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Les Comités de Défense de la Révolution(CDR) dans la politique du Conseil National de la Révolution(CNR)de 1983 à  1987: une approche historique à  partir de la ville de Ouagadougou

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par Kakiswendépoulmdé Marcel Marie Anselme LALSAGA
Université de Ouagadougou - Maîtrise 2007
  

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VI 2.2. Libérer la femme économiquement

Le CNR estima que l'émancipation de la femme passait obligatoirement par son indépendance économique. Or, la femme était pratiquement exclue de l'activité économique moderne et seulement 5% des femmes étaient employées dans les entreprises privées en 1983.411 Dans de nombreux secteurs de la vie professionnelle, les femmes étaient émargées par le fait des préétablis qui avançaient l'infériorité de la femme et sa nullité à produire quelque chose de positif. La situation était d'autant plus critique à cause du taux parlant de la faiblesse de la scolarisation et de l'alphabétisation qui frappait majoritairement les femmes. Bref, de façon globale, la situation économique de la femme était délétère. Pour le CNR, la responsabilité de cette précarité économique incombait aux régimes antérieurs célèbres par les systèmes d'exploitation qu'ils avaient mis en place. La nécessité de promouvoir l'indépendance économique de la femme devenait ainsi une mission exaltante pour le CNR.

Pour ce faire, le CNR ouvrit l'accès des postes politiques aux femmes. Depuis longtemps, ces responsabilités semblaient être réservées exclusivement aux hommes. Le cas le plus spectaculaire de cette ouverture fut l'entrée en force des femmes dans l'équipe gouvernementale. A partir de 1984, les femmes disposèrent désormais de portefeuilles ministériels clés, une innovation extraordinaire sans doute pour bousculer les mentalités : la gestion d'un ministère n'est pas seulement l'apanage de l'homme, la femme peut le faire aussi, et même mieux. Il s'agit alors d'une volonté manifeste de déboulonner tout un système sectariste qui selon l'entendement du CNR s'accommodait bien aux régimes capitalistes de naguère. Ainsi, à l'occasion du renouvellement du gouvernement en août 1984, trois femmes devinrent ministres : Adèle OUEDRAOGO au Budget, Rita SAWADOGO au Sport et aux Loisirs et Joséphine OUEDRAOGO à l'Essor

135 familial et à la Solidarité nationale. En 1986, le nombre des femmes dans l'équipe gouvernementale passa à cinq. Quatre femmes devinrent également hautscommissaires : Aicha TRAORE dans le Passoré, Eve SANOU dans le Sanguié, Béatrice DAMIBA dans le Bazèga et Germaine PITROIPA dans le Kouritenga.

La guerre à l'exclusivisme professionnel écartant la femme fut ainsi déclenchée et força même l'admiration du fait du caractère extraordinaire que revêtaient les actions engagées. La femme possède les mêmes aptitudes que l'homme. A titre d'exemple, cinq femmes suivirent la formation de maçon et furent engagées par l'entreprise GDEIRI, une société de construction.412 A Ouagadougou, 38 femmes, majoritairement analphabètes avaient appris à conduire des poids lourds.413

Concomitamment, les CDR créèrent des entreprises artisanales au profit de l'autosuffisance économique des femmes. Par exemple au secteur 22, l'ONG SAHELSOLIDARITE subventionna avec l'aide des CDR le montage d'une unité de fabrication de savon et de beurre de karité ; la vente de ces produits devait alimenter la caisse d'une coopérative créée par L'UFB.414 Malheureusement, les membres se partagèrent les rétributions de cette oeuvre aux dépens des fonds collectifs. Il s'ensuivit une désolidarisation des femmes du groupement, ces dernières après avoir été bien formées optèrent pour l'expérience individuelle.415

Cette banqueroute ne veut cependant pas dire que la totalité des entreprises initiées ont échoué. Des résultats satisfaisants s'en démarquent heureusement. Au secteur 30, les CDR obtinrent un moulin à mil d'une valeur de 5 millions grâce aux cotisations infra sectorielles et au financement d'une ONG dont l'exploitation généra des bénéfices que les CDR utilisèrent pour l'achat d'une décortiqueuse au prix de 350 000 F.416 Ils prévirent également la création d'un centre de métiers destiné aux femmes. Un dernier exemple d'initiative fut la création du restaurant Yidigri à Ouagadougou. Ce restaurant dont le nom (en moore) signifiait épanouissement avait été encouragé par le pouvoir. Par exemple, le mercredi 03 décembre 1986, Thomas SANKARA au sortir du conseil des ministres, avait invité son gouvernement dans ce restaurant pour prendre le repas du soir.417 De façon globale, la création des entreprises en faveur de la femme a touché tout le territoire national où existaient des CDR.

412 Ludo MARTENS, 1989, SANKARA, COMPAORE et la révolution, Paris, EPO International, page 26.

412 Ibidem.

413 Ibidem.

414 Sylvy JAGLIN, 1994, Gestion urbaine partagée à Ouagadougou : pouvoirs et périphéries, Paris, Karthala, page 338.

415 Ibidem.

416 Ludo MARTENS, 1989, op cit, page 26.

417 L'INTRUS N°0024 du 05 décembre 1986, n Vivre avec les masses ou bouffer avec les masses ? .0, page 7.

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Il reste cependant que de l'avis de certains observateurs, ces entreprises ont eu peu de réussite. C'est l'avis par exemple de Sylvy JAGLIN qui soutient que ces entreprises de par leur aspect embryonnaire et leurs fortunes aléatoires, bénéficiaient faiblement de la mobilisation de la population, ce qui créait des entraves à la capacité des CDR à encadrer dûment le développement local.418

Malgré tout, il convient de complimenter l'initiative de toutes ces entreprises qui au-delà des considérations matérielles et pécuniaires, a défait là une psychologie sexiste longtemps distillée par des traditions ancestrales et a libéré l'énergie productrice maintenue en sommeil chez la femme. Des efforts fort louables ont été faits pour faciliter l'accès de la femme à l'éducation. La scolarisation des jeunes filles connaît un envol sans précédent. En même temps, les CDR et l'organisation des femmes incitèrent les femmes analphabètes à suivre les cours d'alphabétisation. Cette extension de l'éducation à la femme devait renforcer le sentiment de cette dernière quant à sa capacité d'être elle-même l'artisan de son épanouissement économique, gage de renforcement de la révolution.

En 1985, le pouvoir tenta l'institution d'un salaire dit vital pour aider économiquement les femmes. Il était question de prélever directement sur les salaires des maris une somme pour leurs épouses à la fin de chaque mois. Cette mesure « se justifie par le fait que les problemes liés notamment a l'éclatement de la famille traditionnelle et aux conséquences psychosociologiques qui en découlent amènent de nombreux peres de famille a s'adonner a l'alcoolisme ou a entretenir des a
· mattresses », laissant dans un dénuement plus ou moins total épouses et enfants
».419 Par rapport à ce phénomène, Thomas SANKARA déclarait : « l'Etat ne contraint personne au mariage, mais exige que celui qui fonde un foyer assume ses responsabilités [...]. Il y a des hommes qui transforment leurs femmes en bonnes a domicile, refusant cependant de leur donner un salaire de bonne, et dissipent en futilités l'argent du foyer. Ce qui du point de vue de la morale simple est immoral, est pour la révolution démocratique et populaire inacceptable ».420

Le salaire vital avait attisé bien d'espoir chez de nombreuses femmes, mais n'a connu guère d'application à cause de la résistance accrue que son institution avait suscitée chez les hommes. Ces derniers n'étant déjà pas contents du nombre croissant des femmes à la tête des institutions publiques de l'Etat.421 « L'idéologie féodale

418 Sylvy JAGLIN, 1994, Gestion urbaine partagée à Ouagadougou : pouvoirs et périphéries, Paris, Karthala, page 339.

419 Christine BENABDESSADOK, 1985, « Femmes et révolution : comment libérer la moitié de la société » in POLITIQUE AFRICAINE N° 20, Le Burkina Faso, Paris, Karthala, page 62.

420 Lire le discours de Thomas SANKARA à l'An II de la RDP in SIDWAYA N°327 du 06 août 1985, p.p. 1 - 5.

421 Richard BENEGAS, 1993, Insoumissions populaires et révolution au Burkina Faso, Bordeaux, CEAN, page 73.

137 persiste ; les femmes sont mineures, elles doivent "etre chapeautées par les hommes ».422 Au-delà de ces mesures socioprofessionnelles, la libération de la femme, c'était aussi la restaurer dans sa dignité. Le respect de cette dignité était la plénitude de l'importance de la femme dans la société. Dans ce sens, le CNR entreprit de lutter contre la prostitution.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci