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VIH/sida: défi au développement de l'Afrique. Une étude de l'impact économique et social de la pandémie au Rwanda

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par Michel Segatagara KAMANZI
Université pontificale grégorienne - Licence en sciences sociales 2003
  

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1.2 Au niveau de la condition féminine

L'épidémie du VIH/SIDA a mis au grand jour le problème du Genre179, les inégalités sociales qui existent entre les hommes et les femmes. En effet, comme le constate Eleonora Masini, les femmes sont souvent marginalisées en termes d'emploi et de qualité de vie180 ; elles ne jouissent pas des mêmes opportunités socioéconomiques que les hommes. Au Rwanda, ces différences sont assez significatives. Par exemple, en 2002, au niveau de l'instruction, le taux d'alphabétisation des femmes était estimé à 60,2% tandis que celui des hommes est de 73,7%181. Au niveau de l'occupation, le Ministère du commerce, de l'industrie et du tourisme, rapportait, selon ses estimations de l'année 1999, que sur 24 603 employés, 2 174 étaient des femmes 182. Les femmes ont donc peu « de voix au chapitre » et, comme l'affirmait le rapport du PNUD sur le développement humain 2002, « si les femmes sont moins bien loties sous de multiples aspects du développement humain, c'est notamment parce que leur voix se fait moins entendre que celle des hommes dans les décisions qui déterminent leur existence183. »

Cependant, du côté du secteur informel, qui joue un rôle non négligeable dans l'ensemble de l'économie rwandaise, notamment à travers les activités commerciales et artisanales, les femmes sont bien représentées. Le secteur primaire, notamment avec l'agriculture, est aussi porté par les femmes. De même, au niveau des ménages, les femmes jouent un rôle de premier plan ; en effet, on estime environ que 36% des ménages rwandais sont dirigés par les femmes seules184.

Au niveau juridique, le statut de la femme rwandaise est de droit égal à celui de l'homme ; mais, au niveau social, il est en fait inférieur à celui de l'homme. « Malgré les changements introduits dans le code de la famille du Rwanda, notamment en matière de propriété, beaucoup de Rwandais se réfèrent encore à la coutume pour refuser aux femmes

179 Le terme « Genre » sera utilisé ici comme traduction littéraire du terme anglais « Gender », utilisé pour décrire les questions liées aux différents sexes, en particulier à celui des femmes. Plus spécifiquement, il se réfère aux problèmes posés par le statut et le rôle qu'occupe les femmes dans la société.

180 Cf. E.B. MASINI, « Limits to Sustainability in Sustainable and Equitable Development », in The 50th anniversary of the United Nations and the Italian contribution toward the realization of the «Earth Charter», Accademia Nazionale delle Scienze, Roma, 1998, pp. 93-94.

181 Cf. PNUD, Indicateurs du Développement Humain 2002.

182 Cf. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Le Rwanda en Chiffres, Edition 2001, p. 22.

183 PNUD, Rapport mondial sur le Développement Humain 2002, De Boeck, Bruxelles, 2002, p.23.

184 COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, p.23.

le droit de propriété sur le bétail, sur la terre et sur la gestion des fruits de leur labeur185. »

Cette situation d'inégalité flagrante est d'autant plus préoccupante qu'environ 52,3% de la population rwandaise est féminine. Cette tranche de la population, vulnérable au VIH/SIDA pour des raisons évoquées au premier chapitre, est effectivement la plus touchée par l'épidémie. A la base des problèmes de la condition féminine, se trouve certainement le statut social inférieur attribué à la femme. « Ce statut influence directement la possibilité de prise de décision dans les domaines importants comme la santé (dépistage, traitement des IST, contraception, etc.) où seulement 23% des femmes en union peuvent prendre des décisions concernant leur propre santé alors que dans 48% des cas, c'est le mari seul qui a le dernier mot. La majorité des filles célibataires (52%) voient les décisions sur leur santé prises par quelqu'un d'autres sans les consulter186.» Cette situation fait que l'épidémie du VIH/SIDA touche plus les femmes que les hommes. On peut le constater facilement en se référant au tableau des projections sur le VIH/SIDA au Rwanda reporté plus-haut et au rapport de l'ONUSIDA 2002, qui mentionnait que sur un total de 430 000 adultes vivant avec le VIH/SIDA au Rwanda, 250 000 étaient des femmes187.

Il nous faut aussi rappeler que le génocide de 1994 a constitué un facteur aggravant de l'épidémie du VIH/SIDA dans le pays et que les femmes en ont été les principales victimes. Une enquête menée par l'association des veuves du génocide (AVEGA) démontre bien cela. Cette étude, qui a été faite sur une population limitée à 1125 femmes violées pendant le génocide de 1994, a révélé que sur ces 1125 veuves testées, 70% étaient infectées du VIH/SIDA188. Sachant que des nombreuses femmes ont été violées pendant le génocide de 1994, on peut imaginer combien cette tragédie a contribué à la contamination de nombreuses d'entre elles.

185 Ibid., p. 22.

186 Ibid., p. 23.

187 Cf. ONUSIDA, Rapport sur l'épidémie mondiale de VIH/SIDA, Genève, Juillet 2002, p. 196.

188 COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, p. 42. Voir aussi l'article paru récemment sur New York Times Magazine : PETER LANDESMAN, « A woman's work », 15 septembre 2002, paru aussi sur la revue Internazionale, « Lo stupro come arma di guerra,», 13/19 dicembre 2002, pp.28-36.

Les différents éléments et données, que nous venons de voir brièvement, montrent l'importance de l'impact du VIH/SIDA sur la condition féminine et la grande vulnérabilité des femmes par rapport à cette épidémie.

Nous considérons par conséquent que le changement du cours de l'épidémie est en grande partie liée à l'importance qu'on accordera aux femmes, et aux moyens qu'on leur donnera pour prendre en main leur avenir et assurer leur protection elles-mêmes. Cela passe nécessairement, à notre avis, par le relèvement de leur niveau d'éducation et la sensibilisation des hommes aux problèmes du Genre. Nous estimons que le cadre juridique et institutionnel rwandais, qui a déjà fait beaucoup en faveur de la femme, ne suffit pas. Il faudra des actions au niveau des communautés locales grâce à la politique de décentralisation et l'implication des nombreuses associations féminines qui sont en train de devenir importantes au niveau de la société civile rwandaise. Il faudrait qu'on arrive, comme on aime dire aujourd'hui, « to empower women », pas seulement en termes de pouvoir de décision au niveau public et institutionnel, mais aussi et surtout - ce qui nous semble le plus important - en termes d'autorité et de pouvoir de décision en ce qui concerne leur propre vie et leur foyer.

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