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L'émancipation familiale face aux institutions: des pères séparés dans l'impasse

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par Catherine Azémar
Conservatoire des arts et métiers Paris - Master de recherche: sciences du travail et de la société 2009
  

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PREMIERE PARTIE : Place du père et mouvement d'égalité des sexes

Au cours de cette première partie, qui comprend les trois premiers chapitres, il va s'agir de comprendre comment la famille s'est inscrite historiquement selon la désignation du père, pour ensuite l'écarter de la sphère familiale autour d'une division sexuelle des rôles qui marque le mouvement égalitaire de la société industrielle. La problématique de l'égalité identifiée par les sociologues autour de tensions entre modernité et tradition me conduira ensuite à mon hypothèse de travail

CHAPITRE 1 La désignation paternelle dans l'histoire de la famille

À l'origine de la famille en tant qu'institution, le père représente déjà la figure marquante, inscrit historiquement comme son représentant social. L'émergence de la fonction du père en lien avec la religion, puis le pouvoir royal, marque l'institutionnalisation de la famille, qui se poursuit au fil de l'histoire avec la notion de chef de famille. Par la suite, l'évolution démocratique de la société bouleverse cette configuration, sous tendue par une volonté d'égalité des sexes. La désignation paternelle demeurant un repère dans l'histoire du droit de la famille, cette place du père appelle à définir au préalable la notion de famille et son évolution. Nous allons voir ainsi, comment est apparue cette notion, quelles sont les interprétations de son inscription sociale, pour s'attacher ensuite plus particulièrement à l'inscription du père au cours de cette évolution de la famille.

1.1. La famille, une organisation sociale qui questionne

L'appréhension de la notion même de famille apparait de façon complexe car elle recouvre plusieurs champs disciplinaires. En anthropologie, il est dit que dans toutes les sociétés, toutes les relations sociales se conçoivent sur le mode des relations de parenté. Ainsi dès cette approche on peut constater que le regard anthropologique se fixe sur la différenciation sexuelle des rôles.

Dans l'ouvrage « Anthropologie de la famille et de la parenté », Deliège, dresse l'éventail de ces points de vue d'anthropologues, sur la question de la famille (Deliège, 2005). Il est un fait, explique-t il que dans toutes les sociétés, toutes les relations sociales se conçoivent sur le mode des relations de parenté. S'il est admis que la famille nucléaire n'est pas la caractéristique d'une forme primitive de société, toutes les sociétés cependant reconnaîtraient cette triade élémentaire appelée « atome de parenté » par C.L.Strauss, et qui se présente sous des formes articulées très variées selon les sociétés. Et c'est de cette réalité universelle de l'appartenance de l'individu à deux familles nucléaires, que découleraient les systèmes de parenté. Selon les différentes théories anthropologistes présentées par Deliège, la propriété et la limitation des richesses des sociétés de « cueilleuses-chasseurs », conduisant à la division sexuelle du travail, expliquerait que la sexualité et le choix matrimonial soient les foyers de la solidarité sociale et de conflits. L'inégalité sociale et donc des sexes, naîtrait du développement des moyens de production. Certains développent des concepts de domination, d'exploitation et d'oppression des hommes sur les femmes, liés à l'esprit guerrier qu'impliquerait la chasse. Alors que d'autres parlent plutôt de rapports d'adhésion, telles les théories démontrant combien les contraintes de la production déterminent l'organisation de la parenté. La répartition sociale des individus ne serait pas alors fixée à la naissance par des règles de filiation, mais par l'adhésion volontaire de chacun à l'un ou l'autre groupe. Quoiqu'il en soit, l'institution ou l'organisation du mariage au sens d'union, existerait dans quasiment toutes les sociétés. (Deliège, 2005). Le groupe familial tire son origine du mariage, selon Lévi-Strauss. A travers les règles de l'alliance, c'est la société et son organisation qui apparaissent comme premières par rapport à l'organisation de la famille ». Mais La famille stricto sensu serait absente de l'état de nature ; elle n'apparaît qu'avec la révolution qui marque le passage à la société civile et l'institution de la propriété (décrite par Rousseau).

Le « Dictionnaire critique de la sociologie », de R. Boudon et F. Bourricaud (1994), décrit la famille comme une des institutions caractéristiques de la société humaine. Selon cette conception, elle représente le modèle de référence à partir duquel s'inscrivent les principes de la vie en société, les règles de l'organisation sociale et politique de la communauté, devenant ainsi le témoin d'un certain ordre social. Sans pour autant me semble t il représenter le socle de notre société humaine, mais plutôt caractériser l'organisation de la sphère privée en miroir de la société, la famille a toujours été un centre d'intérêt autant pour les chercheurs de toute discipline, que pour les acteurs eux-mêmes. La famille ne cesse d'interroger sociologues et anthropologues ; elle intrigue les psychanalystes, interpelle le politique et sollicite le biologiste. Les médias s'en emparent, elle serait le reflet de nos sociétés, l'indicateur de ses évolutions politiques, sociales et économiques, ou l'instigatrice de ses transformations.

Une définition précise de la famille n'est cependant pas aisée et l'appréhension même de son évolution suscite des controverses. Comme en témoignent les diverses représentations sociologiques de la réalité de la famille qui déterminent son inscription sociale dans l'histoire.

Peut-on parler de la famille, le modèle unique, ou faut il voir plusieurs familles ? Ces représentations sont sujettes à contestation à la fois chez les sociologues, et anthropologues.

Ainsi, Jack. Goody combat la thèse selon laquelle il existerait un modèle familial spécifique à l'Europe, celui de la famille nucléaire (Goody, 2001). Il s'attache à démontrer en ce sens, que la famille nucléaire n'a pas été inventée par l'Occident industrialisé ou l'Europe dite « moderne », et que les modifications des structures de la famille varient selon les conjonctures sans qu'il s'agisse d'une progression linéaire qui aurait évoluée dans le temps, d'une société traditionnelle collective à une société moderne individualiste, de progrès. Les continuités, argumente l'auteur, ont été aussi importantes que les ruptures et il n'y a pas plus une « fin de la famille » de nos jours, qu'il n'y a eu après le Moyen Age une transformation radicale de la famille due à l'avènement du capitalisme. L'enfance, ainsi que l'affection conjugale et parentale, ne seraient pas selon lui, une invention de l'Europe, mais des variantes de comportements universels.

La famille a donc connu de multiples transformations depuis l'antiquité, et d'une ampleur particulière depuis une cinquantaine d'années, en raison notamment de spectaculaires bouleversements économiques, démographiques, technologiques, sociaux et culturels. Actuellement, la question de l'existence menacée de la famille, est fréquemment mise à l'ordre du jour, face aux multiples configurations familiales possibles : davantage de couples en union libre et augmentation des divorces, couples séparés et recompositions familiales, existence de familles homoparentales. Face à ce bouleversement des familles, la naissance de l'individualisme semble toutefois avoir tenu un rôle prépondérant. Le sociologue François de Singly explique ainsi que le passage d'une société holiste à une société individualiste fait que l'individu devient la cellule de base de la société, et non plus la famille. Il correspond en même temps à la représentation sociale de l'amour d'un homme et d'une femme, au début de l'émancipation des femmes dans une société où le mariage est institué comme représentant la lignée familiale. C'est alors la naissance, dit-il, de la « crise de la famille ». La relation amoureuse devient la référence au détriment de la filiation. (De Singly, 2007). Ainsi autour des années 1960, le fait est établit que l'homme et la femme restent des individus à part entière dans le mariage. Un autre auteur, E. Roudinesco, historienne de la psychanalyse, cherche quant à elle à comprendre l'origine du désordre lié aux mutations de la famille, recomposée, monoparentale, homo parentale, ou artificiellement engendrée, en revisitant l'histoire de la famille occidentale, de l'ancienne puissance patriarcale à l'irruption du féminin (Roudinesco, 2002). Elle fait alors le constat qu'il y aurait à la fois une revendication actuelle de la famille par la société occidentale, comme le lieu par excellence de l'épanouissement individuel, et un sentiment d'angoisse que génère notre époque désorientée par la libération des moeurs, la perte d'autorité du père, face aux nouvelles configurations familiales. Elle interroge alors l'existence de la famille qui face à la perte de l'autorité du père, la maîtrise de la procréation par les femmes, et la filiation possible des homosexuels, ne serait pas pour autant, menacée.

Nous allons voir comment l'histoire de la famille ainsi que l'évolution du droit dans ce domaine s'écrit précisément avec celle de la figure du père, dessinant pour la suite les enjeux des nouvelles configurations familiales.

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