parleur, klin gbli, annonce la nouvelle à tout le village. Le chef de terre offre un canari de vin de palme ou une bouteille de vin rouge au tambourineur et il verse lui-même de la boisson en invoquant Dieu, les génies des forêts. Les ancêtres sont invités à venir manger le lendemain le repas qu'il va leur offrir. Il présente ensuite les victuailles et les animaux à immoler (oeuf, poulets, cabris, moutons). Le jour de la fête, le chef de terre goûte d'abord le repas à offrir, puis invoque Dieu, les mânes des ancêtres, les génies des forêts. Il appelle leur bénédiction sur la population. L'offrande est constituée d'une boule de foufou blanc, d'une boule de foufou rouge, de jaune et de blanc de l'oeuf, de poissons, de foie, de coeur, des pattes et des parties blanches et rouge des animaux immolés. Après quoi l'autorisation est donnée à la population de manger leurs ignames. Cette pratique était respectée autrefois. Mais de nos jours ; certains paysans commencent à manger leurs ignames avant la cérémonie du sacrifice.

Beaucoup d'agriculteurs émettent des sentiments d'amertume quant aux récoltes récentes. Dans les années 90 les récoltes étaient encore bonnes. Des ignames pouvaient avoir une taille d'un mètre avec un diamètre de 25 centimètres. Les variétés à seule récoltes appelées tardives ont un rendement moins meilleur que les précoces. Pour preuve de manque de pluie, elles ne sont pas mises en terre dans les périodes indiquées. Et ce manque joue sur la croissance de celles-ci.

La récolte du riz ne nécessite pas une cérémonie particulière. Aujourd'hui, cette culture est faite dans le but de soutenir le manque d'igname en prélude et la scolarité de la progéniture en second temps. L'igname précoce ne donne pas bien et celle tardive se récolte vers Décembre. Alors que le riz se récolte généralement à partir de Août jusqu'à Octobre. C'est un moment où il n'y a plus d'igname et la rentrée débute.

Exécutée habituellement à l'aide d'un couteau, la récolte du riz pluvial est une opération des opérations les plus contraignantes. Elle fait le plus souvent intervenir de la main d'oeuvre extérieure, soit sous forme d'entraide soit sous forme de prestation rémunérée. Ce travail est fait par les femmes et les enfants. Ceux-ci se font en générale, remettre un bottillon de riz pour trois récoltés.

La récolte du maïs commence au stade laiteux pour l'auto consommation et la vente des épis frais. Le maïs frais soutient la faim en attente de la récolte du riz. Ces deux cultures se font en associations. La récolte se déroule au fur et à mesure jusqu'à ce que les grains soient durs.

L'opération de la récolte de l'arachide est une combinaison d'arrachage et d'extraction à, la daba, selon l'état de dureté du sol. La récolte dépend de la maturité des grains. Elle se reconnaît au dessèchement de la partie aérienne et à la teinte brumât de l'intérieur des coques.

* 1 Les instruments aratoires : dabas, râteaux, houes

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius