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Les Comités de Défense de la Révolution(CDR) dans la politique du Conseil National de la Révolution(CNR)de 1983 à  1987: une approche historique à  partir de la ville de Ouagadougou

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par Kakiswendépoulmdé Marcel Marie Anselme LALSAGA
Université de Ouagadougou - Maîtrise 2007
  

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111.3.4. La formation militaire, le port d'arme et la tenue CDR

La formation militaire avait pour but de conférer aux CDR des aptitudes physiques dans la défense pratique de la révolution. Chaque bureau CDR responsabilisa un militant à la sécurité et à la formation militaire. La formation militaire était faite en deux phases : le recrutement et l'instruction.

97 Le secteur 4 regroupe des quartiers comme Paspanga, Koulouba,

98 Ousmane WANGRAWA : entretien du 27 juillet 2004 à Paspanga.

99 Richard BENEGAS, 1993, Insoumissions populaires et révolution au Burkina Faso, Bordeaux, CEAN, page 26.

100 Voir le rapport des travaux de la première conférence des CDR, page 43.

101 Allusion ironique aux origines peul de Thomas SANKARA. D'après Richard BENEGAS, cette tournure en dérision pourrait être aussi une remise en cause de la politique du CNR qui avait proclamé son attachement aux paysans démunis, mais ne faisait pas beaucoup d'effort pour aider les Foulbé du Nord, ethnie originaire de Thomas SANKARA. Richard BENEGAS, 1993, op cit, page 29.

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Le recrutement représentait la porte d'entrée à la formation et consistait au choix des éléments à former militairement dont la responsabilité incombait au bureau CDR. En principe, tout prétendant ne devait pas être retenu, il fallait préalablement jouir d'une bonne moralité. Mais, par manque de critères bien établis, le recrutement qui était supposé être le point de triage avait été vicié.

En effet, il suffisait qu'un militant exprimât sa volonté de s'initier à l'art militaire pour que l'on retienne son nom. Dans les services, il était courant de voir le responsable à la sécurité dresser arbitrairement une liste des éléments à former sans les avoir consultés. Ceux-ci ne pouvaient que se soumettre « aux risques de passer pour des contre-révolutionnaires ».102

Le recrutement découlait donc du volontariat et de l'arbitraire. Ces insuffisances créèrent des conséquences néfastes, tels des accidents au cours de la formation à cause de la mauvaise santé de certaines personnes. En plus, il faut noter qu'elles avaient ouvert la porte à des individus de moralité peu recommandable, qui allaient « commettre toutes sortes d'exactions pour discréditer les structures populaires ».103

Quant à l'instruction, elle était dispensée dans les centres d'instruction des unités militaires comme le CNEC de Po, l'ETIR de Kamboinsin, le BIA de Koudougou... Elle n'avait pas une durée déterminée clairement : elle pouvait durer deux à trois semaines, voire un mois. Les matières étaient : l'idéologie, l'armement et le combat. L'idéologie revêtait un aspect civique qui devait inculquer aux formés le savoirvivre, le respect des valeurs nationales, l'esprit de sacrifice, d'abnégation et par conséquence le dévouement à la patrie.104

Cependant, les CDR avaient fait leur autocritique en reconnaissant que cette formation civique a souvent été négligée ; de ce fait, elle ne sut pas toujours constituer des garde-fous nécessaires pour limiter les égarements de certains militants formés qui une fois en tenue et une arme en main, se prirent pour des spécialistes, mimant un modèle désavoué en son temps : celui du militaire impopulaire, terroriste de son Etat.105 L'armement et le combat constituaient des matières de pratique consistant en un apprentissage du maniement des armes et du combat.

Après leur initiation à l'art militaire, les militants rejoignaient leurs comités d'origine et veillaient à la sécurité de leurs localités. Ils faisaient la patrouille la nuit venue dans le secteur. Les armes qui avaient été mises à leur disposition étaient surtout des PMC (Pistolet Mitraillette Chinois) et des kalachnikovs, avec des balles

102 CNR, SGN-CDR, 1986, Résultat des travaux de la première conférence des CDR, page 134.

103 Ibidem.

104 Idem, page 138.

105 Idem, page 139.

45 réelles. L'usage des armes n'était admis que lorsque les CDR se trouvaient dans une situation d'agression. Mais, il est ressorti que certains CDR n'honoraient pas cette disposition légale. Dans ce contexte, nous avons appris que des cas de vols, de rackets et autres formes d'exactions ont été commis. Il faut ajouter que le caractère sommaire de la formation ne permettait pas une bonne maîtrise des armes d'où des accidents. Par exemple à l'université en 1984, un étudiant avait trouvé la mort suite à un mauvais maniement d'une arme.106

Les éléments militairement formés devaient porter une tenue semblable à celle des militaires lors de leur service. Cette tenue était dotée par le SGN-CDR, mais il n'était pas rare de voir des militants se faire confectionner eux-mêmes ladite tenue. La notion de grade n'existait pas. Dans un comité donné, le premier responsable était le délégué et le responsable à la sécurité et à la formation militaire. Il n'y avait pas toujours de bons rapports entre les délégués de bureau et les responsables à la sécurité qui possédaient une force armée. C'est dire alors que la camaraderie révolutionnaire n'avait pas été chaque fois au rendez-vous dans les rapports entre militants. Ces conflits de compétences compliquaient parfois les rapports entre les CDR et les services paramilitaires et mêmes militaires, en ce sens que les premiers prirent tendance dans leur zèle à une immixtion systématique dans des domaines même qui n'étaient pas de leur ressort.107

Pourquoi malgré ces risques de déviations et d'égarements, le CNR avait-il initié et maintenu la formation militaire des CDR ?

C'est le souci d'asseoir une armée populaire, de confier la défense de la révolution au peuple qui guida le pouvoir révolutionnaire : « Les CDR [...] auront l'insigne honneur d'être comme les gardiens de notre maison nouvelle en devenant a la fois le fondement et le rempart. Ils constituent de ce point de vue la force de frappe. C'est encore eux le moteur, la coquille protectrice de notre révolution au cours de sa longue marche et qui sera inévitablement objet des attaques impérialistes diverses. C'est pourquoi il faut [...] les transformer en citadelles de l'extérieur et de l'intérieur pour que vive notre révolution nouvelle ».108

Par rapport à la prolifération des armes à feu, Achille TAPSOBA109 s'en défend en ces termes : « C'est tout a fait logique. On ne peut pas demander au peuple d'assurer sa propre défense sans lui fournir les moyens nécessaires. Avant la révolution, la défense du pays était une fonction spécialisée commise a un corps spécial qui avait le

106 Rapporté par Pierre Claver HIEN, président du comité des étudiants de 1986 à 1987.

107 Voir le rapport des travaux de la première conférence des CDR, pages 140 et 141.

108 Salia ZERBO, « Le train de la révolution en marche » in CARREFOUR AFRICAIN N° 799 du 07 octobre 1983, page 23.

109 Achille TAPSOBA a été le directeur du comité national d'organisation de la première conférence des CDR.

46 droit de détenir des armes. Mais, avec la logique de la défense populaire, ce n'était plus ce corps seulement qui pouvait détenir des armes. C'est pourquoi on trouvait des armes partout et cela était tout à fait logique ».110

Pour terminer, la formation militaire avait donné l'opportunité aux CDR de concevoir des sanctions corporelles pour tous ceux qui se démarquaient de la conduite révolutionnaire. Ces sanctions corporelles créaient une peur au niveau de la population, crainte qui avait souvent facilité la mobilisation populaire. En effet, de nombreuses personnes craignant les sanctions répondaient aux sollicitations ou aux conduites exigées par les CDR. La peur des sanctions avait été la cause d'un certain suivisme observé pendant la révolution. Entre autres nous pouvons citer :

ü le port du caporal : cette sanction consistait à faire transporter pendant un certain nombre de minutes un gros caillou sur la tête ;

ü faire le grigolo : il s'agissait de garder une position verticale sur les mains la tête en bas et les pieds en haut contre un mur. C'est une sanction qui occasionnait des vertiges ;

ü boire le whisky : on piquait le sol avec le doigt et on faisait une rotation avec le corps en vitesse ;

ü faire le crapaud : il fallait faire des bonds ou marcher en étant accroupi ;

ü genoux progressés : se déplacer sur les genoux ;

ü les tractions ou pompes ;

ü les pilories ;

ü les coups de fouet ou de matraque...

Autant de sévices corporels mis au point pour soumettre les gens. Les sanctions corporelles révélèrent le caractère brutal et violent de l'action des CDR dans leur rôle de défense de la révolution et fondèrent la stupeur de la population à leur endroit.

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Figure 7: Des militants CDR militairement formes au pas bloque lors d'un defile. Source : SIDWAYA / Archives.

La promulgation du Statut général des CDR a constitué une démarche capitale du CNR se traduisant par l'organisation des CDR comme ses acteurs principaux de la révolution. Il s'est agi d'une institutionnalisation complète des CDR comme socle du processus révolutionnaire. Avec cette implication, le devoir et le droit d'action des CDR dans tous les domaines de la vie publique étaient scellés définitivement.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore