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VIH/sida: défi au développement de l'Afrique. Une étude de l'impact économique et social de la pandémie au Rwanda

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par Michel Segatagara KAMANZI
Université pontificale grégorienne - Licence en sciences sociales 2003
  

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2.5 Le Produit Intérieur Brut

Ce point sur le Produit Intérieur Brut veut être une synthèse de cette partie macroéconomique et montrer la complexité qui existe pour évaluer l'impact macroéconomique de l'épidémie du VIH/SIDA. Nous sommes partis de l'équation Keynésienne PNB = C + I + G + NX, et nous avons développé les différents éléments qui la composent. Voyons maintenant l'autre partie de l'équation, la somme des différentes composantes de la production nationale, le PNB, mieux le PIB. En effet, ici au lieu du PNB qui apparaît dans l'équation, nous avons préféré son équivalent, le PIB. Ce dernier nous semble plus adapté à la réalité de l'économie rwandaise car il mesure la production réalisée par les facteurs de production localisés dans le pays, quels que soient les propriétaires149. Vu que le PNB mesure plutôt la production réalisée par les facteurs de production nationaux d'un pays (internes et externes) et qu'il exclut la production locale provenant des facteurs de production étrangers, et vu que le Rwanda ne reçoit pas des revenus significatifs de ses résidants à l'étranger, du moins ils sont difficiles à estimer, le PIB nous semble donc l'indicateur plus adapté pour mesurer les performances de l'économie nationale ; c'est d'ailleurs aussi celui que la comptabilité nationale préfère.

PIB (réel) du Rwanda et ses composantes (en millions de Frw constants 1995) 150

Années

1998

1999

2000

 
 
 

(est.)

148 Cf. A. GINORI, «Veto USA sui farmaci anti-AIDS. No agli sconti per i paesi poveri: Nuova apartheid», in La Repubblica, 22 dicembre 2002, pp. 14-15.

149 Cf. S.FISCHER, R. DORNBUSCH, R. SCHMALENSEE, Economia, HOEPLI, Milano, 1992, p. 773.

150 Cf. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Le Rwanda en Chiffres, Edition 2001, p. 35.

Consommation privée (C)

463,559

474,460

467,661

Investissement (I)

70,288

80,539

83,799

Consommation publique (G)

40,870

43,773

39,604

Exportations nets (NX)

-96,496

-92,627

-54,689

Total Produit Intérieur Brut

(PIB)

478,221

506,145

536,904

Tableau élaboré à partir des données statistiques du Ministère des Finances et de la Planification économique.

Ici, comme c'était le cas pour les composantes de l'équation Keynésienne que nous avons analysées précédemment, la corrélation négative entre le PIB et la progression de l'épidémie du VIH/SIDA n'apparaît pas sur les données disponibles. Faudrait-il alors conclure que l'épidémie du VIH/SIDA n'influence pas la production nationale et qu'elle n'a aucun impact significatif sur le bien être économique ainsi mesuré?

Au début des années 1990, certains économistes s'intéressant à l'épidémie du VIH/SIDA sont arrivés à conclure que l'épidémie n'avait pas d'impact sur l'économie dans son ensemble. Ce fut le cas de Over151 en 1992, et de Bloom et Mahal152 en 1995. Ces derniers estimèrent, à partir de leurs études macroéconomiques, que l'épidémie du VIH/SIDA ne constituait pas une menace au bien être économique. L'étude effectuée par Over, dans le cadre de la Banque Mondiale, a même affirmé que la baisse de la population causée par l'épidémie du VIH/SIDA ne constituait pas une entrave à la croissance économique des pays les plus touchés par l'épidémie. Ces derniers étant pourvus d'un surplus de main d'oeuvre, ils n'auraient pas de difficulté à remplacer les travailleurs atteints par le VIH/SIDA et, par conséquent, il n'y aurait pas de perte de productivité153. Cela pourrait-il se dire aujourd'hui pour le Botswana par exemple? Une telle affirmation a

151 M. OVER, The Macroeconomics Impact of AIDS in sub-Saharan Africa, Technical working Paper Nr.3, World Bank, Washington, 1992.

152 D.E. BLOOM ET A.S. MAHAL, Does the AIDS Epidemic Really Threaten Economic Growth ?, Working Paper 5148, National Bureau of Economic Research Inc., Cambridge MA, 1995.

153 Cf. M. OVER, The Macroeconomics Impact of AIDS in sub-Saharan Africa, Technical working Paper Nr.3, World Bank, Washington, 1992.

certainement sous-estimé les effets dévastateurs du VIH/SIDA et s'est limité à considérer des données qui ne reflètent pas toute la réalité économique et sociale. En effet, même si cela n'apparaît pas dans les statistiques macroéconomiques, la Banque Mondiale estime que sur le plan économique, « le SIDA colite chaque année à l'Afrique un point de pourcentage de croissance économique. Dans le cas des pays les plus durement touchés par l'épidémie, ce coüt avoisine les 3 ou 4 points. En l'espace d'une décennie, la

production totale de ces pays pourrait être de 35% inférieure à celle qu'elle aurait étésans le SIDA.154 ».

En ce qui concerne les données macroéconomiques disponibles, il nous faut faire quelques clarifications pour mieux comprendre la difficulté d'établir une corrélation entre le PIB et l'épidémie du VIH/SIDA. Martha Ainsworth, économiste du groupe de recherche à la Banque Mondiale, a affirmé que les statistiques standard comme le PIB par habitant sont des mauvais instruments pour mesurer l'impact du SIDA en Afrique, et que l'impact de l'épidémie a besoin d'être plutôt considéré dans le contexte plus large du bien-être humain, car le PNB par habitant ou la croissance du PIB ne considère pas la dimension perte de bien-être, et en particulier la perte de bien-être de ceux qui meurent155. Pour David Tarantola, spécialiste en matière de SIDA auprès du centre pour la santé et les droits humains de la Harvard School of Public Health, l'ampleur de l'épidémie est tellement grande aujourd'hui que les chiffres ne sont plus nécessaires pour établir des arguments en faveur des conséquences économiques de l'épidémie156. En plus de ces « arguments d'autorité » que nous venons d'évoquer, il nous faudrait aussi signaler qu'il y a des raisons proprement économiques qui empêchent d'établir une corrélation négative avec l'épidémie du VIH/SIDA. La difficulté naît d'abord du fait que la comptabilité nationale ne considère que les éléments quantitatifs de la production nationale pour mesurer le bien-être économique d'un pays sans tenir compte des activités du secteur informel (secteur important au Rwanda), des coûts sociaux résultant du processus de production (externalités), et d'autres aspects qualitatifs qui contribuent tout aussi au bien- être économique au-delà des simples revenus reçus et distribués. Le PIB comporte donc des

154 G. MUTUME, «Les dirigeants africains partent en guerre contre le SIDA», in Développement et Coopération, Juillet/Août 2001, p. 11.

155 Cf. P. WEHRWEIN, «The Economic Impact of AIDS in Africa», in Harvard AIDS review, Fall 1999/Winter 2000. Disponible sur Internet: < http://www.hsph.harvard.edu/hai/news_publications/har/fallwin_1999/fallwin99-4.html>

156 Ibid.

limites comme mesure du bien-être économique et il ne faudrait pas s'étonner qu'il soit inadéquat pour mesurer l'impact macroéconomique du VIH/SIDA qui est à la fois au niveau quantitatif et qualitatif. Abondant dans le même sens, le scientifique canadien Joseph Decosas, lors de la 11ème Conférence internationale sur le SIDA, déclara que « le manque de preuves en faveur d'un impact macroéconomique négatif du SIDA, ou même le fait de suggérer que, dans certaines conditions, le VIH puisse stimuler l'économie, ne devraient au fond surprendre personne (...) les mesures de la performance macroéconomique ne suffisent pas comme indicateurs du bien-être ou du développement d'une société. Les économies peuvent être stimulées par un grand nombre d'événements différents, dont certains sont carrément abominables, comme les guerres et les épidémies. Le fabricant de cercueils contribue autant à l'économie que le fabricant de berceaux157. »

Il est aussi intéressant de constater que même ceux qui avaient des doutes sur l'impact économique du VIH/SIDA commencent à changer d'opinion. Bloom , professeur d'économie et de démographie à la Harvard School of Public Health, qui était l'un des irréductibles dans la controverse sur l'impact macroéconomique du VIH/SIDA, est arrivé à reconnaître, notamment après un voyage effectué en Afrique du Sud (pays qui compte le plus grand nombre de personnes vivant avec le VIH/SIDA), qu'avec le VIH/SIDA, c'est toute l'économie qui est en danger158. Over, partant des estimations de la Banque Mondiale, a aussi reconnu les effets négatifs de l'épidémie du VIH/SIDA sur l'économie, notamment il estime que l'épidémie créera un retard dans l'amélioration des conditions économiques des générations futures159. Faudrait-il attendre tout ce temps pour se rendre compte des conséquences néfastes de l'épidémie ?

Nous estimons, pour notre part, un peu dans le sens de ce que faisait remarquer David Tarantola, que pour ceux qui vivent et travaillent au Rwanda, l'impact de l'épidémie du VIH/SIDA sur l'économie des individus, des familles et des communautés, est évidente. La maladie, le décès, et la perte des capacités productives dans les communautés

157 J. DECOSAS, Le VIH et le Développement, exposé en plénière dans le cadre de la 11ème Conférence internationale sur le sida, Vancouver, 1996. Disponible sur Internet : < http://www.Ccisd.org/fra/f_documents/decosas.htm>

158 Cf. P. WEHRWEIN, «The Economic Impact of AIDS in Africa», in Harvard AIDS review, Fall 1999/Winter 2000. Disponible sur Internet: < http://www.hsph.harvard.edu/hai/news_publications/har/fallwin_1999/fallwin99-4.html>

159 Ibid.

nécessitent à peine d'être appuyés par des statistiques160. Nous estimons alors qu'il ne faudra pas attendre de constater une baisse de la croissance économique au niveau du PIB, qui peut-être n'apparaîtra que à long terme, pour commencer à réagir à la menace que constitue le SIDA. Comme disait Keynes, « le long terme est un mauvais guide pour les affaires courantes. A long terme nous serons tous morts. Les économistes se fixent une tâche (...) peu utile s'ils peuvent seulement nous dire que lorsque l'orage sera passé, l'océan sera plat à nouveau. 161»

160 Ibid.

161 Cf. Citations du Dictionnaire d'Économie et de Sciences Sociales, sous la direction de C.-D. Echaudemaison, Nathan, Paris, 1998.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway